Two-Dimensional Superconductivity at Titanium Oxide Interfaces

Oxydes de structure Pérovskite

   Les oxydes de structure Pérovskite représentent une vaste famille de composés aux propriétés extrêmement diversifiées. Leur formule générale est ABO3, A et B représentant des cations. La structure idéale est cubique, les ions B étant situés aux sommets du cube et les anions d’oxygène au centre des arêtes, formant un octaèdre autour de l’ion B. L’ion A est au centre du cube en coordinence 12 avec les oxygènes (figure 1.1).  Chaque cation B est entouré d’un octaèdre d’oxygène. Un des octaèdres est représenté en grisé. La structure est en général fortement ionique, les ions oxygènes portant une charge formelle −2 et les cations une charge formelle vérifiant QA + QB = +6. Le grand nombre de possibilités pour les combinaisons (A, B) diversifie le spectre des propriétés présentes dans la structure Pérovskite. La structure cubique ou pseudo-cubique commune permet également d’élargir ce spectre en facilitant les dopages non stœchiométriques des sites A et B. Parmi les choix possibles pour le composé B, les métaux de transition sont particulièrement intéressants de par leur aptitude à accepter plusieurs degrés d’ionisation, facilitant leur dopage chimique et électrostatique. En particulier, les composés de la première ligne de métaux de transition présentent des phases électroniques fortement corrélées, comme des isolants de Mott ou des isolants de transfert de charge, dues au remplissage des souscouches 3d en environnement octaédrique :
– Pour les métaux situés à gauche du bloc d (comme le titane et le vanadium), l’état électronique est contrôlé par le remplissage des sous-couches t2g qui sont bien séparées des orbitales p des atomes d’oxygène. L’énergie de répulsion Coulombienne U est grande devant la largeur de bande W donnant un état isolant de type Mott (comme par exemple LaTiO3).
– Du coté droit du bloc d, les oxydes de métaux comme le nickel et le cuivre ont de fortes hybridations p − d donnant lieu à des isolants de transfert de charge (comme par exemple LaNiO3 [48]).
– Les dopages chimiques de ces phases électroniques ont montré l’existence de transitions métal-isolant, comme le montre la figure 1.2 (extraite de [41]).

Structure électronique

   Le titanate de strontium est un isolant avec une large bande interdite d’environ 3.2 eV. La bande de conduction est principalement constituée des orbitales t2g du titane (3dxy, 3dyz et 3dxz) alors que la bande de valence provient des orbitales 2p de l’oxygène[75]. L’anisotropie des orbitales t2g donne une géométrie particulière à la bande de conduction. En effet, le recouvrement des orbitales dans le plan de même dénomination (par exemple le recouvrement dans le plan (xy) des orbitales 3dxy) est beaucoup plus grand que dans la direction perpendiculaire (pour le même exemple la direction z) comme schématisé dans la figure 1.5. Il en résulte une anisotropie des masses effectives au point Γ, la masse dans le plan étant petite alors que la masse perpendiculaire est 10 à 20 fois plus grande. Les masses effectives répertoriées dans la littérature varient de 0.5 à 1.5 m0 pour lamasse légère selon les études et les techniques de mesures : la masse mesurée par oscillations quantiques dans du SrTiO3 δ-dopé est de l’ordre de 1.2 à 1.5 m0[61], alors que la masse trouvée par photo-émission résolue en angle de la surface clivée est de 0.5 à 0.7 m0[103, 76].

Conditions de croissance et conductivité

   La croissance des hétérostructures de LaAlO3/SrTiO3 se fait à partir de substrats monocristallins de SrTiO3 orientés [001], dont la surface peut être préparée chimiquement pour sélectionner le plan de terminaison TiO2 ou SrO. Les substrats traités montrent des terrasses atomiquement planes de quelques centaines de nanomètres de large et d’une unité cellulaire de hauteur. La croissance se fait ensuite par ablation laser pulsée (en anglais Pulsed Laser Deposition ou PLD) [91]. Depuis la découverte du gaz d’électrons à l’interface LaAlO3/SrTiO3, plusieurs propriétés importantes ont été montrées :
– Le comportement électronique des interfaces n’est pas symétrique par rapport à la terminaison du substrat de SrTiO3, les interfaces partant d’une couche SrO (dites p) s’étant révélées isolantes alors que celles terminées TiO2 (dites n) sont métalliques.
– La pression en oxygène pendant la croissance est un paramètre crucial qui contrôle les propriétés électroniques de l’interface : les couches épitaxiées sous très basse pression d’oxygène (< 10−5 mbar) sont très conductrices et métalliques jusqu’à basse température, alors que les couches épitaxiées sous des pressions plus élevées ont des résistances plus grandes et un comportement de localisation faible à basse température, comme le montre la figure 1.8 (extraite de [17]). Des mesures de la topographie de la résistivité par AFM à pointe conductrice sur la tranche d’une hétérostructure ont montré que dans le premier cas, la zone conductrice s’étend sur plusieurs centaines de nanomètres dans le SrTiO3, la conduction étant vraisemblablement liée à un dopage en masse par lacunes d’oxygène[6]. Dans le second cas, la zone conductrice est localisée sur quelques nanomètres et présente un caractère bi-dimensionnel.

Origine du gaz : la catastrophe polaire

   Le modèle de catastrophe polaire est l’un des modèles proposés pour expliquer l’origine du gaz d’électrons[84]. L’interface entre LaAlO3 et SrTiO3 peut être décrite comme un empilement de couches atomiques de TiO2 et de SrO puis de AlO2 et de LaO. Chaque plan dans le SrTiO3 est intrinsèquement neutre : dans les plans TiO2, les ions de titane portant une charge formelle 4+ compensent les deux charges 2− des ions d’oxygène ; et dans les plans SrO, la charge 2+ des ions de strontium compensent celle des ions d’oxygène. En revanche, la neutralité électrique n’est pas conservée plan par plan dans le LaAlO3 : les plans AlO2 sont chargés −1 et les plans LaO sont chargés +1, la neutralité est donc seulement conservée à l’échelle de la cellule élémentaire. Il y a donc, à l’interface LaAlO3/SrTiO3 un saut de polarité, positif ou négatif suivant la terminaison SrO ou TiO2 du substrat de SrTiO3. D’après les lois fondamentales de l’électrostatique, il y a donc une croissance du potentiel électrique à mesure que le nombre de couches polarisées augmente, comme illustré dans la figure 1.9 (extraite de [84]). La croissance du potentiel est défavorable énergétiquement et le système contourne ce problème en compensant le saut de polarité.

LaTiO3/SrTiO3

   La croissance des échantillons de LaTiO3/SrTiO3 a été effectuée par A. Kushwaha, A.Rastogi, et R.C. Budhani (Indian Institute of technology, Kanpur, Inde) par déposition laser pulsée (PLD) avec un laser excimer. La croissance se fait à partir de monocristaux de SrTiO3 accessibles commercialement (CrysTec GmbH Allemagne). Les cristaux orientés (001) ont reçus un traitement d’acide fluorhydrique tamponné pour exposer une terminaison TiO2 [65]. Les substrats sont ensuite collés sur le porte-échantillon chauffant de l’appareil de PLD et chauffés entre 850 et 900˚C sous une atmosphère de 0.260 mbar (200 mTorr) d’oxygène pour réaliser la reconstruction de surface. La source de LaTiO3 est un bloc de 22 mm de diamètre de LaTiO3 stœchiométrique. L’ablation laser a été effectuée sous une pression partielle d’oxygène de 1.3 × 10−4 mbar (10−4 Torr) avec une énergie de ∼ 1 J/cm2 par impulsion à une fréquence de répétition de 3 Hz pour réaliser un taux de croissance de 0.12 Å/s. La caractérisation par rayons-X montre la bonne croissance de la phase LaTiO3 sur le substrat de SrTiO3 (figure 2.1). L’épaisseur de la couche de LaTiO3 des échantillons est nominalement donnée par le taux de croissance et le temps de déposition. Un échantillon de 10 u.c. a été caractérisé par microscopie électronique à transmission (TEM) par F. Pailloux et J. Pacaud (Institut Pprime, UPR3346 CNRS/Université de Poitiers, France). Les clichés TEM (figure 2.2 ) montrent également que la croissance est épitaxiale et que la rugosité de l’interface est d’environ une maille élémentaire. En revanche la surface et l’épaisseur de LaTiO3 semblent inhomogènes.

LaAlO3/SrTiO3

   Les échantillons de LaAlO3/SrTiO3 ont été également épitaxiés par PLD par N. Reyren et E. Lesne dans l’équipe d’A. Barthélémy et M. Bibes(UMR CNRS-Thalès, Palaiseau, France). Les substrats de SrTiO3 orientés (001) (Crystec ou SurfaceNet) ont reçu un traitement d’acide fluorhydrique et de recuit, comme décrit précédemment, pour exposer les terrasses de TiO2. Le substrat est maintenu à une température de 730˚C pendant la croissance. La source de LaAlO3 est un monocristal ablaté par un laser excimer KrF (248 nm) à une fréquence de répétition de 1 Hz et une énergie de fluence comprise entre 0.6 et 1.2 J/cm2 . La croissance est effectuée sous une atmosphère d’oxygène de 2 × 10−4 mbar. Le suivi en temps réel par RHEED (diffraction par réflexion d’électrons à haute énergie) permet de contrôler la croissance qui s’effectue couche par couche à la maille élémentaire près. La source est à environ 57 mm du substrat, ce qui donne une vitesse de croissance d’environ 0.2 Å/s. Après la croissance du film, l’échantillon est refroidi à 500˚C sous une pression d’oxygène de 0.1 mbar. À cette température la pression d’oxygène est augmentée jusqu’à 400 mbar puis maintenue pendant 30 minutes pour réduire la présence de lacunes d’oxygène. L’échantillon est ensuite refroidi à température ambiante. Les clichés par microscopie à force atomique (AFM) de la surface avant et après déposition (Figure 2.3) montrent des marches dont la hauteur correspond à une maille élémentaire de SrTiO3. La largeur des terrasses est typiquement de 300 nm ce qui correspond à un défaut d’angle de polissage de la surface de moins de 0.1 degré.

Suppression des porteurs de haute mobilité à grille négative

   L’application d’une tension électrostatique entre le gaz d’électrons et une électrode (grille) métallique permet de contrôler la densité de porteurs dans le gaz par effet capacitif, le gaz lui-même faisant office d’électrode du condensateur. La grille métallique évaporée au dos du substrat de SrTiO3 (voir chapitre 2) permet donc de contrôler la densité du gaz en utilisant le substrat comme diélectrique. Dans cette géométrie, un échelon positif de tension de grille ajoute des électrons dans le gaz, alors qu’un saut négatif retire des électrons. Nous nous intéresserons tout d’abord aux propriétés de transport du gaz en fonction de la tension de grille en partant d’une grille positive maximale (VG = +200 V) vers les tensions de grille négatives pour diminuer la densité de porteurs. La première application à froid d’une tension de grille est en effet un phénomène à part décrit dans la prochaine sous-section. La figure 3.6 montre les mesures de résistance à basse température de l’échantillon LTO-15ucAxx à différentes tensions de grilles, en partant de la tension maximale VG = +200 V. La résistance augmente lorsque la tension de grille est diminuée, ce qui est, en première approximation, signe que la densité de porteurs du gaz diminue, conformément au modèle électrostatique de charge du condensateur. La supraconductivité aux basses températures est également contrôlée par la tension de grille, l’état fondamental étant supraconducteur à tensions de grille positives et isolant (état métallique localisé) à tensions de grille négatives. L’étude de la transition supraconducteur-isolant sera détaillée au chapitre 4. La figure 3.7 récapitule les données de résistance dans l’état normal (450 mK) et la température critique de supraconductivité, définie ici comme étant la température à laquelle la résistance à chuté de 15% par rapport à l’état normal. Un comportement singulier au voisinage de VG = 0 V apparaît clairement sur la courbe de résistance et semble concomitant avec la disparition de la supraconductivité (la disparition de la supraconductivité sera traitée dans le chapitre 4). Un tel comportement de la résistance avec la tension de grille ne peut s’expliquer par un simple modèle de Drude prenant en compte la variation de densité de porteurs avec la tension de grille.

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Table des matières

Introduction
1 Oxydes et Hétérostructures 
1.1 Oxydes de structure Pérovskite 
1.1.1 Titanate de strontium : SrTiO3
Structure
Paraélectrique quantique et ferroélectricité incipiente
Structure électronique
SrTiO3 dopé et supraconductivité
1.1.2 Titanate de lanthane : LaTiO3
Structure cristalline
L’isolant de Mott
Antiferromagnétisme
1.1.3 Aluminate de lanthane : LaAlO3
1.2 Hétérostructures d’oxydes 
1.2.1 LaAlO3/SrTiO3
Conditions de croissance et conductivité
Origine du gaz : la catastrophe polaire
Propriétés électroniques du gaz d’électrons
1.2.2 LaTiO3/SrTiO3
1.2.3 Autres hétérostructures à base de SrTiO3
LaGaO3/SrTiO3
LaVO3/SrTiO3
GdTiO3/SrTiO3
1.2.4 La surface de SrTiO3
SrTiO3 irradié en surface
SrTiO3 dopé en surface par électrode à liquide ionique
2 Partie Expérimentale 
2.1 Croissance et préparation des échantillons 
2.1.1 LaTiO3/SrTiO3
2.1.2 LaAlO3/SrTiO3
2.1.3 Préparation des échantillons
2.2 Systèmes de mesures
2.2.1 Mesures de Résistivité
2.2.2 Mesures de Capacité
2.2.3 Cryostats utilisés
Cryostat à dilution
Mesures en champ magnétique pulsé
Mesures en angle (PPMS)
3 Étude et contrôle électrostatique de l’état normal 
3.1 Résistivité et nombre de porteurs
3.1.1 Comportement de type liquide de Fermi
3.1.2 Effet Hall et densité de porteurs
3.1.3 Effet Hall à haut champ magnétique
3.2 Contrôle électrostatique du nombre de porteur et irréversibilité 
3.2.1 Suppression des porteurs de haute mobilité à grille négative
Effet Hall à haut champ magnétique
Mesure de capacité et densité de porteur totale
Comportement en température
Anisotropie
3.2.2 Irréversibilité lors de l’application d’une grille positive
Saturation apparente de la résistance et de la densité de porteur
Asymétrie de polarisation
Étude de la dynamique de fuite des électrons
Modèle de fuite thermique des électrons
Validation expérimentale du modèle
Irréversibilité à l’interface LaAlO3/SrTiO3
3.3 Modèle de courbure de la bande de conduction du SrTiO3
Position du problème
Résolution numérique
Importance des charges piégées
Résultats des calculs
Discussion
4 Supraconductivité 
4.1 Supraconductivité bi-dimensionnelle 
4.1.1 Analyse BKT de la transition supraconductrice
4.1.2 Analyse BKT-GL et inhommogénéités
4.1.3 Saut de densité superfluide
4.2 Contrôle électrostatique de la transition supraconductrice
4.3 Transition de phase quantique supraconducteur-isolant et comportement critique
4.3.1 Les transitions de phase quantique
4.3.2 Application à la transition en champ magnétique
Tensions de grille positives
Tensions de grille négatives
Diagramme de phase des champs critiques
Scénario de flaques supraconductrices
4.3.3 Transition quantique induite par la tension de grille
5 Couplage Spin-Orbite 
5.1 Localisation faible 
5.1.1 Rupture du comportement semi-classique à basse température
5.1.2 Interférences quantiques et rétro-diffusion
5.1.3 Comportement en température
5.2 Magneto-transport 
5.2.1 Magnétorésistance des métaux
5.2.2 Magnétorésistance en régime de localisation faible
5.2.3 Influence du couplage spin-orbite
5.2.4 Magnéto-transport mesuré en fonction de la tension de grille
5.2.5 Origine du couplage spin-orbite
Relaxation de type Elliot-Yafet
Relaxation de type D’Yakonov-Perel’
Rashba
5.3 Dépendance angulaire de la magnétorésistance 
5.4 Résumé et conclusions sur la magnétorésistance
Conclusions et Perspectives
Bibliographie

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