Les préférences bio-écologiques du criquet pèlerin

Les préférences bio-écologiques du criquet pèlerin

Les insectes ravageurs de la zone soudano-sahélienne de l’Afrique de l’Ouest peuvent être classés en deux groupes distincts, les locustes et les sauteriaux. Les locustes sont le criquet nomade, le criquet migrateur africain et le criquet pèlerin. Les sauteriaux sont toutes les autres espèces d’acridiens, ravageurs ou non. Ces deux groupes d’acridiens présentent des comportements différents. Les locustes suivent un phénomène de changement de phase. Ils sont capables, selon la densité de leur population et les conditions climatiques, de se présenter avec deux comportements différents : solitaire et grégaire. Les sauteriaux ne présentent pas ces comportements distincts, néanmoins ils peuvent pulluler et causer des dégâts sur les productions agricoles, mais à un degré inférieur à celui des locustes [170, 102]. Les criquets pèlerins qui colonisent des steppes ou des savanes à faible couvert ligneux qu’on retrouve principalement au Sahel, recherchent de la chaleur (optimum thermique entre 20°- 25°C), et des milieux moyennement humides (optimum pluviométrique de 50 à 300 mm par an). Dans les régions tempérées, ils peuvent résister aux conditions rigoureuses de l’hiver en développant la diapause embryonnaire. En général, les densités des effectifs solitaires des criquets pèlerins sont faibles et ils vivent de manière isolée dans des endroits désertiques, alors que les individus grégaires vivent en bande pouvant contenir un très grand nombre d’individus qui se comportent comme une masse cohérente [170, 77]. Le passage de la forme solitaire à la forme grégaire n’est pas spontané. Il peut se poursuivre sur au moins quatre générations de criquets et est fortement influencé par une succession de pluies soutenues. Le passage inverse est plus rapide et s’effectue souvent en l’espace d’une ou deux générations [77, 144]. Ce changement de phase se passe dans des zones particulières appelées zones de rémission, moins vastes que les zones d’invasion (voir Figure 1.4). La rémission est la période entre deux invasions. Aussi, on reconnait deux formes intermédiaires dites transiens :
— congregans, une évolution de la phase solitaire à la phase grégaire ;
— degregans dans le cas inverse du passage de la phase grégaire à la phase solitaire. La densité des individus est le principal facteur déclencheur du changement de phase . Ce dernier est favorisé par plusieurs facteurs tels que la multiplication des effectifs, et la concentration des individus sur des superficies réduites due au regroupement d’ailés solitaires sous l’effet de systèmes de vents convergents .

D’autres facteurs peuvent intervenir dans la concentration des populations de criquets, en particulier les phénomènes de restriction de surfaces habitables par dessèchement progressif des biotopes obligent leur rassemblement sur des zones favorables de plus en plus réduites [77]. Les effets de la densité peuvent être immédiats ou différés. La première catégorie se manifeste sans délai chez les individus en présence d’une variation de densité alors la deuxième se manifeste dans la descendance. Les seuils de densité de changement de phase en fonction du stade de développement des individus, sont approximativement de 50 000 par hectare, pour les larves L1, de 5 000 par hectare pour les larves L5 et de 250 à 500 par hectare pour les ailés immatures [144]. Les criquets pèlerins vivent préférentiellement dans des zones ayant reçu des quantités de pluies comprises entre vingt cinq et cinquante millimètres. Ces pluies entrainent la formation d’un couvert végétal qui constitue une source d’alimentation et de refuge pour les criquets pèlerins. Elles fournissent également de l’humidité favorable au développement des œufs [218].

Les zones de reproductions du criquet pèlerin

Trois périodes de reproduction, d’importances inégales, se succèdent annuellement selon les phases d’existence du criquet pèlerin. Les solitaires effectuent une ou deux reproductions estivales au sud du Sahara durant les pluies de mousson et une reproduction printanière sub-méditerranéenne. Après la mousson, les grégaires effectuent une reproduction estivale (pluies de mousson au Sahel), une reproduction  automno-hivernale, occasionnellement dans l’Ouest et plus rarement dans le Sahara central. Il suit une reproduction hiverno-printanière souvent suivie d’une reproduction printano-estivale en zone méditerranéenne [77]. Les reproductions chez les solitaires se font de manière continue, sans interruption et tant que les conditions sont favorables, pendant les mois d’avril-mai à décembre. Ceci permet le développement de deux, voire trois générations estivales suivies d’une génération hiverno printanière en zone saharo-méditerranéenne [77]. Une des caractéristiques des criquets pèlérins est leur aptitude à grégariser rapidement pour donner des individus voraces. La grégarisation est le passage de la phase solitaire à la phase grégaire. Elle est entretenue durant au moins deux générations de criquets pèlerins, si les conditions éco-météorologiques sont maintenues. Elle se déroule dans des zones particulières appelées aires grégarigènes.

