Topologie antennaire pour liaison Full-Duplex Inter-NanoSat

Les travaux présentés dans ce manuscrit de thèse sont issus d’une collaboration entre le Centre National d’Etude Spatiale (CNES) basé à Toulouse, l’entreprise Syrlinks basée à Rennes, et le laboratoire universitaire Lab-STICC, commun notamment à l’Université de Bretagne Occidentale (UBO) et à l’ENSTA-Bretagne .

L’étude a majoritairement été menée au laboratoire Lab-STICC (Laboratoire des Sciences et Techniques de l’Information, de la Communication et de la Connaissance) et plus précisément dans l’équipe DH (Dispositifs hyperfréquences) au sein du pôle MatRF (Matériaux et RF). Le champ d’investigation de l’équipe DH s’intéresse à la conception de composants et de systèmes dans les domaines RF et Micro-ondes pour apporter des solutions originales dans divers domaines tels que les télécommunications, la mer, la défense et la santé. La société Syrlinks est spécialisée dans le développement et la fabrication de produits de radiocommunication destinés aux marchés du spatial, de la sécurité et de la défense. Depuis plusieurs années, Syrlinks s’est également imposée comme un acteur important du domaine spatial en participant au développement de la plateforme Myriade Evolutions du CNES destinée à des missions d’observation de la terre. Sa notoriété s’est également construite grâce au programme spatial Rosetta ayant comme objectif l’exploration de la comète Tchouri. L’entreprise a conçu et réalisé les systèmes de communication sans fil reliant la sonde Rosetta au robot-atterrisseur Philae. Cette thèse s’insère dans l’ambition de Syrlinks de devenir un des leaders mondiaux dans le domaine spatial pour la fourniture d’équipements de radiocommunication embarqués sur des satellites petites plateformes, y compris ceux de type nanosatellite.

De même, depuis plusieurs années, le CNES s’implique de plus en plus dans la recherche et le développement sur les nano-satellites, notamment le standard «CubeSat ». La miniaturisation qu’imposent de telles structures nécessite le développement d’innovations technologiques pour réduire la taille, la masse, ainsi que la consommation de ces plateformes. Ces contraintes s’appliquent également  frontends RF et antennaires tout en permettant des débits de données plus élevés également associés à une montée en fréquence porteuse. Par exemple, pour le projet EYE-SAT, L’ESA et le CNES ont conçu une telle architecture hybride (bandes S et X) et proposé un test expérimental en orbite d’un émetteur miniature en bande X dans le cadre du projet OPS-SAT triple CubeSat ESA. De plus, de nouvelles versions de télémétrie à haut débit sont à l’étude en bande X et en bande Ka. Le CNES conduit également des études sur des constellations de nano-satellites dans lesquelles la liaison inter-satellite est primordiale pour structurer et synchroniser le réseau et permettre un échange de données à haut débit. Le nombre important de satellites et les besoins croissants en terme de débit génèrent des contraintes très fortes sur les ressources et allocations de fréquence. Une des solutions envisagées dans d’autres domaines (5G par exemple) pour augmenter l’efficacité spectrale des liaisons est de mettre en œuvre une communication Full-Duplex bidirectionnelle sur une même bande de fréquence.

