Techniques d’identification des espèces du complexe Anopheles gambiae

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L’adulte

Les adultes ou (imagos) d’anophèle mènent une vie aérienne. Après émergence, ils volent et s’accouplent. Ils ont une morphologie particulière rapidement reconnaissable des autres stades avec trois parties bien distinctes : la tête, le thorax et l’abdomen (Figure 5).
– La tête porte deux gros yeux composés, deux antennes (de 15 articles) avec un fort dimorphisme sexuel, un appareil buccal qui permet une double circulation des fluides à travers deux canaux différents : de la salive qui est injectée du moustique vers l’hôte à travers le canal salivaire; du sang de l’hôte (ou d’une substance sucrée) qui est aspiré par le moustique à travers le canal alimentaire.
– Le thorax porte une paire d’ailes et 3 paires de pattes qui sont les organes de locomotion.
– L’abdomen comprend 10 segments dont au moins 7 sont bien visibles. Le dernier porte à son extrémité les appareils génitaux (génitalia chez les mâles et cerque chez la femelle). L’abdomen est couvert d’écailles, en nombres variables, qui peuvent être utilisées pour l’identification des espèces (Carnevale & Robert, 2009).

Les vecteurs du paludisme

En Afrique subsaharienne les vecteurs du paludisme appartiennent à une douzaine d’espèces avec une compétence vectorielle (aptitude à absorber, multiplier et transmettre le parasite) très variable (Djogbénou, 2009). La plupart des vecteurs majeurs de Plasmodium appartiennent à des groupes ou complexes d’espèces avec à l’intérieur de chaque complexe ou groupe, des vecteurs et des non vecteurs (Carnevale & Robert, 2009). Dans la région Afrotropicale, An. gambiae, An. coluzzii, An. arabiensis, An. melas, An. merus, An. funestus, An. moucheti et An. nili sont considérés comme les principaux vecteurs de Plasmodium humains, alors que, An. mascarensis (Madagascar), An. pharoensis, An. paludis, An. hargreavesi, An. brunnipes sont considérés comme des vecteurs locaux et/ou secondaires selon les régions et leurs abondances (Robert et al., 2017). La capacité à transmettre le parasite découle de particularités biologiques, écologiques et génétiques très spécifiques (Robert et al., 2017), ce qui explique en partie la distribution des vecteurs dans le monde.

La distribution des vecteurs au Sénégal

Au Sénégal, le paludisme sévit de façon quasi permanente dans presque toutes les zones géographiques avec une hétérogénéité de la transmission conditionnée par le climat, l’hydrographie et les facteurs anthropiques (PNLP, 2017a). Il faudra toutefois noter que le fardeau de la maladie est toujours lourd dans certaines régions du pays où les décès qui lui sont attribuables persistent (PNLP, 2017b).
En fonction de leur rôle vecteur et de leur aire de distribution, les vecteurs du paludisme se répartissent comme suit au Sénégal (Niang, 2014) : (i) quatre sont considérés comme des vecteurs majeurs du fait de leur large répartition et de leur rôle dans la transmission: An. gambiae, An. coluzzii, An. arabiensis et An. funestus ; (ii) trois sont considérés comme vecteurs secondaires du fait de leur répartition focalisée et de leur implication locale dans la transmission: An. nili, An. melas et An. pharoensis (Figure 6).
En fonction des conditions climatiques et des facteurs écologiques qui imposent un certain niveau de transmission, on distingue au Sénégal classiquement deux principaux faciès épidémiologiques, à savoir, le faciès tropical et le sahélien (Faye, 1994).
– Le faciès tropical :
Il est caractérisé par une transmission saisonnière longue qui dure entre 4 et 6 mois couvrant la saison des pluies et le début de la saison sèche. Le paludisme y est méso-endémique stable. La transmission est assurée par des vecteurs majeurs ou d’importance locale (An. gambiae, An. coluzzii, An. arabiensis, An. funestus et An. nili). Ce type de faciès est surtout retrouvé dans les régions Sud (Ziguinchor, Kolda, Tambacounda et Kédougou) appartenant au domaine soudano-guinéen. Dans ce faciès la transmission s’effectue généralement de juillet à décembre.
– Le faciès sahélien :
Il est caractérisé par une transmission saisonnière courte (<4 mois). Le paludisme y est hypo-endémique, de stabilité intermédiaire à instable et est transmis par An. gambiae, An. coluzzii, An. arabiensis, An. funestus, An. melas et An. pharoensis. Ce faciès est retrouvé surtout dans les parties Nord des régions du centre (Kaolack, Fatick, Diourbel, Dakar et Thiès) et dans les régions du Nord (Louga, Saint louis et Matam).

