Famille et Usage de la Télévision

La culture est aussi vielle que l’humanité. Dés le début de l’existence, l’homme a, en effet, mis en place un ensemble de pratiques, de normes, de règles pour faciliter la vie en commun. Leur pérennisation a été toujours assurée par la socialisation que le professeur Boubacar LY, dans le cours de socialisation traditionnelle, définissait comme « un processus psychosocial par lequel se forme la personnalité de base de l’individu sous l’influence du milieu et particulièrement des institutions éducatives familiales et religieuses » . Les attitudes et comportements acquis par ce biais n’ont pas toujours été statiques. Ils ont considérablement évolué du fait des bouleversements sociologiques, politiques, économiques, culturels, etc… Beaucoup de facteurs y ont contribué. Parmi ceux-ci nous avons les médias qui sont devenus de nos jours une réalité mondiale. En effet, aussi bien la presse écrite, auditive que celle audiovisuelle transcendent les frontières des pays où elles sont installées. Beaucoup d’entre eux (les médias) sont reçus, lus, écoutés ou suivis aux quatre coins du monde. C’est ainsi que les journaux comme, le Monde, le Monde diplomatique, Jeune Afrique, Time … et j’en passe ont des lecteurs dans les cinq continents. RFI, BBC, Africa n° 1…peuvent être captés au Japon, en Russie, aux Etats-Unis, au Sénégal et ailleurs. Les médias audiovisuels américains, africains, européens, asiatiques ont de fidèles téléspectateurs dans et hors de leurs pays d’implantation. L’exploitation de la bande FM et de l’Internet surtout ont beaucoup contribué à la mondialisation des télécommunications.

Dans le cas échéant, les médias, la télévision en particulier, transmettent des modèles culturels mondiaux à travers les programmes qu’ils proposent au public. En effet, le diffusionnisme culturel par le biais du petit écran a eu entre autres conséquences le dépassement de certaines réalités, l’adoption de nouveaux comportements et surtout l’uniformisation des modes de vie, de pensée, etc.. En attestent par exemple le port du jean, la prise des repas à table, la danse du « rap » etc.. qu’on retrouve dans presque tous les pays du monde. Ces éléments culturels originaires d’autres contrées peuvent cependant être source de problèmes par rapport aux modèles endogènes dans lesquels les jeunes ont été socialisés.

En plus, la télévision sans frontière, présente dans la plupart des foyers citadins, s’est même imposée comme un outil de transmission de valeurs tantôt conformes à celles trouvées sur place, tantôt étrangères à celle-ci. C’est pourquoi, à bien des moments, la télévision en Afrique et au Sénégal en particulier a fait l’objet de débats autour de sa mission et des finalités dans la société. Jadis considéré comme un instrument de développement et de transformation sociale, ce médium qui sollicite à la fois les organes visuels et auditifs, est accepté presque sans réserve apparente dans nos foyers. En clair, cet appareil alliant sons et images (la télé), encore appelé « boite magique » par les spécialistes de la communication, s’est finalement installé de façon irréversible dans le vécu quotidien des citadins.

CADRE GENERAL

Problématique

Depuis l’avènement de la télévision sans frontière en Afrique et plus précisément au Sénégal, le petit écran est devenu un véritable phénomène social au point qu’à tous les niveaux les gens s’interrogent sur sa massification, son internationalisation avec ses corollaires et surtout sa capacité à véhiculer des éléments culturels. La popularité de la télévision est le résultat d’un long processus auquel beaucoup de facteurs ont participé. En effet, d’une part, l’équipement des foyers en postes récepteurs est un élément important si on reconnaît avec Hervé BOURGES, Ancien Président du Conseil Supérieur de l’audiovisuel français que « la télévision a mis du temps à s’installer en Afrique ».(3) En attestent les statistiques du Rapport de l’UNESCO de l’exercice de 1997 intitulé : les médias face aux défis des nouvelles technologies(4) . Entre 1965 et 1988, le nombre de postes récepteurs est passé de 600 000 à 15 000 000. Quatre africains sur cent disposaient alors d’un téléviseur.

