Trajectoire de soins des femmes enceintes

Trajectoire de soins des femmes enceintes

Recension des écrits

Trisomie 21

La T21, aussi appelée syndrome de Down, est l’anomalie chromosomique viable la plus fréquente (43). La personne atteinte de T21 possède un 3ème chromosome à la 21ème paire. Elle a donc 47 chromosomes au lieu de 46 (44). Le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) estime que la T21 touche environ 1 bébé sur 770 à la naissance. Le facteur de risque principal est l’âge de la mère (29, 44). En effet, la prévalence de la T21 augmente en fonction de l’âge de la mère. Cette augmentation est graduelle jusqu’à l’âge de 35 ans et elle est particulièrement marquée par la suite (30). Les personnes ayant la T21 ont des caractéristiques physiques communes. Ils ont un petit crâne, un visage rond, les yeux bridés, le nez court et parfois épaté. Aussi, ils ont une petite bouche, le pli de la nuque est épais, et la nuque est plate et large. Ils ont un plus faible tonus musculaire et une plus grande souplesse des articulations (30, 44). Les personnes atteintes de la T21 ont un risque plus élevé d’avoir des problèmes de santé. Par exemple, les malformations cardiaques sont présentes chez environ 40-50 % des nouveau-nés et nécessitent parfois une intervention chirurgicale. Aussi, ils ont plus souvent des problèmes comportementaux et émotionnels, une qualité de vie reliée à la santé moins favorable (28, 45), et des compétences sociales limitées par rapport aux personnes qui n’ont pas la T21. Leur apprentissage du langage, de la marche et des habiletés motrices est plus long. Ils présentent une déficience intellectuelle qui varie généralement de légère à modérée, mais cette déficience peut parfois être grave (44). Dans la vie quotidienne, ils dépendent plus ou moins des autres, et ont besoin d’un soutien continu, d’intensité variable tout au long de leur vie (28, 44). Plusieurs des adultes porteurs de la T21 vivent dans un milieu pour personnes non autonomes. Leur espérance de vie est d’environ 55 ans (28). Par ailleurs, à l’enfance, ces personnes peuvent vivre positivement leur intégration à l’école et leurs familles peuvent vivre des vies enrichissantes. Ainsi, les personnes atteintes du syndrome de Down peuvent connaître une vie remplie et satisfaisante et contribuer à une société diversifiée et plus riche sur le plan humain (6, 29).

Dépistage de la trisomie 21

L’objectif du dépistage prénatal pour la T21 consiste à identifier un sous-groupe de patientes enceintes considérées comme présentant un risque accru de donner naissance à un enfant trisomique afin de leur offrir de recourir à un test diagnostique, mais celui-ci comporte le risque de perte du foetus (46). Le test de dépistage de la T21 permet donc de déterminer si le bébé a une probabilité faible ou élevée d’avoir la T21, mais il ne permet pas de garantir que le bébé est réellement atteint ou non de la T21. De nos jours, il existe différentes modalités de dépistage de la T21 (4, 30, 46, 47). L’âge maternel et les marqueurs échographiques et sériques sont les éléments sur lesquels s’appuie l’évaluation du risque pour la trisomie 21 (46, 47).
Depuis 2010, le Québec a instauré un Programme populationnel de dépistage prénatal de la T21 (48). L’objectif de ce Programme est d’offrir au sein du réseau public, un dépistage prénatal de la T21 à toutes les femmes enceintes et aux couples du Québec qui le souhaitent. Ainsi, la participation à ce programme est volontaire et doit reposer sur un consentement libre et éclairé. Plus de la moitié des grossesses font l’objet d’un dépistage prénatal de la T21 dans la province de Québec (49). Dans le réseau public, sur 112 291 grossesses, 45 887 femmes ont participé au programme québécois de dépistage de prénatal de la T21 en 2013, soit environ 40,9% (48). Le test de dépistage est couvert par le régime d’assurance maladie du Québec (RAMQ) (44). Il consiste en deux prises de sang chez la mère pendant la grossesse : une première prise de sang entre la 10ème et la 13ème semaine ; et une seconde prise de sang entre la 14ème et la 16ème semaine. Si la probabilité d’une femme enceinte est suffisamment élevée (supérieur à un seuil de 1 sur 300 soit un seuil comportant un rapport bénéfice-risque jugé optimal pour décider de recourir au test diagnostique), on lui offre le test diagnostique (5). Le test diagnostique prénatal de la T21 le plus répandu est l’amniocentèse, qui permet de déterminer avec certitude si le bébé présente ou non une anomalie chromosomique comme la T21. Sa complication majeure est un risque de perte fœtale (fausse couche), qui va de 1 sur 400 à 1 sur 200 amniocentèses (44). En principe, c’est seulement après une confirmation par amniocentèse de T21 que la femme enceinte peut choisir ou non de subir une interruption volontaire de la grossesse.