Le complexe Anopheles gambiae au Sénégal

Parmi les membres du complexe An. gambiae, seuls An. gambiae, An. coluzzii, An. arabiensis et An. melas sont présents au Sénégal et sont tous impliqués dans la transmission du paludisme. Les gîtes des espèces d’eau douce sont essentiellement constitués par des collections d’eau de taille variable, ensoleillées, avec ou sans végétation. Ces dernières sont représentées par des flaques d’eau de pluie ou de bords de robinets publics, des ornières, des empreintes de sabot ou de pas et des mares temporaires. D’autres types de gîtes sont constitués de surfaces irriguées, de barrages, de fosses d’emprunt de terre, etc. (Robert & Carnevale, 1987). Les larves d’An. melas sont inféodées aux eaux saumâtres, aussi la répartition de cette espèce est strictement littorale, dans les estuaires, lagunes et mangroves, où elle peut représenter plus de 25% du complexe An. gambiae (Diagne et al., 1994; Diop et al., 2002).
An. gambiae, An. coluzzii et An. arabiensis sont sympatriques dans une bonne partie du pays et leur fréquence relative est fonction des conditions climatiques. Généralement, An. gambiae et/ou An. coluzzii prédominent dans les régions du sud et surtout pendant la saison des pluies alors qu’An. arabiensis prédominent dans le nord plus aride.

Techniques d’identification des espèces du complexe Anopheles gambiae

L’existence d’une hétérogénéité au sein des populations d’An. gambiae a été pour la première fois observée sur la base d’observations purement écologiques avec la mise en évidence de deux écotypes l’un se développant en eau douce et l’autre en eau saumâtre. C’est ainsi que l’identification des membres du complexe a d’abord été basée sur la technique des croisements expérimentaux puis sur d’autres techniques.

Méthode des croisements expérimentaux

Cette méthode a permis d’isoler et d’identifier les espèces d’eau douce et celles d’eau saumâtre. Elle a été basée sur l’existence au sein des générations F1 de mâles stériles (Coz & Hamon, 1964) mais également sur l’étude de l’héritabilité de la dieldrine (Davidson, 1964). Ceci a permis ainsi de démontrer que le complexe An. gambiae était constitué d’espèces (An. gambiae A, An. gambiae B, An. melas et An. merus) morphologiquement identiques mais génétiquement différentes.

La cytogénétique

Elle est basée sur l’étude des inversions au niveau des chromosomes géants ou chromosomes polythènes des glandes salivaires des larves de stade 4 ou des cellules nourricières ovariennes de femelles semi-gravides. Elle a permis à partir de l’étude des inversions paracentriques sur le chromosme X de différencier les espèces du complexe (Coluzzi et al., 1979). Des études complémentaires portant sur les autres chromosomes, notamment le chromosome 2R a permis de mettre en évidence une hétérogénéité au sein de l’espèce nominale An. gambiae s.s. avec la description de plusieurs formes chromosomiques (Forêt, Savane, Bissau, Bamako et Mopti) sur la base de l’existence d’inversions fixées (Coluzzi et al., 1979, 2002; Touré et al., 1998). Cependant, même si cette technique a permis des avancées notoires dans l’identification des espèces au sein du complexe, elle présente l’inconvénient que les chromosomes polythènes ne sont observables que chez les femelles semi-gravides et les larves de stade 4, ce qui constitue une portion de la population de moustique à l’état sauvage. De plus, la préparation des chromosomes est longue et fastidieuse, et la lecture des inversions requiert une certaine expertise.

