Une relation paysage-agriculture à différentes échelles

De l’évolution de la notion de paysage à la prise en compte des paysages à différentes échelles 

Les apports du contexte législatif et réglementaire 

Analyser la notion de paysage n’est pas une chose aussi aisée qu’il y paraisse. Le terme de paysage étant profondément polysémique, il semble avant tout nécessaire de trouver une entrée à l’analyse. Le paysage ayant une forte connotation avec le domaine de l’art en général, il serait possible d’étudier l’évolution de la notion de paysage à la lumière de l’évolution de la considération des artistes envers le paysage c’est-à-dire en analysant l’évolution de la retranscription de l’élément paysage dans les productions artistiques (bas reliefs, peintures…). Cependant, d’autres entrées beaucoup plus objectives existent. Pour ce projet de fin d’étude, le choix est fait d’étudier la notion de paysage et son évolution à travers la transcription qu’il en est fait d’un point de vue juridique et réglementaire. Au-delà d’une simple analyse autour de la notion de paysage, ceci devrait permettre de définir le cadre et le contexte juridique dans lequel s’inscrit le paysage afin de cerner les attentes qui en découlent. Un ensemble de lois, règlements, décrets et même des directives européennes ont pu avoir des effets, directs ou indirects, sur l’évolution et les mutations, ou au contraire sur la préservation des paysages et ce depuis le début du XXème siècle. La première loi s’y rapportant date de 1906. Le corps réglementaire concernant le paysage s’est ensuite étoffé au fil des époques tout en précisant la notion même de paysage. A partir de la simple protection de monuments au début du XXème siècle, le paysage devient une réelle notion, un élément à protéger et à valoriser dans sa globalité. Emmanuelle Heaulmé distingue trois grands modèles de perception et d’action qui, au cours du XX siècle, ont ordonné la patrimonialisation et la prise en compte des paysages : « Le « paradigme du pittoresque » : le paysage s’impose comme objet patrimonial dans la mesure où il se prête à un rapprochement avec une œuvre peinte (lois 1906 et 1930 sur les sites et monuments naturels) ; le paysage en tant qu’objet remarquable. Le « paradigme de l’environnement » à partir des années 1950 : inscription et classement, dans les années 60 et 70, de grands paysages naturels (ex. Landes et Gironde), et apparition d’une nouvelle politique qui s’attache, au-delà de la simple protection, à mettre en œuvre une véritable gestion des sites. Le « paradigme du paysage culturel » depuis les années 1980 : attention portée au paysage en tant que forme sensible d’une interaction dynamique du naturel et du social ; prise en compte de la notion de perception des paysages et du rapport de chacun avec le paysage observé ».

Le « paradigme du pittoresque » 

➤ 1906, loi portant sur la protection des monuments et des sites naturels « œuvres de nature ». En ce qui concerne les monuments, le classement insistait sur la dimension patriotique du paysage : « le patriotisme est un sentiment inné et pour ainsi dire instinctif mais ce qui contribue le plus sûrement à le fortifier et à le graver d’une manière ineffable dans les âmes c’est l’attachement à la terre maternelle, à des horizons préférés et aux souvenirs qu’ils évoquent. »
➤ 1913 (31 décembre), loi sur la protection des monuments historiques,
➤ 1930, loi sur la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque remarquables. Elle distingue deux degrés de protection : le classement, contraignant (« sites classés ») et la simple inscription (« sites inscrits »).

Le « paradigme de l’environnement » 

➤ 1941, loi lançant les premières opérations de remembrement sur la base d’échanges volontaires de terres. En 1954, un décret l’évoque en termes d’aménagement foncier puis, en 1975, en termes d’aménagement rural. En 1976, la loi impose la réalisation d’une étude d’impact avant toute opération de remembrement.
➤ 1960, loi du 22 juillet créant des Parcs nationaux dont le but est la conservation d’espaces naturels fragiles : « la conservation de la faune, de la flore, du sol, du sous-sol, de l’atmosphère, des eaux et en général du milieu naturel ». Cette loi sera complétée par un décret en 1961 et une loi en 1995.
➤ 1962, « loi Malraux » qui institue les secteurs sauvegardés pour les ensembles urbains qui présentent un caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la protection et la mise en valeur de tout ou partie d’un ensemble d’immeubles.
➤ 1967, (1er mars), décret créant les Parcs naturels régionaux (PNR) qui, destinés à concilier le développement économique et la conservation des milieux, doivent promouvoir des activités d’ordre culturel, scientifique et touristique.
➤ 1967, loi d’orientation foncière instaurant les Plans d’occupation du sol (POS, au niveau communal) et les Schémas directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) afin de mieux maîtriser l’urbanisation et l’évolution des paysages urbains.
➤ 1973 (22 février), circulaire relative à la protection des espaces verts en zone urbaine qui est toujours en vigueur. Elle donne une définition précise des espaces verts. Elle convie les préfets à élaborer un plan de protection et de mise en valeur des espaces verts urbains et périurbains. Elle rappelle qu’un espace vert représente un équipement structurant d’intérêt général et une catégorie juridique soumise, le cas échéant, à des règles et des servitudes opposables aux tiers, pouvant être déclinées dans les documents d’urbanisme, les schémas d’aménagement rural et forestier, les politiques foncières des collectivités territoriales.
➤ 1975, loi donnant naissance au Conservatoire du littoral et des rivages lacustres, établissement public ayant pour mission de « mener dans les cantons côtiers et dans les communes riveraines des lacs et des plans d’eau d’une superficie au moins égale à 1000 ha, une politique foncière de sauvegarde de l’espace littoral, de respect des sites naturels et de l’équilibre écologique ».
➤ 1976, loi relative à la protection de la nature précise dans son article premier que « la protection des espaces naturels et des paysages est d’intérêt général ». Elle définit le cadre des « réserves naturelles » dont l’initiative revient soit à l’administration, soit à des associations de protection de la nature.
➤ 1979, loi relative à la publicité par enseignes et présenseignes : elle permet la mise en œuvre d’une réglementation communale destinée à encadrer l’affichage publicitaire. Elle est complétée par la « loi Barnier » sur la publicité en agglomération (1995 et décret de 1996). Mais leur efficacité demeure limitée : le traitement des entrées de ville reste notamment un problème majeur.

Le « paradigme du paysage culturel » 

➤ 1985, promulgation de l’article 19 du règlement de la CEE qui permet de fournir des « aides aux zones sensibles du point de vue de la protection de l’environnement et des ressources naturelles ainsi que du point de vue du maintien de l’espace rural et du paysage ». Les agriculteurs se voyaient ainsi attribuer un rôle de production de biens paysagers et environnementaux. Cet article et les règlements qui l’ont suivi ont été appliqués en France sous l’appellation d’Opération groupée d’aménagement foncier ou OGAFenvironnement
➤ 1985 et 1986, promulgation des lois « montagne » et « littoral », lois d’aménagement et d’urbanisme dont les dispositions s’imposent aux documents de planification.

Cependant, le mouvement de prise en compte du paysage en tant que tel s’accélère réellement dans les années 90. En effet, depuis les années 90, le droit de l’urbanisme a significativement évolué pour prendre en compte les exigences du développement durable et intégrer la question du paysage au cœur de l’aménagement et de l’urbanisme. Le paysage devient une réelle valeur ajoutée mais également un élément à protéger et à valoriser à part entière. A cet effet, une loi lui est consacré (loi du 8 janvier 1993 dite « loi Paysage ») et permet la protection du paysage en tant que tel.

➤ 1992 (21 mai), la directive européenne n° 92/43 engage la constitution d’un réseau écologique de zones spéciales protégées dénommé « Natura 2000 ». Celuici est destiné avant tout à préserver les habitats naturels d’espèces animales et végétales (faune et flore sauvages) menacées dans l’espace communautaire. Elles sont recensées dans les directives « oiseaux » de 1979 (zones ZPS) et « habitats » de 1992 (zones pSIC / ZSC). Le classement en zone Natura 2000 n’interdit pas la poursuite d’activités économiques ou de loisirs compatibles avec leur protection et le zonage des sites du réseau, en ZPS ou en pSIC/ZSC, doit être un compromis entre les impératifs scientifiques, socio-professionnels et politiques.
➤ 1993 (8 janvier), la loi paysage, n° 93-24, sur la protection et la mise en valeur des paysages et ses textes d’application (1994). La loi propose une série de mesures destinées à une meilleure intégration des aménagements. Cette loi, qui donne un statut officiel au paysage, comporte trois volets. Elle modifie les dispositions législatives en matière d’enquête d’utilité publique afin de proposer une meilleure concertation autour des projets d’aménagement, et élargit ainsi les possibilités de débat autour des projets publics. Elle complète le code d’urbanisme en matière de permis de construire, demandant une étude de l’insertion dans l’environnement et de l’impact visuel des nouveaux bâtiments et de leurs abords. Ces dispositions, assorties de mesures d’incitations fiscales et réglementaires, visent à préserver la « qualité paysagère » dans les campagnes lors des opérations de remembrement, aux abords des villes en expansion, sur le rivage ou en montagne. Enfin, la loi complète les dispositifs de protection, élargissant les compétences du Conservatoire du littoral, renforçant les chartes des parcs naturels régionaux, et définissant des Zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP). Elle implique un inventaire régional du patrimoine paysager, sans toutefois proposer des critères d’évaluation des zones à protéger. Elle ouvre la voie à une politique de préservation et de reconquête des paysages. Les textes ultérieurs proposent l’établissement de « contrats de paysage » avec les collectivités locales permettant l’insertion des constructions nouvelles et la valorisation du décor rural (…, d »après Charles Le Cœur – TDC « Le paysage, décor ou enfer ? », juin 1997). Cette loi traduit le glissement d’une analyse des grands paysages, des grands sites touristiques vers le « tout » paysage. Tout espace rural ou urbain devient un paysage à prendre en compte dans l’aménagement . La mise en application de la loi paysage a supposé une modification des procédures de demande de permis de construire (Article R421-2 du Code de l’Urbanisme modifié par le décret n° 94-408 du 18 mai 1994) qui comporte un important volet d’intégration paysagère.
➤ 1995, loi « Barnier » relative au renforcement de la protection de l’environnement.
➤ 1995 (4 février), loi d’Orientation pour l’Aménagement et le Développement du Territoire (LOADT ou « loi Pasqua ») a créé la notion de « pays » comme territoire sur lequel se mettent en œuvre des actions d’organisation des services publics ainsi qu’une politique d’aménagement et de développement. Des Directives territoriales d’aménagement (DTA) fixent les orientations fondamentales de l’État en matière d’aménagement des territoires dans la perspective « de leur développement, de leur protection et de leur mise en valeur ».
➤ 1999, loi d’Orientation pour l’Aménagement et le Développement Durable du territoire (LOADDT ou « loi Voynet ») modifie la LOADT de 1995 en intégrant les notions de développement durable et de participation citoyenne et en instituant des Schémas régionaux d’aménagement et de développement du territoire.
➤ 2000 (13 décembre), loi relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbains (SRU) qui intègre les notions de développement durable, de solidarité, particulièrement en matière d’habitat, de territoires de projet. Elle institue de nouveaux documents d’urbanisme : les Schémas de Cohérence Territoriale (SCoT) et les Plans locaux d’urbanisme (PLU) qui remplacent les SDAU et les POS de 1967 et doivent être compatibles avec les DTA.
➤ 2000, adoption, à Florence, de la Convention européenne du paysage, ratifiée par la loi du 13 octobre 2005.
➤ 2006 (14 avril), loi relative aux Parcs nationaux, aux Parcs naturels marins et aux Parcs naturels régionaux qui réforme la loi de 1960. Elle renforce la protection juridique des Parcs nationaux et modifie leur statut en associant plus étroitement les collectivités locales à leur gestion. Elle modifie les dispositions des articles L. 331-1 du code de l’environnement et suivants relatifs aux Parcs naturels nationaux, parcs qui peuvent être crées à partir d’espaces terrestres ou maritimes quand ils comportent un intérêt spécial et qu’il faut en assurer la protection. Elle crée des instruments spécifiques de protection pour les espaces marins comme « l’Agence des aires marines protégées ». De plus, elle aménage le régime des Parcs naturels régionaux. Enfin, elle institue un Établissement public coordonnateur nommé « Parcs nationaux de France ».

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Table des matières

Introduction
Partie 1 : Une relation paysage-agriculture à différentes échelles
1. De l’évolution de la notion de paysage à la prise en compte des paysages à différentes échelles
2. Vers la formalisation d’un système d’acteurs « paysage » ou élus locaux et agriculteurs occupent une position centrale
3. Emergence de la problématique
Partie 2 : Une analyse quantitative de l’évolution des surfaces boisées et populicoles
1. La définition d’un périmètre d’étude pertinent en vue de la mise en place d’une méthode d’analyse quantitative
2. Une fermeture du paysage à deux visages
3. Evolution de la fermeture du paysage du point de vue de l’évolution des surfaces boisées et populicoles
4. La formalisation du lien agriculture-paysage à travers l’analyse comparée de l’évolution des surfaces boisées / populicoles et agricoles
Partie 3 : Une analyse qualitative de l’évolution des surfaces boisées et populicoles
1. Un processus d’entretiens pour une analyse qualitative de du lien agriculturepaysage au regard de la problématique du paysage
2. Une bonne connaissance des paysages communaux malgré une notion de paysage difficile à définir
3. L’absence de perception de la problématique de fermeture du paysage liée aux peupleraies
Conclusion
Bibliographie

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