CONSOMMATION CHRONIQUE DE CANNABIS ET TROUBLES DE LA MEMOIRE CHEZ UN ADOLESCENT

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Assumer son corps sexué

Il y a bien ici deux sous problématiques : celle de l’intégration de la transformation pubertaire d’une part et celle de l’identité sexuelle d’autre part.
Les changements corporels se traduisent par toutes sortes de doutes comme en témoignent l’attention portée au corps, les inquiétudes sur ses différentes parties corporelles et les éventuelles craintes d’allure dysmorphophobique.
Si l’adolescent passe de longues heures dans la salle de bain, ce n’est pas tant pour se laver que pour effectuer un travail de reconnaissance, de réappropriation quotidienne de son corps, comme le souligne D. Marcelli (12).
En outre, l’émergence d’un sexe spécifique et imposé lors de la puberté implique le développement de l’identité sexuée et doit aboutir à reconnaître la dimension d’incomplétude et le besoin de l’autre. Le ressenti de ce manque directement issu de la transformation pubertaire et de la définition sexuelle du corps peut conduire à deux des axes psychopathologiques essentiels de l’adolescence : d’un côté la problématique de la perte et de la dépression, et de l’autre, celle de la dépendance et des recherches de substitution.

Subjectivation et individuation

L’enjeu est ici d’acquérir une autonomie psychique. L’adolescent doit s’émanciper de la pensée parentale, seule référence jusqu’alors, pour tenter de construire sa propre réflexion. Sa quête d’indépendance est paradoxale : l’adolescent doit se séparer de ses parents pour s’affirmer en même temps qu’il a besoin de s’identifier à eux. Ceci incarne le paradoxe fondamental du développement psychique en ce sens que nous avons besoin d’aller vers les autres pour être soi et qu’en même temps, nous devons nous en détacher pour nous en différencier et être soi (13). Ce travail psychique de séparation pour devenir un sujet à part entière est la « subjectivation ». Le psychanalyste R. Cahn définit celle-ci comme « un processus de différenciation permettant, à partir de l’exigence interne d’une pensée propre, l’appropriation du corps sexué, l’utilisation des capacités créatives du sujet (..)(14)».
Le concept de séparation-individuation a été introduit par P. Blos (15). Il comporte deux phases :
La première phase de séparation/individuation a lieu chez le nourrisson.
La deuxième phase de séparation/individuation se produit chez l’adolescence) et fait référence à deux processus concomitants :
– Le processus de deuil de l’enfance et des parents idéaux de l’enfance. Le jeune doit alors se défaire et se dégager du cocon de l’enfance.
– Le processus d’identification où l’adolescent recherche des sources d’identification extérieures à sa famille comme la bande, le groupe d’amis/amies ou encore l’adulte « mentor » voire la star…
La seconde phase est également appelé travail de désengagement du lien à l’objet œdipien.
Nous comprenons alors tout le danger d’un complexe d’œdipe non résolu dans l’enfance.
Celui-ci réactivé dans l’adolescence amène le sujet à une régression, comme le souligne M.
Laufer (16), et peut ainsi initier certaines pathologies de la dépendance.