La méthode isoenzymatique

Elle est basée sur la mobilité électrophorétique différentielle de certaines enzymes ayant les mêmes fonctions mais présentant des séquences d’acides aminés différentes : ce sont des isoenzymes. Certains allèles s’avèrent spécifiques d’espèces ou de populations (allèles discriminants) et peuvent être utilisés comme marqueurs d’identification (Lochouarn et al., 1996). Tout comme la méthode cytogénétique ces tests ont permis l’identification de nombreuses espèces jumelles au sein de complexe du genre Anopheles (Simard, 1999). Cependant, l’utilisation de cette méthode exige de disposer entre autres de matériel frais et de ce fait, a été délaissée au profit des méthodes basées sur l’amplification de l’ADN (Robert et al., 2017).

La technique de polymérisation en chaine

Les progrès de la biologie moléculaire ont permis le développement de sondes ou amorces ADN spécifiques qui ont débouché sur la mise au point d’un test diagnostic basé sur l’amplification par PCR des gènes codant pour les ARN ribosomaux (Scott et al., 1993). Ce test permet l’identification rapide des spécimens collectés sur le terrain, quels que soient le sexe et le stade de développement (Sangare, 2014). Il nécessite très peu de matériel de départ (pattes, ailes, etc.). Son efficacité a été largement démontrée. Elle est maintenant pratiquée en routine dans la plupart des laboratoires (Robert et al., 2017).

Les réactifs de la PCR

La PCR permet d’amplifier une séquence spécifique d’ADN dans un mélange réactionnel approprié contenant (Figure 7) :
– Une enzyme permettant la synthèse des nouveaux brins d’ADN lors de l’amplification. L’enzyme utilisée est la Thermus Aquaticus polymerase (Taq) actuellement synthétisée, protéine de 94 kilodaltons, isolée de la bactérie Thermus aquaticus. La Taq polymerase est une ADN polymerase thermostable qui résiste à des températures élevées pouvant atteindre 95°C.
– Les dNTP (deoxynucleotide triphosphate) qui sont constitués d’un mélange contenant les différentes bases A (Adénosine), T (Thymine), G (Guanine), C (Cytosine).
– Le MgCl2 qui est utilisée dans la PCR du fait de son influence sur l’activité enzymatique de la Taq.
– Les amorces ou oligonucléotides (amorces ou primers) qui sont des polymères nucléotidiques, de 10 à 30 paires de base, de séquences complémentaires spécifiques à une partie du gène à amplifier. Lors de la PCR, les amorces se fixent spécifiquement sur l’ADN dénaturé par chauffage et l’ADN compris entre les amorces est amplifié. Leur choix est très important. Elles déterminent les caractéristiques de l’ADN amplifié (longueur, spécificité et nature).
– Le tampon de réaction qui comprend plusieurs composants dont le Tris-Cl, KCl, (NH4)2S04, MgCl2 (15mM) qui contribuent à stabiliser la PCR.

Les étapes de l’amplification

Etape 3: la Taq polymerase synthétise le brin complémentaire à partir de l’amorce fixée sur sa séquence complémentaire en utilisant les dNTP. Ceci permet ainsi de doubler l’ADN cible. Cette étape se déroule généralement à 72°C. Chaque cycle ainsi répété permet d’aboutir à un ADN cible multiplié exponentiellement par 2n (n=nombre de cycles) : c’est l’étape de l’élongation.
Amplification exponentielle Le processus est répété et la région d’intérêt amplifiée exponentiellement

Les méthodes utilisées

Au cours de notre étude, nous avons sélectionné trois méthodes couramment utilisées dans l’identification des espèces An. gambiae.

