Une combinaison de fonctions pour un urbanisme durable

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L’agriculture urbaine au service de la ville et la multifonctionnalité

En premier lieu, l’AU est souvent considérée pour sa contribution au système alimentaire urbain. Mais il est inexacte de concevoir l’AU uniquement comme une composante de ce système.Le caractère multifonctionnel de cette agriculture ressort dans l’ensemble des travaux d’urbanistes et de géographes pour qui l’AU peut participer à rendre la ville plus viable et plus durable. La multifonctionnalité est un atout de l’agriculture urbaine (Ba et Aubry 2011). En effet, elle peut influencer les collectivités locales sur la préservation et la croissance des espaces agricoles en ville. L’agriculture urbaine s’inscrit également dans des politiques de développement durable auxquelles de plus en plus de villes adhèrent, compte tenu des problématiques environnementales actuelles. D’après Sandrine Glatron géographe et chercheuse au CNRS : « Si les collectivitéspubliques, dont les surfaces d’agriculture urbaine dépendent essentiellement, s’y intéressent de plus en plus, c’est pour tous ces services […] qu’elle peut remplir au coeur de la ville, de sociabilité, desolidarité, de lien au vivant, de lutte contre l’obésité, d’éducation environnementale, de sauvegarde de la biodiversité, ou encore de gestion des déchets » (Sobocinski 2013). On retrouve en effet, dans les différentes fonctions de l’agriculture urbaine les composantes du développement durable (sociale, économique, environnementale), fonctions qui vont donc bien au-delà de la seule production alimentaire. Au vue des différents types d’agricultures urbaines existantes, on dénombre de nombreuses fonctions à ces agricultures : aménagement urbain par l’appropriation citoyenne des espaces vacants ; protection de l’environnement ; l’éducation (sensibilisation, autonomisation personnelle et politique, formation citoyenne) ; développement économique et la lutte contre la pauvreté ; la sécurité alimentaire abordant l’autosuffisance alimentaire ; les loisirs (espaces de détente) ; interactions sociales ; la santé, grâce aux activités physiques de plein air et aux aliments de qualité; etc. (Duchemin, Wegmuller, et Legault 2010).