En 1994, ce faible taux a considérablement augmenté. L’Annuaire Statistique (5) publié en 1996 sous l’égide de l’UNESCO renseigne qu’il y avait à cette date 100 postes récepteurs pour 1 000 habitants. Dans le cas échéant, un autre phénomène des temps modernes est venu jouer sa partition en faveur de l’équipement des foyers. Il s’agit des appareils électroménagers de seconde main plus connus sous le nom de « venant » et acquis à moindre coût. C’est pourquoi, on peut dire sans risque de se tromper que la majorité des foyers dakarois sont équipés au moins d’un poste téléviseur. Ces forêts d’antennes suspendues au dessus des toits des maisons et carrément visibles le prouvent bien.

D’autre part, les profonds changements comportementaux et familiaux liés peut être au travail ont orienté de manière irréversible les citadins vers la télévision. En effet, de plus en plus, on assiste à la fondation de foyers à deux apporteurs. Autrement dit, la femme qui avait tendance à rester au foyer et à s’occuper de l’éducation des enfants se fait remplacer dans ces tâches par d’autres transmetteurs de modèles culturels comme la télévision. En plus, le travail à temps plein des parents et des enfants à l’école réduit considérablement les moments d’échange dans la famille et dans le quartier. C’est pourquoi, dans bien de quartiers dakarois, le « social living » fait défaut. Les portails des maisons sont fermés presque 24 heures sur 24. Combler ce vide signifierait pour ces populations s’accrocher à la télévision  devenue moyen d’information, de distraction, d’ouverture, etc.. Par ailleurs, notons que la télévision a connu depuis les années 90 une profonde mutation. Deux facteurs l’expliquent : l’avènement de la démocratie dans la plupart des pays africains et surtout l’internationalisation de la communication. Ce deuxième aspect est rendu possible grâce aux progrès dans les domaines de la production, du transport et de la diffusion des émissions qui se sont accrues, favorisés en cela par le développement du numérique et des techniques de compression. Ces découvertes gagnent aujourd’hui tous les supports (câbles, réseau hertzien, satellite), couvrent le processus de transmission de l’image (émission, diffusion, réception), et accaparent de plus en plus les territoires de la production et de la post production. Ce joyau des télécommunications (le numérique) est d’une importance capitale. En effet, dans le domaine de la diffusion directe, le numérique permet de multiplier les bouquets de programmes et de services qui sont directement reçus par les téléspectateurs. Ces progrès seront à l’origine de véritables bouleversements sur le plan de l’offre des programmes mais également et plus profondément sur celui de paysages audiovisuels. Les pays du sud sont par conséquent envahis par des pluies d’images relatant des réalités culturelles parfois très éloignées des leurs. A ce rendez vous du donner et du recevoir, deux catégories de pays sont présents : ce sont d’une part les pays producteurs d’images préoccupés par l’impérialisme culturel avec leurs moyens technologiques couvrant la planète et ceux dits en voie de développement et qui ne peuvent s’en tenir qu’à la consommation. Ainsi « s’achemine t-on vers une éducation universelle ou les grands perdants seraient les moins riches, les moins outillés en matière de technologie ? »(6) ; S’interrogeait J.F.L dans le Monde Diplomatique de mars 1983.

En réalité, la télévision sans frontière se manifeste dans notre pays par la prolifération des chaînes étrangères. On en compte aujourd’hui, plus d’une trentaine appartenant à deux bouquets…Multicanal et M.M.D.S. Par exemple les chaînes telles que : France 2 – 3, TF1, Cartoons, Network, i-télé, Canal + Horizon, cinémas, Sport + Info Sport, Motors …appartiennent au bouquet multicanal. MMDS quant à lui concentre les chaînes telles que : France 5, Euronews, Mangas, Tiji, RTL9, Action, Planète, Festival, Arte, Trace tv, TV5, …

En plus, il ne fait aujourd’hui l’ombre d’aucun doute que les comportements des jeunes, surtout ceux des villes, changent de plus en plus. Ce qui signifie que les références culturelles locales ont tendance à être reléguées au second plan. Cette situation s’est accentuée avec la prolifération des chaînes de télévision étrangères sur notre capitale. Certains auteurs ont même franchi le rubricon pour affirmer la capacité de l’image télévisuelle à transformer la personnalité de l’individu. Dans le cas échéant le sociologue Thierno DIOP écrivait « grâce à sa puissance d’attraction et à son grand pouvoir de fascination, la télévision est devenue sans conteste le médium dont l’impact ne cesse de grandir. Le pouvoir de l’image télévisuelle est tel qu’elle est capable de modeler les personnalités de ceux qui la reçoivent ».

