Les questions scientifiques et techniques sensibles dans le média exposition

L’intégration sociale d’un savoir scientifique non stabilisé

   La première caractéristique commune aux QSTS est le caractère non encore stabilisé des connaissances scientifiques ou techniques concernées. Ces questions naissent en quelque sorte sur le terreau de « la science en train de se faire » et non celui des connaissances stables pour lesquelles il existe déjà un consensus, pour reprendre les deux facettes de la science évoquées par Audouze (2003). L’une des caractéristiques de la science est certes de progresser par remises en cause des connaissances antérieures. Aucune connaissance n’est donc définitivement figée. Néanmoins il existe une distinction entre les connaissances qui, à un moment donné, font l’objet d’un consensus scientifique et celles qui, à ce même moment donné, sont encore en cours de stabilisation et pour lesquelles le consensus n’est donc pas encore établi. Les recherches sur les nanotechnologies, sur les organismes génétiquement modifiés, ou encore sur les causes du cancer, sont des exemples typiques de domaines de recherche contemporains qui font débat. Preuve en est la demande faite à certains scientifiques convoqués en tantqu’experts de produire des méta-analyses, c’est-à-dire des synthèses de l’ensemble des résultats connus sur une question posée, pour déterminer les points de convergence et de divergence entre scientifiques. Car le caractère non encore stabilisé des connaissances est également renforcé par les modes de production de la science contemporaine, avec une multiplication des équipes de recherche, des laboratoires, des publications, impliquant la nécessité pour les scientifiques spécialistes d’un domaine de se réunir périodiquement pour mutualiser – ou non – les avancées de leurs recherches respectives. Mais ce n’est pas uniquement l’absence de consensus scientifique qui rend ces questions sensibles. Ce ne sont pas non plus uniquement es nouvelles connaissances ou les progrès envisagés en tant que tels. Ce qui les rend sensibles, c’est l’intégration sociale de connaissances nouvelles, non stabilisées, donc encore incertaines. Pour le dire autrement, le caractère non stabilisé des savoirs scientifiques n’est pas un facteur de sensibilité, c’est un facteur d’émergence des QSTS qui surgissent lors de la prise de conscience de la dimension sociale des savoirs. Il existe évidemment des champs de recherche qui ne provoquent pas de QSTS car leur dimension sociale apparaît moins prégnante. Ce qui suscite et provoque le débat, et fait naitre ainsi ce que nous appelons les questions scientifiques et techniques sensibles, c’est la mobilisation d’acteurs d’origine très diverses autour de questions qui, même au sein de la communauté scientifique, ne font pas consensus. Cela crée un objet scientifique et technique hybride, dont nous allons approfondir la caractérisation.

La conjonction d’enjeux et intérêts croisés

   Les débats qui caractérisent les QSTS dépassent la sphère scientifique, dans la mesure où les enjeux liés à l’avancée des connaissances, à leur publicisation et à leur intégration sociale, dépassent les seuls enjeux liés au progrès de la connaissance. C’est en ce sens que les QSTS sont une manifestation des relations entre sciences, techniques et société, dont l’interdépendance grandissante complexifie les enjeux et la clarté du débat.
Complexité et interdépendance Ces questions scientifiques et techniques font en effet écho à des intérêts d’ordre économique, politique, culturel ou encore social, si bien que les acteurs ayant voix au débat tendent à se multiplier. Prenons l’exemple de la crise liée à la survenue d’encéphalite spongiforme chez certaines personnes ayant consommé du bœuf britannique : l’enjeu du débat et des intérêts défendus a été certes scientifique, avec la mise en cause du prion responsable de la maladie, mais il a été aussi et surtout environnemental et éthique, avec la critique des modes d’élevage et de production de viande bovine, ou encore économique et politique, avec la nécessité d’appliquer une stricte politique de prévention, au risque d’engendrer de graves, conséquences économiques pour la filière bovine. Comme le souligne Lévy-Leblond (2004), aujourd’hui « le contexte d’un problème scientifique est avant tout social », même si paradoxalement la science reste un discours de référence et d’autorité, et souvent le seul considéré comme légitime. Lors de la crise de la « vache folle », la légitimité scientifique a effectivement dominé les débats, alors que d’autres aspects auraient tout à fait pu être davantage évoqués (Delforce, 2003). Mais malgré cette domination de l’approche scientifique, les controverses ont surgi précisément du fait de la confrontation à d’autres enjeux et d’autres voix que celles de la communauté scientifique. Rappelons ici qu’une question n’est pas par nature scientifique, technique, sociale ou politique : il s’agit d’un angle d’approche lié à une forme de construction sociale de la question. Or justement différents acteurs cherchent à agir sur cette construction sociale, par la défense et la mise en valeur de leurs intérêts propres. Nelkin (1995) cite à ce propos différents types de controverses liées à des confrontations entre des acteurs aux vues divergentes : tensions entre des principes moraux ou religieux et des recherches scientifiques, entre des valeurs environnementales et des priorités économiques, entre des attentes individuelles et des finalités collectives, entre des risques de santé et des pratiques industrielles… La complexification des sciences et des techniques ainsi que leur interdépendance croissante avec les domaines politiques, sociaux et économiques engendre un processus nouveau de diffusion et d’appropriation des connaissances, auquel participe une multitude d’acteurs.