Une combinaison de fonctions pour un urbanisme durable

Les pressions sur le sol sont de plus en plus nombreuses, en effet chaque parcelle est associée à une fonction particulière (agricole, foncier, commerciale etc.) qui lui est propre, mais la croissance démographique actuelle ne permet plus cette monofonctionnalité à cause du manque de surface disponible. C’est à ce sujet que la déléguée interministérielle du Développement durable s’est exprimée en 2010 : En France, la Stratégie nationale de développement durable pour 2010-2013 a inscrit parmi ses objectifs de « veiller à freiner le rythme d’artificialisation du territoire, qui est actuellement plus rapide que la dynamique démographique, notamment en localisant les infrastructures sur les espaces déjà artificialisés » (Keller et al. 2012). C’est pourquoi, la multifonctionnalité est conseillée en termes d’aménagement de l’espace afin de réduire les conflits pour le sol. « L’affectation des sols doit être pensé à long terme afin de limiter leur dégradation et permettre l’exploitation durable de cette ressource. Pour cela plusieurs fonctions devraient se chevaucher sur une même parcelle et ainsi utiliser le sol pour bâtir et pour nourrir, pour s’alimenter et se déplacer » (ADEME 2011).
Dans le contexte actuel, le rapport au sol est donc particulier et freine le développement de la multifonctionnalité. En effet, « l’approche multifonctionnelle se propose d’oeuvrer à développer les synergies pour bénéficier des opportunités qu’elles génèrent tout en atténuant les rivalités d’usages » (Guellier et al. 2016). La multifonctionnalité est considérée aujourd’hui comme une approche d’analyse de planification et de gestion du territoire du fait de son impact positif dans l’organisation des espaces. Elle met en évidence, quand elle est appliquée, la diversité des territoires et soulève les différentes caractéristiques émergentes du lieu en question comme sa production, sa population, et la biodiversité présente. Des acteurs multiples aux intérêts variés sont impliqués dans cette diversité de fonctions, de ce fait, leur participation nécessite d’être équilibrée. Ainsi, la multifonctionnalité permettrait « une combinaison optimale des fonctions marchandes et non marchandes du territoire » et favoriserait aussi la cohabitation des usagers (Dupriez 2012).
Il y a donc une grande diversité d’acteurs, de fonctions et de territoires autour de la multifonctionnalité d’où la difficulté de trouver une définition commune à ce concept. Des chercheurs et doctorants ont développé, dans un article sur l’adaptation de la multifonctionnalité à la forme urbaine, la signification du terme multifonctionnel de manière approfondie. Il s’agit d’obtenir une combinaison d’au moins trois utilisations différentes dans une période spécifique et serait liée au concept de « multi usage qui signifie différents usages de l’espace à des moments différents » (Ghafouri et al. 2010). Il y a donc une véritable relation entre l’espace, letemps et les fonctions, qui dans un milieu urbain se caractérise par les relations entre la forme et la morphologie urbaine de l’espace en question, ses fonctions caractéristiques et les usages présents.
De manière plus générale, la multifonctionnalité se définie comme la combinaison de différentes fonctions socio-économiques sur un même espace. Cette disposition permettrait « d’économiser de l’espace en intensifiant son fonctionnement, et ceci tout en conservant un haut niveau de qualité spatiale » (Ghafouri et al. 2010).
On retrouve les questions autour des fonctions du territoire dans la majorité des définitions de la multifonctionnalité. Holmes suit aussi une réflexion axée sur les fonctions. Il met en évidence l’existence de plusieurs formes de multifonctionnalité. Des fonctions peuvent être dominantes mais peuvent être aussi combinées à d’autres fonctions. Il ne s’agit pas, pour lui, d’un équilibre parfait entre chacune des fonctions concernées. Il raisonne en considérant « d’une part la fragmentation de l’espace et d’autre part la simultanéité des usages ainsi un médiateur est nécessaire pour rassembler les usages » (Serrano 2015).

Faire émerger la multifonctionnalité

La multifonctionnalité est un outil capable de s’adapter à différents territoires mais il existe des conditions à son intégration. En effet, il est important que « les différentes activités de l’espace en question soient rassemblées par un principe unifiant » (Serrano 2015) afin de créer une cohérence sur le territoire. Il y a donc un réel lien entre les fonctions de l’espace et la morphologie urbaine accueillant les activités concernées.
Les acteurs ont un rôle fondamental dans la mise en place de la multifonctionnalité. Ils sont véritablement intégrés au territoire, puisqu’ « ils n’agissent pas sur l’espace mais avec l’espace » (Serrano 2015). Un espace multifonctionnel est rendu possible seulement si les relations entre les acteurs sont équilibrées. La vision d’un sol multifonctionnel est plutôt absente aujourd’hui, « le grand public reste peu informé sur les sols, leurs fonctions et les services qu’ils rendent » ainsi il serait intéressant organiser des discussions collectives pour les considérer autrement (Guellier et al. 2016).
Afin de promouvoir une mixité fonctionnelle certains principes devraient être respectés :
● Les différentes fonctions urbaines  doivent cohabiter selon de nouveaux critères de compatibilité .
● Chercher des usages compatibles, adaptés aux besoins actuels et utiles au fonctionnement du quartier (activités de proximité) .
● Les politiques urbaines liées à l’affectation du sol (attribution des zones à certaines fonctions) et à l’environnement doivent corriger les contraintes et les pollutions que la diversité fonctionnelle et l’évolution des quartiers ont apportées au fil du temps (Goblet 2005).
Cependant pour qu’une mixité fonctionnelle soit efficace et durable, il semble important de diminuer voir éliminer les fondements actuels liés à la monofonctionnalité :
● Prendre en compte la menace du logement provoquée par le secteur tertiaire (bureau, tourisme, commerces…) .
● Limiter l’offre d’espaces aux fonctions autres que le logement, en réalisant des plans d’affectation du sol.
● Éviter la monofonctionnalité de certains quartiers même si la fonction en question est très rentable (Goblet 2005).