Par rapport au développement technologique dans le domaine des télécommunications, J. CAZENEUVE ajoute : « le mode de transmission d’une culture étrangère influe sur la culture et la façonne ».(8) Enfin, notre cible, constituée d’enfants et d’adolescents âgés de 10 à 17 ans n’est pas fortuite au vu des idées reçues, véhiculées par le sens commun sur leurs facultés de réaction par rapport à la réception des images d’autres contrées de la planète. De l’avis d’experts versés dans la psychologie, cette tranche d’âge coïncide avec une période délicate dans la formation de l’individu. L’adolescent a plusieurs registres pense le psychologue Serigne Mor MBAYE, « à cet âge, il exerce sa fonction critique. Du point de vue psychique, il devient philosophe ».(9) Sur ce, Monsieur MBAYE ajoute : «l’adolescent se pose en s’opposant »(10) . C’est en effet, la période au cours de laquelle s’installe chez le jeune une remise en question perpétuelle de l’éducation reçue dans le cadre de la cellule familiale.

METHODOLOGIE

Le champ d’étude 

En sociologie, il est important de restreindre le champ d’étude pour permettre une bonne appréhension des réalités étudiées c’est-à-dire les objets de la recherche. Cela permettra d’éviter les généralités qui sont parfois abstraites et arbitraires. Aussi bien au niveau spatial que du point de vue de la population cible, la restriction est nette. Dans le premier cas, nous avons choisi l’espace urbain dakarois pour les multiples possibilités d’utilisation de la télévision qu’il offre. En effet, c’est la première localité du Sénégal à être servie en matière d’innovations technologiques surtout dans le domaine des télécommunications. Depuis la libéralisation du secteur en 1992, les téléspectateurs de la capitale suivent de multiples chaînes de télévision étrangères avant leurs compatriotes de l’intérieur du pays. En plus, Dakar compte quatre départements avec des réalités socio-économiques et démographiques très différentes. En attestent les grandes disparités qu’on peut noter entre le Plateau et la banlieue. Au vue de toutes ces réalités, nous avons préféré mener nos recherches à la Médina actuellement érigée en Commune d’Arrondissement. Cette localité, créée depuis 1914 à la suite d’une épidémie de peste à Dakar, connaît de nos jours un développement fulgurant dans tous les domaines. Elle compte 15 quartiers selon le document de proposition d’investissement de la Mairie. Restriction du champ oblige, nous nous sommes intéressé particulièrement à un quartier traditionnel connu sous le nom de Thieurigne. Avec Gouye Salane, ils constituent les deux principaux quartiers de Médina Est. Plus précisément Thieurigne se situe d’une part entre la Rue 11 et la Rue 25 et d’autre part entre la Rue 22 et le boulevard du Général De Gaulle. Sa situation, son histoire, son développement et les attitudes des jeunes qu’on y a constatés, ont motivé notre choix.

Dans le second cas nous avons ciblé la population jeune. Dans cette entité, nous avons travaillé avec les enfants (10 – 13 ans) et les adolescents (14 – 17 ans). Ces deux catégories d’âges ont été préférées respectivement à cause des périodes d’innocence, d’imitation et de crises auxquelles elles correspondent. Ages ne pouvaient donc être mieux indiqués pour cette étude. La cohabitation entre jeunes et télévision multinationale dans le milieu familial peut être intéressante dans la détermination des causes des comportements et attitudes de notre population cible à Thieurigne. Toutes ces dispositions contribuent à rendre plus efficace le travail du sociologue pourvu qu’elles soient accompagnées de méthodes et de techniques d’observation et de collecte idoines.