Pertinence de la prise de décision partagée

La PDP est un processus interpersonnel et interdépendant au cours duquel le clinicien et le patient collaborent pour prendre des décisions à propos de la santé du patient. La PDP permet non seulement le partage des connaissances avec le patient, mais elle permet également au clinicien d’impliquer ce dernier dans la décision (50, 51). Elle repose sur le meilleur niveau de données probantes et sur les valeurs et préférences du patient. Pendant la grossesse, les femmes enceintes doivent décider si elles veulent recourir ou non au test de dépistage prénatal de la T21, ce qui peut s’avérer difficile compte tenu des avantages et désavantages perçus (4, 21). Par exemple, suite à leur rencontre avec un professionnel de la santé, environ 6% des femmes enceintes font face à un conflit décisionnel cliniquement significatif non résolu (52) ce qui veut dire qu’elles ne sont pas confortables avec leur décision à l’égard du test de dépistage de la T21. En effet, plusieurs facteurs comme les valeurs personnelles, le soutien social et la qualité de l’information fournie par le clinicien peuvent influencer leur décision (8). Selon Seror et al. (2000), l’information donnée par le médecin au moment de la prescription du test n’est pas claire ou sinon, elle est jugée insuffisante (9). Les femmes rapportent une méconnaissance du but du test et de la signification des résultats (53). Elles expriment le besoin d’avoir une information la plus précise possible pour leur permettre de prendre une décision en accord avec leurs valeurs et préférences. Ceci est d’autant plus important qu’il existe des issues associées au fait de faire le test ou non et du fait qu’ultimement, certaines femmes pourraient avoir à faire un second processus de prise de décision : faire le test diagnostique ou non avec les conséquences possibles qui pourraient avoir cours (8). Par ailleurs, les émotions (p. ex. anxiété, peur) générées par les procédures du test et les conséquences possibles, ainsi que la pression exercée par les cliniciens ont également été rapportées comme source de difficultés rencontrées par les femmes (4). De plus, les futurs parents ont à décider dans un contexte d’incertitude, car les résultats du test de dépistage ne peuvent pas prédire avec certitude l’atteinte du fœtus (10, 23, 24). L’information médicale est complexe et la décision requière la compréhension de données probabilistes, comme le risque personnel de porter un enfant atteint de la T21, et la compréhension des caractéristiques des tests de dépistage, tels que les taux de détection et la notion de faux-positifs et de faux-négatifs (25). Enfin, au bout du processus, certaines femmes auront une décision encore plus difficile à prendre : soit celle d’interrompre la grossesse ou de se préparer à la venue d’un enfant qui aura des besoins particuliers tout au long de sa vie (28, 44). Par conséquent, la PDP est un processus idéal à mettre en place afin d’assurer que les femmes enceintes puissent prendre des décisions éclairées dans ce domaine.