Cercle social et projection dans l’avenir

La troisième mutation concerne la projection dans l’avenir, qui nécessite deux mouvements indissociables : la recherche d’un idéal du moi, c’est-à-dire d’une image future de soi satisfaisante, mais aussi le déploiement vers de nouvelles relations sociales ou, en termes psychanalytiques, de nouvelles « relations d’objet ».
L’idéal du moi est l’héritier de l’adolescence , comme le Surmoi est l’héritier du complexe d’œdipe (17). Cela passe par une remise en cause de l’autorité parentale.
La subjectivation ou travail de création de soi peut, de ce point de vue, être comprise comme la tentative du sujet de s’extraire du désir de l’autre en désengageant le surmoi infantile de l’ombre portée du surmoi des parents pour parvenir à un idéal (du moi) ressenti comme l’expression d’un désir propre. En un mot, l’enjeu est d’obéir à des valeurs et non plus à une personne et s’émanciper de la dépendance infantile à l’égard de ses parents (18).
D’autre part, l’adolescent s’éloigne de ses parents parce qu’il est poussé par le besoin, le désir, l’espoir de découvrir de nouveaux objets d’amour, des « objets » qui le mettent à l’abri de la menace incestueuse.
Dans cette perspective, le rôle des relations aux pairs dans un premier temps, puis de la relation amoureuse, est primordiale. Il s’agit d’abord d’être entre pairs du même sexe pour s’éprouver et se reconnaître dans son sexe d’appartenance, pour ensuite intégrer la différence des sexes et des désirs. La notion d’altérité du désir caractérise le dépassement du stade de l’enfance.
A ce stade, nous pouvons d’ores et déjà noter la présence d’une menace addictive. En effet, il arrive que l’adolescent déplace la dépendance infantile douloureuse et subie vers une dépendance active et recherchée à l’égard de produits, de conduites et/ou de sensations. Si ces conduites ont souvent la signification d’une recherche d’expérience vécue et de limite, leur répétition et leur escalade inscrivent l’individu dans un « processus de dépendance » dont le rôle est en général de faire l’économie du travail psychique précédemment décrit (19).

Adolescence, réactivation et déclin du complexe d’oedipe :

Selon Freud (20), tel qu’il le décrit dans son essai « L’Organisation génitale infantile » (1923), l’élaboration du complexe d’Œdipe représente une étape constitutive du développement psychique des enfants.
Le désir envers la mère trouve en effet son origine dès les premiers jours de la vie et conditionne toute sa psychogenèse. La mère est, d’une part, la « nourricière », et, d’autre part, celle qui procure du plaisir sensuel, via le contact avec le sein et à travers les soins corporels. L’enfant, qu’il soit fille ou garçon, en fait donc le premier objet d’amour qui restera déterminant pour toute la vie amoureuse.
On note une réactivation transitoire du complexe d’œdipe, sorte de soubresaut avant sa disparition programmée et salutaire, au moment de l’entrée dans l’adolescence. Cependant, à la différence de la situation initiale, la « menace incestueuse » est maintenant physiologiquement possible. L’adolescent va répondre à ce mouvement d’attirance inconscient par un mouvement de rejet. Cependant, à la différence de la situation initiale, la « menace incestueuse » est maintenant physiologiquement possible. L’adolescent va répondre à ce mouvement d’attirance inconscient par un mouvement de rejet.
Cette période se traduit souvent par une forte agressivité de l’adolescent, qui peut prendre la forme d’actes violents ou de comportements à risque.
Le déclin du complexe d’Œdipe correspond à la phase finale de la dynamique œdipienne. Il est marqué par le renoncement progressif à posséder l’objet libidinal. Plusieurs processus permettent en effet à l’enfant de détourner son attention libidinale des objets parentaux. Les déplacements identificatoires, les sublimations notamment, le transfert aussi, permettent à la libido de trouver d’autres objets de satisfaction, en particulier dans la socialisation progressive et dans l’investissement des processus intellectuels. Enfin, la « phase génitale » survient pendant l’adolescence et correspond à la reconnaissance de la « double différence, des sexes et des générations » et coïncide avec la seconde période de maturation sexuelle.
Dès lors l’équilibre est trouvé, au sein d’une organisation génitale adulte et grâce aux changements d’objets devenus possibles : le désir sera donc adressé à une autre femme que la mère, à un autre homme que le père.
Le Surmoi découle de la résolution du complexe d’Œdipe : l’enfant assume les interdits du parricide et de l’inceste et s’identifie au parent du même sexe. En intériorisant ainsi l’autorité de ce parent, l’enfant le tue symboliquement en s’emparant de sa sphère d’influence et en rendant en quelque sorte ce parent superflu.

