Théâtralisation du réel et action sociale

Théâtralisation du réel et action sociale

Faire sens de l’expérience co-construit

L’acte créateur et la psyché de l’artiste ont été étudiés par de nombreux auteurs en psychologie de l’art et en psychanalyse : en guise d’exemple, citons Alexandre Journeau (2011) et son parallèle au jeu, les études de Michelle Morin (2017) autour du sujet créateur et ses traumas ou encore l’exploration des liens entre rêves et création par Masson & Schauder (2017).
Ces travaux soulignent entre autres la part importante d’inconscient dans la création artistique ou les projections du Moi dans les œuvres artistiques. En effet, de nombreux travaux en psychanalyse ont été dédiés à l’étude de la création comme expression de pulsions ou traumatismes inconscients des artistes, dans une tradition freudienne assumée (Freud 1987).
Mais aussi, durant le XXe siècle, les enjeux de la perception visuelle ont particulièrement  intéressé les psychologues dans leurs approches de l’art (Rocha Lordelo 2017, p. 64), à l’instar de Arnheim (1974).

Faire : le travail comme activité

L’approche théorique sélectionnée pour ce travail n’est pas uniquement celle du sens : c’est celle du sens à travers l’activité. Pour cela, j’ai divisé le processus de création – de manière très schématisée – en faire, défaire et refaire. Il s’agit d’un axe d’analyse, d’une tentative de modéliser un processus qui en réalité a été très organique et fluide, composé d’allers-retours constants et de nombreuses redéfinitions. Une approche par le faire ne veut absolument pas faire fi de cet aspect mouvant, mais plutôt constituer une entrée ludique dans un projet théâtral où la création est au centre et qui, justement, a été construit et reconstruit à plusieurs reprises au fil des deux années de travail. Pour Rabardel & Pastré (2005), le faire peut se définir en tant « qu’intervention intentionnelle du sujet visant à produire des transformations dans le monde » (Rabardel & Pastré 2005, p. 18). Or, selon Bonnefond (2016), l’activité ne se limite pas uniquement à ses formes observables – le texte écrit d’une pièce par exemple. On distingue en effet l’activité réalisée du réel de l’activité (Bonnefond 2016, p. 44). Comme l’expliquent Rabardel & Pastré (2005), « le réel de l’activité ne coïncide pas forcément avec l’activité réalisée : le réel de l’activité, ce n’est pas seulement ce qui a été fait, [produit, réalisé], mais aussi ce qu’on aurait voulu faire et qu’on n’a pas réussi à faire, ce qu’on a fait à la place de ce qu’on aurait voulu faire » .

Faire la mise en scène

A présent, il s’agit de comprendre comment les deux metteurs en scène décrivent leur travail. Quel est le rôle du metteur en scène ? Comment il intéragit avec l’équipe ? Voici ce qu’en  dit Nicolas Yazgi : « moi je vois vraiment le travail de mise en scène comme un travail d’orchestration. Tu es un peu le chef d’orchestre, parce qu’il faut bien quelqu’un qui décide, il faut être le garant d’une vision » (Entretien avec Nicolas Yazgi, suite 31 mai 2017, réplique N38).
Ainsi pour le metteur en scène, son travail correspond à celui d’un directeur d’orchestre « garant d’une vision » et réunissant tous les corps de métier autour d’un seul objectif commun. Tout comme en musique, au théâtre le rythme compte énormément. Et c’est la metteuse en scène Sophie Pasquet-Racine qui nous parle de l’importance de l’enchaînement visuel et verbal dans un spectacle :
On n’a pas idée à quel point ça change un spectacle, une faute de rythme, ça bousille un spectacle;
un spectacle peut-être magnifique, très beau, etcetera, si le rythme n’est pas pensé – alors après c’est ma question le rythme – mais vraiment faut trouver le rythme juste, mais c’est en musique, en danse, en tout art vivant, c’est quand même assez premier (Entretien avec Sophie Pasquet-Racine, 3 novembre 2017, réplique S50).

Défaire : jeu et enjeux

Lorsque les membres du projet Agora-Territoire décident de reprendre les trois pièces de la deuxième phase pour créer un spectacle théâtral ouvert au public, plusieurs questions se posent concernant les modalités de reprise. Comment enchâsser les trois pièces ? Faut-il construire un cadre dramaturgique les liant ? Nicolas Yazgi a donc réfléchi à la construction de Territoire ; des  éléments qui avaient caractérisé la deuxième phase du projet ont donc été retravaillés, d’autres ont été abandonnés au profit de nouvelles idées. Voici comment le dramaturge décrit cette phase de réflexion : Ça semble évident maintenant, mais je me suis beaucoup posé de questions de l’ordre : « est-ce qu’on reprend les trois vraiment, est-ce qu’on en reprend que deux », alors trois c’est toujours un nombre un peu magique, si tu veux commencer à ouvrir des possibilités pour que les gens réfléchissent à d’autre domaines sociaux, je pense que trois c’est mieux que deux, après je me suis dit « dans quel ordre on les met ? », alors bien sûr là c’est dans le même ordre quand elles ont été faites mais c’est pas juste pour ça en fait. C’est que j’ai été tout à coup convaincu que la partie beaucoup plus humaine qui te touche vraiment au fin fond de l’émotion, elle était très bien au centre, parce que pour moi c’est un pivot du truc et le pivot c’est de dire que même dans la première, même dans la troisième toutes ces décisions, tous ces procédés, il y a toujours après des destins biographiques qui sont impactés par ça […]. Et puis c’est très important comme en musique les questions rythmiques, et la première et la troisième elles ont quelque chose de l’ordre de cette belle tradition du burlesque politique quelque part, et l’autre – même s’il y a un petit peu de burlesque, mais je trouve c’est complètement autre chose – de l’avoir au milieu ça donnait je pense aussi une manière à ce que l’énergie de réception et de participation des spectateurs se renouvelle (Entretien avec Nicolas Yazgi, suite 30 octobre 2017, réplique N1).

Refaire : le spectacle final

Voici comment Nicolas Yazgi parle de cette phase de travail : Tu vas lire le texte avec les différents intervenants, tu vas leur raconter tes intentions etcetera, c’est des pros, ils vont t’écouter, forcément c’est aussi des artistes, donc ils vont s’approprier les choses personnellement et heureusement parce que c’est pour leur patte qu’ils sont intéressants, et donc c’est trouver cet équilibre entre quelque chose qui est approprié et puis ensuite ça revient vers le point de centralisation qui est la petite entité mise en scène.  Et ça sera des allers-retours entre ces appropriations – qui doivent être personnelles pour qu’elles soient fortes et singulières et qu’elles amènent l’intelligence créative de quelqu’un qui est spécialiste de la lumière et qui est un bon spécialiste de la lumière, quelqu’un qui est une bonne costumière, quelqu’un qui est un bon scénographe – et la garantie d’une cohérence avec la vision (Entretien avec Nicolas Yazgi, 31 mai 2017, réplique N38).
Le metteur en scène et dramaturge parle de cette étape comme d’un travail collectif et collaboratif. L’équipe théâtrale – comme le soulignait plus haut Viviane Thiébaud – a la chance de pouvoir travailler avec l’auteur de la pièce, car il est en mesure de leur faire part de ses  intentions derrière l’écriture, de comment il avait imaginé le spectacle. Les créateurs et créatrices vont donc tenir compte de ces remarques, mais également apporter leur « patte », leur savoir-faire, leur créativité pour ensuite se retrouver tous et toutes autour de la même vision scénique, comprenant la mise en scène, les lumières, la scénographie, les costumes, la musique, etc.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. AGORA-TERRITOIRE : UN PROJET PLURIDISCIPLINAIRE (ET TERRITORIAL) EN SCIENCES SOCIALES 
I.I. L’Université de Neuchâtel et le Théâtre de la Connaissance
I.II. Les membres du projet
I.III. Le développement chronologique du projet
I.III.I. Première phase : un certain regard
I.III.II. Deuxième phase : trois pièces courtes pour une action sociale
I.III.III. Troisième phase : Territoire ou un autre regard
I.IV. Théâtralisation du réel et action sociale
II. APPROCHE METHODOLOGIQUE
II.I. Posture épistémologique et fondements théoriques
II.I.I. Faire sens de l’expérience co-construite
II.I.II. Faire : le travail comme activité
II.I.III. Pensée et (re)création
II.II. Problématique et question(s) de recherche
II.III. Une étude de cas qualitative
II.IV. Méthodes sélectionnées
II.IV.I. L’entretien
II.IV.II. L’observation
II.IV.III. L’étude de sources textuelles
II.V. Analyse des données
II.VI. Enjeux éthiques..
III. ETUDE DU PROCESSUS DE CREATION DE TERRITOIRE
III.I. Faire : le travail d’écriture
III.I.I. Prise de notes
III.I.II. Ecrire la dramaturgie
III.I.III. Ecrire la saynète universitaire
III.I.IV. Ecrire la pièce sur les enjeux du photovoltaïque
III.I.V. Ecrire la pièce sur l’hébergement thérapeutique.
III.I.VI. Ecrire la pièce sur l’écorégion
III.II. Faire : les trois pièces courtes
III.II.I. Faire la mise en scène
III.II.II. Faire le jeu
III.III. Défaire : jeu et enjeux
III.III.I. Défaire la mise en scène
III.III.II. Défaire le jeu
III.IV. Refaire : le spectacle final
III.IV.I. Faire le prologue, l’epilogue et les transitions
III.IV.II. (Re)faire la scénographie
III.IV.III. Refaire la mise en scène
III.IV.IV. Refaire le jeu
IV. CONSIDERATIONS REFLEXIVES ET CRITIQUES
CONCLUSION

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