Les outils d’aide à la décision

Les OAD contribuent à la prise de décision éclairée en précisant le point de décision, et en fournissant des informations factuelles à propos de l’état de santé, des options de traitement ou de plans d’action, des avantages et/ou des inconvénients associés à ces options, des probabilités et des incertitudes scientifiques (30, 37). De plus, ils aident les patients à identifier ce qui est important pour eux (ex. leurs valeurs et préférences) (38). En fait, les OAD sont des outils qui peuvent promouvoir et soutenir la PDP dans la pratique clinique (39, 54). Comparée à la pratique et aux soins habituels (sans utilisation d’OAD), l’utilisation des OAD améliore les indicateurs clés de la qualité de la décision comme le niveau de connaissances des patients, et la compréhension des probabilités (38). Il a d’ailleurs été démontré que les patients qui utilisent les OAD font moins l’expérience du conflit décisionnel (38). Le conflit décisionnel est défini comme une incertitude personnelle quant à la ligne de conduite à adopter lorsque le choix entre des options concurrentes comporte des risques, des regrets ou des défis pour les valeurs de la vie personnelle (55). Aussi, les patients qui utilisent les OAD participent plus activement à la prise de décision (c.-à-d. s’engagent plus dans la PDP), sont moins susceptibles d’être indécis et font un choix qui est plus congruent avec leurs valeurs (23, 37). Malgré les preuves qui démontrent l’efficacité de la PDP et de l’utilisation des OAD, ces approches sont très peu utilisées actuellement (40, 56), et ce, certainement en raison de plusieurs barrières perçues par les cliniciens et les patients, mais aussi à certains mythes qui en découlent (12, 57).Dans le cadre du projet PEGASUS, une cartographie a été effectuée dans le but d’identifier les OAD disponibles pour le test de dépistage prénatal de la T21 qui respecte tous les critères de l’International Patient Decision Aid Standards (IPDAS, standards internationaux des OAD). A partir d’un échantillon de 543 OAD potentiellement éligibles, cette cartographie a révélé l’existence de 5 OAD portant sur le dépistage prénatal, trois sur le diagnostic prénatal et 12 pour à la fois le dépistage prénatal et le diagnostic prénatal (18). L’OAD qui respectait le plus les critères IPDAS a été amélioré par l’équipe de recherche de la Chaire de recherche du Canada sur la décision partagée et l’application des connaissances (58) et pourrait être implanté auprès des femmes enceintes du Québec.

Déterminants de l’intention des femmes enceintes d’utiliser l’outil d’aide à la décision

L’étude des comportements dans le domaine de la santé est aidée par l’apport de théories permettant d’en identifier les déterminants psychosociaux influant leur adoption, facteurs qui sont modifiables par la mise en place d’interventions de changement de comportement. Selon certaines de ces théories, dont la théorie du comportement planifié (TCP), l’adoption d’un comportement est principalement déterminée par le niveau d’intention (42), même si la relation intention-comportement n’est pas parfaite (42, 59). Les travaux de Légaré et al. (2011) ont démontré que les femmes enceintes ont la volonté de s’engager dans la PDP en ce qui concerne le dépistage prénatal de la T21. Leur volonté est influencée par l’attitude, l’auto-efficacité et la perception du sens moral (22). De même, à partir d’un échantillon de 350 femmes enceintes et au moyen d’un questionnaire basé sur la TCP enrichie, l’étude de Delanoë et al. (2016) a révélé que 41.9% des femmes ont une forte intention, 26.6% des femmes ont une intention plutôt forte et 31.5% des femmes ont une intention de très faible à neutre d’utiliser l’OAD dans le contexte du dépistage prénatal de la trisomie 21. Ces résultats ont montré que l’attitude, le regret anticipé, la norme descriptive et la norme morale prédisent l’intention de ces femmes d’utiliser l’OAD (41).

Techniques de changement de comportement

La connaissance des déterminants de l’intention est un facteur clé du développement d’une intervention de changement de comportement (ICCo) (42). Plusieurs interventions de changement de comportement ont été menées dans le but de motiver, modifier ou renforcer l’intention comportementale (60, 61). Ces interventions ont permis un changement au niveau de certains déterminants comme une attitude favorable (62, 63). Ces différentes interventions peuvent viser un ou plusieurs déterminants à la fois (60). Le choix des déterminants cibles permet le choix des techniques de changement de comportement (TCC) qui seront la pierre angulaire d’une intervention ou plan d’ICCo. Ces techniques proviennent de diverses théories. Selon plusieurs auteurs, les interventions basées sur plusieurs théories sont plus prometteuses (20, 59). Une TCC est une composante observable et reproductible conçue pour changer le comportement. Les TCC peuvent être utilisées seules ou en combinaison (64). Selon une revue systématique sur le changement de comportement en activité physique, les interventions comprenant dix TCC ou plus semblent avoir de meilleurs effets que les interventions avec moins de dix TCC (65). Les TCC peuvent être utilisées dans différents contextes et populations diverses y compris les femmes enceintes. Par exemple, elles ont permis de mener des interventions pour gérer le poids gestationnel chez les femmes enceintes (66). Par contre, il n’existe pas dans la littérature une intervention reposant sur les TCC telles que définies ci-haut pour promouvoir l’utilisation d’un OAD dans le contexte du dépistage prénatal de la T21 auprès des femmes enceintes.