Méthode de Scott et al., (1993) et Fanello et al., (2002)

Cette méthode est basée sur l’amplification de séquences spécifiques aux espèces, situées dans les espaces intergéniques (IGS) de l’ADN ribosomal. Cette méthode permet d’identifier les espèces du complexe An. gambiae quel que soit leur stade de développement, en utilisant soit un extrait d’ADN ou des fragments d’un spécimen. La méthode utilise un cocktail de cinq oligonucléotides (amorces) de 20 bases dont une commune aux différentes espèces et une spécifique à chacune des espèces An. gambiae, An. arabiensis, An. quadriannulatus, An. merus et An. melas. Après amplification, les amplifiats sont digérés par l’enzyme de restriction HhaI, ce qui permet ensuite de différencier en plus d’An. arabiensis les espèces An. coluzzii et An. gambiae.

La méthode de Wilkins et al., (2006)

Cette méthode utilise des amorces IMP (intentional mismatch primers) qui détectent des polymorphismes mononucléotidiques pour l’identification des espèces du complexe Anopheles gambiae de même que les formes moléculaires. Le principe est basé sur l’introduction de séquences non concordantes de trois bases au troisième oligonucléotide à partir de l’extrémité 3’ de l’ADN. Cette introduction permet d’augmenter la spécificité des amorces et de pouvoir identifier facilement les espèces.

La méthode de SINE200 de Santolamazza et al., (2008)

Les SINE (éléments cours intercalés) sont des marqueurs génétiques co-dominants très répétitifs  (>3000 copies) répandus sur le génome d’An. gambiae s.s. L’analyse du polymorphisme d’insertion sur un segment d’environ 200 paires de bases à travers le génome d’An. gambiae présentant une forte hybridation (ilots de spéciation) a permis de mettre au point une PCR spécifique permettant d’identifier les espèces An. gambiae et An. coluzzii.

Description des sites d’étude

Le travail a été réalisé entre septembre et novembre 2018 autour de deux villages situés respectivement en zone soudanienne et soudano-guinéene (Figure 9).

Le village de Madina Djikoye

Il se trouve dans la région de Fatick. Le village de Madina Djikoye est situé dans la zone soudanienne entre les isohyètes 700 et 1000 mm. Le climat est de type soudanien avec une saison des pluies qui s’étend sur 4 à 5 mois de juin à septembre-octobre avec des amplitudes thermiques souvent au-dessus de 25°C. Les températures maximales sont enregistrées entre avril-mai (40°C) et octobre (35°C), alors que les températures minimales souvent autour de 15°C sont enregistrées en décembre-janvier et entre 20 et 25°C le reste de l’année. An. gambiae, An. arabiensis et An. coluzzii sont sympatriques dans le village avec une prédominance d’An. gambiae. Une étude réalisée par Nwakanma et al, (2013) a mis en évidence des taux d’hybridation de l’ordre de 32,5%.

Le village de Djinkoré Mafing

Il est situé dans la zone soudano-guinéenne nord entre les isohyètes 1000 et 1300 mm à une dizaine de kilomètres de la ville de Tambacounda. La saison des pluies dure cinq (5) mois dans cette zone (de mai à octobre). La végétation se compose d’arbustes et de savane boisée remplaçant la forêt qui couvrait autrefois une bonne partie de la région et dont les vestiges sont représentés par des forêts reliques. La dégradation de la végétation naturelle est due à l’action combinée du déficit pluviométrique persistant et l’extension des zones cultivées. Comme dans le village de Madina Djikoye, An. gambiae, An. arabiensis et An. coluzzii sont sympatriques dans le village de Djinkoré Mafing (Niang et al., 2019). Des taux d’hybridation de l’ordre de 4,7% ont été mis en évidence par Niang et al., (2014).

Collecte et traitement des échantillons

Les échantillons sur lesquels ont porté notre étude, ont été constitués de stades aquatiques collectés aux alentours des villages sélectionnés.