Attachement et adolescence :

Théorie de l’attachement :

La théorie de l’attachement (21-22) a été utilisée au cours des deux dernières décennies dans l’étude des liens et du fonctionnement social et relationnel du nourrisson, du jeune enfant, de l’adolescent et de l’adulte (23). Bowlby (21) suggère l’existence d’une complémentarité adaptative entre divers systèmes de comportements tels que le soin des parents envers les nouveaux-nés. Ces systèmes auraient selon cet auteur, une double fonction en ce qui concerne le processus d’adaptation: la protection et la socialisation.
Bowlby (21) définit l’attachement comme un équilibre entre les comportements d’attachement envers les figures parentales et les comportements d’exploration du milieu. Ce n’est que lorsque les besoins d’attachement sont satisfaits qu’un individu peut s’éloigner de sa figure d’attachement pour explorer de façon créative et ludique le monde extérieur. Ceci représente la notion de sécurité de l’attachement. Les deux pôles : attachement et exploration, peuvent aussi être représentés par les pôles : dépendance et autonomie.
Nous parlons ainsi de base sécure lorsque les figures d’attachement apparaissent à l’enfant comme accessible et capable de répondre de manière cohérente à ses demandes en cas de nécessité (24). En revanche, nous entendons par attachement insécure quand l’enfant prévoit que les figures d’attachement restent insensibles à ses demandes ou lui apportent des réponses inadéquates. Un modèle d’attachement évitant est caractérisé par un mal-être dans les relations intimes et le modèle préoccupé par une recherche de plus de proximité avec une forte crainte d’être abandonné.

Modèles internes d’attachement :

Dans les années 80, Main, Kaplan, & Cassidy (25), en se basant sur la théorie de Bowlby sur les comportements d’attachement, élaborent un modèle qui conçoit la théorie de l’attachement en termes de représentations internes. Au cours des premières expériences relationnelles, l’enfant construit mentalement des attentes quant aux événements et aux comportements des personnes qui l’entourent lorsqu’elles interagissent avec lui (26). La régularité des comportements des figures de l’entourage permettra à l’enfant d’organiser ses attentes en modèles opérants (internal working models). Ces modèles vont lui permettre au cours de sa vie de guider les relations avec ses partenaires sociaux.
Main et ses collaborateurs (25) proposent différents types de modèles internes, définissant l’état d’esprit du sujet à l’égard de ses relations d’attachement. Ces modèles sont définis par la manière dont l’individu perçoit et intègre les souvenirs de ses premiers liens d’attachement et les rend ou non significatifs et utiles pour établir de nouveaux liens au cours de sa vie. Le modèle interne sécure ou autonome se caractérise par un sentiment de continuité interne qui permet à l’individu d’utiliser ses ressources pour établir de nouvelles relations et faire face à l’adversité. Au contraire, le modèle interne insécure détaché décrit des personnes désengagées émotionnellement à l’égard des expériences relationnelles, ayant peu d’accès à leurs souvenirs, alors que le modèle insécure préoccupé renvoie à une restitution plutôt confuse et peu cohérente des expériences relationnelles du passé (26). Le modèle insécure anxieux désorganisé ou désorienté décrit quant à lui des personnes adoptant des comportements contradictoires ou incompréhensibles (simultanément ou dans leur succession) et présentant des indices de stress ou des signes de peur de la figure d’attachement.
Il a été montré que l’attachement insécure est fortement représenté dans les populations cliniques, alors que les populations non cliniques ont un modèle d’attachement majoritairement sécure (27). Des chercheurs ont montré que, dans plus de 75% des cas, ces enfants ont des mères qui présentent elles-mêmes des signes de désorganisation, souvent à l’issue de deuils ou de traumatismes non résolus (28). Enfin, plusieurs études ont montré également la stabilité du modèle interne d’attachement à travers le parcours de vie (29).