Modes de diffusion d’une intervention de changement de comportement

Le mode de diffusion de l’intervention est l’une des sept dimensions d’une intervention. Il indique le moyen par lequel l’intervention sera diffusée à la population cible (19). Les interventions peuvent être diffusées de plusieurs manières, soit en face-à-face, soit à distance, à l’échelle individuelle (téléphone, programme informatique accessible individuellement), ou à l’échelle populationnelle (médias audiovisuels, numériques, extérieurs ou imprimés) (19). Les médias audiovisuels sont représentés par la télévision et la radio. Les réseaux sociaux (ex. Facebook) se classent également dans cette catégorie. Les médias numériques sont représentés par l’internet (site web, courriel), et les applications mobiles. Les panneaux d’affichage et les affiches sont des exemples de média extérieur. Les journaux, brochures et autres matériels écrits constituent des exemples de média imprimé (19, 42). Les recherches évaluant les préférences du mode de diffusion de l’intervention sont rares (67). Selon Vandelanotte et al. (2012), la préférence des participants quant au mode de livraison pourrait ne pas influencer de façon significative les résultats de l’intervention (68). Toutefois, les préférences du mode de livraison d’une intervention pourraient influencer l’acceptabilité de cette intervention et donc, le choix du mode de diffusion doit tenir compte de la population cible (19, 67), du comportement et du contexte (19), du genre et de l’environnement (67). En effet, il existe une grande variation entre les préférences des individus par rapport au mode de diffusion (68).

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 – Problématique
Chapitre 2 – Recension des écrits
2.1. Trisomie 21
2.2. Dépistage de la trisomie 21
2.3. Pertinence de la prise de décision partagée
2.4. Les outils d’aide à la décision
2.5. Déterminants de l’intention des femmes enceintes d’utiliser l’outil d’aide à la décision
2.6. Techniques de changement de comportement
2.7. Modes de diffusion d’une intervention de changement de comportement
Chapitre 3 – Cadre de référence
3.1. Le modèle COM-C
3.2. Les couches de la roue du changement de comportement
3.3. Développement d’une intervention à partir de la roue du changement de comportement
Chapitre 4 – Objectif et portée de l’étude
4.1. Contexte de l’étude
4.2. Question de recherche et objectifs de l’étude
Chapitre 5 – Méthode
5.1. Phase 1 – Phase théorique
5.2. Phase 2 – Phase centrée sur les utilisatrices
5.3. Phase 3 – Phase de développement de l’intervention
5.4. Considérations éthiques
Chapitre 6 – Article
Résumé
Abstract
Chapitre 7 – Trajectoire de soins des femmes enceintes
7.1. Trajectoire de soins des femmes enceintes dans le groupe de médecine familiale universitaire (annexe 5)
7.2. Trajectoire de soins des femmes enceintes au service de gynécologie obstétrique (annexe 6)
7.3. Trajectoire de soins des femmes enceintes à la Maison de naissance (annexe 7)
7.4. Trajectoire générique de soins des femmes enceintes
Chapitre 8 – Proposition d’un plan d’intervention pour promouvoir l’utilisation d’un outil d’aide à la décision par les femmes enceintes dans le contexte du dépistage prénatal de la trisomie 21
8.1. Plan d’intervention de changement de comportement auprès des femmes suivies dans le groupe de médecine familiale universitaire
8.2. Plan d’intervention de changement de comportement auprès des femmes suivies au service de gynécologie obstétrique
8.3. Plan d’intervention de changement de comportement auprès des femmes suivies à la Maison de naissance
8.4. Plan d’intervention de changement de comportement générique
Chapitre 9 – Discussion
9.1. Discussion générale
9.2. Forces de l’étude
9.3. Limites de l’étude
Chapitre 10 – Contributions de l’étude et implications
10.1. Contributions de l’étude
10.2. Implication pour la pratique, la recherche et les politiques
Chapitre 11 : Pertinence pour la santé publique et application des connaissances
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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