La collecte des échantillons

Autour de chaque village, des gîtes ont été choisis au hasard pour la collecte. Les larves ont été le plus souvent collectées par la méthode du «dipping», méthode qui consiste à prélever l’eau du gîte à l’aide d’une louche, puis y rechercher les larves d’anophèles. Des pipettes de type Pasteur ont été aussi utilisés («pipeting») pour prélever directement les larves dans les gîtes (de petite taille) ou pour récupérer les larves se trouvant dans la louche (Figure 10). Les larves ont été séparées en fonction des types de gîte de provenance et conservées dans des pots portant le numéro du gîte et le nom de la zone d’étude (village de Madina Djikoye ou de Djnkore Mafing).

Traitement des échantillons collectés sur le terrain

Une fois collectées sur le terrain, les larves ont été triées puis conservées dans des tubes NUNC contenant de l’éthanol 70° portant le numéro du gîte et le site d’étude.
Les tubes ont ensuite été rangés dans des boîtes NUNC (Figure 11).

Identification des échantillons

L’identification des larves collectées a été faite au laboratoire en utilisant les méthodes de Scott et al., (1993) et Fanello et al., (2002), Wilkins et al., (2006) et la méthode de PCR- SINE200 de Santolamazza et al., (2008).

Extraction d’ADN

L’ extraction de l’ADN a été faite par la méthode CTAB. Les échantillons ont été sortis des tubes contenant l’éthanol et ont été bien séchés. Chaque larve a ensuite été individuellement broyée dans un tube numéroté contenant 200 µl de CTAB 2% préalablement préparé et conservé à température ambiante. Les tubes ont ensuite été placés dans un bain sec à 65°C pendant cinq (5) minutes puis ont été refroidis dans de la glace pendant cinq (5) minutes. A l’issue de cet étape, 200 μl de chloroforme ont été ajoutés à chaque tube puis les tubes ont été centrifugés pendant cinq (5) minutes à 12 000 tours/min(1256,6371 rad/s). A l’issue de la centrifugation, la phase supérieure de chaque tube a été prélevée et mise dans un nouveau tube portant le même numéro, puis 200 μl d’isopropanol ont été ajoutés à ce surnageant puis le contenu des tubes a été bien mélangé par inversion (chaque tube est secoué de bas en haut). Les tubes ont ensuite été centrifugés pendant quinze (15) minutes à 12 000 tours/mn puis la phase liquide a été minutieusement vidée et les tubes bien égouttés, puis 200 μl d’éthanol 70° ont été ajoutés aux tubes puis ces derniers ont été centrifugés pendant cinq minutes à 12 000 tours/mn. Après vidange de l’éthanol, les tubes ont été séchés pendant cinq minutes au Speed Vac puis 50 μl d’eau distillée ont été ajoutés à chaque tube. Les tubes ont ensuite été conservés sur la paillasse pendant au moins 12 h puis à -20°C jusqu’aux tests de laboratoire.

Amplification

L’ADN extrait a été amplifié en utilisant les méthodes de Scott et al., (1993) et Fanello et al., (2002), la méthode de Wilkins et al., (2006) et Santolamazza et al., (2008). Les protocoles spécifiques sont préséntés respectivement aux annexes 1, 2, et 3.

Migration et visualisation des produits de la PCR

Après amplification, les produits de la PCR ont été migrés sur un gel d’agarose à 1,5% contenant du bromure d’ethidium pour séparer et identifier les fragments d’ADN. A l’issue de la migration, les bandes ont été visualisées sous une table lumineuse munie d’une lampe à ultraviolet. Le protocole de migration est présenté en annexe 4.

