Traitements antithrombotiques et microhémorragies cérébrales

Les microhémorragies cérébrales sont des petites lésions arrondies qui apparaissent en hyposignal sur les séquences pondérées en T2* écho de gradient (GRE), et qui correspondent probablement à des dépôts d’hémosidérine autour des petites artères cérébrales, et donc à des reliquats de petites hémorragies, en rapport avec les pathologies fragilisant les petites vaisseaux cérébraux (angiopathie amyloïde cérébrale ou arteriolosclérose/lipohyalinose, i.e. pathologie des artères perforantes profondes) (12).

Les microhémorragies sont fréquentes chez les patients ayant une pathologie cérébrovasculaire : leur prévalence est d’environ 60% chez les patients ayant présenté une hémorragie cérébrale, et d’environ 35% chez les patients victimes d’infarctus cérébral, alors que leur prévalence en population générale est d’environ 5% (13). La présence et le nombre de microhémorragies ont été associés à un risque accru de récidive d’HIP (14, 15), ainsi qu’à un risque accru d’HIP chez les patients victimes d’un infarctus cérébral (16). Une méta-analyse conduite sur 1460 patients a montré que les microhémorragies cérébrales sont presque 2 fois plus fréquentes chez les patients ayant une HIP sous AVK par rapport aux patients n’ayant jamais pris de traitements antithrombotiques (17). Devant ces données, les microhémorragies cérébrales ont été considérées comme un marqueur de vasculopathie à haut risque de saignement (12), et certains auteurs recommandent de ne pas utiliser de traitements antithrombotiques en présence de microhémorragies cérébrales (18). Cependant, la relation entre microhémorragies et HIP dans le contexte de l’utilisation d’antithrombotiques n’est pas établie avec certitude. Avant de limiter l’utilisation de médicaments ayant fait largement leur preuve d’efficacité en termes de prévention vasculaire, les facteurs associés à l’incidence des microhémorragies cérébrales doivent être mieux connus. En effet, si l’incidence de microhémorragies a été associée à une augmentation du risque de récidive d’HIP en cas d’hémorragie lobaire (14), l’association est moins claire en cas d’hémorragie non lobaire, et l’influence des traitements antithrombotiques pourrait être différente dans les deux groupes de patients.

Bilan radiologique 

Une IRM cérébrale (1.5 Teslas ; GE Healthcare, Milwaukee, WI) était réalisée à l’admission et durant le suivi de manière standardisée, sauf pour les patients présentant une contre-indication à la réalisation de cet examen (pacemaker, prothèse valvulaire mécanique, état neurologique trop sévère). Pour cette étude, nous avons pris en compte les données de l’IRM réalisée peu après l’admission [délai médian de réalisation après l’HIP (espace interquartile IQR) : 7 (4-14) jours] et de l’IRM réalisée lors de la dernière visite de suivi, ou la plus proche du décès du patient [délai médian entre les deux IRM (IQR) : 3,4 (1,4-4,7) années]. Un investigateur de l’étude, expert en pathologie vasculaire cérébrale, a analysé de façon indépendante les images d’IRM. Le protocole IRM comprenait la réalisation de coupes axiales pondérées en T1, diffusion, T2 Fluid Attenuation Inersion Recovery (FLAIR) et T2* GRE. Nous avons décrit localisation de l’hémorragie cérébrale de la façon suivante : (i) lobaire : si l’origine supposée du saignement était localisée dans les hémisphères cérébraux, au niveau superficiel, dans le lobe frontal, temporal, pariétal ou occipital ; (ii) non lobaire, si l’origine supposée du saignement était localisée au niveau du thalamus, du noyau caudé, du noyau lenticulaire ou au niveau de la capsule interne ou externe, du cervelet ou du tronc cérébral ; (iii) indéterminée si l’origine du saignement ne pouvait pas être déterminée de façon certaine ; et (iv) multiple si plusieurs saignements actifs et récents étaient visualisés sur l’imagerie réalisée à l’admission. L’atrophie corticale était évaluée selon une échelle qualitative de 4 points (20), et définie comme présente en cas de score ≥ 2. La leucopathie vasculaire était évaluée selon l’échelle de Fazekas (21), et définie comme présente en cas de score ≥ 2. Sur chaque IRM nous avons évalué : (i) la présence, le nombre et la localisation des lacunes, définies comme des lésions ovoïdales ayant les caractéristiques du signal du liquide céphalo-rachidien, avec ou sans un liseré en hypersignal FLAIR, localisées dans la substance blanche profonde ou sous-corticale, les noyaux gris centraux, ou dans la protubérance (22); (ii) la présence, le nombre et la localisation de séquelles radiologiques d’hémorragie intra-parenchymateuse (de dimensions supérieures à 15mm), en dehors de l’hémorragie aiguë ; (iii) la présence et le nombre des microhémorragies cérébrales, définies comme des images arrondies en hyposignal sur les séquences pondérées en T2* GRE, et évaluées avec l’échelle Brain Observer MicroBleeds Scale (BOMBS) (23). La localisation des microhémorragies était par la suite décrite en :

– lobaire, si les microhémorragies étaient uniquement localisées au niveau de la substance grise corticale,
– non lobaire si uniquement localisées au niveau de la substance blanche sous corticale, des noyaux gris centraux ou de la fosse postérieure,
– mixte dans les cas où les régions corticales et sous corticales étaient touchées de façon simultanée.