Les politiques de planification permettent-elles aujourd’hui l’émergence d’un modèle de ville durable?

Dans cette partie, nous tentons de comprendre l’évolution des formes urbaines et des politiques de planification. Il est question de saisir les liens existants entre morphologie urbaine, fonctions des espaces et relations entre les acteurs du territoire. A l’heure actuelle, peu d’études sur l’intégration de l’agriculture urbaine dans la planification ont vu le jour. Nous utilisons donc majoritairement les données concernant l’agriculture périurbaine (qui fait partie intégrante de l’agriculture urbaine) et qui peuvent s’élargir à l’étude de l’agriculture en ville.

Une évolution des outils de planification en faveur du développement durable

La planification urbaine regroupe l’ensemble des documents de planification qui organisent les territoires. Ces documents sont issus des études, des procédures juridiques et financières, des textes législatifs et réglementaires mis en oeuvre par les services de l’État et les collectivités territoriales. Ils permettent de contrôler l’évolution des territoires et de maîtriser leur développement.
L’objectif principal de ces documents est de déterminer des règles touchant à l’affectation et à l’occupation des sols (gestion de l’habitat et de l’urbanisation, réalisation d’infrastructures, offre de services…) (Cerema 2017).
Les objectifs de ces documents ont progressivement évolué avec le temps. Au cours du XXe siècle, les villes ont commencé à s’étaler suite au développement du marché automobile. Rapidement, la majorité des habitants possédaient une voiture et une maison individuelle. De plus, les politiques de planification privilégiaient la monofonctionnalité des espaces notamment en séparant les espaces à travers des zonages pour que les industries ne polluent pas les habitations. Ainsi, les différentes fonctions de la ville (commerces, maisons et industries etc.) se sont retrouvées loin les unes des autres et la voiture est devenue indispensable. Ce phénomène a entraîné une importante consommation des espaces, notamment des espaces périurbains (Saga Cité 2014).
En 1967, la loi d’Orientation Foncière (LOF) représente le principal coup d’arrêt à la consommation aveugle des espaces agricoles suite à la croissance urbaine. Elle met en place le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) et le plan d’occupation des sols (POS) qui obligent les décideurs à réfléchir à l’organisation de l’espace agricole périurbain. Cette nouvelle orientation urbaine va « accélérer les affectations urbaines et stopper des consommations immobilières » (Donadieu 1998). Malgré cette nouvelle réglementation, le problème de la consommation d’espace ne sera pas résolu. En 2000, les outils de la loi LOF sont transformés par la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) qui introduit le concept de durabilité au sein des politiques urbaines. Elle se rapproche du modèle de ville compacte en incitant le renouvellement urbain et la fin du gaspillage foncier (Marty 2016).
La loi SRU possède trois principes fondamentaux :
● l’équilibre entre aménagement et protection de l’environnement .
● la mixité sociale et urbaine .
● la lutte contre l’étalement urbain (CNLE 2008).
Le SDAU devient le SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale) et le POS est remplacé par le PLU
(Plan Local d’Urbanisme). Par cette modification leur régime juridique a profondément changé.

qui donne naissance à des modèles urbains durables

La morphologie de la ville a considérablement changé au cours du XIXème siècle. Il y a toujours eu un lien étroit entre la ville et l’agriculture, entre lieu de production et lieu de consommation mais « ce lien a considérablement évolué au cours des deux derniers siècles: par la révolution des transports et l’agrandissement des villes, la proximité entre ces deux espaces a évolué, tout comme le rôle qu’ils jouent maintenant l’un envers l’autre » (Cubizolles et Fontanaud 2017). En Europe, la principale forme urbaine pour les grandes villes est celle de la ville compacte. Paris et Londres en sont de bons exemples : ce sont des villes médiévales qui se sont développées et densifiées avec le temps.
La typologie urbaine compacte semble être la plus adéquate pour répondre aux enjeux de la ville durable (notion introduite aux conférences de Rio en 1992 et d’Aalborg en 1994). Ce concept, considéré comme un nouveau courant urbanistique, ne propose pas de modèle formel de ville à développer et à appliquer (Cubizolles et Fontanaud 2017). En effet, chaque ville doit trouver les solutions durables à ses besoins pour cela les mesures suivantes peuvent être mises en place :
● réduire les rejets et la consommation énergétique des villes .
● lutter contre l’étalement urbain et ses conséquences (mixité fonctionnelle) .
● traiter et recycler les déchets .
● favoriser les modes de transports doux.
Ainsi, le modèle urbain compact créant des villes « de fortes densités et une urbanisation continue » suit les objectifs fixés par les documents de planification français (loi SRU, loi ALUR etc.) (Pouyanne 2004). Cependant, le modèle compact montre ses limites. On observe une dichotomie importante entre les espaces bâtis très denses et la désertification des espaces agricoles phénomène qui entraîne une augmentation du prix du foncier (Serrano 2012). Ainsi, la multifonctionnalité se développe seulement dans des espaces aux bordures de la ville. On note une urbanisation autour des axes de communication qui cloisonne l’espace et laisse place à des îlots non-urbanisés.

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Table des matières

PARTIE I : État de l’art 
1) L’agriculture urbaine : une représentation de la multifonctionnalité des espaces urbains
1.1) L’agriculture d’hier et d’aujourd’hui
1.2) « Il n’existe pas une, mais des agricultures urbaines » (Duchemin 2013)
1.2.1) La localisation
1.2.2) Les fonctionnalités réciproques
1.2.3) Les dynamiques locales et agricoles
1.2.4) Les activités 1
1.3) L’agriculture urbaine au service de la ville et la multifonctionnalité
2) La multifonctionnalité: une nouvelle approche pour aménager les villes?
2.1) Une combinaison de fonctions pour un urbanisme durable
2.2) Faire émerger la multifonctionnalité
2.3) La nature comme levier d’action?
3) Les politiques de planification permettent-elles aujourd’hui l’émergence d’un modèle de ville durable?
3.1) Une évolution des outils de planification en faveur du développement durable.
3.2) … qui donne naissance à des modèles urbains durables
3.3) Mais des conflits d’usages limitent toujours cette évolution
4) Quels sont les obstacles et les leviers d’action de l’intégration de l’AU à la planification urbaine?
4.1) Les obstacles
4.1.1) Le foncier, un facteur limitant
4.1.2) Les blocages politiques et législatifs
4.1.3) Les risques de pollution
4.2) Les leviers d’action
4.2.1) Le rôle des collectivités
4.2.2) L’amélioration de la qualité des relations entre acteurs
4.3) Poursuite de l’étude : élaboration d’un protocole de recherche
PARTIE II : Étude de cas 
1) Protocole de recherche
2) Projet Alimentaire Territorial de Tours Métropole Mission Val de Loire
2.1) La naissance du projet
2.2) Le dispositif
2.3) Le diagnostic territorial
3) Les entretiens
3.1) Les résumés des entretiens
3.1.1) Entretien avec le service Dévelopment Économique de la Métropole (Annexe 6)
3.1.2) Entretien avec la Chambre d’Agriculture 37 (Annexe 7)
3.1.3) Entretien avec un maraîcher bio (Annexe 8)
3.1.4) Entretien avec InPACT 37 (Annexe 9)
3.1.5) Entretien avec l’Agence d’Urbanisme (Annexe 10)
3.1.6) Entretien avec le président du PAT (Annexe 11)
3.1.7) Entretien avec un maraîcher conventionnel (Annexe 12)
3.2) Vue d’ensemble des entretiens
3.2.1) Un projet pluri-acteurs (pilier social)
3.2.2) Un projet en faveur de l’économie locale (pilier économique)
3.2.3) Une réalité plus nuancée face aux valeurs environnementales valorisées par le projet
CONCLUSION 
Bibliographie

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