Attachement à l’adolescence :

Pour Allen, Kuperminc et Moore (30), la recherche de l’autonomie chez l’adolescent correspond au comportement d’exploration du jeune enfant. L’adolescent parviendrait à s’individualiser lorsqu’il sait qu’il peut se retourner vers ses parents en cas de nécessité.
Ainsi, les efforts de l’adolescent pour atteindre son autonomie et pour maintenir une proximité avec ses parents seraient le signe d’un attachement sécure.
Parmi les nombreuses recherches conduites à l’adolescence, on peut retenir qu’un lien d’attachement de type insécure influence négativement la manière dont le sujet fait face aux difficultés de la vie scolaire (31). En revanche, un type insécure évitant est en relation avec la difficulté à exprimer les émotions et à s’ajuster aux codes sociaux (32). Sur le plan empirique, une relation directe a été établie entre les modèles internes d’attachement et le coping chez l’adolescent comme chez l’adulte (33). Le modèle interne sécure est mis en lien avec la possibilité de faire face à l’adversité en utilisant des ressources internes favorables au développement et à l’adaptation. En revanche, le modèle insécure est lié à des stratégies empêchant l’utilisation des ressources permettant de faire face à la difficulté (34).

Différents types de MDT :

MDT visuo-spatiale :

Il s’agit de la mémorisation et du traitement des informations visuelles (descriptives) et spatiales (localisation). C’est dans l’optique de la décrire que Baddeley & Hitch (38) élaborent le concept de calepin visuo-spatial.
Le système de stockage visuo-spatial maintient l’information et ses variations, en interaction avec un système attentionnel d’ordre spatial, facilitant ainsi la rétention de l’information relative à la localisation (44).
Des études faisant intervenir des tâches d’interférences ont montré que la performance des sujets à une tâche de MDT visuelle diminue si l’on administre en même temps une tâche d’interférence visuelle. Ceci n’est pas le cas s’il s’agit d’une tâche interférente spatiale. Il s’agit du profil inverse pour une tâche de MDT spatiale, un stimulus spatial ayant un impact sur une tâche spatiale et non sur une tâche visuelle (45).
Chez l’adulte, l’empan moyen de la MDT visuo-spatiale est de 5 éléments. Dans une série de 7 éléments, les mieux mémorisés sont les premiers et les derniers.
Pléthore d’études ont montré qu’un déficit dans le stockage visuo-spatial est associé à des difficultés scolaires concernant la lecture, l’écriture, la compréhension et l’arithmétique (46).

MDT motrice :

Des études ont montré que la MDT motrice, impliquée dans les mouvements topocinétiques (mouvements réalisés en fonction d’un but et prenant en compte les informations environnementales), est en lien étroit avec la MDT visuo-spatiale. En effet, les recherches de Smyth et al. (47) ont permis de montrer que les tâches d’interférence spatiale diminuent la capacité de l’individu à mémoriser une séquence motrice de positions spatiales tandis qu’une tâche d’interférence motrice est sans effet sur la mémorisation d’une telle séquence.
En revanche, la MDT visuo-spatiale ne semble pas impliquée dans les mouvements morphocinétiques (reproduction d’une forme corporelle donnée).
L’encodage des mouvements fait entrer en jeu la MDT verbale, s’il existe par exemple un terme spécifique pour un mouvement morphocinétique (comme « faire une roue », ou « faire le poirier ») ou si l’individu connaît et maîtrise le vocabulaire spatial pour un mouvement topocinétique (comme « en-dessous », « à-côté »…). Le codage verbal est plus accessoire que le codage visuo-spatial (48), ce qui pourrait expliquer l’absence de différence observée pour les mouvements qualifiables verbalement ou non concernant l’empan.

MDT verbale :

Elle correspond à la mémoire temporaire de l’information verbale codée sous la forme de sons (39,43) et peut être intrinsèquement liée à la MDT visuo-spatiale.
Au-delà des trois formes de MDT présentées, il en existerait d’autres types relatifs à chacune de nos modalités sensorielles tel qu’exposé par Goldman-Rakic (49) dans son modèle théorique.

Aspects neurocognitifs de la MDT:

La capacité à retenir et manipuler des informations dans la MDT dépend du cortex préfrontal (CPF) (50) et sous-tend plusieurs habiletés cognitives dont le raisonnement logique et la résolution de problème.
La MDT spatiale est latéralisée à droite tandis que la MDT verbale et celle des objets sont latéralisées à gauche (51). Il est à noter que seules quelques régions corticales sont impliquées distinctement dans chaque type de MDT.
L’activation de certaines régions cérébrales est observée en réponse à des tâches cognitives mobilisant les différents types de MDT. Ainsi, l’activation du lobe occipital et de la partie inférieure du lobe frontal est notée dans le cadre de tâches mobilisant exclusivement la MDT visuo-spatiale. La partie inférieure du lobe temporal est quant à elle activée pour les tâches mobilisant la MDT relative aux objets alors que c’est seulement l’aire de Broca qui s’active lorsque la MDT verbale fonctionne.
À l’intérieur du circuit concernant la MDT verbale, il y a une séparation entre ce qui correspond au stockage et ce qui sert de médiateur à la répétition. A cet effet, le cortex pariétal postérieur (notamment dans l’hémisphère gauche) semble être impliqué dans le stockage des informations alors que les régions frontales servent de médiateur à la répétition. Le lobe frontal gauche quant à lui comprend trois régions également impliquées dans les aspects spécifiques du langage : l’aire de Broca, l’aire pré-motrice et l’aire motrice associative. La MDT spatiale possède une structure qui comprend parallèlement le stockage impliquant les régions pariétales postérieure et la répétition sous-tendue par l’aire pré-motrice du cortex frontal.
Le CPF dorso-latéral semble être responsable du traitement du contenu de la MDT. Cette région est particulièrement activée lorsque l’on doit traiter temporellement le contenu de la MDT plutôt que le stockage « pur » des informations (52).
Des études récentes ont démontré l’implication du cervelet dans le fonctionnement de la MDT (53).
La possibilité de mémoriser des événements séquentiels pourrait être liée à l’activation des lobes frontaux. Ainsi, les patients atteints de lésions frontales sont incapables de se rappeler des informations inscrites dans le domaine temporel. Ils ne peuvent pas exécuter des séries de mouvements complexes, ni programmer une série d’activités dans le bon ordre ou se rappeler l’ordre de différentes expériences personnelles (54).

MLT :

Modèle d’organisation hiérarchique des systèmes de MLT :

Depuis la caractérisation des troubles dont souffrait H.M. en 1957, de nombreux autres cas de patients amnésiques présentant des lésions cérébrales ont permis l’établissement de différents modèles théoriques de la mémoire. Ces derniers ont mené à l’élaboration d’une classification hiérarchique des sous-systèmes de MLT en fonction du type d’information mémorisée (figure 3). Ainsi, la mémoire déclarative (MD), ou explicite, comprenant la mémoire sémantique (MS) et la mémoire épisodique (ME) s’oppose à la mémoire non-déclarative (MND), ou implicite, qui est constituée de la mémoire procédurale (MP), des apprentissages non-associatifs, de l’amorçage et du conditionnement classique. Le fonctionnement de ces types de mémoire est sous l’influence de certaines structures cérébrales exposées dans la figure 3.

Nature et relations entre les différents systèmes de MLT :

Encodage, stockage et récupération de l’information :

La qualité du rappel et de la reconnaissance dépend de trois processus, à savoir l’encodage, le stockage et la récupération (64). Ces processus sont indépendants les uns des autres mais interagissent ensemble.

Encodage :

Selon Schacter (65), l’encodage est la procédure qui transforme ce qu’une personne voit, entend, pense ou ressent en un souvenir. C’est la première étape nécessaire au stockage de l’information. De même, Tiberghien (66) définit l’encodage comme le processus qui transforme une nouvelle information sensorielle en une trace mnésique plus ou moins permanente. Ce dernier permet d’individualiser les informations les unes par rapport aux autres et fait intervenir des processus très complexes aussi bien conscients qu’inconscients. L’encodage est sous-tendu par l’état affectif et la capacité attentionnelle et la récupération dépend de la profondeur de l’encodage.

Stockage :

Le stockage est la deuxième étape nécessaire au maintien de l’information. Malgré un encodage efficace, une nouvelle information non stockée ou consolidée sera effacée. Le stockage nécessite une révision mentale plus ou moins longue et répétée. Il permet à l’information d’être mémorisée pour une longue durée. Stockée, elle est disponible en mémoire mais un oubli demeure encore possible à ce stade. L’information peut être aussi temporairement inaccessible et il faut être capable de la récupérer au moment opportun.

