Effet du climat, des relations trophiques et de la densité sur la dynamique des populations

DYNAMIQUE DES POPULATIONS AVIAIRES NICHANT EN ARCTIQUE

Prédire les facteurs qui influencent la dynamique des populations aVIaIres est particulièrement difficile puisque plusieurs espèces migrent sur de très grandes distances. En effet, l’abondance des populations d’oiseaux migrateurs peut être influencée par les conditions climatiques rencontrées dans différentes parties du monde (Sherry & Holmes, 1996; Newton, 2004). Selon l’hypothèse «du robinet» (tap hypothesis), la dynamique des populations d’oiseaux se reproduisant en milieux arides, tel l’Arctique, serait plus fortement influencée par les conditions climatiques en saison de reproduction qu’en période d’hivernage puisque la reproduction serait possible uniquement lorsque les conditions climatiques sont favorables (Grant & al., 2000; Martin, 2001; Sa ether & al., 2004). Les conditions climatiques prévalant durant la période de reproduction auraient ainsi un impact plus marqué sur les juvéniles que sur les adultes (Blomqvist & al., 2002). Chez les espèces dites «Iongévives» (grande durée de génération), le taux de survie des adultes est considéré comme étant le paramètre démographique influençant le plus fortement la dynamique des populations (Gaillard & al., 2005). Toutefois, puisque le taux de mortalité naturelle est assez faible et relativement constant chez les adultes (peu affecté par les variations environnementales), la survie des juvéniles, plus vulnérable aux conditions climatiques, peut devenir un paramètre important dans la dynamique des populations (Gaillard & al., 1998).

Plusieurs études ont analysé l’effet des variations climatiques sur la dynamique des populations d’oiseaux (variations de la taille ou de la productivité; Franklin & al., 2000; Grant & al., 2000; Thompson & Ollason, 2001; Saether & al., 2003). La température en juin serait, par exemple, positivement corrélée à la productivité de jeunes chez l’Oie rieuse (Anser albifrons; Z6ckler & Lysenko, 2000), la Bernache du Canada (Branla canadensis; Sheaffer & Malecki, 1996) et la Bernache cravant (Branla bernicla; Boyd, 1987). Les variations climatiques pourraient même expliquer jusqu’à 97% de la variabilité interannuelle de certains aspects de la phénologie et du succès reproducteur de la Petite Oie des neiges (Chen caerulescens caerulescens; Skinner & al., 1998). Les phénomènes à grande échelle tels l’ONA ou El Nino (oscillation australe équivalente à l’ONA) semblent également expliquer une proportion importante des variations annuelles de la taille de certaines populations d’oiseaux (Barbraud & Weimerskirch, 2001; Loison & al., 2002; Barbraud & Weimerskirch, 2003). En Norvège, par exemple, l ‘ONA est positivement associée au taux de recrutement et au taux de croissance d’une population de Cincle plongeur (Cinclus cinclus; Saether & al., 2000). Par contre, les mécanismes qui expliquent les relations entre les variations climatiques et les populations sont souvent moins bien documentés (Krebs & Berteaux, 2006).

DYNAMIQUE DE LA POPULATION DE LA GRANDE OIE DES NEIGES

La Grande Oie des neiges (Chen caerulescens atlantica) est un oiseau migrateur qui niche principalement dans l’Est du Haut-Arctique canadien. Elle parcourt au moins 4 000 km entre ses aires d ‘hivernage, situées sur la côte Est des États-Unis, et ses aires de reproduction, situées principalement du nord de l’île de Baffin à l’île d’Ellesmere. La plus importante colonie d’oies nicheuses est située sur l’île Bylot (20 000 couples, représentant approximativement 15% de la population; Reed & al., 2002). L’écosystème terrestre arctique de l’île Bylot est relativement simple (peu d’espèces) comparativement aux écosystèmes tempérés ou tropicaux. Outre la Grande Oie des neiges, la communauté d’herbivores vertébrés est majoritairement composée de Lemmings bruns (Lemmus sibiricus) et de Lemmings variables (Dicrostonyx groenlandicus). Le Lagopède alpin (Lagopus mutus) et le Lièvre arctique (Lepus arcticus) sont aussi présents, mais en très faibles nombres (Gauthier & al., 1996).

Les principaux prédateurs des oies ou des lemmings sont le Renard arctique (Vulpes lagopus), le Labbe parasite (Stercorarius parasiticus), le Goéland bourgmestre (Larus hyperboreus) et le Grand corbeau (Corvus corax; Bêty & al., 2001). Le Harfang des neiges (Nyctea scandiaca), la Buse pattue (Buteo fagopus) , le Labbe à longue queue (Stercoraris fongicaudus) et l’Hermine (Mustefa herminea) sont essentiellement des prédateurs de lemmings (Gauthier & al., 2004). Contrairement aux lemmings, les oies sont présentes seulement l’été puisqu’elles arrivent majoritairement au début juin et quittent au début septembre. Elles sont d’importants brouteurs de la toundra et peuvent fortement influencer la dynamique de la chaîne trophique arctique, incluant les communautés végétales ainsi que la distribution et la productivité des prédateurs (Gauthier & al., 1996; Szor & al., 2007). Les oies n’ont qu’une seule couvée par année et ne pondent pas à nouveau s’il y a un échec de reproduction (Lepage & al., 2000). La prédation est la principale cause d’échec de nidification sur l’ île Bylot (Bêty & al., 2001; Lecomte & al., 2008).