Analyse des résultats

Les trois techniques PCR ont été comparées en termes de sensibilité et de spécificité en considérant la méthode de Scott et al., (1993) et Fanello et al., (2002) comme méthode de référence. Le coefficient Kappa de Cohen () a ensuite été utilisé pour évaluer le degré de concordance par paire entre les trois techniques en utilisant l’échelle suivante (Cohen, 1960):
 < 0,20 : Mauvaise
0,21 < < 0,40 : Médiocre
0,41 < < 0,60 : Modérée
0,61 < < 0,80 : Bonne
0,81 < < 1 : Excellente
Nous avons ensuite évalué pour les deux sites d’étude, les fréquences relatives des espèces du complexe An. gambiae rencontrées ainsi que des hybrides entre An. gambiae et An. coluzzii.
Ces fréquences ont été estimées par la proportion en pourcentage du nombre de spécimen de chaque espèce ou d’hybrides sur le nombre total de spécimens identifiés. La comparaison des fréquences a été faite par la méthode de Chi2 avec un seuil de signification fixée à 0,05.
Les données obtenues à partir de cette étude ont été saisies dans une base de données sous EXCEL et analysées en utilisant le logiciel R.

RESULTATS ET DISCUSSION

Résultats globaux

Au total, les ADN de 408 larves (240 provenant de la zone de Madina Djikoye et 168 de la zone de Djinkoré Mafing) ont été extraits et les espèces d’origine identifiées par les trois méthodes PCR. Trois espèces ont été identifiées dans chacun des deux sites : An. gambiae, An. arabiensis, An. coluzzii ainsi les hybrides entre An. gambiae et An. coluzzii.

Comparaison entre les trois méthodes

Sensibilité et spécificité

Dans la zone de Madina Djikoye

En prenant en référence la méthode de Scott, la sensibilité a varié entre 75% et 100% dans la zone de Madina Djikoye (Tableau I) chez An. arabiensis, An. gambiae et An. coluzzii. Un seul hybride a été détecté par la méthode de Scott. Avec la méthode Wilkins, la sensibilité et la spécificité ont été respectivement de 93 et 100%. Au total 14 spécimens identifiés avec la méthode de Scott n’ont pu l’être avec la méthode Wilkins chez An. arabiensis. Chez An. gambiae, la méthode Wilkins a été aussi spécifique et sensible que la méthode Scott alors que chez An. coluzzii, les deux paramètres ont été respectivement de 100 et 57%. Au total 3 spécimens non identifiables par la méthode Scott ont été identifiés par la méthode Wilkins comme An. coluzzii.
Par rapport à la méthode SINE, la sensibilité a été de 97% chez An. arabiensis et 75% chez An. coluzzii. Aucune spécificité n’a été observée puisqu’aucun individu négatif n’a été détecté par les deux méthodes. Avec seulement 4 individus parfaitement identifiés par les deux méthodes, une sensibilité de 100% a été observée chez An. gambiae avec les deux méthodes (Tableau I).

Dans la zone de Djinkoré Mafing

Du fait de l’absence d’individus non identifiés entre la méthode de Scott et les deux autres méthodes, la spécificité a été nulle entre les différentes paires comparées (Tableau II). Avec la méthode Wilkins, la sensibilité a été de 91%. Au total, 12 individus identifiés comme An. arabiensis avec la méthode de Scott n’ont pu l’être avec celle de Wilkins. Il en a été de même pour 1 individu identifié comme An. arabiensis par la méthode Wilkins mais qui n’a pas pu l’être avec celle de Scott. Chez An. gambiae, An. coluzzii et les hybrides, tous les individus identifiés par la méthode de Scott ont pu l’être avec la méthode de Wilkins et SINE. Une sensibilité de 100% a été observée pour les trois espèces avec les trois méthodes (Tableau II).

Concordance

La concordance entre les méthodes exprimées par le coefficient Kappa de Cohen a varié entre 0,37 et 1 dans la zone de Madina Djikoye. On note ainsi dans cette zone une concordance qui varie entre «médiocre» pour An. coluzzii entre les méthodes Scott et Wilkins, «modérée» pour An. arabiensis entre les méthodes Scott et Wilkins et «Excellente» pour An. gambiae entre les méthodes Scott et Wilkins.

Fréquences relatives des espèces et des hybrides

Fréquences globales

L’étude des variations des fréquences globales avec les trois méthodes montrent une prédominance d’An. arabiensis dans chacune des deux zones. Bien que les autres espèces ainsi que les hybrides sont observées dans les deux zones, les fréquences d’An. gambiae sont plus élevés que celles d’An. coluzzii dans la zone de Djinkoré Mafing alors que les fréquences des deux espèces sont similaires dans la zone de Madina Djikoye. Dans la zone de Djinkoré Mafing, les fréquences des espèces ainsi que celles des hybrides sont similaires entre les trois méthodes. La même observation a été faite dans la zone de Madina Djikoye où il a été noté que les fréquences d’An. arabiensis estimées avec la méthode Wilkins ont été significativement différentes de celles observées avec les deux autres méthodes (Figure 12).

Variations mensuelles des fréquences

L’étude des variations mensuelles des fréquences des espèces montre globalement des variations  similaires quel que soit la méthode et la zone.
Dans la zone de Djinkoré Mafing, An. arabiensis prédomine en octobre pour la méthode de Scott alors que pour les deux autres méthodes, c’est au mois de novembre que les fréquences les plus élevées ont été observées. Pour les autres espèces, An. gambiae a prédominé en novembre pour les méthodes de Wilkins et SINE alors que c’est plutôt en octobre que les fréquences les plus élevées ont été observées pour la méthode de Scott. Chez An. coluzzii, les fréquences observées ont été globalement faibles, les plus élevées ont été observées en octobre. Quelque soit l’espèce et la méthode, aucune différence significative n’a été observée entre les fréquences (Figure 13).
Dans la zone de Madina Djikoye, l’étude des variations des fréquences chez An. arabiensis a montré une augmentation légère de septembre à novembre quelle que soit la méthode. Une tendance contraire a été observée chez An. coluzzii. Chez An. gambiae, les fréquences les plus élevées ont été observées en octobre pour la méthode SINE et Wilkins et en octobre et novembre pour la méthode Scott. Pour les hybrides, les fréquences les plus élevées ont été observées en septembre. Quelle que soit l’espèce et la méthode, aucune différence significative n’a été observée entre les fréquences (Figure 13).