Les aires grégarigènes

Ce sont des régions qui s’échangent régulièrement des populations de criquets et qui constituent des points de départ d’invasions généralisées.

Les aires grégarigènes ont des endroits particuliers appelés des foyers grégaires où se fait effectivement la grégarisation [77]. Les premières étapes de la transformation phasaire conduisant à une invasion généralisée partent de ces zones. En Afrique sudsaharienne, elles sont localisées dans des zones à humidité importante en saison sèche (le delta central du fleuve Niger au Mali, le pourtour du lac Tchad, la région du Nil bleu au Soudan et les oueds du Sahara). À Madagascar, elles sont situées dans les clairières enclavées dans des bush au sud-ouest de l’île. Plusieurs aires grégarigènes existent dans la zone d’invasion (voir Figure 1.4), les principales se trouvent :
— à la frontière indo-pakistanaise où les régimes de vents favorisent des concentrations de populations importantes ;
— aux bords de la Mer Rouge et du golfe d’Aden où le régime pluvial peut fournir des conditions favorables à la reproduction tout au long de l’année ;
— à la bordure de certains massifs montagneux où les phénomènes d’écoulement favorisent la création de sites favorables (massifs du Sahara central et méridional, bordure sud de l’Atlas, bordure ouest des montagnes de l’Oman, vallées du Mekran au Pakistan et en Iran).

Le cas de la Mauritanie

La Mauritanie est située en Afrique de l’Ouest et présente trois zones de reproductions identifiées, une zone de reproduction estivale, une zone de reproduction hivernoprintanière et une zone de reproduction mixte .

La première zone couvre la partie Sud du pays avec un régime pluviométrique tropical débutant aux mois de juin-juillet et pouvant aller jusqu’en octobre. La deuxième zone couvre les parties Nord et Nord-Ouest du pays, avec un régime pluviométrique à tendance méditerranéenne, débutant aux mois de décembre-janvier et pouvant être précoce à partir d’octobre. Et la troisième zone, à cheval entre les zones estivales et printanières, peut fonctionner à partir du mois de septembre en fonction des aléas météorologiques. Nous nous intéressons à la Mauritanie parce que ce pays constitue un habitat quasipermanent pour les criquets pèlerins, plusieurs foyers de grégarisation y sont localisés. C’est un état frontalier du Sénégal et les cas d’invasion acridienne enregistrés au Sénégal et dans les pays environnants sont causés par des individus provenant des zones de reproductions situées en Mauritanie. Ce pays dispose d’un Centre National de Lutte Anti-acridienne (CNLA) qui est chargé de la surveillance des zones de reproductions situées sur le territoire mauritanien. Le CNLA dispose de données acridiennes qui peuvent servir à valider les modèles développés ici.

Le cycle biologique du criquet pèlerin

Le cycle biologique du criquet pèlerin peut être résumé en trois étapes successives correspondant aux états embryonnaire, larvaire et imaginal [218]. L’état embryonnaire se passe sous le sol à une profondeur d’environ cinq à dix centimètres (on parle d’état hypogé), alors que les deux autres se passent sur le sol, ce sont des états épigés. Ces trois états représentent une génération. Le criquet pèlerin effectue deux à trois générations annuelles avec un arrêt de développement facultatif à l’état imaginal, appelé diapause, qui survient généralement, au cours des conditions difficiles comme en saisons sèches [77]. La durée de vie d’une génération est donc de l’ordre d’une cinquantaine de jours. Toutefois, dans les conditions éco-météorologiques défavorables, elle peut atteindre une dizaine de mois, soit par ralentissement du développement sous l’influence de basses températures, soit par arrêt de la reproduction et installation d’une période de diapause [77]. Dans nos modèles, nous supposerons des conditions éco-météorologiques favorables à l’évolution et au développement des criquets pèlerins. Ceci permet de considérer les temps minimum de développement des différents stades (référencé par exemple maxEggLifePeriod, pour l’état œuf dans les programmes).

La fréquence des pontes

Les femelles des criquets pèlerins produisent leurs oothèques dans des sols humides. Une oothèque est une membrane rigide qui contient les œufs. L’humidité, nécessaire à la ponte, maintient des conditions acceptables pour toute la durée du développement larvaire [77]. Généralement, les femelles pondent peu de fois, la fréquence des pontes varie selon les phases d’existence. Les individus grégaires pondent deux à trois fois par générations alors que leurs homologues solitaires, ont trois à quatre pontes générationnelles. En moyenne, les femelles pondent deux à trois fois dans leur vie. Si les conditions éco-météorologiques sont favorables, le nombre d’œufs par oothèque est plus important. La ponte peut durer sept à trente heures et l’intervalle de temps entre deux pontes peut aller de six à onze jours. En moyenne, les femelles solitaires peuvent pondre cent quarante œufs lors d’une première ponte et les grégaires soixante dix, toujours dans des conditions favorables . Pour les pontes suivantes, ce nombre décroit avec le vieillissement des individus. Par exemple, à la quatrième ponte, il n’est plus que de soixante dix œufs chez les solitaires et de cinquante chez les grégaires. Nous supposerons la quasi totalité des femelles de criquets pondent une oothèque à la première ponte, que 75% d’entre elles environ survivront et pondront une deuxième oothèque, que 25% d’entre elles environ pondront une troisième oothèque, mais que très peu d’entre elles parviendront à pondre une quatrième oothèque. Une moyenne de deux oothèques par femelle et par génération sera retenue dans la suite. En raison de la mortalité naturelle, tous les œufs n’éclosent pas. De même toutes les larves issues de l’éclosion, n’atteignent pas le stade adulte. Dans des conditions optimales de température et d’habitat, les taux de multiplication des individus peuvent atteindre seize à vingt. En d’autres termes, une femelle peut produire de seize à vingt criquets viables en une seule génération [183].

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Table des matières

Introduction générale
1 Le criquet pèlerin
1.1 Introduction
1.2 Les préférences bio-écologiques du criquet pèlerin
1.2.1 Les zones de reproductions du criquet pèlerin
1.2.2 Les aires grégarigènes
1.2.3 Le cas de la Mauritanie
1.3 Le cycle biologique du criquet pèlerin
1.3.1 La fréquence des pontes
1.3.2 Le développement des œufs
1.3.3 Le développement des larves
1.3.4 Le développement des ailés
1.4 La migration des criquets pèlerins
1.5 Les données acridiennes
1.6 Conclusion
2 Eléments techniques pour la modélisation de la dynamique des criquets pèlerins
2.1 Introduction
2.2 La dynamique de population
2.2.1 Etat de l’art
2.2.2 Le cas des criquets pèlerins
2.3 Les automates cellulaires
2.3.1 Un bref historique
2.3.2 Le modèle du jeu de la vie
2.3.3 Les dimensions d’un AC
2.3.4 Les domaines d’applications des AC
2.3.5 Autres exemples d’AC
2.4 Modélisation cellulaire du système physique
2.4.1 L’échantillonnage spatial
2.4.2 L’échantillonnage temporel
2.4.3 Les règles de transition
2.5 PickCell, outil de génération de systèmes cellulaires
2.5.1 Génération d’un maillage de système cellulaire
2.5.2 Algorithme de classification cellulaire par couleurs
2.6 Conclusion
3 Accès aux sources de données géolocalisées
3.1 Introduction
3.2 Les promoteurs de bases de données
3.2.1 Les initiatives internationales
3.2.2 Les initiatives internationales privées
3.2.3 EIS-AFRICA, une initiative continentale
3.2.4 Les initiatives nationales publiques
3.2.5 Les initiatives nationales privées
3.3 La correspondance objet-relationnel
3.3.1 La bibliothèque de correspondance : « Glorp »
3.3.2 Notions de transactions objet et d’unités de travail
3.3.3 Connexion à la base de données
3.3.4 Modélisation d’une base de données avec « Glorp »
3.4 Intégration PostgreSQL et application Visualworks
3.4.1 Le support de bases de données : « EXDI »
3.4.2 Chargement du support de bases de données
3.4.3 Connexion à la base de données
3.5 Conclusion
Conclusion générale

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