Travaux antérieurs sur le dépistage du cancer du sein

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Histoire naturelle du cancer du sein

Ľ histoire naturelle ď un type de cancer a pour objectif de reconstituer son évolution depuis sa naissance jusqu’à son émergence clinique, puis celle de ses métastases [4]. Connaître le risque de progression des différentes lésions identifiées permet d’améliorer les traitements existants et de les adapter aux besoins de la patiente, de comprendre jusqu’à quel point ces lésions doivent être investiguées et de contribuer au développement des stratégies de dépistage de masse [5]. L’évènement le plus important de cette longue histoire est la dissémination métastatique à distance. En effet, avant qu’elle ne survienne, le cancer est une maladie locorégionale curable par un traitement local: chirurgie ou radiothérapie; après qu’elle a eu lieu, le cancer est devenu une maladie généralisée dont le traitement est beaucoup plus aléatoire. Une caractéristique essentielle de ľ histoire naturelle d’un type de cancer est donc la taille de la tumeur primitive au moment de la dissémination [4]. Les cancers du sein sont majoritairement des adénocarcinomes et majoritairement des carcinomes intra-canalaires, parfois lobulaires. Leur développement est d’abord in situ, puis invasif, puis métastasé. Dans 90 % des cas, le cancer du sein est découvert lors d’un dépistage, et dans 10 % des cas, par un examen clinique faisant suite à des signes d’appel : masse palpable, écoulement unipore sérosanglant mamelonnaire, maladie de Paget du mamelon [6]. Malgré les progrès qui ont permis de mieux connaître les mécanismes de développement des cancers, les causes du cancer du sein ne sont actuellement pas connues. Néanmoins les études ont mis en évidence certains facteurs de risque.

Prévention primaire

La lutte contre certains facteurs de risque du cancer du sein sur lesquels il est possible d’agir et une prévention intégrée efficace des maladies non transmissibles favorisant une alimentation saine, l’exercice physique et la lutte contre la consommation d’alcool, le surpoids et l’obésité pourraient avoir un impact et réduire l’incidence du cancer du sein à long terme [1].

Dépistage

En 1951, Lors de la Conférence qui s’est tenue aux États-Unis sur les aspects préventifs des maladies chroniques, la Commission des maladies Chroniques a défini le dépistage comme : « L’identification présomptive de maladies non reconnues ou déclarées au moyen de tests, d’examens ou autres méthodes pouvant être appliqués rapidement. Les tests de dépistage doivent permettre de distinguer les personnes apparemment en bonne santé qui sont probablement malades des personnes non malades. Un test de dépistage n’est pas destiné à être un test de diagnostic. Les personnes avec un test de dépistage positif doivent s’adresser à leur médecin pour le diagnostic et la mise en place des traitements nécessaires » [7].
Le dépistage s’adresse à une population cible identifiée asymptomatique de la pathologie recherchée. Le processus permet d’identifier [8,9] :
une anomalie préclinique ;
une maladie à un stade précoce ;
des facteurs (marqueurs) de risque d’une maladie.
Pour que le dépistage d’une maladie soit approprié [10]:
sa prévalence doit être élevée parmi la population cible ;
elle doit être suffisamment grave et l’administration d’un traitement à un stade précoce devrait être plus bénéfique en terme de réduction de la morbidité, de l’invalidité et de la mortalité ;
les moyens de diagnostic et de traitement doivent être disponibles et adaptés ;
son histoire naturelle connue et elle doit avoir un temps de latence important ou une phase asymptomatique ;
le test de dépistage doit être acceptable par la population.
Dans le cadre des cancers, le dépistage est une action de prévention secondaire dont l’objectif est de diminuer la prévalence de la maladie en agissant au tout début de l’apparition du trouble ou de la pathologie [11].
Bien qu’une certaine réduction des risques puisse être obtenue grâce à la prévention, les stratégies en ce sens ne peuvent permettre d’éliminer la majorité des cancers du sein qui surviennent dans les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire. Par conséquent, un dépistage précoce afin d’améliorer l’issue de la maladie et les chances de survie reste le principal moyen de lutter contre le cancer du sein [12].
Il existe deux méthodes de dépistage précoce :
le diagnostic précoce ou la reconnaissance des premiers signes et symptômes dans les populations présentant certains symptômes, afin de faciliter le diagnostic et un traitement à un stade précoce, et
le dépistage qui est l’exécution systématique d’un test de dépistage dans une population normalement asymptomatique. Il vise à trouver les individus porteurs d’une anomalie évocatrice d’un cancer.
Quelle que soit la méthode de dépistage précoce utilisée, le succès d’un dépistage précoce dans la population repose essentiellement sur une planification rigoureuse et un programme bien organisé et durable qui vise le bon groupe de population et veille à la coordination, à la continuité et à la qualité des interventions pendant toute la durée des soins [13].

Auto-examen des seins

Il n’existe pas de preuve de l’effet du dépistage moyennant l’auto examen des seins (AES). Toutefois, on a pu constater que la pratique de l’auto-examen, ou palpation, des seins permet aux femmes de se responsabiliser et de prendre en charge leur propre santé. Par conséquent, l’auto-examen est recommandé pour sensibiliser les femmes à risque plutôt que comme une méthode de dépistage [1].

Mammographie

La mammographie est la seule méthode de dépistage aux résultats tangibles. Elle permet de réduire la mortalité par cancer du sein de 20 à 30% chez les femmes de plus de 50 ans des pays à revenu élevé lorsque le taux de dépistage est supérieur à 70% [14].
Le dépistage par mammographie est très complexe et demande d’importantes ressources, et aucune recherche n’a été menée quant à son efficacité dans les pays où les ressources sont limitées.

Echographie

Elle permet de caractériser plus précisément la nature d’une lésion repérée par la mammographie. L’indication d’une échographie bilatérale systématique dépend de la densité du sein (non contributive pour une classe de densité 1 correspondant à un sein en involution graisseuse). L’analyse conjuguée des images mammographiques et échographiques permet d’orienter le diagnostic vers une anomalie bénigne (par exemple un kyste) ou vers une tumeur maligne. Par ailleurs, une exploration échographique axillaire est faite systématiquement et dans le même temps que l’échographie mammaire diagnostique ou lors de la biopsie tumorale mammaire [6].

Travaux antérieurs sur le dépistage du cancer du sein

L’étude FADO-sein sur les facteurs d’adhésion au dépistage organisé du cancer du sein en France a analysé les caractéristiques, tant sociodémographiques que d’accès aux soins, associées à la participation ou non au dépistage organisé ainsi qu’au dépistage individuel. Il est ressorti de cette étude que les facteurs de participation des femmes au dépistage du cancer du sein sont essentiellement ceux en relation avec le suivi médical, en particulier du suivi gynécologique et l’accès aux soins. Deux biais peuvent être évoqués dans l’étude. Le premier est le biais de non-réponse qui a vraisemblablement exclu les femmes les plus précaires et/ou les moins intéressées par le dépistage. Le deuxième est inhérent à toute étude déclarative par auto-questionnaire qui conduit à une sur déclaration de la pratique de dépistage. Une deuxième limite de l’étude est la difficulté pour les femmes à différencier une mammographie de dépistage d’une mammographie de suivi ou de diagnostic, puisque le nom de l’examen est le même. Là encore, cela ne concerne dans l’étude que les femmes en dehors du dépistage organisé et peut conduire à sous-estimer les relations mises en évidence [15].
Le niveau socio-économique individuel a été décrit par la plupart des études comme un déterminant majeur de la participation au dépistage du cancer du sein : plus le niveau socio-économique est bas, moins les femmes ont recours à la mammographie [15-19].
Certains chercheurs ont adapté au dépistage du cancer du sein les théories de changement du comportement. Ainsi, des associations ont été montrées entre le stade de changement du comportement du modèle transthéorique et la participation au dépistage du cancer du sein [20,21]. D’autres auteurs ont montré que le « health belief model » ou modèle des croyances liées à la santé pouvait être appliqué à la pratique du dépistage du cancer du sein : les femmes qui avaient une perception de la gravité du cancer du sein et de leur susceptibilité à en être atteinte plus grande participaient plus fréquemment au dépistage du cancer du sein [22,23].