Une pluralité d’acteurs et de voix Conséquence de la conjonction d’enjeux, plusieurs acteurs participent à la diffusion, à la définition et à l’orientation des QSTS dans la sphère sociale : les scientifiques, œuvrant à la production de savoirs de référence ; les pouvoirs publics, souvent contraints par la sensibilité de la question, à se prononcer sur des décisions politiques voire à légiférer ; les experts, sollicités par les pouvoirs publics comme aide à la décision ; les citoyens qui participent au débat par la création d’associations ou de mouvements divers ; enfin les médias qui contribuent à diffuser le débat, voire à l’orienter, ou en tous cas à orienter la représentation de ces questions parmi l’opinion. Nous assistons ainsi à un processus complexe de communication des sciences et des techniques, dans lequel différents acteurs s’emparent d’un thème aux enjeux multiples à des fins diverses d’information, de persuasion, de défense d’intérêts particuliers, d’expression ou encore de désinformation liée à la volonté de rassurer. La notion d’intérêts divergents est centrale dansl’appréhension des questions scientifiques et techniques sensibles. Elles sont inscrites au cœur de ce que nous pouvons appeler une « topographie d’intérêts ». C’est précisément cette conjonction d’intérêts et d’enjeux parfois contradictoires qui créent le débat, selon un modèle qui n’est pas celui de la controverse scientifique, mais, comme le souligne Delforce (2003), celui du débat public où l’enjeu n’est pas tant de produire un savoir sur la réalité que de légitimer des raisons d’agir. Ceci explique, aussi, comme le notent Davallon, Grandmont et Schiele (1992) à propos de l’environnement, que les « sujets chauds » tendent à être l’objet d’un discours normatif et prescriptif. Dépasser le courant STS : questions socioscientifiques et questions socialement vives STS : l’émergence d’un courant d’enseignement Dans les années soixante-dix, les didacticiens partagent un double constat de désintéressement des élèves pour les sciences et techniques et de décalage entre ces disciplines telles qu’elles sont enseignées et telles qu’elles existent, s’intègrent ou parfois posent question dans la société. Il estreproché à l’enseignement des sciences et des techniques de ne pas aborder les enjeux sociétaux de ces questions et, par conséquent, de ne pas donner aux élèves les moyens de comprendre et d’intervenir dans les débats sur l’intégration sociale des sciences et des techniques. Le mouvement Science-Technologies-Société – baptisé STS par Ziman en 1980 comme le rappelle Dreyfus (1998) – naît donc de ce constat et répond ainsi quasiment à un souci d’éducation démocratique et citoyenne. Explicite en est d’ailleurs la description proposée par Dreyfus (1998) de ce qu’il nomme lui-même – et cela est intéressant – un idéal : « L’idéal STS est essentiellement démocratique et moderne. Il est démocratique en ce sens qu’il ne traite pas un sujet ésotérique destiné à des élites socioculturelles, mais comme un outil efficace dans la vie de tous les jours et de tout le monde. Son but principal est de donner à tous les futurs citoyens les instruments intellectuels nécessaires à la compréhension de controverses publiques et de décisions politiques, même lorsque celles-ci relèvent partiellement de savoirs scientifiques, et de leur donner ainsi les instruments nécessaires à l’intervention active dans la prise de décisions « civiques » ». (Dreyfus, 1998 : 3) Concrètement cet idéal se manifeste par deux orientations principales de l’éducation STS : un enseignement orienté vers les élèves avec une attention accrue portée au point de vue des apprenants d’une part et un enseignement orienté vers les interactions entre science et société d’autre part (Aikenhead, 1986, 1994 ; Bybee, 1987 ; Dreyfus, 1998). D’un point de vue théorique, les didacticiens ne s’intéressent pas nécessairement à la nature de ces questions et de ces interactions, mais à la manière de les traiter en classe par des situations d’enseignement non traditionnelles, par une prise en compte des obstacles pour les apprenants, mais aussi pour les enseignants, qui ne disposent pas toujours d’outils pour appréhender ces questions. Si le mouvement STS a le mérite de faire émerger les préoccupations liées aux interactions entre science, techniques et société et de les diffuser hors de l’éducation non formelle – la création des centres de culture scientifique, technique et industrielle dans les années 80 s’inscrit dans le prolongement de ce mouvement -, il nous est, du point de vue théorique, d’une faible utilité.
