Un territoire a pour ambition de véhiculer des valeurs qui lui sont propres

Un territoire a pour ambition de véhiculer des valeurs qui lui sont propres 

A. Comment peut-on déterminer l’identité d’un territoire ?

Avant de s’intéresser à ce qu’est la notion d’identité, penchons-nous d’abord sur celle de territoire, pour tenter modestement et uniquement dans le cadre de ce mémoire, de définir ce qu’est l’identité d’un territoire. Dans un article intitulé « Qu’est ce qu’un “territoire” », le sociologue Thierry Paquot recense les différents sens du mot selon les disciplines universitaires, puisque sa définition varie grandement selon les époques et les disciplines ; pour Maryvonne Le Berre, le territoire « peut être défini comme la portion de la surface terrestre, appropriée par un groupe social pour assurer sa reproduction et la satisfaction de ses besoins vitaux. C’est une entité spatiale, le lieu de vie du groupe, indissociable de ce dernier ». Ici, la géographe insiste sur le lien entre le territoire et les individus qui l’investissent. Sans individus, pas de territoire. T. Paquot étaye cette définition ; à partir du moment où le territoire « résulte d’une action des humains », « il devient l’enjeu de pouvoirs concurrents et divergents et trouve sa légitimité avec les représentations qu’il génère, tant symboliques que patrimoniales et imaginaires ». L’urbaniste Alberto Magnaghi emploie une formule, presque poétique, qui pourrait résumer ce lien indissociable entre territoire et individus : le territoire est « le fruit de l’union amoureuse de la nature et de la culture ». Mais plus concrètement, le territoire est aussi, selon les géographes Pierre George et Fernand Verger, un espace géographique qualifié par trois appartenances :
– Une appartenance juridique ; ce sont les pouvoirs juridictionnels qui définissent les limites d’un territoire, et celui-ci peut évoluer ; la réforme des régions sous François Hollande en témoigne, ou bien l’Union Européenne, territoire voué à s’agrandir ou rétrécir en fonction de l’arrivée ou du départ de pays membres. Cette appartenance juridique est d’autant plus majeure dans ce mémoire, puisque les campagnes de promotion du territoire sont l’initiative des villes, métropoles, agglomérations ou régions en place.
– Une particularité naturelle ; les frontières physiques semblent avoir façonné les territoires juridiques, la frontière franco-allemande est par exemple un fleuve, tout comme celles avec l’Italie et l’Espagne, incarnées par des chaînes de montagne.
– Une particularité culturelle enfin, avec une zone linguistique spécifique selon les habitants présents sur le territoire.

Ce point de vue géographique contemporain de ce qu’est un territoire apporte un premier éclairage sur ce que peut être « l’identité d’un territoire ». Intéressons-nous maintenant à la notion d’identité.

Selon Joël Gayet, fondateur de la chaire « Attractivité et Nouveau Marketing Territorial » d’Aix-Marseille Université, l’identité territoriale est une superposition de plusieurs éléments :
• Sensitifs : matières, sons, goûts, lumières, couleurs
• Dynamiques : climat, dynamiques naturelles et architecturales (les maisons traditionnelles bretonnes sont réalisées en granit, roche locale, idem pour l’Île deFrance avec les carrières de pierre meulière par exemple), organisation du territoire, profils humains, rapports avec l’extérieur
• Patrimoniaux : histoire, traditions populaires, activités humaines, patrimoine bâti, personnalités locales
• Énergétiques : mouvements collectifs (sociaux, associatifs), événementiels, offres d’activités
• Symboliques : symboles naturels (faune, flore), symboles graphiques, objets artisanaux, traits de caractère des habitants, personnages fictifs, valeurs collectives.

L’identité étant l’interaction permanente entre tous ces éléments, l’on se rend compte dès lors qu’il parait difficile de figer une seule et même définition de l’identité territoriale : l’histoire du territoire évolue, son patrimoine bâti aussi, ses traditions peuvent se perdre ou évoluer en fonction de l’époque. Pour Yves Guermond, ce sont trois autres éléments qui participent à la formation d’une identité territoriale :
– Le cognitif : connaissance et reconnaissance de l’espace par les individus qui l’habitent
– L’affectif : le sentiment d’appartenance, d’identité commune au sein de l’espace habité
– L’instrumental : la mobilisation pour des actions collectives sur cet espace .

Le géographe fait lui aussi référence au paramètre essentiel que sont les habitants d’un territoire. Sans eux, pas de transmission de son histoire, de ses traditions ; pas de fierté revendiquée d’appartenance à ce territoire et pas de tentative de promotion de celui-ci ! Il considère d’ailleurs que « l’identité territoriale est à l’origine un sentiment individuel, très souvent limité au coin de terre, au quartier de son enfance, ou encore au lieu des vacances, idéalisés dans un souvenir confus mais permanent». Si l’identité territoriale est en fait changeante, mais surtout diffère selon les souvenirs, l’histoire et les idées de chaque habitant, comment l’institution en charge de vendre son territoire va-t-elle réussir à le mettre en avant ? Il paraît difficile de recenser l’idée que se fait chaque habitant de l’espace qu’il habite, dans le but de faire ressortir une seule et uniforme identité territoriale. Il est alors intéressant de se pencher sur la définition de l’identité qu’a énoncé Erving Goffman ; l’identité « résulte de l’opposition entre une identité définie par autrui (l’identité « pour autrui ») et une identité pour soi ». Même si cette définition de l’identité s’applique ici à l’individu, on pourrait établir un parallèle avec l’identité des territoires. Face à une multitude d’identités territoriales propres à chaque habitant (ici, l’identité « pour soi »), le territoire se retrouve presque contraint d’imaginer une nouvelle identité, la plus proche possible de l’identité pour soi, mais devant, dans le même temps, être mise en avant pour attirer touristes, nouveaux habitants ou entreprises (l’identité « pour autrui » donc).

Jean-Jacques Lambin définit ainsi l’image de marque : « l’ensemble des représentations mentales, cognitives et affectives, qu’une personne ou groupe de personnes se font d’une marque ». Il distingue trois dimensions de l’image de marque :
– L’image perçue, soit la manière dont la cible de communication voit la marque
– L’image vraie est celle que l’entreprise a d’elle-même ; dans ce mémoire il s’agira de la perception de leurs territoires qu’ont les Villes, Agglomérations ou Métropoles qui les mettent en avant.
– L’image voulue, soit la façon dont l’entreprise souhaite être perçue par ses cibles de communication.

On pourrait, de la même façon, faire un parallèle avec les identités d’un territoire, et en reprendre deux : l’identité « réelle » (soit l’image vraie), en quelque sorte la somme approximative de toutes les identités territoriales individuelles, et l’identité « vendue » (soit l’image voulue), à destination des prospects. Il semble que l’ identité « vendue », au contraire de l’identité « réelle » ne puisse pas se permettre d’être multiple. Dans un contexte concurrentiel et pour davantage de clarté auprès des publics cibles, elle doit être unique et définissable en quelques mots. Dès lors, comment le territoire va-t-il déterminer son « identité vendue » ? Quels traits distinctifs et singuliers seront attribués au territoire, et de quelle manière ? Les professionnels du marketing territorial nous proposent des exemples de méthodes concrètes pour déterminer l’identité de son territoire, ainsi que les points singuliers à mettre en avant. Si Joël Gayet avait exposé les composantes de ce qu’il nomme l’identité « sensible » d’un territoire, Vincent Gollain propose une approche de recherche d’identité davantage axée économie.

B. La première campagne de communication d’Alès Agglomération, ou comment un territoire tente-t-il de mettre en avant ses singularités

Afin d’appréhender la manière dont un territoire met en avant ses particularités et ainsi son identité, penchons-nous désormais sur le cas qui constituera notre principal terrain d’étude tout au long de ce mémoire, à savoir les campagnes de mise en avant du territoire d’Alès Agglomération entre 2013 et 2020 compris. J’ai choisi d’étudier les campagnes de promotion de ce territoire pour plusieurs raisons : leur campagne de communication postCovid-19 dans le métro est l’une de celles qui a le plus attiré mon attention, parce que je connaissais seulement la ville de nom, mais je ne savais pas vraiment la situer sur la carte, ni ses principales caractéristiques ; n’ayant aucune idée préconçue sur ce territoire, j’ai jugé intéressant de me pencher dessus, d’autant que sa communication n’a jamais été étudiée dans des articles scientifiques, au contraire de marques territoriales connues, comme « OnlyLyon » ou la marque de la région Bretagne, souvent analysées.

La campagne de 2013 paraît intéressante à étudier puisque c’est la première lancée par l’agglomération, quelques mois seulement après sa création officielle.

Contexte : Alès Agglomération est une communauté d’agglomération dans le département du Gard, créée le 1er janvier 2013, et regroupant les communautés de communes du bassin de vie d’Alès. Cet établissement public de coopération intercommunale (EPCI) a pour objet, selon la définition de l’INSEE, « l’élaboration de projets communs de développement au sein de périmètres de solidarité ». Intégrant au fil du temps six communautés de communes, Alès Agglomération regroupe aujourd’hui 72 communes et 130 000 habitants sur le bassin de vie d’Alès, siège et ville la plus peuplée (40 00 habitants) de l’EPCI. C’est la deuxième agglomération la plus importante du Gard après Nîmes Métropole, et la cinquième plus importante de la région Occitanie. Présidée par Max Roustan, actuel maire d’Alès, de 2013 à 2020, c’est désormais Christophe Rivenq (actuel premier adjoint à la ville) qui dirige Alès Agglomération.

Parmi les compétences de l’agglomération, on retrouve l’aménagement de l’espace, le développement économique, la gestion des déchets, des équipements culturels et sportifs, l’enseignement et la formation, mais aussi le tourisme. La première campagne de communication d’Alès Agglomération à destination du grand public peut d’ailleurs être considérée comme une campagne d’attractivité et de notoriété.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
I. Un territoire a pour ambition de véhiculer des valeurs qui lui sont propres
I.A. Comment peut-on déterminer l’identité d’un territoire ?
I.B. La première campagne de communication d’Alès Agglomération, ou comment un territoire tente-t-il de mettre en avant ses singularités
I.C. La campagne « Je veux Metz ! » en 2010 : un « contre-exemple » ?
II. Face à la concurrence, les marques territoriales se démarquent difficilement
II.A. Quelles sont les cibles de communication visées par les campagnes de promotion du territoire ?
II.B. Une « économie de marché » prégnante
II.C. Un cliché de territoire idéal ?
III. La crise de la Covid-19, un tournant pour la communication territoriale ?
III.A. Une évolution des aspirations des publics cibles ?
III.B. La campagne « post-covid » d’Alès Agglomération, ou comment profiter d’un contexte favorable
III.C. Quel avenir pour les marques territoriales françaises ?
Conclusion
Bibliographie
Annexes
Résumé

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *