Transport turbulent d’un plasma à travers un champ magnétique

La turbulence

Tout système présentant des fluctuations, de densité ou d’autres paramètres, n’est pas turbulent. Quels critères peut-on se donner pour caractériser un système turbulent ? En s’appuyant sur l’énoncé de Lesieur, nous exposerons quelques propriétés d’un tel système :
une sensibilité extrême aux conditions initiales : un écart infime par rapport à un état initial, même très localisé, peut conduire à une évolution différente du système tout entier;
une capacité de transport et de mélange bien plus importante que la diffusion thermique particulaire des constituants élémentaires du milieu (molécules pour un gaz, ions et électrons pour un plasma); un taux de fluctuation supérieur de plusieurs ordres de grandeur au taux de fluctuation dû à la dynamique moléculaire;
la description du système fait intervenir une grande gamme d’échelles spatiales, depuis la taille du système lui-même jusqu’à l’échelle où le taux de fluctuation est le taux de fluctuation d’équilibre, imposé par la dynamique moléculaire, cette dernière pouvant être inférieure de plusieurs ordres de grandeur à la taille du système.
D’une façon plus générale, le mouvement turbulent est principalement le fait des grandes échelles (grandes devant toutes les échelles particulaires). Par conséquent, la description fluide (milieu continu) convient. Un tel milieu peut être modélisé comme une superposition de particules fluides, dont on peut étudier le mouvement et la déformation.

Le formalisme des marches aléatoires appliqué à la diffusion des molécules

En idéalisant ces collisions par des évènements instantanés et localisés dans l’espace, on peut décrire la trajectoire des molécules par des lignes brisées, chaque point anguleux correspondant à une collision. Entre chaque point anguleux, on dit que la molécule fait un pas. Après un temps τ et un nombre plus ou moins grand de pas, la molécule a effectué un déplacement ∆ par rapport à sa position initiale. Le paramètre d’impact d’une collision particulière étant imprévisible dans un système à grand nombre de particules, il pourra être traité comme une variable aléatoire. Comme la physique des molécules d’un gaz résulte uniquement d’interactions binaires, les différents pas qui constituent la marche aléatoire d’une molécule pourront être considérés comme des évènements aléatoires indépendants, caractérisés par une vitesse et un temps de libre parcours. La vitesse après une collision est « tirée au sort » selon la loi de distribution des vitesses dans le gaz; le temps de libre parcours est également tiré au sort suivant sa propre distribution de probabilité, qui dépend de la section efficace de collision et de la densité du gaz.

Diffusion de la lumière par un milieu turbulent

La propagation de la lumière dans le vide est régie par les seules équations de Maxwell. Il s’agit d’une onde transverse, non-dispersive, de vitesse c. Le vecteur d’onde, défini comme le gradient de la phase, est donc orthogonal aux vecteurs du champ électrique et du champ magnétique, et par là même parallèle au vecteur de Poynting. Si le front d’onde est lisse, on peut construire simplement la notion de rayon (courbe parallèle en tout point au vecteur de Poynting) et retrouver un résultat élémentaire d’optique géométrique : la lumière dans le vide se propage en ligne droite.
La modélisation de sa propagation dans un milieu matériel est fondamentalement complexe puisqu’elle nécessite a priori l’étude de l’interaction de l’onde avec chacune des charges, électrons ou noyaux. Elle est souvent pratiquement simple parce que les longueurs d’onde en optique sont très grandes devant les distances interatomiques et que l’interaction est linéaire. Il est alors possible de considérer la matière comme un milieu continu. L’onde interagit avec un milieu dont la densité de charge est moyennée sur une fraction de longueur d’onde. En particulier, si le milieu est homogène, son interaction avec l’onde est entièrement contenue dans un seul paramètre: l’indice optique. La propagation de l’onde dans un tel milieu se réalise comme dans le vide mais à une vitesse de phase valant c = c0/n.
Si le milieu est inhomogène mais sur des longueurs caractéristiques grandes devant la longueur d’onde, la description en terme d’indice est toujours valable, mais ce dernier dépend désormais de la position. On peut décrire ainsi les phénomènes de réfraction et de mirage. La description de la propagation dans le cadre de l’optique géométrique fait apparaître des rayons incurvés.
Cela dit, même dans ces conditions, cette decription du milieu continu n’est pas complète puisqu’il existe aussi la diffusion moléculaire (diffusion Rayleigh sur les électrons liés, dans le domaine optique) ou Thompson (sur les électrons atomiques dans le domaine des X ou sur les électrons libres d’un plasma) qui résulte de l’interaction de l’onde avec les composants élémentaires de la matière. C’est un phénomène bien visible puisqu’il rend le ciel lumineux et bleu ou filtre la lumière directe du soleil au point de la faire apparaître rouge au couchant.
A une échelle intermédiaire entre l’échelle particulaire et l’échelle macroscopique, les fluctuations d’indice engendrent également un phénomène de diffusion de la lumière. C’est pourtant toujours la même interaction qui est à la source, quelle que soit l’échelle, depuis la diffusion (Rayleigh ou Thompson) jusqu’à la réfraction. Pour décrire l’influence sur la lumière des fluctuations du milieu à une échelle intermédiaire, il est utile de se rappeler des processus fondamentaux.

Diffusion cohérente

Pour des échelles sondées plus grandes, au moins de l’ordre de la longueur de Debye, des effets collectifs apparaissent, qui changent les caractéristiques du signal diffusé et en particulier son spectre temporel. La prise en compte de ces interactions entre particules a conduit au tout début des années soixante à la théorie de la diffusion cohérente. Celle-ci permet d’expliquer les observations étonnantes faites avec les radars ionosphériques. Les premières observations de diffusion d’ondes électromagnétiques, avant le développement des lasers, furent des expériences de rétrodiffusion d’onde radar sur le plasma ionosphérique. Les scientifiques de l’époque attendaient des spectres temporels d’une largeur typique correspondant à la vitesse thermique électronique, soit plusieurs centaines de kHz. Cette largeur s’est révélée être cent fois plus faible . L’explication de ce phénomène nécessite la prise en compte des interactions entre les électrons, qui sont les particules diffusantes dans un plasma, et les autres particules du plasma, ions et électrons . Nous présentons ici une approche exposée par Hutchinson et proposée dans les années soixante par Oberman et Montgomery, faisant appel au modèle de l’ion et de l’électron habillés, qui permet de rendre compte des interactions à deux particules.
Ce modèle consiste à décrire la diffusion de la lumière sur les fluctuations de densité induites par le simple mouvement thermique des particules (ions et électrons) qui induit une perturbation électrique. Ces fluctuations sont la réponse d’un plasma homogène, caractérisé par sa permitivité diélectrique et en particulier par sa permitivité diélectrique électronique, puisque seuls les électrons diffusent signicativement .
Cette dernière est calculée en utilisant la théorie cinétique. Une image assez juste du modèle serait d’imaginer les particules du plasma (ions et électrons) habillés par les charges de polarisation dont elles provoquent l’apparition à leur passage. Les ions, individuellement, diffusent très peu, mais ce sont les électrons participant aux charges de polarisation induites par la présence et le mouvement des ions qui diffusent. Les électrons diffusent individuellement et, de plus, tout comme les ions, engendrent des charges de polarisations électroniques.

Quelques indices sur la nature des fluctuations du plasma

Il est possible d’obtenir des informations importantes sur la nature des fluctuations si on connaît la relation locale et instantanée entre fluctuations de densité, de potentiel plasma et de température. Des systèmes de sondes multiples ont été conçus dans différentes expériences, pour mesurer simultanément et au même point ces différents paramètres. Nous avons utilisé une autre méthode. Le potentiel d’une sonde unique est balayé périodiquement pour obtenir une série de caractéristiques de sonde complètes. Le balayage est effectué sur un temps court par rapport aux temps de la turbulence et long par rapport à la réponse du plasma aux sollicitations de la sonde. Nous avons donc procédé à l’enregistrement de caractéristiques de sonde avec un balayage périodique rapide de façon à accéder à tout moment aux valeurs de la densité, de la température et du potentiel plasma, ainsi qu’à leur variation en fonction du temps.

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Table des matières

Introduction 
1. Fluctuations et turbulence 
I La diffusion moléculaire et sa modélisation
I.1 Le problème
I.2 Le formalisme des marches aléatoires appliqué à la diffusion
des molécules
I.3 Fonction caractéristique du déplacement
II La turbulence
II.1 Définition
II.2 Modélisation par une marche aléatoire
II.3 Statistique gaussienne des déplacements
II.4 Exemple d’une autre statistique
II.5 Les distributions stables de Lévy : une généralisation de la distribution gaussienne
II.6 Les distributions de Lévy en physique
2. La diffusion collective : une mesure de la turbulence 
I Diffusion de la lumière par un milieu turbulent 
I.1 Rayonnement d’une charge soumise à une onde électromagnétique
I.2 Champ diffusé par un ensemble de particules
II Détection du champ diffusé
II.1 Détection hétérodyne
II.2 Obtention du signal complexe
II.3 Détection du champ électrique
III Intérêt et limite du diagnostic
III.1 Avantages de la méthode de détection superhétérodyne
III.2 La question du volume de mesure
III.3 Résolution spatiale du diagnostic
III.4 Limites liées à l’électronique
IV Le spectre spatial de la turbulence 
IV.1 Rappel des définitions des facteurs de forme dynamique et statique
IV.2 Courant de détection et profil du faisceau
IV.3 Facteur de forme en unités absolues : cas d’une turbulence à trois dimensions
IV.4 Cas d’une turbulence à deux dimensions
V La dynamique de la turbulence 
3. De la diffusion incohérente à la diffusion collective 
I Diffusion incohérente dans un plasma sans champ magnétique 
II Diffusion cohérente 
II.1 Expression générale des fluctuations dans un plasma uniforme à l’équilibre
II.2 Expression des fluctuations associées au mouvement propre des particules
II.3 Expression de la susceptibilité du milieu
II.4 Spectre temporel de la diffusion cohérente
III Diffusion collective
IV Expression complète des fluctuations de densité : du microscopique au macroscopique
IV.1 Exposé du problème
IV.2 Effet du changement de référentiel : du plasma au laboratoire
IV.3 Expression complète des fluctuations de densité, microscopiques et macroscopiques
IV.4 Conséquences sur les mesures de diffusion collective dans un plasma magnétisé
IV.5 Conséquence sur les mesures de diffusion cohérente
4. Dispositif expérimental et plasma de ToriX
I ToriX 
I.1 La machine
I.2 Ses diagnostics
II DFL3
II.1 Rappel sur les faisceaux gaussiens
II.2 Principe technique
II.3 Conception du banc
II.4 Etalonnage du banc
II.5 Enregistrement du signal superhétérodyne
III Le plasma de ToriX : paramètres typiques et états stationnaires
III.1 Echelles caractéristiques
III.2 Protocole d’acquisition des profils spatiaux
III.3 Plasma sans champ magnétique vertical
III.4 Plasma avec un champ magnétique vertical
IV Quelques indices sur la nature des fluctuations du plasma 
IV.1 Acquisition et traitement des caractéristiques
IV.2 Analyse des fluctuations
5. La diffusion turbulente dans ToriX 
I Facteur de forme statique
I.1 Plasma en champ magnétique purement toroïdal
I.2 Plasma avec une petite composante magnétique verticale additionnelle
II Facteur de forme dynamique et mouvement du plasma : première interprétation
II.1 Traitement du signal superhétérodyne
II.2 Ajustement de la fonction d’Ornstein sur la fonction d’auto-corrélation
III Dépendance en k de la fonction d’autocorrélation : statistique non gaussienne des déplacements 
III.1 Dépendance en k de la fonction d’autocorrélation temporelle
III.2 Analyse de la dépendance en k de P(k, τ )
III.3 Interprétation des résultats
Conclusion 
Bibliographie 

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