Les “socioscientific issues” C’est seulement au début des années 2000 qu’émerge un nouveau courant de recherche en didactique des sciences, celui des « socioscientific issues », ou « questions socioscientifiques », dont la particularité est d’intégrer une réflexion sur la réception de ces questions, et non plus seulement sur leurs enjeux intrinsèques. « L’approche des questions socioscientifiques représente une reconstruction et une évolution du modèle STS, permettant de ne pas se limiter aux implications sociales de la science et de la technologie, mais d’aborder aussi les propres considérations et systèmes de représentations des élèves. » (Zeidler et al., 2005 : 371). Les questions socioscientifiques peuvent être décrites comme des dilemmes sociaux liés à des questions scientifiques, et comprenant des dimensions émotives, culturelles et épistémologiques (Simonneaux et Simonneaux, 2006). Les chercheurs américains à l’origine du concept de socioscientific issues revendiquent en effet la prise en compte du développement psychologique et social des apprenants, contrairement au mouvement STS qui aurait mis l’accent sur l’impact des choix scientifiques et technologiques sur la société, mais sans prendre en compte ni les aspects éthiques de telles décisions, ni l’expérience quotidienne des élèves ou leur propre considération. Alors que la finalité de l’enseignement STS aurait été d’accroitre l’intérêt des élèves pour les sciences en la replaçant dans un contexte social, la finalité de l’enseignement des socioscientific issues serait certes la prise de conscience de l’interdépendance entre science et société, mais aussi la promotion du développement intellectuel des élèves dans le domaine de la morale et de l’éthique, en vue de la formation d’une opinion consciente et informée (Zeidler et. al., 2005 ; Sadler, 2009 ; Simonneaux et Simonneaux, 2006). Même si de telles considérations s’appuient, de notre point de vue, sur une approche partielle de l’enseignement STS tel qu’il avait été formalisé par ses théoriciens, ces nouveaux travaux relatifs aux questions socioscientifiques présentent pour nous l’intérêt d’esquisser une construction théorique de ces questions. De fait, cette construction va surtout être approfondie dans le cadre de la recherche française sur les questions socialement vives.
Les questions scientifiques socialement vives Les recherches françaises sur les « questions socialement et/ou scientifiquement vives » (QSSV) font écho à celles concernant les socioscientific issues. Les auteurs définissent ces questions d’après trois caractéristiques principales (Legardez et Alpe, 2001 ; Legardez, 2006 ; Simonneaux, 2003) :
– elles sont vives dans la production de savoirs de référence, ce qui se manifeste par l’existence de controverses scientifiques à leur sujet ;
– elles sont vives dans la société, c’est-à-dire qu’elles interpellent les pratiques et représentations des individus et sont prégnantes dans l’environnement social et médiatique ;
– elles sont vives dans l’enseignement, puisque les enseignants sont démunis pour les aborder.