CADRE CONCEPTUEL

Le cadre conceptuel s’est appuyé sur le modèle théorique d’Andersen (1995), qui est une approche par les besoins. Ce modèle explique le processus conduisant les individus à utiliser les services de santé. Andersen distingue trois catégories de facteurs, que sont les facteurs prédisposant (démographiques), les facteurs de capacité (socio-économiques) et les besoins de soins de santé [24].
Le modèle peut se résumer ainsi : pour que l’utilisation des services de santé ait lieu : l’utilisateur potentiel doit être prédisposé à recevoir les soins de santé; il doit y avoir des conditions facilitant ou inhibant l’accessibilité du service au patient et, le patient doit sentir le besoin de recourir aux services.
Les variables prédisposant au recours au dépistage du cancer du sein sont les caractéristiques sociodémographiques (âge, situation matrimoniale, niveau d’instruction, milieu de résidence) des femmes, leurs connaissances ou attitudes sur le cancer du sein. Cependant, ces variables ne seraient pas directement responsables de recours au dépistage car, même si un individu est prédisposé à se faire dépister, d’autres facteurs peuvent l’en empêcher. C’est ce que les auteurs nomment « ressources ». Parmi eux, on trouve le niveau socio-économique, l’existence d’une source de revenu, l’accessibilité géographique (temps et distance) par rapport aux services de santé, l’accès à l’information sur le cancer du sein et tous les autres éléments qui peuvent faciliter ou empêcher les femmes de recourir au dépistage. En outre, le modèle stipule que, pour qu’il y ait utilisation des services de santé, l’individu doit ressentir le besoin. À la suite d’Andersen et Newman, Brodeur donne deux dimensions aux besoins : la dimension du problème perçu ou ressenti par l’individu et la dimension du problème diagnostiqué ou évalué en fonction des normes de pratiques. Par besoins ressentis de soins, il entend « les moyens préventifs, curatifs et de réadaptation nécessaires à un individu ou une population pour atteindre l’état de santé idéal [25].

QUESTIONS DE RECHERCHE

Quelle est la proportion de femme qui a recours au dépistage du cancer sein dans la région de Thiès?
Quels sont les déterminants du recours au dépistage du cancer sein dans la région de Thiès?

JUSTIFICATION DE L’ETUDE

Le cancer du sein est une pathologie fréquente surtout dans les pays en voie de développement. Elle est grave de par sa mortalité et les mutilations qu’elle occasionne (source de séquelles psychologiques chez les femmes). Le diagnostic est souvent tardif du fait de l’absence de dépistage précoce. Il n’existe pas beaucoup d’études au Sénégal sur le cancer du sein notamment sur les déterminants liés au recours au dépistage d’où l’intérêt de notre étude.

OBJECTIFS DE RECHERCHE

Objectif général

L’objectif général était d’étudier les déterminants du recours au dépistage du cancer du sein chez la population féminine de la région de Thiès.

Objectifs spécifiques

Les objectifs spécifiques étaient de : décrire les caractéristiques sociodémographiques des femmes de la région de Thiès mesurer les connaissances des femmes sur le cancer du sein déterminer les attitudes des femmes sur le cancer du sein déterminer le taux de recours au dépistage du cancer du sein dans la région de Thiès analyser la qualité de soins dans la région de Thiès identifier les facteurs influençant le recours au dépistage du cancer du sein dans la région de Thiès.

CADRE D’ETUDE

Ce chapitre est consacré à une présentation de la région de Thiès à travers sa géographie, son économie, sa population et sa politique en matière de santé.

Aspects sociodémographiques

Selon les données issues du RGPHAE de 2013, la population de la région se chiffre à 1.788.864 habitants contre 1.331.916 en 2002 (RGPH) et 941.151 en 1988. C’est la troisième région la plus densément peuplée (271 hts/Km2) après Dakar (5404 hts/Km2) et Diourbel (294 hts/Km2). Thiès est la seconde région la plus urbanisée après Dakar. Avec un taux d’urbanisation de 48,8%, elle concentre 14,3 % de la population urbaine du Sénégal. Cette population est inégalement répartie sur le territoire avec les départements de Mbour et de Thiès, qui sont des pôles d’attraction (tourisme, pêche, transport et services), concentrent près de 74% de la population de la région tandis que seuls 25 % résident dans le département de Tivaouane qui fait un peu plus de la moitié du territoire de la région.
La région bénéficie d’une population jeune. En effet, un peu plus de la moitié de la population (52,3%) est âgé de moins de 19 ans, dont 27,2% se trouvent dans la tranche d’âge allant zéro (0) à cinq (5 ans). Suivant le sexe, la population est composée de 50,1% d’hommes et 49,9% de femmes.
Le taux de natalité au niveau régionale est estimé à 34,1‰. Autrement dit sur 1.000 habitants en moyenne, on enregistre 34 naissances vivantes au cours de l’année. Thiès fait partie des régions qui ont les plus faibles taux de mortalité avec 6,6‰, ce qui est inférieur à la moyenne nationale (7,7‰) [26].

Aspects sanitaires

La région de Thiès dispose d’un système sanitaire relativement pourvue en matière d’infrastructures (elle se situe juste après Dakar). On note une certaine évolution du nombre d’infrastructures depuis 2001 due aux constructions effectuées par l’Etat et ses partenaires notamment la Banque Mondiale et l’OMS. La région compte 03 Etablissements Publics de Santé, 02 établissements hospitaliers privés, 09 Districts / Centres de santé, 01 Centre Psychiatrique Dalal Xèl, 152 Postes de santé publics, 17 Postes de santé privés, 331 Cases de santé fonctionnelles, 26 Cabinets médicaux privés, 32 Cabinets de Soins Infirmiers Privés, 165 Officines privées de pharmacie et 10 Cliniques privées [27]. Néanmoins, la situation reste déficitaire dans tous les niveaux sanitaires par rapport aux normes imposées par l’OMS.

Définition opérationnelle des variables

 Variable dépendante
La variable dépendante était le dépistage du cancer du sein qui est composé de deux modalités : «oui» pour les enquêtées qui l’ont déjà pratiqué et «non» pour celles qui n’en ont jamais eu recours.
 Variables indépendantes
— l’instruction : dans notre étude sont considérées comme instruites les femmes ayant pratiqué l’enseignement scolaire formel. Elle est composé de deux modalités : «instruite» et «non-instruite»;
— Le niveau de scolarisation avec la modalité « instruite » qui intègre les niveaux «primaire», «secondaire» et «supérieur» et la modalité « non-instruite» qui prend en compte les non scolarisées. n= (Ɛ²*p*q)/i².
— la situation matrimoniale qui est composée de quatre modalités : «célibataire», «mariée», «divorcée» et «veuve»;
— Le milieu de résidence qui était soit «urbain» ou «rural»;
— le niveau socioéconomique: il a été construit en se basant sur l’indice de bien-être économique. Cet indice est construit à partir des données sur les biens des ménages. Les informations sur les biens des ménages proviennent des réponses aux questions relatives à la possession par les ménages de certains biens durables (la télévision, la radio ou la voiture, etc.) et celles concernant certaines caractéristiques du logement comme la disponibilité de l’électricité, le type d’approvisionnement en eau de boisson, le type de toilettes, le matériau de revêtement du sol, le type de combustible pour la cuisine, etc. Des scores ont été attribués à chacun des biens et la somme des scores par ménage a été faite. Les ménages sont classés par ordre croissant de score total et divisés en 4 catégories appelées quartiles. On établit ainsi une échelle allant de 1 (quartile le plus pauvre) à 4 (quartile le plus riche). Les femmes sont ainsi réparties dans les différentes catégories : «plus pauvre», «pauvre», «riche» et «plus riche»;
— la qualité des soins: désigne l’appréciation que les enquêtées ont des services qui leurs sont offertes dans les structures de santé. Elle s’appréciera subjectivement suivant l’accueil, le temps d’attente, les conseils et la prise en charge.
Une échelle de type Likert à trois niveaux sera utilisée pour apprécier la qualité des soins : « Satisfaite », « Peu satisfaite » et « Pas satisfaite ».

Recodage des variables

Certaines variables ont été recodées en variables dichotomiques pour pouvoir les comparer à la variable dépendante «dépistage du cancer du sein» :
— l’âge de la femme a été répartie en deux classes : « ≤ moyenne » et « > moyenne »
— la situation matrimoniale a été recodée en « en union » pour les femmes mariées et « libre » pour les autres modalités de la variable;
— le niveau socioéconomique a été recodé « élevé » pour riche et plus riche, et « bas » pour pauvre et plus pauvre;
— l’accessibilité géographique en termes de temps a été recodée en « court » pour une durée de moins d’une heure et « long » pour une heure ou plus.
— les variables liées à la qualité des soins (accueil, temps d’attente, prise en charge, conseils) ont été recodées chacune en deux modalités : satisfaite a été considérée comme une qualité de service « satisfaisante », tandis que peu satisfaite et pas satisfaite ont été considérées comme une qualité de service « insatisfaisante ».

Collecte des données

 Technique et outil de collecte
La collecte des données s’était faite par un entretien individuel avec les femmes âgées de 35 à 65 ans à leurs domiciles par des enquêteurs formés avec l’aide d’un questionnaire destiné aux femmes. Les données recueillies portaient sur les caractéristiques personnelles des femmes, les connaissances, attitudes et pratiques sur le cancer du sein et sur la qualité de soins.
 Déroulement de l’enquête
L’enquêteur identifiait le centre sociologique du quartier/village correspondant à la grappe à visiter dans l’aire de santé et numérotait toutes les directions. Il choisissait ensuite de manière aléatoire une direction. La sélection de la première concession à enquêter était effectuée par la méthode de la bouteille. Après avoir sélectionné la première concession, l’enquêteur sélectionnait les prochaines concessions par saut de 5. Lorsque le nombre de grappe n’était pas atteint, l’enquêteur retournait chaque fois à droite et le processus était effectué comme décrit ci-dessus jusqu’à épuiser toutes les directions.

Analyse des données

Les logiciels Epi Info version 3.5.3 [28] et R version 3.1.3 [29] ont été utilisés pour cette analyse. Nous avons, dans un premier temps, procédé à une description des variables. Ensuite nous avons recherché un lien entre les différentes variables. Enfin, nous avons déterminé les facteurs associés au recours au dépistage du cancer du sein.
 Etude descriptive
Des calculs de fréquences avec un intervalle de confiance à 95% ont été effectués avec les variables qualitatives. Pour les variables quantitatives, les moyennes, les écart-type, les extrêmes ont été calculés.
 Etude analytique
Le test de Khi2 a été utilisé pour la comparaison des proportions avec un seuil de signification à 5%. Ainsi, dans les tableaux de croisement, quand toutes les valeurs théoriques étaient supérieures à 5, le khi2 de Pearson avait été utilisé. Quand au moins une des valeurs théoriques était inférieure à 5, le test non paramétrique de Fisher avait été utilisé. Une différence a été trouvée statistiquement significative lorsque le p est inférieur à 0,05. L’odds ratio, entouré de son intervalle de confiance donne et quantifie la force du lien.
Ensuite, toutes les variables avec un p-value inférieur à 0,25 [30] ont été incluses dans la modélisation par une régression logistique multiple pour étudier l’importance relative des facteurs associés au recours au dépistage du cancer du sein. Dans les modèles, les effets étaient mesurés par les odds ratio avec leurs intervalles de confiance, par le test de Wald pour la significativité dans les différentes catégories de la variable et le Lr test (rapport de vraisemblance) pour la significativité globale de la variable. Ainsi, dans le modèle de régression logistique retenu, toutes les variables avec un p inférieur à 5% ont été considérées comme déterminants du recours au dépistage du cancer du sein.

CONSIDERATIONS ETHIQUES

Le consentement des personnes enquêtées a été préalablement acquis. Les enquêtées ont été informées des objectifs et des contraintes de l’étude, de leurs droits de refuser de participer à l’étude ou de la quitter à tout moment. L’anonymat et la confidentialité étaient respectés.

DISCUSSION

L’enquête intéressait 960 femmes âgées de 35 à 65 ans de la région de Thiès. Le taux de dépistage du cancer du sein était de 25,7% chez ces femmes au moment de l’enquête.
Le niveau de scolarisation, le milieu de résidence, la connaissance des facteurs de risque du cancer du sein, la connaissance de l’autopalpation, la connaissance sur la guérison de la maladie, le niveau socioéconomique et les conseils de dépistage avaient un effet significatif sur le recours au dépistage du cancer du sein.
 Taux du dépistage du cancer du sein
Dans notre étude, 25,7% des enquêtées avaient déjà fait le dépistage. L’enquête CAP sur le cancer du sein dans une population féminine sénégalaise (SAGO 2008) a montré un taux de dépistage à 29% [3]. La prévalence du dépistage du cancer du sein semble être basse dans la région de Thiès. Ce faible taux pourrait être lié à un défaut de sensibilisation mais aussi une conséquence de l’asymétrie d’information dans notre système de santé car beaucoup de femmes ont pu bénéficier d’un examen des seins sans savoir qu’il s’agissait d’un dépistage.
 Caractéristiques individuelles Notre étude a établi un lien statistiquement significatif entre l’instruction et le recours au dépistage du cancer du sein. En effet la prévalence du dépistage chez les femmes instruites était presque deux fois supérieure à la prévalence chez les non instruites (OR = 1,89; IC à 95% : [1,25 à 2,85]). Ce résultat est similaire à celui de l’étude sur les déterminants comportementaux de dépistage du cancer du sein aux Émirats arabes unis en 2002 [32], également identique à celui de l’étude nigériane sur les connaissance, attitude et pratique des femmes face au cancer du sein en 2006 (OR = 3,56 ; [IC à 95% : 2,58-4,92) [33] et à celui de l’étude SAGO au Sénégal en 2008 (p=0,000) [3]. Dans ce sens plusieurs hypothèses ont été émises selon lesquelles les individus ayant bénéficiés d’une instruction formelle accorderaient une plus grande attention aux risques sanitaires et seraient plus ouverts à l’innovation et aux progrès technologiques.
Le milieu de résidence était en relation avec le recours au dépistage. Les femmes résident en milieu urbain avaient plus tendance à recourir au dépistage que les femmes rurales (OR = 1,79; IC à 95% : [1,05 à 3,04]). Cette différence pourrait s’expliquer par le fait que les centres urbains sont assimilés à des zones des riches et les centres ruraux à ceux des pauvres suivant le niveau socioéconomique.
Les femmes de la région de Thiès semblent bien connaitre le cancer du sein. En effet 97,9% des femmes enquêtées connaissaient la maladie. L’autopalpation était connue par 69,3% des femmes. Une enquête CAP sur le cancer du sein menée dans une population féminine sénégalaise (SAGO 2008) a montré un taux de connaissance de l’autopalpation à 42,7 % [3].Ce niveau de connaissances peut être expliqué par la forte urbanité, le développement des réseaux communautaires, l’essor économique que la région a connu en un moment de son évolution. Ainsi les ménages ont accès à l’information via les sources audio-visuelles.
La prévalence du dépistage était plus élevée chez les femmes connaissant au moins un facteur de risque du cancer du sein (OR = 7,70; IC à 95% : [5,58 à 10,62]). Ceci peut s’expliquer par le fait que ces femmes avaient meilleure connaissance des risques qu’elles encouraient. Ces résultats corroborent avec ceux de l’enquête SAGO (p<0,05) [3].
Le recours au dépistage était fortement lié à la connaissance de l’autopalpation. En effet, les femmes qui connaissaient l’autopalpation avaient 11 fois plus de chances d’avoir fait le dépistage. Les femmes qui percevaient que le cancer du sein était curable avaient moins tendance à recourir au dépistage (OR= 0,34 [0,23-0,50]). Cela pourrait s’expliquait par le fait que ces femmes considèrent que le cancer du sein est une maladie bénigne, et par crainte de l’angoisse de se savoir malade alors qu’on est en bonne santé apparente, elles préfèrent attendre que la maladie manifeste pour recourir aux soins.
L’âge n’influençait pas la pratique du dépistage. Il en est de même pour la situation de couple. Des résultats similaires ont été obtenus dans l’étude SAGO 2008 contrairement à l’étude FADO-sein dont les résultats affirment l’augmentation du dépistage chez les femmes en couple (OR = 1,3; IC à 95% : [1,0 à 2,0]) [15].
 Ressources des femmes Le niveau socioéconomique influençait le dépistage. Les femmes ayant un niveau socioéconomique bas étaient moins enclines à se faire dépister (OR=0,66; IC à 95% : 0,45 à 0,97). Ce lien a été établi par plusieurs études notamment l’étude FADO-sein sur les facteurs d’adhésion au dépistage organisé du cancer du sein en France. L’hypothèse émise était que les femmes ayant un bon niveau socioéconomique auraient moins de contraintes financières à accéder aux soins et se faire dépister [15] que celles ayant un niveau socioéconomique bas. Il en est de même pour l’octroi de conseils de dépistage de la part des professionnels de santé. En effet, les femmes ayant bénéficié de conseils de dépistage avaient plus tendance à se faire dépister (OR = 4,18; IC à 95% : 2,81 à 6,23) probablement parce que ces femmes seraient plus motivé à s’engager dans ce processus de se responsabiliser dans la prise en charge de leur propre santé. Dans la population de femmes étudiée, 78,5% avaient été informés par le canal de la télévision entre autres sources. La télévision constitue ainsi une source d’information très importante. Ces résultats corroborent avec ceux de l’enquête SAGO qui montre que 52,9% des femmes étaient informées sur le cancer du sein par le canal de la télévision [3].
 Besoins de santé
La prévalence du recours au dépistage n’était pas liée à la satisfaction de la qualité des soins; ce qui va à l’encontre des données empiriques qui affirment que la qualité de l’offre est un déterminant du recours au système de soins. Ce résultat peut être la conséquence d’un biais inhérent à toute étude déclarative qui entraine une sur déclaration de satisfaction.
 Limites de l’étude
Plusieurs limites sont à noter dans cette étude notamment qu’elle n’a pas permis d’identifier les déterminants socio-culturels notamment les croyances des femmes sur le cancer du sein qu’une étude socio-anthropologique complémentaire pourrait bien étayer.
Egalement l’étude n’a pas permis de bien apprécier la qualité des soins et d’examiner le coût du dépistage et la disponibilité des outils de dépistage comme déterminant du recours au dépistage du cancer du sein.
Une autre limite notoire est celle de l’autopalpation comme moyen de dépistage quant à sa pertinence dans le dépistage du cancer du sein et comment évaluer sa faisabilité et sa qualité.

RECOMMANDATIONS

En vue d’augmenter les connaissances des femmes sur le cancer du sein et de promouvoir des comportements favorables à la bonne santé des femmes concernant cette maladie, un certain nombre d’actions devraient être mené notamment:
Pour le niveau communautaire
Inciter les femmes à créer les mutuelles de santé par le groupement des femmes.
Inciter les femmes à s’engager à faire régulièrement l’auto examen des seins dans le but du dépistage précoce
Pour le niveau central
Organiser des campagnes de sensibilisation de masse sur le cancer du sein
Mettre l’accent sur les émissions télévisées en langue nationale sur le cancer du sein pour enrôler les femmes non instruites
Promouvoir la scolarisation des filles pour lutter contre l’analphabétisme
Consentir plus d’effort pour rehausser le niveau de scolarisation
Promouvoir l’insertion professionnelle des femmes
Pour le niveau opérationnel
Organiser des séances de sensibilisation sur le cancer du sein dans tous les villages dans les districts au niveau des postes de santé en s’appuyant sur le personnel communautaire
Sensibiliser et renforcer les connaissances des femmes sur les facteurs de risque du cancer du sein, les symptômes, les moyens de dépistage et l’évolution de la maladie.
Organiser des séances de dépistage gratuit à travers les consultations gratuites en se basant sur l’examen clinique des seins
Améliorer la communication avec les femmes lors des consultations dans les structures de santé Améliorer la qualité des soins des malades en général dans les postes et centre de santé des districts.

CONCLUSION

Le cancer du sein constitue un problème de santé publique. Dans nos pays à ressources limitées, il est important d’insister sur la prévention secondaire sachant que la prévention primaire du cancer du sein est presque utopique. Pour ce faire, nos Etats doivent promouvoir le diagnostic précoce de la maladie et le dépistage qui sont conditionnés par les connaissances que les populations ont de cette maladie. Cette étude a révélé que la prévalence du recours au dépistage du cancer du sein reste encore faible dans la région de Thiès. Le niveau d’instruction, les connaissances sur le cancer du sein et le fait d’avoir reçu des conseils de dépistage sont des éléments à prendre en compte pour améliorer ce taux et le plus important reste la sensibilisation des populations.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. ETAT DES CONNAISSANCES
I.1. Histoire naturelle du cancer du sein
I.2.Facteurs de risque
I.3. Prévention primaire
I.4. Dépistage
I.5. Auto-examen des seins
I.6. Mammographie
I.7. Echographie
I.8. Travaux antérieurs sur le dépistage du cancer du sein
II. CADRE CONCEPTUEL
III. QUESTIONS DE RECHERCHE
IV. JUSTIFICATION DE L’ETUDE
V.OBJECTIFS DE RECHERCHE
V.1. Objectif général
V.2. Objectifs spécifiques
VI. CADRE D’ETUDE
VI.1. Aspects géographiques
VI.2. Aspects économiques
VI.3. Aspects sociodémographiques
VI.4. Aspects sanitaires
VII. METHODOLOGIE
VII.1. Type et période d’étude
VII.2. Population d’étude
VII.3. Echantillonnage
VII.4. Définition opérationnelle des variables
VII.5. Recodage des variables
VII.6. Collecte des données
VII.7. Analyse des données
VIII. CONSIDERATIONS ETHIQUES
IX. RESULTATS
IX.1. Etude descriptive
IX.2. Etude analytique
X. DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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