Contexte technique de l’étude 

De manière générale, l’évolution des réseaux de communications sans fil a conduit à une augmentation très importante du trafic de données et du nombre d’utilisateurs, ce qui nécessite une amélioration sans cesse accrue des performances des interfaces radios (Antennes et Front-end) notamment pour exploiter au mieux le spectre disponible. L’émergence des nouveaux réseaux tels que la 5 G exige une capacité de prise en charge de flux très importants pour un très grand nombre d’utilisateurs et de connexions ; de nombreuses innovations de l’interface radio (5G New Radio [1], massive MIMO, beamforming, NOMA (non-orthogonal multiple access), Cognitive Radio , …) sont prévues pour résoudre ces problématiques. De nouvelles bandes de fréquence seront également affectées pour la 5G, en dessous de 6 GHz pour les “Lowband 5G” et “Mid-band 5G” et au-delà de 24 GHz et 66 GHz (bandes millimétriques), ce qui illustre d’autant plus le besoin d’optimiser la ressource spectrale. Dans ce contexte global d’augmentation de débit des systèmes sans fil, de tous premiers travaux innovants (2013-2015) ont mis en évidence la possibilité réelle d’une mise en œuvre de transmission en Full-Duplex (FD) et l’intérêt pour cette technique s’est depuis fortement accru au point d’en faire un des axes de réflexion lors de la définition de la 5G [2]. La dénomination « Full-Duplex » se doit cependant d’être précisée. En effet, dans le domaine des réseaux, les transmissions full-duplex sont largement répandues car il s’agit simplement de transmettre l’information de manière bidirectionnelle. Dans les systèmes de communications sans fil, cette appellation correspond en fait à deux cas, celui où les deux sens utilisent deux ressources différentes en fréquence ou en temps (duplexage fréquentiel ou temporel), que nous appellerons « out-of-band Full-Duplex », et celui où une approche plus innovante consiste à émettre et recevoir en même temps et dans la même bande de fréquence. Les termes « in-band Full-Duplex », « vrai » FullDuplex, ou encore STAR (Simultaneous Transmit And Receive) sont ainsi parfois utilisés pour le distinguer des configurations classiques « out-of-band Full-Duplex ». Dans ce chapitre il s’agira tout d’abord de repréciser les différentes configurations classiques, d’introduire la notion de « in-band Full-Duplex » que nous qualifierons simplement de Full-Duplex, ou FD, et d’identifier les avantages a priori de cette technique. Le concept même de Full-Duplex impose, en effet, des exigences élevées lors de la conception de l’émetteur-récepteur en raison des phénomènes d’autointerférence (Self-interference ou SI) correspondant à la fuite du signal transmis vers la voie de réception. Si elle est complètement supprimée, le système FD permet en théorie de diviser la bande de fréquence utilisée par 2, ou de permettre un flux de données double en conservant la même bande de fréquence. Le Full Duplex est considéré comme une solution particulièrement prometteuse pour une meilleure exploitation des ressources spectrales dans le cadre de communication sans fil terrestre .

Un état-de l’art des différentes techniques mises en œuvre pour lutter contre cette auto-interférence dans des systèmes sans fil full-duplex sera dressé.

L’émergence récente de solutions pour répondre au phénomène de SI offre des ouvertures importantes dans de nombreux domaines. Pour le domaine spatial, peu de recherches ont été faites pour le moment, mais les avantages que permettrait cette technique laissent à penser que de futures études vont s’y intéresser. L’augmentation des débits et l’occupation de la bande spectrale sont au cœur des préoccupations du secteur spatial. De plus, l’apparition de projets des grandes constellations de satellites renforce cet intérêt pour le FD afin, par exemple, de mettre en phase (synchroniser) tous les satellites. Cette thèse a pour objectif final d’étudier la faisabilité et la mise en œuvre des techniques Full-Duplex pour une liaison de type ISL (Inter-Satellite Link) entre des nanosatellites. Une brève présentation des nanosatellites ou CubeSats sera proposée dans ce chapitre pour permettre d’identifier les contraintes majeures liées à ce contexte sur la conception du front-end RF Full-Duplex et ainsi dégager un choix d’approches ou de topologies potentiellement pertinentes pour des applications de type CubeSat.

Techniques de duplexage
Dans une communication filaire ou sans fil, l’information peut être transmise de façon unidirectionnelle ou bidirectionnelle. La communication Simplex ne permet l’acheminement d’informations que dans une seule direction entre émetteur et récepteur. Une communication duplex est bidirectionnelle et se divise en 2 catégories : HalfDuplex et Full-Duplex .

La liaison Half-Duplex (HD) qui constitue une version basique d’un duplexage temporel est capable d’émettre et de recevoir alternativement dans un sens ou dans l’autre, chacun leur tour, et la liaison dite « Full-Duplex » (mais qui ne correspond pas au vrai FD envisagé dans cette étude) peut émettre dans les 2 directions.