L’utilisation du « et/ou » dans la dénomination de ces questions reflète un débat propre aux didacticiens concernant la circonscription de ces questions. Beitone (2004) insiste par exemple sur la nécessité de ne pas associer systématiquement ces deux caractéristiques – socialement et scientifiquement vives – car certains sujets peuvent être vifs dans la sphère sociale uniquement ou d’autres dans la communauté scientifique exclusivement. D’autres chercheurs préfèrent le terme « questions sociales scientifiquement vives » (Albe, 2009), marquant au contraire la double caractéristique de ces questions. Notons ici que nous avons, pour notre part, adopté une perspective communicationnelle qui nous permet de nous affranchir de ce débat. Nous considérons comme relevant des questions sensibles les sujets scientifiques et techniques ayant une dimension sociale. Autrement dit, le caractère sensible de ces questions provient, de notre point de vue, de leur sensibilité sociale, et non exclusivement scientifique. C’est le cas par exemple du regain des théories créationnistes qui, bien que ne s’appuyant sur aucun fondement scientifique mais sur un pur système de croyances, revêtent toutes les apparences d’une question scientifique et peuvent donc être catégorisées comme relevant des QSTS. Dans le syntagme « questions scientifiques et techniques sensibles », le terme « sensibles » inclut de fait la dimension sociale. Qu’il s’agisse de « questions socioscientifiques » ou de « questions scientifiques socialement vives », ce que chacun des deux termes recouvre reste finalement assez proche (Sadler, 2009 ; Simonneaux et Simonneaux, 2006). La seule différence semble reposer sur le fait que lespremières se caractérisent par la présence d’un élément qui requiert un niveau de raisonnement moral ou l’évaluation de dimensions éthiques dans la prise de décisions (Zeidler, 2003 ; Bryan, 2009), ce qui n’est pas nécessairement présent dans la définition de questions scientifiques socialement vives, cette dernière étant par ailleurs assez vaste. L’approche didactique de ces questions désigne dans tous les cas un cadre théorique pour l’enseignement des sciences, plutôt qu’une catégorie ou une modalité d’existence des connaissances scientifiques et techniques. Leur conceptualisation a répondu à la nécessité d’approfondir l’approche de l’enseignement de questions scientifiques controversées telle qu’elle avait été prônée par le mouvement Science-Technologies-Société, dont le défaut majeur serait de s’être vidé de sa substance à force d’avoir été si largement utilisé. Finalement, les interactions entre science, technologies et société seraient davantage un contexte, et les questions scientifiques socialement vives un concept pédagogique (Zeidler et. al., 2005 ; Sadler, 2009).

La médiation de ces questions : les situations d’éducation formelle

   Les recherches sur l’usage des questions scientifiques socialement vives en situation d’éducation formelle porte sur trois domaines principaux : les savoirs de référence utilisables par les enseignants, les conceptions et connaissances des élèves, et enfin le type d’enseignement approprié à ces questions. La question des savoirs de référence se pose en effet à quiconque entreprend une action de médiation des questions sensibles : face à un savoir non stabilisé, rendu complexe par la multiplication des informations en provenance d’acteurs aux intérêts divers, quelles connaissances peut-on sélectionner, utiliser, appuyer, mettre en doute ? Les travaux portant sur la médiation des questions scientifiques socialement vives relèvent d’une approche constructiviste de la transmission des connaissances dans la situation d’enseignement, avec une attention particulière portée aux conceptions préalables des apprenants (Simonneaux, 1997 ; Lewis et al., 1999). Il s’agit d’observer dans quelle mesure les croyances épistémologiques des étudiants s’accordent ou non avec leur système de représentations sur les problématiques sociales Zeidler et al. (2005). Par ailleurs, les discours et débats sont au cœur de la recherche sur l’enseignement de ces questions. Plusieurs travaux visent à analyser la manière dont les interactions entre élèves favorisent le développement du raisonnement argumentatif et la construction d’un savoir partagé (Zeidler et al., 2005 ; Simonneaux, 2005). Il y a donc finalement assez peu d’interrogations sur la définition, la circonscription et la caractérisation de ces questions à proprement parler. La grande majorité des travaux de recherche portent sur l’enseignement de ces questions dans le cadre de l’éducation formelle. Les concepts ont été formalisés dans cette perspective et ne sont donc pas opératoires dans l’analyse de situations de communication propres à l’éducation non formelle. La didactique des sciences a souvent été précurseur de certaines interrogations qui traversent la muséologie des sciences tant que cette dernière était pensée selon un modèle de la transmission linéaire des connaissances comparable au modèle de l’éducation formelle. L’évolution, désormais communément admise, de la muséologie des sciences comme étant l’étude d’un dispositif de communication sociale qu’est l’exposition, rend difficile la transposition de ces travaux de recherche en didactique au cadre de l’éducation non formelle. Mais ceux-ci soulèvent néanmoins des questions qui nous invitent à nous interroger plus largement sur les situations d’interaction créées par la médiation de telles questions.

