Transition dans la coopération internationale environnementale au Costa Rica

Transition dans la coopération internationale environnementale au Costa Rica

Nous analysons ici les éléments marquants de l’histoire des financements internationaux de l’action environnementale au Costa Rica que nous rapprochons de l’histoire du secteur de la conservation au niveau mondial. Le secteur de la conservation prend forme au 19ème siècle et se consolide après la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 1970 s’opère un changement radical rapprochant les préoccupations environnementales de l’idéologie développementaliste. La révolution environnementale prend ensuite forme dans les années 1990 avec le Club de Rome, le Sommet de Stockholm, les balbutiements du développement durable et le verdissement du développement. Cette période est marquée par la création de nombreuses ONG. Les acteurs internationaux diffusent le référentiel mondial de la conservation axé sur la biodiversité à partir des années 1990 caractérisé par un phénomène de priorisation. Le nouveau référentiel mondial fournit de nouvelles sources de financement international. Les flux financiers internationaux se multiplient ainsi autour de 1991-1992. Le budget de la conservation de l’aide nord-américaine augmente de 180% et s’oriente pour la moitié vers l’Amérique latine et les Caraïbes. Cette augmentation radicale a des influences sur la structure et les financements des ONG. Dans un contexte de politique mondialisée les grandes ONG ont chacune développé des stratégies d’identification stratégique des zones prioritaires de conservation. Les hot spots, les écorégions globales, structurent et hiérarchisent désormais les actions des ONG de l’oligopole à l’échelle du globe. On assiste à un verdissement de la coopération internationale marqué en particulier par une réorientation des financements de la Banque Mondiale dans le champ insistant par ailleurs sur la nécessité d’une collaboration avec les ONG. Le Fond Mondial pour l’Environnement devient alors un acteur clé. Son budget dépasse celui de tous les autres acteurs. Le Costa Rica devient l’exemple même de la concentration des financements internationaux et de l’effet boule de neige après 1992. La liste des financeurs internationaux est donc interminable.

Les politiques nationales environnementales : de fortes contradictions entre la bannière écologique internationale et les réalités locales

Il s’agira d’établir le contexte politique national en mettant l’accent sur les politiques publiques de soutien au tourisme vert et les politiques environnementales. Nous tenterons de problématiser les contradictions internes qui existent entre la bannière écologique brandie à l’international et les politiques mises en œuvre au niveau national.

La valorisation de la différence verte costaricienne

Alors qu’en 1969, il n’y avait aucun intérêt pour la conservation de la part du gouvernement ou de la société civile au Costa Rica. Le pays, en vingt cinq ans a été reconnu mondialement pour son système de parc national, sa règlementation environnementale, avoir été pionnier des concepts comme l’écotourisme et la prospection de la biodiversité, être la maison mère de centaines de groupes environnementaux de citoyens et avoir eu un président qui a fait du développement durable l’axe de toute son administration. Il faut souligner que les actions de conservation au Costa Rica sont en grande partie entre les mains de l’Etat. Le quart du territoire national est placé sous la désignation des aires protégées gérées par l’Etat. Il s’agit du programme de conservation le plus grand que possède l’Etat costaricien. Il ne cède pas tellement de place aux acteurs privés dans ce domaine et gère la grande partie des politiques menées dans les aires protégées. S’il implique des personnes externes, elles se cantonnent au rôle de consultant ou sont chargées de petits projets pour lesquels l’Etat prend les décisions finales. Il existe donc une certaine étatisation de la conservation dans le pays. Si quelques unes des aires protégées possèdent une ouverture éco-touristique, toutes ne l’ont pas. Le gouvernement costaricien a historiquement diffusé et vendu sur la scène internationale l’image d’un pays vert que Linda Boukhris nomme la « différence verte ». Le pays s’est progressivement construit un leadership international sur les politiques environnementales. La reconnaissance de ce leadership est fondée sur la construction historique d’un système d’aires protégées depuis les années 1960.
Il faut ensuite considérer la création d’institutions nationales scientifiques, de recherche et de conservation, comme l’Organisation des Etudes tropicales (1963), le Centre Scientifique Tropical et d’institutions politiques nationales telle que la création du SINAC en 1989, également l’institutionnalisation par des lois de conservation comme la Loi forestière de 1969 et la Loi sur la Biodiversité de 1998.

Les contradictions au niveau local

En dépit de son haut niveau dans les classements de performance environnementale, le pays possède un modèle économique tourné vers les investissements étrangers et l’agriculture intensive destinée à l’exportation. Réfléchissant sur la région latino-américaine, Jaime Osorio montre la confrontation entre deux modèles36. Il avance l’idée que les Etats possèdent deux faces, une face visible et une face invisible. La face visible est présentée au reste du monde.
Elle correspond à l’image que l’Etat souhaite que les autres pays aient de lui et à ce qu’il veut que nous croyions qu’il soit. Il s’agit du Costa Rica accolé aux adjectifs suivants Costa Rica vert, pacifique, progressiste. La face visible est le discours officiel. La face invisible correspond aux politiques qui sont mises en œuvre à l’intérieur du pays et qui ne correspondent pas à la face visible. La face invisible correspond à une économie nationale tournée vers les investissements étrangers et l’agriculture intensive d’exportation. Ainsi, le Costa Rica est le premier pays producteur d’ananas transgénique au monde et le premier utilisateur de pesticides en Amérique centrale. Les monocultures d’ananas, de bananes et de palmier à huile constituent un problème environnemental et social majeur. Des politiques permissives vis-à-vis des investissements étrangers sont encouragées par le gouvernement notamment dans le secteur touristique dans le domaine de l’hôtellerie par exemple, et dans le secteur agricole en encourageant les monocultures d’entreprises étrangères. Le développement immobilier de la zone côtière entre en effet en conflit avec l’image du pays durable projeté à l’international. En 1985 est promulguée la loi 6990 dite «d’incitation touristique» dont le but est à travers des avantages divers, notamment fiscaux d’encourager l’investissement dans le secteur du tourisme. Ils concernent le domaine des transports, des agences de voyage et des hôtels et correspondent généralement à un investissement non négligeable.

Sociologie du personnel de Fundecor : professionnalisation des personnels et socialisations propres au secteur de la conservation

L’analyse vise à réaliser une sociologie des personnels qui nous permette de réfléchir à leurs liens avec l’international en nous interrogeant sur leurs origines régionales, leurs études, leurs diplômes, leurs expériences à l’étranger et leurs activités militantes en associations ou partisanes en lien avec l’écologie notamment. Pour réaliser cette sociologie des personnels, nous allons nous appuyer sur les entretiens approfondis de trois agents de Fundecor : Roxana ingénieure forestière, Felipe directeur exécutif et Ivannia responsable du secteur éducation environnementale et gestion des aires sauvages protégées, et d’une conversation informelle avec Diana, coordinatrice des giras educativas- sorties d’éducation environnementale.
Roxana Chacón est ingénieure forestière d’origine costaricienne. Après une licence en sciences forestières, elle obtient un master en gestion des ressources naturelles et technologie de production à l’Institut technologique du Costa Rica (TEC à Cartago). Elle n’étudie qu’au Costa Rica. Dans le cadre de son parcours professionnel antérieur, elle travaille d’abord sur un projet de gestion forestière pionnier pour le pays au sein de Portico SA, une entreprise d’achat et transformation de bois pour la vente vers les Etats-Unis. Elle travaille ensuite à son compte comme consultante en qualité d’ingénieure forestière pendant cinq ans. Elle postule ensuite à Fundecor et devient ingénieure forestière pour la fondation.
Felipe Carazo réalise sa licence de biologie à l’Université du Costa Rica (UCR à San José). Contrairement aux dirigeants antérieurs de la fondation, il ne vient pas de la filière de sciences forestières mais d’une formation en biologie ce qui change la conception qu’il peut avoir de la conservation, axée sur la conservation des espèces et non pas de la forêt. Après avoir travaillé à la fondation AMBIO Ambiente y Biodiversidad- environnement et biodiversité (crée en 1989) de 1997 à 1999. Il part réaliser un master à l’Université de Duke en Caroline du Nord aux Etats-Unis et obtient un diplôme en économie et politique des ressources naturelles. Il rejoint ensuite le poste de responsable du programme pour le changement climatique pour le Costa Rica au PNUD à San José de 2001 à 2002.

Le label géoparc et le cadrage de la proposition réalisée par Fundecor dans la région du Poás

Dans cette partie, il faudra analyser le label géoparc, sa définition, le statut juridique du géoparc et ses caractéristiques. De plus, nous étudierons le cadrage de la proposition de géoparc réalisée par Fundecor pour répondre à la crise socio-économique traversée par les communautés voisines du Parc national volcan Poás.

Une labellisation ultra-sélective de l’Unesco

Il faut d’abord s’intéresser aux origines du label pour mieux le comprendre. Le Congrès de Digne se tient en 1991 à l’initiative de la Réserve naturelle géologique de Haute Provence. Il s’agit du premier symposium international sur la protection du patrimoine géologique. Ce Congrès marque la prise de conscience de la valeur patrimoniale des objets géologiques. Il rassemble les représentants de quatre territoires – la Réserve géologique de Haute-Provence, la Forêt pétrifiée de l’île de Lesbos en Grèce, le Parc naturel régional de Vulkaneifel en Allemagne et le Parc de Maestrazgo-Teruel en Espagne. L’idée de créer des géoparcs remonte à 1996 lors du 30ème Congrès International de Géologie tenu à Beijing pendant le symposium sur la protection de l’héritage géologique. On considère qu’il faut protéger et promouvoir l’héritage géologique par le développement économique durable des territoires. C’est la première fois qu’un effort est fait pour concevoir ensemble le problème scientifique de protection des sites géologiques et les besoins des sociétés. La création de géoparcs sous l’auspice de l’Unesco relève d’une initiative démarrée en 1997 avec la création du Programme des Géoparcs au sein de la division des sciences de la terre. En 2000, les représentants des quatre territoires initialement présents au Congrès de Digne signent la convention déclarant la création du Réseau Européen des Géoparcs. L’idée de ce réseau est de promouvoir le partage d’expériences. De plus, il s’agit de partager une expertise pour discuter de problèmes socio-économiques tels que la stagnation du développement économique, le chômage, l’exode rural. Le réseau vise à identifier comment la protection géo-touristique et le géotourisme peuvent apporter des solutions à ces problèmes. Ce réseau devient mondial en 2004, soutenu par l’Unesco, devenant le Réseau mondial des Géoparcs. Longtemps restés dans l’ombre des sites du patrimoine mondial, les Géoparcs ont été intégrés lors de la 38e session de la Conférence générale de l’Unesco le 17 novembre 2015 dans le Programme International de Géosciences (IGCP), devenu alors le Programme international sur les géosciences et les géoparcs (IGGP) créant le nouveau label de Géoparc mondial de l’Unesco.

La proposition de géoparc : mise en ressource et réponse à une crise socio-économique

La désignation du parc national volcan Poás date de 1961. Il appartient à la province de Alajuela. Il s’étend sur plusieurs cantons : Alajuela, Valverde Vega, Grecia et Poas.
Le parc national Volcan Poas est le parc le plus visité du pays. Il représente un apport à l’économie locale par la culture de fougères, destinées à l’exportation. Le service de restauration et les cafés arrivent en seconde position et la production de fraises en troisième position. Au niveau national, les recettes des entrées du parc, la production de fougères représente un apport de 13,9 millions à l’économie nationale. Le paysage autour du parc est également constitué par des activités agricoles de fraises et de café. L’autre activité économique importante est l’élevage laitier. L’activité touristique est dépendante du parc national volcan Poás et de ses alentours. Il faut noter que les voies d’accès au parc traversent les communautés. Les ressources en eau dans le parc servent à l’usage des communautés situées autour du parc et aux activités agricoles. Le parc national joue un rôle central dans la protection de ces ressources en eau.
Dû à des éruptions de gaz toxiques, le SINAC ferme le parc national volcan Poás en mai 2017. La fermeture crée un manque à gagner économique au niveau national dû à l’absence de recettes liées aux entrées du parc. Les activités économiques des communautés alentours dépendent du tourisme à destination du parc. En effet, les touristes consomment dans les restaurants, les hôtels et les petits magasins sur les routes d’accès au parc. Plus aucun touriste n’emprunte la route menant au parc. La fermeture du parc national signe l’arrêt de l’activité économique tournée vers le tourisme. D’une part, les productions agricoles au sein du parc national volcan Poás ont subi des affectations liées au gaz dégagés par les éruptions.
L’exportation des fougères a été ralentie. Le manque d’activité touristique freine la consommation des productions caractéristiques de la région, les fraises, les fromages et les plantes ornementales.

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Table des matières

INTRODUCTION 
Chapitre 1 : FUNDECOR DANS LE SECTEUR DE LA CONSERVATION AU COSTA RICA 
I. Transformation de la coopération internationale au Costa Rica : redéfinition des priorités des bailleurs de fonds au niveau régional et adaptation des organisations 
A. Transition dans la coopération internationale au Costa Rica
B. Cartographie des acteurs de l’aide internationale et adaptation des organisations
II. Les contradictions entre la bannière écologique brandie sur la scène internationale, les politiques nationales environnementales et les réalités locales
A. La valorisation de la différence verte costaricienne
B. Les contradictions au niveau local
III. La régulation des parcs nationaux et les enjeux environnementaux locaux 
A. La régulation environnementale nationale en conflit avec la régulation environnementale internationale sur les catégories des aires protégées
B. Les problématiques environnementales dans les parcs nationaux
Chapitre 2 : FUNDECOR : UNE FONDATION INTERMEDIAIRE
I. Le statut juridique de la fondation et son rapport à l’Etat 
A. Un statut ambigu dès la création : un lien publico-privé
B. Le rapport ONG/Etat en pratiques
II. Une organisation connectée à la recherche de la centralité
A. Les manifestations de la centralité
B. Les intérêts de l’organisation et des personnes à rechercher une position de centralité
III. Une fondation avec une stratégie multiniveaux, du global au local et du local au global
A. Des projets locaux et globaux, une fondation aux activités de courtage
B. Une organisation intermédiaire et ses courtiers en développement
IV. Sociologie du personnel de Fundecor : une organisation d’experts
A. Sociologie du personnel de Fundecor : professionnalisation des personnels et socialisations
propres au secteur de la conservation
B. Le registre de l’expertise, technicisation et dépolitisation des actions menées
Chapitre 3 : LOGIQUES ENTREPRENEURIALES, DEVELOPPEMENT ET CONSERVATION : LA
MISE EN ŒUVRE DE LA MODERNISATION ECOLOGIQUE ?
I. Logiques entrepreneuriales, développement et conservation : projets, vision du développement et recherche d’une identité plus entrepreneuriale
A. Des pratiques professionnelles proches du monde de l’entreprise
B. Les projets et la conception du développement focalisés sur l’amélioration du sort
économique des personnes
II. La recherche de l’efficacité et la professionnalisation des employés
A. La diffusion de la bonne gouvernance et du New Public Management, la construction de
pratiques professionnelles gestionnaires
B. La professionnalisation des agents et la norme de l’efficacité appliquée par l’évaluation des projets
III. La modernisation écologique : s’allier avec le privé 
A. Le développement durable comme leitmotiv de la protection de l’environnement
B. L’ouverture des partenariats avec le secteur privé
Chapitre 4 : LE CAS D’UNE PROPOSITION DE GEOPARC MONDIAL UNESCO PAR FUNDECOR: UN TRANSFERT DE NORMES OIG/ONG
I. Le label Géoparc et le cadrage de la proposition réalisée par Fundecor dans la région du
volcan Poás
A. Une labellisation ultra-sélective de l’Unesco
B. La proposition de géoparc : mise en ressource et réponse à une crise socio-économique
II. La place de la coopération internationale, capacitations et perception de la coopération internationale par les protagonistes sur le terrain 
A. L’Unesco sur le terrain
B. La variété des acteurs qui entrent en contact sur le projet
III. Le transfert de normes par le label : gouverner par les labels et l’Unesco
A. Un processus de transfert de politiques publiques qui induit un transfert de normes
B. Un instrument de gouvernement qui implique des pratiques de la fondation
IV. Les intérêts autour de la candidature au label depuis la fondation
A. Les relations entre la fondation et l’Unesco San José avant la demande du label de géoparc
mondial de l’Unesco
B. Quelles sont les motivations des agents de la fondation ?
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE 

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