La phénologie de la reproduction

À leur arrivée sur le site de reproduction, les oies doivent acquérir d’importantes quantités de nourriture nécessaires à la production des oeufs. Les nutriments accumulés localement représentent en effet plus de 70% des protéines et des graisses nécessaires à la fonnation des oeufs (Gauthier & al., 2003). Les conditions climatiques prévalant durant la période d’ an’ivée, de pré-ponte et de ponte des oies sont donc cruciales puisqu’elles vont influencer le taux d’accumulation de réserves en modulant la disponibilité de la nOUlTÎture (Bêty & al. , 2003). Le climat lors de cette période est d’ailleurs considéré comme le principal facteur déterminant l’effort et la phénologie de la reproduction des oies. Des conditions printanières rigoureuses (basses températures et fort couvert neigeux) sont associées à un faible effort de reproduction, des dates de ponte tardives et des tailles de couvée réduites (Bêty & al., 2003; Reed & al., 2004; Dickey & al., 2008). La date de ponte est un paramètre déterminant puisqu’elle influence la phénologie des étapes subséquentes de la reproduction (incubation, éclosion, élevage des jeunes) et affecte fortement le succès reproducteur des individus (Lepage & al. , 2000).

Durant l’incubation, les oies passent jusqu’à 94% du temps sur leur nid, ne le quittant que pour s’alimenter et s’abreuver (Reed & al., 1995). Puisque la vulnérabilité des oeufs à la prédation augmente considérablement lorsque les femelles s’éloignent à plus de 10 mètres du nid, ces absences régulières peuvent être directement liées aux risques de prédation des oeufs (Bêty & al. , 2002). Les besoins énergétiques et hydriques des femelles en incubation et l’accessibilité des ressources peuvent varier selon les conditions environnementales. Des précipitations abondantes peuvent, par exemple, diminuer la distance qu’une femelle doit parcourir pour s’abreuver lorsque les dépressions naturelles de la toundra se remplissent d’eau, réduisant ainsi le risque de prédation (Lecomte, 2007).

Pression de prédation et abondance de lemmings

Les variations de la pression de prédation exercée sur les oies sont principalement le résultat d’interactions indirectes entre les oies, les lemmings, les renards et les Labbes parasites. Les prédateurs peuvent consommer jusqu’à 90% de tous les oeufs d’oies produits en une année et le Renard arctique représente le principal prédateur (Bêty & al., 2002). Lorsque l’abondance de lemmings est relativement élevée, les attaques de renards sur les nids d’oies sont moins fréquentes que lorsque l’abondance de lemmings est faible (Gauthier & al., 2004). Alors que les Renards arctiques semblent montrer une réponse numérique reproductive, les Labbes parasites semblent davantage présenter une réponse numérique agrégative à l’abondance de lemmings (Bêty & al., 2002). Les réponses numérique et comportementale de ces deux prédateurs aux variations d’abondance de lemmings expliquent en grande partie l’association entre l’abondance de lemmings et le succès reproducteur des oies (Gauthier & al. , 2004; Lecomte & al. , 2008).

Pour certaines espèces d’oiseaux de l’Arctique, la productivité annuelle est cyclique et fortement corrélée avec les cycles de lemmings (Summers & Underhill, 1987; Summers & al. , 1998). Par contre, les fluctuations du succès de nidification des oies semblent être synchronisées avec les cycles de lemmings seulement à l’intérieur des colonies de très faibl es densités (Bêty & al., 2001 ; Gauthier & al. , 2004). Pour les oies nichant à fortes densités, le taux annuel d’échec est inversement relié à la densité de nids en raison des effets de dilution (l’augmentation du nombre d’oeufs disponibles diminue les chances qu’un oeuf soit consommé par les prédateurs; Bêty & al., 2001). Les variations annuelles de densité de nids sont indépendantes des cycles de lemmings et semblent surtout déterminées par les conditions climatiques printanières dans l’Arctique (Reed & al. , 2004; Dickey & al. , 2008).

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Table des matières

Remerciements
Avant-propos
Contribution des auteurs
Résumé
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES TABLEA UX
LISTE DES FIG URES
LISTE DES APPE DI CES
CHAP ITRE 1 : INTRODUCTION GÉNÉRALE
Effet du climat, des relations trophiques et de la densité sur la dynamique des populations
Dynamique des populations aviaires nichant en Arctique
Dynamique de la population de la Grande Oie des neiges
La phénologie de la reproduction
Pression de prédation et abondance de lemmings
Croissance de la population
Objectif et plan de l’étude ……….
CHAPITRE 2: CLiMATE, INDIRECT TROPH IC INTERACTIONS AN D DENS ITY-DEPENDENT EFFECTS: WH ICH FACTORS DRI VE HIGH ARCTIC SNO W GOOSE PROD UCTIVITY?
INTRODUCTION
METHODS
Study popul ation
Study design
Climatic effects
Predation pressure effects
Carry-over effects
Density-dependent effects
Data analyses
Relationship between small and large-scale climatic conditions
A11l1Ual goose productivity
R ESULTS
Relation between small and large-sc ale climatic variables
Annual goose productivity
Climatic effects
Predation pressure effects
Carry-over and density-dependent effects
Predictive power of the model
DI SCUSS ION
Annual goose productivity and climatic conditions: bottom-up processes
Annual goose productivity and predation pressure: top-down processes
Carry-over effects
Density dependence
CONCLUSION
ACKNOWLEDGMENTS
TABLES AND FIGURES
ApPENDIXES
CHAPITRE 3 : CONCLUSION DU MÉMOIRE
Contributions
Perspectives d’avenir
REFERENCES

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