Nous avons défini la progression de l’atrophie corticale et de la leucopathie vasculaire comme tout changement de catégorie entre la première et la deuxième IRM sur les échelles d’évaluation spécifiques ; l’incidence des lacunes comme l’apparition d’au moins une nouvelle lacune sur l’IRM de suivi ; l’incidence de microhémorragies comme l’apparition d’au moins une nouvelle microhémorragie sur l’IRM de suivi .

Analyses statistiques 

Nous avons tout d’abord comparé les caractéristiques démographiques, les principaux antécédents et la sévérité initiale du déficit entre les survivants à 6 mois inclus ou non inclus dans l’étude par analyses bivariées (Chi², test exact de Fisher si nécessaire, test U de Mann et Whitney). Nous avons étudié les caractéristiques associées à l’apparition de nouvelles microhémorragies par régression logistique qui était dans un second temps ajustée sur l’âge, le sexe et le délai entre la réalisation des deux IRM. La même analyse statistique était répétée en stratifiant les patients en fonction de la localisation de l’HIP initiale (103 hémorragie non lobaires ; 58 hémorragie lobaires ; après l’exclusion des patients ayant des multiples HIP ou des HIP de localisation non classifiable). L’analyse statistique était réalisée avec le logiciel SPSS 22.0.

Ethique

Le Comité d’Ethique de l’Hôpital Universitaire de Lille a qualifié cette étude d’observationnelle. Un consentement écrit éclairé n’a pas été jugé nécessaire.

Résultats

Parmi les patients inclus dans la cohorte initiale, 264 étaient vivants à 6 mois : 82 patients ont été exclus en raison d’une contre-indication à l’IRM cérébrale (figure 2). Parmi les 182 patients ayant eu 2 IRM, 168 avaient une IRM de qualité satisfaisante et ont été inclus dans l’étude. Par rapport aux patients inclus, les patients non inclus étaient plus âgés, avaient plus souvent un antécédent d’hémorragie cérébrale et de démence. La sévérité initiale du déficit neurologique était similaire entre les deux groupes .

Caractéristiques à l’admission
Parmi les 168 patients inclus [âge médian (IQR) 64 (53-76) ans], 89 (53%) présentaient des microhémorragies cérébrales sur l’IRM réalisée lors de la survenue de l’HIP [nombre médian de microhémorragies (IQR) : 4 (1.5-12.5)]. Parmi ces patients, 18 (20%) présentaient des microhémorragies en localisation lobaire, 25 (28%) en position non lobaire, et 46 (52%) présentaient des microhémorragies en position mixte. Le nombre de microhémorragies variait entre 0 et 53. La localisation et le nombre de microhémorragies étaient similaires chez les patients avec une hémorragie lobaire ou profonde (p=0.83 et p=0.36 respectivement).

Incidence des Microhémorragies au cours du suivi
Quatre-vingt patients (48%) ont présenté 285 nouvelles microhémorragies au cours d’un suivi médian de 3,4 (1,4-4,7) années. Parmi eux, 29 patients ne présentaient pas de microhémorragie à l’admission. L’incidence des microhémorragies était de 14,2/100 patients-année, avec un taux de 0,5 nouvelles microhémorragies par an sur toute la population de l’étude. Cette incidence augmentait à 0,7 lésions par an chez les patients ayant au moins 1 microhémorragie à l’admission. Chez les patients ayant présenté une hémorragie lobaire (n=58), 26 patient [45%; Intervalle de Confiance (IC) 95% 32-58] présentaient des nouvelles microhémorragies sur l’IRM de contrôle, dont 8 (31%; IC 95% 12-50) en position strictement lobaire, 11 (42%; IC 95% 22-63) en position strictement non lobaire et 7 (27%; IC 95% 9-45) en position mixte. Parmi les patients avec une hémorragie non lobaire (n=103), 50 (48%; IC 95% 39-58) présentaient des nouvelles microhémorragies, dont 10 (20%; IC 95%CI 8-31) en position strictement lobaire, 24 (48%; IC 95% 34-62) en position strictement non lobaire et 16 (32%; IC 95% 19-45) en position mixte.

Incidence des Microhémorragies : Facteurs Pronostiques et Associés
L’apparition de nouvelles microhémorragies était 2,3 fois plus fréquente chez les patients ayant des microhémorragies à l’admission par rapport aux patients sans microhémorragies (Odds Ratio ajusté [ORa] 2,27; intervalle de confiance [IC] 95% 1,18-4,35). Ceci était particulièrement vrai chez les patients ayant ≥ 1 microhémorragies à l’admission .

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Table des matières

Introduction
Objectifs de la thèse
I. Traitements antithrombotiques et microhémorragies cérébrales
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Conclusion
II. Traitements antithrombotiques et hémorragies cérébrales « spontanées »
II.1 : Influence du traitement par antagonistes de la vitamine K sur les caractéristiques des hémorragies cérébrales
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Conclusion
II.2 : Reprise des traitements antithrombotiques après une hémorragie cérébrale et impact de la reprise sur la survenue d’évènements thromboemboliques ou hémorragiques
Introduction
II.2-a Facteurs influençant la décision de reprendre les traitements antithrombotiques après une hémorragie cérébrale
Méthodes
Résultats
Discussion
Conclusion
II.2-b Impact de la reprise des traitements antithrombotiques sur la survenue d’évènements thromboemboliques ou hémorragiques
Méthodes
Résultats
Discussion
Conclusion
Conclusions générales et perspectives
Références
Annexe I
Annexe II

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