Dans le domaine des communications sans fil, on retrouve différentes techniques de duplexage/multiplexage et de séparation de canaux. De manière générale, les interférences entre canaux se produisent lorsque les signaux occupent le même espace, ou la même fréquence, ou utilisent les mêmes créneaux temporels ou encore s’ils ont des profils identiques. Une séparation de ces signaux par séparation d’espace, mais de manière plus normalisée et courante une séparation de fréquence (FDMA), de temps (TDMA) ou en code (CDMA) permet d’isoler les canaux entre eux, le minimum d’interférences entre canal étant obtenu lorsque les signaux sont strictement orthogonaux.
– Le TDMA (Time Division Multiple Access) est une technique d’accès multiple par répartition dans le temps. Elle utilise une seule bande de fréquence pour l’émission et la réception, mais attribue des intervalles de temps différents pour transmettre et recevoir les informations. Les utilisateurs émettent successivement l’un après l’autre.
– En FDMA (Frequency Division Multiple Acces), une fréquence distincte est attribuée à chaque signal. Dans la plupart des applications, la bande passante est divisée en deux bandes de fréquence dédiées pour l’émission et la réception, cette technique FDD (Frequency Division Duplexing) étant également dénommée out-of-band-full-duplex. C’est typiquement le cas en LTE ou pour des liaisons bord-sol satellitaire (communication entre une station terrestre et un satellite) qui utilisent des bandes de fréquences différentes pour les liaisons montantes et descendantes.
– Le CDMA (Code division multiple access) utilise une technique d’étalement de spectre. Il permet à plusieurs liaisons numériques d’utiliser simultanément la même fréquence porteuse à partir de l’utilisation simultanée de plusieurs codes orthogonaux ou non (scrambling). Cette technique est quasisystèmatiquement associé à un duplexage fréquentiel des voies montantes et descendantes, du fait de la grande différence de niveaux entre ces deux voies.

Avantages et inconvénients du vrai système Full-Duplex

Les avantages a priori du vrai Full-Duplex (ou in band Full-Duplex) sont les suivants :
– Comme évoqué précédemment, l’utilisation optimale des ressources spectrales et temporelles doit permettre de doubler l’efficacité spectrale par rapport aux techniques classiques de duplexage.
– La réduction du retard total de transmission (end-to-end delay) dans le cas de transmission en mode relais car celui-ci peut recevoir simultanément les données utiles et transmettre d’autres données vers un autre nœud du réseau [3].
– La réduction du temps de latence : en effet, la possibilité de recevoir des signaux de signalisation, de synchronisation et d’allocation tout en réalisant une transmission de données doit permettre un gain du temps de latence sur la partie liaison sans fil [4].
– L’introduction d’un premier niveau de sécurisation sur la couche physique : l’émission simultanée et sur la même fréquence de deux nœuds du réseau compliquent fortement la séparation de ces deux signaux superposés et donc la capacité à décoder d’un éventuel « récepteur intrus » qui ne connait aucun des deux signaux pour les séparer [5].
– L’amélioration potentielle de l’efficacité des réseaux ad hoc grâce à l’écoute et la détection simultanées pendant la transmission des signaux : chaque nœud peut ainsi décider si les autres nœuds transmettent ou non des signaux et ainsi éviter les collisions. Des protocoles de type ARQ (Automatic Repeat Request) spécifiques au Full-Duplex sont d’ailleurs en cours de développement [4]. Le FD peut également participer à réduire ou éliminer complètement le problème du terminal caché qui est un problème typique dans les réseaux locaux sans fil (WLAN) : la capacité d’un terminal à recevoir un paquet de données qui lui est destiné tout en transmettant d’autres données permet également aux terminaux cachés de mieux détecter les nœuds/terminaux actifs dans leurs zones [6]. D’autre part, lorsque le nœud n’a pas de paquet à envoyer, il peut transmettre un signal factice afin que tout nœud caché puisse détecter l’activité à proximité et se rendre compte que le canal est en cours d’utilisation.
– Le même avantage d’écoute et d’émission simultanées est intéressant pour la radio cognitive, avec la possibilité d’émettre en tant qu’utilisateur secondaire dans un réseau avec licence, et cela sans interférer avec les utilisateurs primaires sous licence puisque l’utilisateur secondaire peut les écouter en continu et donc changer de canal.
– La flexibilité accrue des émetteurs-récepteurs : commutation possible entre HD et FD selon les besoins et la configuration du réseau.
– …

Les inconvénients qui peuvent être cités sont ainsi :
– L’auto-interférence ou Self-Interference (SI) constitue le point d’achoppement majeur pour la réalisation effective d’un front-end radio FD capable de traiter ces signaux. La puissance du signal transmis est, en effet, d’un grand nombre d’ordre de grandeur plus importante que celle du signal reçu. Aussi une grande isolation entre les deux voies d’émission/réception (TX/RX) est donc indispensable pour limiter la SI et rendre ainsi le système opérationnel. Le niveau de suppression SIC (Self Interference Cancellation) nécessaire dépend fortement du ratio entre la puissance du signal émis et la puissance minimale du signal utile requise au niveau du récepteur et donc au final de la distance de la liaison et de l’application visée. Le niveau de SIC obtenu impactera forcément la capacité à atteindre un doublement de l’efficacité spectrale. D’ailleurs, dans certaines configurations l’efficacité spectrale risque de s’effondrer en deçà de celle de systèmes traditionnels à deux fréquences.
– Une augmentation de l’interférence inter-utilisateurs est également à craindre pour des systèmes multi-utilisateurs car tous les nœuds ou utilisateurs adjacents émettent simultanément, le nombre d’interférences inter-utilisateurs est accru et les interférences globales au niveau d’un nœud augmentent également.
– La puissance consommée, la complexité et donc indirectement la fiabilité des émetteurs-récepteurs FD peuvent être impactées par la mise en œuvre des techniques d’annulation de l’auto-interférence. Globalement, la complexité et la puissance de calcul nécessaire de la partie numérique seront accentuées : la taille des buffers doit être plus conséquente en FD pour éviter d’accroitre la perte de paquets de données entre la partie acquisition puis transmission. De plus les ressources numériques de l’émetteur-récepteur doivent permettre de traiter simultanément deux fois plus de données, ce qui vient s’ajouter aux ressources nécessaires pour implémenter la partie numérique de la SIC.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 – Contexte technique de l’étude
1.1 Introduction
1.1.1 Introduction
1.1.2 Techniques de duplexage
1.1.3 Avantages et inconvénients du vrai système Full-Duplex
1.1.4 Sources d’auto-interférences (Self-Interference)
1.1.5 Niveaux et étages d’isolation pour la SIC
1.1.5.1 SIC au niveau RF/antennaire
1.1.5.2 SIC au niveau analogique
1.1.5.3 SIC au niveau numérique
1.2 Contexte applicatif de l’étude : les Cubesats
1.2.1 Petites satellites
1.2.2 Avantages et inconvénients des nanosatellites par rapports aux satellites conventionnels
1.2.3 Données techniques des charges utiles et les liaisons bord-sol, sol-bord et intersatellite
1.2.4 Scénarios de liaisons FD inter-CubeSat
1.2.5 Contraintes antennaires
1.3 Objectifs et organisation de la thèse
1.3.1 Cahier des charges de la liaison FD ISL
1.3.2 Organisation de la thèse
Bibliographie
Chapitre 2 – Etude des techniques FD antennaires existante
2.1 Introduction
2.2 Techniques de SIC pour système mono-antennaire
2.2.1 Annulation par polarisation orthogonale
2.2.2 Mono-patch à annulation par coupleur hybride
2.2.3 Antenne unique FD à polarisation circulaire
2.3 Techniques de SIC pour systèmes multi-antennaires
2.3.1 Conception d’un réseau d’antennes
2.3.2 Système FD « Stanford »
2.3.2.1 Principe de fonctionnement
2.3.2.2 Simulations de la topologie antennaire de « Stanford »
2.3.2.3 Réalisation de démonstrateurs
2.3.3 Architecture MIDU
2.3.3.1 Analyse de la structure MIDU
2.3.4 Architecture STAR
2.3.4.1 Principe de fonctionnement
2.3.4.2 Exemple de mise en application en planaire
2.3.5 Conclusion
Bibliographie
Chapitre 3 – Topologies d’Antennes Réseaux à Polarisation Circulaire pour Liaison FD Inter-Cubesat
3.1 Présentation du concept
3.1.1 Principe de fonctionnement
3.1.2 Avantages et améliorations
3.2 Premiers démonstrateurs
3.2.1 Premiers prototypes à 2,4 GHz
3.2.1.1 Structure de base
3.2.1.2 Gain en compacité
3.2.1.3 Influence de l’alimentation
3.2.1.4 Comparaison topologique
3.2.1.5 Analyse temporelle
3.2.2 Mise en œuvre pour la communication FD
3.2.2.1 Configuration testées
3.2.2.2 Exploitation directe des résultats par démodulation vectorielle : VSA
3.2.2.2.1 Présentation de l’interface du logiciel VSA
3.2.2.2.2 Analyses et exploitations des mesures directes par VSA
3.2.2.2.3 Limitations de cette exploitation des mesures directes par VSA
3.2.2.3 Exploitation des résultats par post-traitement sous Matlab
3.2.2.4 Association d’annulation antennaire et numérique de l’auto-interférence
3.2.2.5 Limitations et améliorations
3.2.3 Prototypes à 20 et 26 GHz
3.3 Prototype final
3.3.1 Amélioration de la qualité de la polarisation circulaire
3.3.2 Développement du réseau final
3.3.2.1 Construction du réseau de 64 antennes patch
3.3.2.2 Simulations et analyses
3.4 Perspectives : intégration des antennes et baluns en multi-couches
3.5 Conclusion
Conclusion
Bibliographie

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