Méthodes et techniques d’observation et de collecte

Comme toute discipline scientifique, la sociologie obéit à des règles, des principes et modèles de recherche. Le sociologue est donc obligé de se plier à ces exigences méthodologiques. Mais pour bien baliser le chemin, élucidons brièvement les termes de méthode et de technique qui sont souvent confondus. La méthode appartient au domaine du rationnel et résulte du choix fait en toute conscience par le chercheur qui oriente son action. Ainsi, pouvons nous dire que la méthode est une manière d’organiser une pratique pour atteindre des objectifs fixés. Elle relève du savoir, de la réflexion et entretient des relations évidentes avec la technique. La technique quant à elle est du domaine du savoir faire. Elle est un moyen choisi parmi tant d’autres en fonction d’un certain nombre de critères comme l’efficacité, la pertinence, la congruence avec les objectifs et les méthodes, les contraintes matérielles, etc… Cette nuance étant levée, nous déclinons maintenant nos sources d’informations, la méthode choisie, les techniques de collecte mises en œuvre et les questionnaires et variables.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction générale
PREMIERE PARTIE : CADRE GENERAL ET METHODOLOGIE
CHAPITRE 1 : CADRE GENERAL
1.1. – Problématique
1.2. – Objectif de l’étude
1.3. – Hypothèses
1.4. – Elucidation des concepts
1.5. – Revue de la littérature
1.6. – Modèles théoriques
CHAPITRE 2 : METHODOLOGIE
2.1. – Le Champ d’étude
2.2. – Méthodes et techniques d’observation et de collecte
2.2.1. – Les sources d’informations
2.2.2. – La méthode
2.2.3. – La technique des quotas
2.2.4. – Questionnaires et variables
2.3. – Déroulement de l’enquête
2.4. – les difficultés rencontrées
DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION GENERALE DE LA ZONE ET DES OBJETS D’ETUDE
CHAPITRE 3 : PRESENTATION DU QUARTIER THIEURIGNE
3.1. Historique
3.1.1. La Médina : des origines à la création de la Commune d’Arrondissement
3.1.2. Description de la Médina des villages traditionnels Lébou
3.1.3. Quelques éléments historiques du quartier Thieurigne
3.2. Présentation générale de Thieurigne
3.2.1. Aspects physiques et démographiques
3.2.2. Aspects économiques, habitat et cadre de vie
3.2.3. Equipements et Infrastructures
CHAPITRE 4 : PRESENTATION DES OBJETS D’ETUDES
4.1. La télévision et les émissions télévisuelles à Dakar
4.1.1. Historique de la télévision
4.1.2. Les chaînes et émissions télévisuelles à Dakar
4.1.3. La télévision : véhicule culturel et moyen de domination
4.2. Valeurs culturelles sénégalaises et système de socialisation
4.2.1. Une éducation basée sur l’approche communautaire
4.2.2. L’inculcation des valeurs culturelles aux enfants
TROISIEME PARTIE : ANALYSE ET INTERPRETATION DES DONNEES DE L’ENQUETE
CHAPITRE 5 : LE MILIEU FAMILIAL DES JEUNES
5.1. Composition de la famille Thieurignoise
5.1.1. Les membres et religion de la famille
5.1.2. Les statuts matrimoniaux et socioprofessionnels des parents
5.1.3. Les niveaux d’instructions des chefs de famille
5.2. Les modèles culturel familiaux
5.2.1. La religion : une foi à moitié pratiquée
5.2.2. Des études peu surveillées
5.2.3. Des valeurs culturelles en désuétudes
CHAPITRE 6 : L’USAGE ET LES REFERENCES TELEVISUELS DES JEUNES
6.1. L’utilisation de la télévision par les jeunes
6.1.1. L’équipement télévisuel des foyers
6.1.2. Le contrôle du temps télé
6.1.3. Le divertissement comme principale attraction
6.2. Les pratiques télévisuelles des enfants et adolescents
6.2.1. Les chaînes et émissions préférés
6.2.2. Les acteurs et personnages télévisuels de référence des enquêtés
6.2.3. L’adolescence comme facteur explicatif du comportement télévisuel
CONCLUSION GENERALE
Références bibliographiques

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *