TRANSPORTS FLUVIAUX

TRANSPORTS FLUVIAUX

Objectifs

Cartographie

Afin de pouvoir étudier le système défensif mis en place sur les deux frontières, il doit être tout d’abord cartographié. Les divers éléments constitutifs de ce système (tours de guet, ville, fort, etc.) doivent pouvoir être clairement distinguables et placés dans leur contexte géographique. Les deux frontières étant fluviales, il est important de pouvoir appréhender les paramètres hydrologiques. La topographie enfin est de première importance lorsqu’il s’agit de stratégie défensive.

Chronologie

La période couverte par notre étude se situe entre l’avènement de Dioclétien en 284 et l’abandon des frontières durant le premier quart du Ve siècle. Au cours de ces 140 années, plusieurs empereurs se succédèrent à la tête de l’Empire et chacun, nous le verrons, eut une politique défensive différente. Nous chercherons donc à mettre en évidence par l’intermédiaire de la cartographie l’évolution de la frontière en fonction du temps et à observer les divers apports des empereurs successifs.

Etudes spatiales

Le système défensif établi sur ces frontières consistait notamment en un certain nombre de forteresses bâties en bordure ou en retrait du fleuve, ce dernier élément constituant le seul élément linéaire du dispositif et remplaçait avantageusement un mur. Il s’agissait alors de répartir les troupes dans ces places fortes afin de pouvoir répondre localement rapidement à toute menace, les renforts étant envoyés à partir des places fortes sécurisées. L’imposante forteresse de Kaiseraugst, l’un des plus grands forts de Grande Séquanaise constituait sans doute la pièce centrale de la région8. Nous chercherons à déterminer en combien de temps la garnison locale pouvait intervenir sur les divers sites du dispositif..Plus en retrait de la frontière, le castrum d’Eburodunum (Yverdon) disposait d’un port qui servait à acheminer diverses marchandises sur la frontière. Celles-ci pouvaient être transportées par voie fluviale ou terrestre. Nous chercherons à déterminer combien de temps prenait le déplacement de ces marchandises jusqu’à la frontière.

Etude de visibilité

L’une des spécificités du système défensif des deux provinces est la présence de nombreuses tours de guet le long du Rhin et du Danube9. Elles étaient destinées à repérer une éventuelle menace provenant du barbaricum et à rapidement signaler le danger. Il s’agit ici de déterminer autant que faire ce peut la superficie qui était effectivement observable à partir de ces lieux d’observation.

 Méthode

Catalogue

Afin de mener à bien notre étude, nous avons réalisé un catalogue des sites pour chacune des deux régions. Nous y avons répertorié les divers sites constitutifs de ces frontières et les avons décrits minutieusement. Ce catalogue contient à l’heure actuelle de nombreuses données relatives à plus de 220 sites de natures diverses. Les données utiles à notre analyse ont ensuite été répertoriées dans des tables Excel (cf. Annexe). La valeur « ID » y fait référence au numéro de catalogue des sites.

Cartographie et analyses

Le travail de cartographie et d’analyse a été réalisé à l’aide du logiciel ArcMap 10.210.
Les données fournies par l’Université de Lausanne nous ont, dans un premier temps, permis d’obtenir le support adéquat pour réaliser notre projet. Afin de pouvoir replacer le dispositif défensif dans son contexte géographique actuel, les cartes ont été obtenues en utilisant les éléments suivants:
– Deux cartes topographiques: L’une couvrant le territoire de la Suisse actuelle, le Liechtenstein et le sud de l’Allemagne. La seconde comprenant l’ouest du territoire actuel de la Hongrie et l’est de l’Autriche.
– Le réseau fluvial desservant les deux régions concernées
– Les grands lacs qui y sont localisés
Les tableaux Excel réalisés sur la base du catalogue ont ensuite été importés dans ArcMap et utilisés comme base de donnée cartographique. Ces tableaux comprennent les coordonnées géographiques de chaque site afin qu’il puisse être géolocalisé de manière précise.
Le réseau routier, de première importance dans le cadre de cette étude, a ensuite été ajouté manuellement, sur la base de plusieurs travaux11. Nous avons également utilisé les données recueillies par le centre de recherche « Ancient World Mapping Center »12. Ce projet de cartographie et d’informations géographiques historiques réalisé dans un cadre académique comprend en effet parmi les nombreuses données récoltées des reconstitutions de réseaux routiers antiques. Une fois ce réseau vérifié, puis corrigé, elle a été incluse dans la géodatabase de l’étude.
La symbologie permet de mettre en évidence les divers éléments constitutifs de la défense frontalière:
– Les forteresses (castella), de tailles très variables, étaient destinées à abriter les troupes, les biens et la population. Leurs murs épais et leurs tours saillantes en rendaient l’assaut difficile et devaient permettre à la garnison de tenir un siège le temps de l’arrivée des renforts.
– Les tours de guet (burgi) étaient souvent des fortifications de relativement petite taille (env. 10m x 10m). Bâties le long de la frontière, elles étaient destinées à l’observation et à donner l’alerte en cas de trouble.
– Les entrepôts étaient utilisés pour le stockage de marchandises destinées aux soldats sur les divers sites frontaliers.
– Les villes, centres économiques, devaient être protégées des menaces extérieures. Certaines d’entre elles étaient protégées par un rempart.
– Les fortifications en tête de pont étaient bâties sur la rive opposé du fleuve, en face d’une forteresse et étaient destinées notamment à protéger les ponts et leur accès.
– Les forteresses de rivière offraient aux navires une place sécurisée pour charger ou décharger hommes et matériel.
-Les refuges de hauteur étaient des sites bénéficiant de bonne défenses naturelles, complétées le cas échéant par des murs. Ils servaient de refuge à la population locale.
Les différentes études cartographiques ont ensuite été réalisées sur la base des ces travaux préparatifs et à l’aide des outils offerts par le logiciel.
Les recherches portant sur les distances que peuvent parcourir les soldats et les marchands ont enfin nécessité la création d’un réseau routier (Network dataset) tenant compte de la pente moyenne des divers tronçons constituant ce réseau. Le réseau fluvial devait quant à lui tenir compte du sens du courant et de l’importance de ce même courant. Le modèle qui a servi à le créer provient également des travaux réalisés par l’Ancient World Mapping Center (cf.supra).

Résultats

Répartition chronologique

Nous pouvons répartir l’attribution chronologique des fortifications en trois grandes périodes distinctes. La première de ces périodes, que nous qualifierons de « dioclétienne » inclut la période comprise entre 284 ap. J.-C., date de l’avènement de l’empereur et 305, date de son abdication, et comprend donc l’époque de la gouvernance tétrarchique. La période suivante que nous nommons « constantinienne » inclut les règnes de Constantin le Grand et ceux de sa lignée, couvrant plus de la moitié du IVe siècle, de 306 à 363 ap. J.-C. La troisième période enfin, comprend les règnes de Valentinien et de Valens, période particulièrement riche, nous le verrons, en termes d’édification de fortifications, ainsi que de leurs successeurs Valentinien II et Gratien, et qui couvre une partie du dernier tiers du IVe siècle, entre 364 et 392. Nous considérons enfin comme « post-valentinien » les édifices construits entre cette période et l’abandon du limes.

La période tétrarchique

Lorsque l’empereur Dioclétien accède à la pourpre impériale, la frontière rhénane de la province est presque dépourvue de fortifications. Deux sites du limes furent toutefois fortifiés peu après le retrait des troupes des Champs Décumates. Une enceinte fut bâtie en 276 sur le plateau du « Kastelen », petite hauteur située dans la ville d’Augusta Raurica, probablement à la suite des incursions alamanes de 27513. Le site du camp légionnaire de Vindonissa ensuite fut une place militaire importante jusque vers le milieu du IIe siècle, date à laquelle il fut, semble-t-il, abandonné par les troupes au profit de la population civile14. D’après une source épigraphique15, Gallien fit reconstruire une forteresse à cet endroit en 260.Les fortifications bâties durant la tétrarchie dans la province Maxima Sequanorum se concentrent dans leur grande majorité le long de la frontière entre Bâle et le lac de Constance. Il s’agissait alors de défendre les axes de passages stratégiques situés directement sur la nouvelle frontière tels que Constance, Stein am Rhein, Zurzach et Kaiseraugst. Toujours le long de la frontière, la fortification de la colline de Bâle et les murs du vicus portuaire d’Arbon furent également probablement édifiés durant cette période.Plus en retrait, sur des sites localisés à une vingtaine de kilomètres de la frontière dessinée par le Rhin, deux enceintes sont encore attribuables à la période de la tétrarchie, celle de Brugg, située non loin de l’ancien camp de Vindonissa et protégeant un passage à gué sur l’Aar et celle d’Oberwinterthur, dans l’arrière pays de Stein am Rhein, près d’un important axe routier.
Figure 4 – Répartition des fortifications bâties sous la tétrarchie

La période constantinienne

Durant les règnes de Constantin et de ses fils, la fortification du limes s’est essentiellement concentrée sur l’arrière-pays. La forteresse de Horbourg fut édifiée près de l’important axe routier Bâle-Strasbourg ainsi que sur la voie menant à l’intérieur des terres par les cols vosgiens. Celle de Mandeure fut édifiée sur le cours du Doubs, à une soixantaine de kilomètres du Rhin, afin de sécuriser l’axe routier menant de Bâle à la capitale de la province, Besançon (Vesontio). La voie romaine menant du tronçon de frontière situé entre le coude du Rhin à Bâle et le lac de Constance à l’Italie du Nord par le col du Grand-Saint-Bernard ou à la Gaule centrale et méridionale en passant par Genève fut également probablement fortifiée à cette époque. Trois enceintes furent bâties sur ce tracé: celles d’Olten et de Soleure sur le cours de l’Aar et celle d’Yverdon, à l’extrémité sud-ouest du lac de Neuchâtel. Ce dernier site, localisé loin de la frontière, possédait toutefois un port à partir duquel les embarcations pouvaient rejoindre le Rhin en aval de Zurzach en descendant le cours de l’Aar et longeant par là-même les entrepôts fortifiés d’Aegerten (construites ultérieurement) et les fortifications de Soleure, Olten et Brugg. Deux fortifications furent enfin bâties sur les axes routiers passant par la Rhétie et menant de ce même tronçon de frontière ainsi que de Bregenz (Brigantium) vers l’Italie du Nord par les cols alpins: Zürich-Lindenhof et Coire.

La période valentinienne

L’activité de construction défensive s’emploie essentiellement à renforcer la ligne de la frontière. C’est probablement à Valentinien que nous devons les nombreuses tours de guet bâties le long du Rhin et surveillant la frontière entre Bâle et le lac de Constance. Toujours directement au bord du Rhin, trois fortins furent bâtis sur la rive droite cette fois, afin de sécuriser les ponts. Le fort de Bâle-Kleinbasel (Robur) se situait en face de Bâle, celui de Wyhlen en face de Kaiseraugst et celui de Zurzach-Rheinheim en face de ceux de Zurzach. Deux des quatre entrepôts fortifiés se situent également le long du Rhin, sur le territoire des localités de Mumpf et de Sisseln. Les deux autres se trouvent plus en retrait, à Aegerten, sur la route reliant la ville d’Avenches (alors en partie en ruines et sur le déclin) à celles situées sur la frontière, près de l’extrémité orientale du lac de Bienne, près de l’Aar.Plusieurs forteresses furent également édifiées durant cette période. Trois d’entre elles se situent sur le tronçon de frontière situé aujourd’hui en France, près de la fortification de Horbourg. Il s’agit, du nord au sud, des forts de Sponeck, Biesheim et Breisach, le premier et le dernier étant situés sur la rive droite du Rhin, le second entre ceux-ci et Horbourg. Toujours sur le Rhin, sur son tronçon supérieur cette fois, et à nouveau sur le site de Zurzach, une seconde fortification au Siedelen vient compléter celui de Kirchlibuck.Plus en retrait de la frontière, les défenses de l’arrière-pays dans la partie orientale de la province de Maxima Sequanorum et occidentale de Raetia prima sont complétées par trois forts bâtis le long des axes pénétrant dans l’empire: les forts de Kloten entre Zurich et Oberwinterthur, d’Irgenhausen entre Oberwinterthur et le vicus de Kempraten, sur la route menant à Coire et enfin le fort de Schaan, environ à mi-chemin entre ceux de Bregenz et de Coire.

Les tours de guet

Un nombre important de tours de guet surveillait la zone frontalière entre Bâle et le lac de Constance. Celles-ci ont fait l’objet de deux publications d’ensemble: celle de K. Stehlin en 1957 et celle de W. Drack en 198016. Sur les 100 km séparant Bâle de Stein am Rhein, un total de 50 tours a été inventorié.

Ensemble du dispositif

L’ensemble du dispositif frontalier de la Maxima Sequanorum protégeait un tronçon de frontière long d’environ 240 kilomètres. Onze castella furent bâtis sur le tracé de la frontière même, le long de la route du limes, ainsi que quatre fortins en tête de pont, sur la rive droite du fleuve. Ce dispositif de protection fut complété par un dispositif de surveillance par l’intermédiaire des nombreuses tours de guet permettant de repérer et de signaler rapidement une éventuelle menace. Des entrepôts situés le long du fleuve permettaient en outre d’acheminer rapidement du matériel vers les sites qui en auraient besoin.
En retrait de la frontière, les routes menant au cœur de l’Empire furent fortifiées jusque loin derrière la frontière. Il s’agissait ici non seulement de mettre à l’abri la population locale, mais aussi de retarder autant que faire se peut une progression de troupes ennemies vers les riches cités gauloises et latines. Treize castella protègent ces voies de communications. Là aussi, des structures destinées au ravitaillement des troupes ont été prévues dans des entrepôts fortifiés et ceux abrités par ces places fortes. Le centre de ce dispositif était certainement la forteresse de Kaiseraugst. Sa situation centrale, sa taille imposante et sa construction précoce sur la frontière parlent en faveur de cette hypothèse.Le tronçon de frontière Bâle-Bregenz fut défendu dès le retrait de la frontière le long du Rhin et ne cessa d’être renforcé par de nouvelles constructions jusqu’à l’abandon de la frontière. Le tracé sud-nord entre Bâle et Sponeck ne fut fortifié que sous Valentinien, exception faite du fort de Horbourg, probablement déjà bâti sous Constantin.Ce système frontalier semble avoir été d’une grande efficacité dans la mesure où la province ne connut pas d’invasions majeures après les réformes entreprises par Dioclétien, exception faite des troubles et raids alamans à l’occasion de l’usurpation de Magnence. Elle tint dans une relative sécurité la population de l’Empire durant plus d’un siècle, jusqu’à l’hiver 406-407 marquant la chute de ce tronçon du limes.

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Table des matières

1. RÉSUMÉ
2.INTRODUCTION
2.1 CADRE DU TRAVAIL
2.2 LA FRONTIÈRE
2.3 CADRE GÉOGRAPHIQUE
2.4 CONTEXTE HISTORIQUE
3. OBJECTIFS
3.1 CARTOGRAPHIE
3.2 CHRONOLOGIE
3.3 ETUDES SPATIALES
3.4 ETUDE DE VISIBILITÉ
4. MÉTHODE
4.1 CATALOGUE
4.2 CARTOGRAPHIE ET ANALYSES
5. RÉSULTATS
5.1 RÉPARTITION CHRONOLOGIQUE
5.1.1 La période tétrarchique
5.1.2 La période constantinienne
5.1.3 La période valentinienne
5.1.4 Les tours de guet
5.1.5 Ensemble du dispositif
5.2 PANNONIE
5.2.1 Période tétrarchique
5.2.2 Période constantinienne
5.2.3 Période valentinienne
5.2.4 Tours de guet et fortifications de rivière
5.2.5 Ensemble du dispositif
6. ETUDES SPATIALES
6.1 SOLDATS
6.2 MARCHANDS ET CONVOYEURS
6.3 TRAJET KAISERAUGST-YVERDON
6.4 RAPIDITÉ D’INTERVENTION DE LA GARNISON DE KAISERAUGST
6.5 TRANSPORTS FLUVIAUX
7. ETUDES DE VISIBILITÉ
8. CONCLUSION ET COMMENTAIRES
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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