Qualifier Epicurium, espace ambivalent

   Le programme muséographique d’Epicurium communique aussi bien sur les fruits et légumes en tant qu’objets de consommation quotidiens que sur les fruits et légumes en tant qu’objets de connaissance scientifique, ou encore sur la filière fruits et légumes comme mise en œuvre d’en ensemble de pratiques et savoir-faire entre traditions et innovations. Dès lors, comment qualifier ce lieu singulier ? Nous pensons qu’il s’agit d’abord d’un espace d’interprétation, au sens où il utilise le sensible comme vecteur de médiation entre le visiteur et un ensemble muséographique qui ne peut être directement exposé (Jacobi et Chaumier, 2009). Il poursuit en outre un objectif de sensibilisation et de réaction émotionnelle ou hédonique, visant à faire apprécier les fruits et légumes. Mais c’est aussi un espace d’expression de discours scientifiques et culturels, un lieu d’ateliers, un espace de rencontre avec des professionnels… La variation des dénominations descriptives au fil des mois est révélatrice de la difficulté d’appréhender la nature de ce projet. A la lecture de la description succincte faite ci-avant, la qualification la plus logique – et d’ailleurs celle que nous conserverons dans le cadre de la recherche – est celle d’espace de culture scientifique et technique sur les fruits et légumes. Mais le PEIFL estimant que ce qualificatif ne permettrait peut-être pas d’atteindre les financeurs escomptés ou le public concerné, la dénomination du lieu a varié en fonction des supports de communication : « musée vivant » pour les documents à destination du public potentiel, « centre de culture scientifique et technique » pour ceux à destination de l’Etat et des collectivités, « espace de communication et de sensibilisation » pour les partenaires privés. Ces changements ne sont pas anodins et ils ne signifient pas simplement un certain opportunisme dans la recherche de financements. Ils sont aussi le reflet de l’ambivalence du projet au regard de ses objectifs institutionnels : volonté d’informer, mais aussi volonté d’éduquer, voire de sensibiliser, ou encore volonté d’offrir de la visibilité à la filière fruits et légumes.

Une question de santé publique

   Les pouvoirs publics se placent comme acteurs majeurs de l’intervention en matière d’amélioration des pratiques et habitudes alimentaires, illustrant « le gouvernement des corps » évoqué par Fassin et Memmi (2004). Cette attitude visant à inculquer aux individus des contraintes en vue de les transformer en automatismes (Elias, 2002) s’inscrit donc plus largement dans l’histoire des politiques de santé publique, marquées par les tentatives de normer les pratiques sociales. L’enjeu de ces politiques consiste en effet à faire adopter à la population un mode de vie réputé favorable à la prévention de maladies, par recours à différents moyens de communication (Berlivet, 2004). Dans ce domaine, Berlivet (2004) a observé une évolution importante au cours des trente dernières années, avec trois changements principaux : la priorité accordée aux maladies dites dégénératives, par opposition aux maladies infectieuses ; la généralisation des médias de masse ; la promotion d’une vision « positive » de la santé, visible à travers le basculement sémantique d’ « éducation sanitaire » à « éducation pour la santé ». Ces éléments permettent de comprendre dans quel cadre et dans quel contexte s’inscrit la politique publique en matière d’alimentation aujourd’hui. Cette politique est, depuis 2001, placée sous l’autorité du Plan National Nutrition Santé (PNNS). Cela inclut la mise au point d’un socle de repères et recommandation nutritionnels officiels, l’édition de supports dits « éducatifs », et des tentatives de réglementation du marché des aliments, notamment avec la loi de santé publique d’août 2004. Cette forte implication des pouvoirs publics, d’un point de vue sociétal mais aussi règlementaire, contribue à la sensibilité de cette question donc les enjeux économiques sont également centraux.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE LA MUSEOLOGIE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES SENSIBLES : LE CAS DE L’ALIMENTATION ET DE SES EFFETS SUR LA SANTE