Récupération :

Il s’agit du processus ultime et critique du fonctionnement de la MLT tel que précisé par Tiberghien (66). La récupération se définit par la capacité de restituer une information préalablement encodée et stockée en une représentation mentale. Lorsqu’une représentation ne peut être restituée, il est nécessaire d’en déterminer la cause. Ainsi, Tulving et Patterson (67) distinguent deux cas pouvant expliquer l’échec de récupération. Le premier cas est celui où la mémoire n’est pas stockée. Le second cas correspond à la situation ou l’information est stockée mais ne peut être récupérée. Dans ce dernier cas, l’information est disponible mais non accessible.

Modèle SPI (Sériel, Parallèle, Indépendant) :

En 1985, Tulving (59) propose une organisation mono-hiérarchique, un agencement par emboîtement de la mémoire en trois systèmes : la mémoire procédurale, la MS et la ME. Chaque système y est caractérisé par la nature de ses représentations et l’état de conscience (anoétique, noétique, autonoétique) durant la récupération. En 1995, ce modèle évolue et est complété par deux systèmes mnésiques supplémentaires qui sont le système de représentations perceptives (PRS) et la MDT. Les processus d’encodage, de stockage et de récupération y ont également été rajoutés (68). La conception actuelle (69)(Figure 4) du modèle de Tulving correspond au modèle SPI. Ce dernier est conçu dans l’optique de préciser l’organisation et les relations entre les différents systèmes mnésiques. Ces derniers y sont hiérarchisés selon leur ordre d’apparition au cours du développement ontogénétique et phylogénétique.

Consolidation en MD lors du sommeil à ondes lentes :

La consolidation d’éléments déclaratifs associatifs surviendrait préférentiellement au cours des phases 2, 3 et 4 du sommeil à ondes lentes (74-75), avec, peut-être, un rôle particulier de la phase 2 (76). Ceci semble être confirmé par l’augmentation, au cours du sommeil, de l’activité de fuseaux et des oscillations lentes après une journée d’apprentissage déclaratif intense chez les humains. Cette activité électrique signerait la réactivation de processus néocorticaux mis en oeuvre dans la journée, au cours de l’apprentissage (74,76). On retrouve également une corrélation entre l’activité de fuseaux et l’apparition d’oscillations à haute fréquence au niveau hippocampique, suggérant un lien entre le système de mémoire hippocampique et le mécanisme générant les fuseaux de sommeil (76).

Consolidation en MD lors du sommeil paradoxal :

La richesse des détails phénoménologiques associés au souvenir semble en majeure partie influencée par la période du sommeil paradoxal (75). La consolidation des souvenirs en MD possédant une composante émotionnelle surviendrait également au cours de cette période (75,77).
Si le sommeil est altéré chez des sujets au cours de la première nuit suivant l’encodage d’un souvenir épisodique ayant une composante émotionnelle, les caractéristiques du rappel en imagerie fonctionnelle à 6 mois sont modifiées par rapport à des individus ayant dormi normalement. Le rappel sera également de meilleure qualité, après quelques heures, comme après 4 ans, si la phase d’encodage est suivie d’une période de sommeil (77).

Rôle du cortisol et de l’acétylcholine dans la consolidation en MD :

L’étude des taux de cortisol et d’acétylcholine au cours de la consolidation mnésique revêt une grande importance. La modification des taux plasmatiques de ces deux substances est en effet nécessaire à la consolidation mnésique.
Le sommeil à ondes lentes constituerait une période optimale pour la mise en œuvre de la consolidation mnésique déclarative, via la réduction de l’activation cholinergique et la réduction du feedback corticoïde vers l’hippocampe (74).

Cortisol :

Les glucocorticoïdes sont fortement impliqués dans la régulation de la mémoire à divers niveaux. Ils semblent en effet améliorer la rétention de souvenirs encodés lors de périodes émotionnellement riches mais altèrent le rappel en cas de stress. Ces différents effets liés au stress seraient sous la dépendance de l’activation de la neurotransmission noradrénergique au niveau du complexe amygdalien basolatéral, région en lien avec l’hippocampe et de nombreuses aires néocorticales (78).
La perfusion expérimentale de cortisol au cours des premières phases du sommeil supprime les effets bénéfiques de la consolidation en mémoire déclarative (79). La diminution physiologique du taux de cortisol en soirée et au cours de la nuit apparait donc primordiale pour la mise en place d’une consolidation efficiente en mémoire déclarative.
La prise en compte du rôle du cortisol dans l’étude de la mémoire a son importance dans notre travail, puisque le cannabis modifie la sécrétion de cortisol aussi bien lors de sa consommation aiguë que chez des consommateurs réguliers.

Acétylcholine :

On retrouve également une diminution des performances déclaratives en cas d’administration nocturne de physostigmine, inhibitrice de la cholinestérase, provoquant donc une augmentation du tonus cholinergique. En effet, si l’encodage est associé à une augmentation des niveaux d’acétylcholine, la consolidation lors du sommeil à ondes lentes nécessite la réduction de ces niveaux. Les autres types de mémoire ne sont pas atteints par cette administration de physostigmine, ils bénéficieraient davantage de mécanismes de consolidation survenant au cours du sommeil paradoxal, où le tonus cholinergique est élevé.
Le déficit en mémoire déclarative induit par l’augmentation du tonus cholinergique est comparable à celui observé chez des sujets totalement privés de sommeil, suggérant qu’une augmentation du tonus cholinergique central altère sévèrement, voire supprime, les mécanismes de consolidation en mémoire déclarative (80).
Au plan de l’architecture du sommeil, l’administration de physostigmine diminue le temps passé en sommeil à ondes lentes. Elle augmente cependant l’activité de fuseaux, ce qui peut sembler paradoxal. En fait, cette activité de fuseaux provient de la région thalamo-corticale et est une condition favorisant la consolidation. L’interruption de la consolidation par l’administration de physostigmine semblerait donc davantage se jouer au niveau hippocampique. En effet, l’acétylcholine passe pour être un modulateur important de la communication hippocampo-néocorticale. Au cours du sommeil, la réduction du tonus cholinergique induit une désinhibition du feedback hippocampique à l’œuvre dans la journée. Ceci a pour effet de permettre à l’activité hippocampique, sous forme d’ondes EEG en pointes de large amplitude, de se propager au néocortex et au cortex entorhinal. Ce processus passe pour sous-tendre l’intégration des nouveaux souvenirs au sein de réseaux néocorticaux déjà existants (80).

Maturation cérébrale et développement des fonctions cognitives à l’adolescence:

Une hypothèse raisonnable serait que le développement cognitif soit supporté par la maturation cérébrale. L’adolescence est caractérisée par la maturation du cerveau, plus prononcée au niveau du cortex cérébral et de la SB, et le développement des fonctions cognitives. Il existe très peu de données concernant les relations spécifiques entre ces deux processus.
Il a été suggéré que les régions cérébrales associées aux fonctions cognitives les plus basiques subissent leur maturation en premier. Elles sont suivies par les aires cérébrales impliquées dans des fonctions plus complexes. Les régions motrices et sensorielles jouant un rôle dans les fonctions cognitives basiques subissent la maturation la plus précoce. Elles sont suivies par les cortex associatifs pariétaux et temporaux qui sont associés aux compétences de base relatives au langage et à l’attention spatiale, et les cotex préfrontaux et temporaux latéraux qui subissent en dernier leur maturation. Ces dernières pourraient être impliqués dans le contrôle des fonctions supérieures du cerveau (81). Une séquence similaire a été rapportée par l’étude de la microstructure de la SB, révélant que les connexions fronto-temporales subissent un maturation plus lente par rapport aux autres régions cérébrales (82). Les preuves de relations directes entre le cerveau et les changements cognitifs lors du développement normal sont très limitées à ce jour. Des corrélations entre des indicateurs structurels et les mesures de performances des fonctions cognitives en développement ont été rapportées (81,83). Néanmoins, peu d’études ont exploré directement les liens entre les trajectoires de maturation du cerveau et les fonctions cognitives. Shaw et al. (84) ont démontré que la maturation du cortex cérébral est associée aux habiletés intellectuelles générales. Les résultats de son étude ont suggéré que les enfants à différents niveaux de leurs habiletés intellectuelles ont des trajectoires de maturation différentes, principalement au niveau des régions frontales. Les enfants ayant des scores d’intelligence élevés avaient une phase d’épaississement cortical accélérée et prolongée, ainsi qu’un amincissement cortical plus rapide à l’adolescence. Sowell et al. (85) ont objectivé que le gain en intelligence verbale était corrélé à l’amincissement cortical au niveau des régions dorsofrontale latérale et pariétale latérale de l’hémisphère gauche. Cette association n’a pas été retrouvée concernant l’hémisphère droit.
Des associations entre la microstructure de la SB et les mesures de l’intelligence ont été établies chez les adultes sains mais les données concernant ces associations chez l’adolescent sont limitées.
Les fonctions exécutives pourraient dépendre de réseaux distribués englobant les cortex associatifs frontal et pariétal postérieur, ainsi que les voies de la SB (86). Le cortex pré-frontal serait particulièrement important et modulerait les processus favorisés par les régions cérébrales postérieures (87). Le développement prolongé des fonctions exécutives serait alors attribué à la maturation relativement tardive du CPF. A notre connaissance, il n’existe pas d’étude ayant recherché directement les relations entre le développement des différentes fonctions exécutives et la maturation de la structure cérébrale.
Nous n’avons pas pu trouver d’étude se penchant sur les relations entre la mémoire, ses différents types et la maturation du cerveau chez l’adolescent.

Mémoire, attachement et adolescence :

Le développement de la mémoire chez l’adolescent est très influencé par les pratiques scolaires correctes, la méthodologie d’apprentissage et l’éducation, ainsi que la grande dépendance culturelle de l’environnement dans lequel il vit. L’environnement fait référence dans ce cas à l’environnement familial de l’adolescent, à l’influence de ses paires et les capacités de ses professeurs à rendre les matières scolaires attractives. Ces derniers tenteront de motiver l’adolescent (88) et donner du sens à l’effort requis par les études programmées à partir de cet âge.
Il nous semble important d’aborder les connexions qui peuvent exister entre l’attachement et la mémoire chez les adolescents. A notre connaissance, peu d’études ont traité de cette problématique. L’étude da Feeney et Cassidy (89) se sont penchés sur ce sujet en ciblant la mémoire des adolescents pour des informations sociales. Dans cette étude, les auteurs ont examiné les représentations rapportées par les adolescents sur l’attachement et leur lien avec la mémoire pour les conflits parents-adolescents. Les auteurs en ont conclu que les adolescents remaniaient dans leur mémoire les discussions conflictuelles en fonction des représentations de leur attachement. Ainsi, les adolescents ayant des représentations plus sécures de leurs parents étaient plus à même de se rappeler les discussions conflictuelles comme étant plus positives et moins négatives que ce qu’ils avaient rapporté initialement. Ces mêmes adolescents se souvenaient avoir reçu un moins mauvais traitement de la part de leurs parents que ce qu’ils avaient rapporté initialement. Ces constatations sont les premières à supporter que les modèles internes d’attachement fournissent les règles pour orienter la mémoire des informations relatives à l’attachement durant l’adolescence (25). Elles indiquent que la mémoire des événements reliés spécifiquement à l’attachement sera organisée dans le sens qui corrobore l’état des connaissances des individus en rapport avec leurs expériences d’attachement. Les adolescents vont par la suite faire usage de leurs modèles internes d’attachement à mesure que le temps passe. Ils pourront être enclins à croire qu’ils ont bien été traités par les figures d’attachement durant ces événements si ces modèles internes fonctionnent pour fournir aux adolescents des souvenirs d’avoir bien été traités.

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Table des matières

DÉDICACES & REMERCIEMENTS
LISTE DES ABREVIATIONS :
TABLES DES ILLUSTRATIONS :
INTRODUCTION
I. CONTEXTE THEORIQUE
II. METHODOLOGIE
III. OBSERVATION
IV. DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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