CHAPITRE 1 APPROCHE COMMUNICATIONNELLE ET MUSEOLOGIQUE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES SENSIBLES
1. Les questions scientifiques et techniques sensibles : de quoi s’agit-il ?
1.1. LES QSTS COMME MANIFESTATION DES RELATIONS ENTRE SCIENCES, TECHNIQUES ET SOCIETE : UNE APPROCHE EMPIRIQUE
1.1.1. L’intégration sociale d’un savoir scientifique non stabilisé
1.1.2. La conjonction d’enjeux et intérêts croisés
Complexité et interdépendance
Une pluralité d’acteurs et de voix
1.1.3. Modalités d’existence sociale : une tension entre différents modes d’appréhension du monde
Opinions, attitudes et représentations sociales
Opinion publique et mobilisations citoyennes
Le poids de l’expertise
1.2. DEFINITION ET TERMINOLOGIE DES QUESTIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES SENSIBLES
1.2.1. Formalisation du concept
Définition
Unité et clivages au sein des QSTS : une sensibilité variable
1.2.2. Terminologie
2. Diffusion et médiation des QSTS : pour une approche communicationnelle
2.1. DETOUR PAR LA DIDACTIQUE : SOCIOSCIENTIFIC ISSUES ET QUESTIONS SOCIALEMENT VIVES
1.1. Dépasser le courant STS : questions socioscientifiques et questions socialement vives
STS : l’émergence d’un courant d’enseignement
Les “socioscientific issues”
Les questions scientifiques socialement vives
1.2. La médiation de ces questions : les situations d’éducation formelle
2.2. APPREHENDER LES QSTS EN SCIENCES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
2.1. Les QSTS comme objets de communication sociale
Des « faits de discours »
La médiatisation comme processus de construction sociale du sens
2.2 La muséologie des questions scientifiques et techniques sensibles
La muséologie d’environnement
CHAPITRE 2 ALIMENTATION ET SANTE – OPERATIVITE DE LA RECHERCHE
1. A l’origine de la recherche : la diffusion de culture scientifique et technique par un pôle de compétitivité
1.1. CREER UN CENTRE DE CULTURE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE SUR LES FRUITS ET LEGUMES
1.1.1. Le PEIFL, pôle de compétitivité de la filière
Les missions classiques du pôle de compétitivité
Les actions de sensibilisation : promouvoir la consommation de fruits et légumes
1.1.2. Epicurium : naissance d’un « Musée vivant sur les fruits et légumes »
A l’origine du projet
Du projet à sa réalisation : un bref aperçu
1.1.3. Un projet au cœur des enjeux de mise en exposition des questions scientifiques et techniques sensibles
Qualifier Epicurium, espace ambivalent
La diffusion de culture scientifique et technique au cœur d’intérêts croisés
Les fruits et légumes, objets sensibles ?
1.2. CONDUIRE UNE RECHERCHE EN CONTRAT CIFRE
1.2.1. Mission professionnelle et objet de recherche
1.2.2 Elargir la recherche : une nécessité heuristique
2. Alimentation et Santé, une question scientifique et technique sensible
2.1. LE « PAYSAGE ALIMENTAIRE » CONTEMPORAIN : ENJEUX ET TENDANCES
2.1.1. Les différentes facettes d’une question scientifique et technique sensible
Un savoir instable qui devient certitude
Une question de santé publique
Une question aux enjeux économiques
Mobilisations citoyennes
Le contrôle des représentations sociales
2.1.2. Dans les discours : la médicalisation de l’alimentation
Alimentation et santé : un lien ancien aux accents nouveaux
La médicalisation dans l’espace public : homogénéisation et transformation des discours
2.2. REPRESENTATIONS SOCIALES, CROYANCES ET PRATIQUES : QUELLE PERFORMATIVITE DES DISCOURS SUR L’ALIMENTATION ?
2.2.1. Essence et finalité de l’acte alimentaire
Le rapport à l’alimentation
Essence et finalité de l’acte alimentaire : plaisir vs nutrition ?
2.2.2. Performativité des discours : le piège de la médicalisation
Le décalage entre connaissances et pratiques
DEUXIEME PARTIE LA MISE EN EXPOSITION DE L’ALIMENTATION, UNE ANALYSE FORMELLE CONTRASTIVE
CHAPITRE 3 – ANALYSER LA MISE EN EXPOSITION DE L’ALIMENTATION
1. Analyser la mise en exposition de QSTS
1.1. L’APPROCHE SOCIOSEMIOTIQUE DE L’EXPOSITION EN SCIENCES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
1.1.1. L’exposition résulte de la mise en exposition
L’exposition comme dispositif sociosémiotique
L’exposition : outil de communication sociale ou de transmission de connaissances ?
1.1.2. Le choix d’une méthode : l’analyse experte
Précisions méthodologiques
Objectifs de l’analyse formelle contrastive
1.2. ANALYSER LA MISE EN EXPOSITION DANS LE CAS DE QSTS : CONSTRUCTION DES INDICATEURS
1.2.1. L’auteur face à la mise en exposition de QSTS
Engagement et point de vue dans l’exposition
De l’auteur à l’institution : quel mode de légitimation ?
Construction des indicateurs et sélection des marqueurs
1.2.2. L’exposition comme opérateur de médiation : enjeux pour les QSTS
Le rapport au savoir : la représentation de la science et la reconnaissance de son caractère sensible
Le rapport au savoir : la finalité de la médiation
Le rapport à l’environnement socio-symbolique
Construction des indicateurs et sélection des marqueurs
2. Tri et constitution du corpus : six expositions sur l’alimentation
2.1. LA CONSTITUTION DU CORPUS
2.1.1. Tamisage et sélection des expositions
2.1.2. Le corpus : six expositions permanentes et temporaires sur l’Alimentation
Cité Nature
L’Alimentarium
Agropolis Museum Museum
A Table ! La santé au menu
Cuisine ta santé
Bon Appétit – L’alimentation dans tous ses états
2.2. QUELLE VISION DE L’ALIMENTATION DANS LE CORPUS ?
2.2.1. Homogénéité du corpus : une muséologie de savoir
2.2.2. L’alimentation entre fait culturel et objet médical
L’alimentation, un fait culturel
L’alimentation, un objet scientifique et technique
CHAPITRE 4 – LA MISE EN EXPOSITION DE LA THEMATIQUE ALIMENTATION ET SANTE
1. Un effacement de la sensibilité des savoirs au profit de l’affirmation auctoriale
1.1. PRESENCES ET FORMES DE LA THEMATIQUE ALIMENTATION ET SANTE
1.1.1. Choix des unités d’exposition pertinentes pour l’analyse
Alimentation et Santé, une thématique faisant parfois l’objet d’un traitement formel différencié
Quand l’exposition dans son ensemble traite de la thématique Alimentation et santé
1.1.2. Alimentation et santé : de l’équilibre alimentaire aux questions de santé publique
1.1.3. Alimentation et santé : culpabilisation vs relativisation
1.2. LA « NEUTRALISATION » DES SAVOIRS SENSIBLES
2.1 Savoirs neutres et savoirs sensibles
2.2 La dialectique formelle entre savoirs neutres et savoirs sensibles
2.3 L’absence de contextualisation des savoirs sensibles
Quand les recommandations deviennent parole d’exposition : l’absence de transposition muséographique
L’intemporalité et l’impersonnalité discursives
1.3. UNE POSTURE AUCTORIALE MARQUEE (EN TOUTE IMPERSONNALITE)
1.3.1. De l’explication à la prescription
1.3.2. De la prudence à la certitude
1.3.3. La relation entre l’auteur et le visiteur : du « vous » au « nous »
2.Une typologie des postures de médiation dans l’exposition
2.1. POSTURES DE MEDIATION FACE A UNE QSTS : DE LA VULGARISATION A LA COMMUNICATION
2.1.1. Postures de médiation et nature de la culture scientifique et technique
2.1.2. Quand le savoir est la finalité : une posture informative bienveillante
2.1.3. Quand le visiteur est au centre : une posture éducative, voire prescriptive
2.2. LA TRANSPOSITION MUSEOGRAPHIQUE DES QSTS : UNE DIFFICILE « MISE EN CULTURE » DE LA SCIENCE
2.2.1. Un facteur dominant parmi plusieurs hypothèses : l’absence de transposition muséographique
Des hypothèses écartées : l’approche muséologique et le positionnement institutionnel
Une perméabilité de l’exposition à la présence sociale des QSTS ?
2.2 La difficile « mise en culture » de la science
3 EME PARTIE : LA TRANSPOSITION MUSEOGRAPHIQUE ET SES ENJEUX
CHAPITRE 5 : EPICURIUM, INSTRUMENT DE PROMOTION D’UNE FILIERE OU DE DIFFUSION DE LA CST SUR LES FRUITS ET LEGUMES ?
1.Quel projet pour un lieu de diffusion de CST sur les fruits et légumes ?
1.1. UNE PLURALITE D’OBJECTIFS AU CŒUR DE LA GENESE D’EPICURIUM
1.1.1. Les objectifs initiaux du pôle de compétitivité
1.1.2. Des infléchissements dûs à l’implication d’autres acteurs
1.2. POTENTIALITES OPERATIONNELLES : L’ETUDE PREVISIONNELLE DE FREQUENTATION
1.2.1. Contexte de l’étude et précisions méthodologiques
1.2.2. Les publics d’Epicurium et leurs attentes
1.3. L’AFFIRMATION D’UN PROJET DE DIFFUSION CULTURELLE DE LA CST
1.3.1. Un parcours thématique élargi
Le programme muséographique
La valorisation de l’expérience sensorielle de visite
1.3.2. Un projet de « mise en culture »
2. La réalisation : les limites d’un projet de diffusion culturelle de CST par un pôle de compétitivité
2.1. LES AMBIVALENCES DE LA REALISATION : D’UNE APPROCHE CULTURELLE DES FRUITS ET LEGUMES A LA VALORISATION DE LA FILIERE ?
2.1.1. Etude de cas : la présence de l’agroalimentaire au sein de l’exposition
2.1.2. Le traitement des QSTS
2.2. L’ESPACE ALIMENTATION COMME REVELATEUR DES CONTRAINTES LIEES A LA CONJONCTION D’INTERETS ET D’OBJECTIFS
2.2.1. L’alimentation : plaisir ou santé ?
2.2.2. La persistance implicite de velléités préventives
CHAPITRE 6 : LA CONCEPTION D’UN DISPOSITIF D’EXPOSITION : INFORMER, PRESCRIRE OU QUESTIONNER ?
1.La transposition muséographique d’une nouvelle approche scientifique de l’équilibre alimentaire
1.1. REPRESENTER L’EQUILIBRE ALIMENTAIRE : EVALUATION PREALABLE DE DEUX FIGURES SCRIPTOVISUELLES
1.1.1. Deux figures de l’équilibre alimentaire
La pyramide alimentaire
Le graphique SAIN/Lim
1.1.2. Evaluation préalable : représentations et obstacles à l’interprétation de l’équilibre alimentaire
La prégnance d’un savoir de sens commun sur l’équilibre alimentaire
Dépasser le savoir de sens commun ?
Les obstacles persistants
1.2. L’ELABORATION D’UNE STRATEGIE COMMUNICATIONNELLE : ANALYSE REFLEXIVE DU PROCESSUS DE CONCEPTION D’UN DISPOSITIF D’EXPOSITION
1.2.1 Le dispositif « Une Question d’Equilibre » : contexte et objectifs
La transposition d’un outil scientifique de profilage nutritionnel
Une question scientifique et technique sensible ?
Les objectifs assignés au dispositif
Présentation sommaire du dispositif
1.2.2. Au cœur de l’élaboration d’une posture de médiation : stratégie communicationnelles et contraintes de la transposition muséographique
Conserver une certaine distance vis-à-vis du visiteur
Trouver un compromis entre l’opérativité de la démonstration et la promesse d’interactivité
Transmettre des concepts scientifiques nouveaux : les difficultés pressenties
Arbitrer entre rigueur scientifique et performativité discursive
2. « Alimentation et santé » : Les limites de la posture de vulgarisation classique
2.1. L’EVALUATION COMME AIDE A LA CONCEPTION : EVALUATION FORMATIVE ET ANALYSE EXPERTE DU DISPOSITIF
2.1.1. L’évaluation formative du dispositif
2.1.2. L’analyse experte
2.2. L’EVALUATION SOMMATIVE DU DISPOSITIF
2.2.1. Objectifs et méthodologie
Rappel des objectifs de l’évaluation
Méthodologie
2.2.2. Deux postures pour deux modalités de communication entre le dispositif et le visiteur
Le retour des deux postures
L’acceptation de la posture informative comme préalable à la confrontation à de nouvelles connaissances
La dimension prescriptive en question
CONCLUSION

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