Discussion

L’objectif de notre étude était de comparer trois méthodes d’identification des espèces du complexe An. gambiae et des hybrides entre An. gambiae et An. coluzzii. Les résultats obtenus montrent la présence d’An. arabiensis, d’An. gambiae, et d’An. coluzzii ainsi que les hybrides entre ces deux derniers dans les deux zones d’étude avec chacune des trois méthodes d’identification utilisées. Ces résultats ne sont pas surprenants puisque des résultats similaires avaient déjà été observés par Caputo et al., (2008); Nwakanma et al., (2013) et Niang et al., (2014, 2019).
En considérant la méthode de Scott comme méthode de référence, l’étude comparative des trois méthodes montre une bonne sensibilité et une bonne spécificité dans les deux zones. La méthode de Wilkins présente une sensibilité de 100% avec presque toutes les espèces dans les deux zones à l’exception de l’espèce An. arabiensis (93% dans la zone de Madina Djikoye et 91% dans la zone de Djinkoré Mafing). Cette diminution de la sensibilité chez An. arabiensis est due au fait que la méthode de Scott a pu identifier certains spécimens comme An. arabiensis (14 spécimens) alors que la méthode de Wilkins n’a pu parvenir à le faire.
Dans la zone de Madina Djikoye, tous les spécimens identifiés comme An. gambiae par la méthode de Scott l’ont été aussi par la méthode SINE. Par contre, parmi ceux qui ont été identifiés comme An. arabiensis et An coluzzii par la méthode de Scott, certains se sont révélés différents. Dans la zone de Djinkoré Mafing, An. arabiensis, An. gambiae, An. coluzzii ainsi que les hybrides détectés par la méthode de Scott l’ont été aussi par celle de SINE.
La spécificité de la méthode de Wilkins par rapport à celle de Scott a été variable en fonction des espèces dans la zone de Madina Djikoye. Elle a était très spécifique avec An. arabiensis et An. gambiae, mais moins chez An. coluzzii.
La spécificité n’a pu être évaluée en comparant la méthode de SINE par rapport à celle de Scott dans les deux zones du fait de l’absence de spécimens non détectés avec les deux méthodes.
Ces résultats montrent ainsi globalement que les deux méthodes utilisées étaient plus ou moins sensibles à la méthode de référence puisque la majorité des espèces identifiées par celle-ci a été détectée aussi bien par la méthode de Wilkins que la méthode SINE. En considérant les espèces An. gambiae, An. coluzzii et les hybrides entre ces deux espèces, nos résultats sont discordants avec ceux de Santolamazza et al., (2011) qui avaient observé une discordance entre les méthodes utilisées.
Cependant, quelle que soit la méthode utilisée l’espèce An. arabiensis prédomine dans les deux zones en concordance avec des résultats déjà obtenus dans les deux zones (Niang et al., 2014, 2019 ; Nwakanma et al., 2013). Cependant, il est à signaler que du fait des discordances observées avec la méthode de Wilkins, les fréquences d’An. arabiensis ont été significativement différentes dans la zone de Madina Djikoye. Les fréquences des autres espèces ont été comparables dans les deux zones avec les trois méthodes avec une légère prédominance d’An. coluzzii et d’An. gambiae respectivement dans la zone de Madina Djikoye et Djinkoré Mafing, ce qui a été observé auparavant (Caputo et al., 2008 ; Nwakanma et al., 2013). Concernant les hybrides, notre étude a montré des fréquences similaires contrairement aux études antérieures sur des populations imaginales qui avaient montré des fréquences plus élevées dans le village de Madina Djikoye (Nwakanma et al., 2013 ; Niang et al., 2014).
En fonction des mois de collecte, il a été observé dans la zone de Madina Djikoye, durant toute la période de notre étude (septembre-novembre) que l’espèce An. arabiensis prédomine quelle que soit la méthode avec des fréquences relativement plus élevées en novembre en fin de saison des pluies. Les fréquences d’An. coluzzii ont connu une relative diminution de septembre à novembre alors que chez An. gambiae les fréquences les plus élevées ont été observées en octobre. Des observations similaires ont été faites par (Nwakanma et al., 2013) dans la zone de Njabakunda en Gambie. Dans la zone de Djinkoré Mafing, An. arabiensis est l’espèce prédominante en octobre et en novembre. An. coluzzii a été très rare voire absente contrairement à An. gambiae qui est très présente en Octobre, ce qui confirme les observations de (Niang et al., 2019) dans cette zone.

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Table des matières

LISTE DES ABREVIATIONS
Introduction
CHAPITRE I : Synthèse bibliographique
1. Généralités sur les vecteurs du paludisme
1.1. Cycle biologique des anophèles
2. Les vecteurs du paludisme
3. La distribution des vecteurs au Sénégal
3.1. Le complexe Anopheles gambiae au Sénégal
4. Techniques d’identification des espèces du complexe Anopheles gambiae
4.1. Méthode des croisement expérimentaux
4.2. La cytogénétique
4.3. La méthode isoenzymatique
4.4. La technique de polymérisation en chaine
CHAPITRE II : MATERIELS ET METHODES
1. Description des sites d’étude
1.1. Le village de Madina Djikoye
1.2. Le village de Djinkoré Mafing
2. Collecte et traitement des échantillons
2.1. La collecte des échantillons
2.2. Traitement des échantillons collectés sur le terrain
3.Traitement des échantillons au laboratoire :
3.1. Identification des échantillons
4. Analyse des résultats
CHAPITREIII : RESULTATS ET DISCUSSION
1. Résultats
1.1. Résultats globaux
1.2. Comparaison entre les trois méthodes
2. Discussion
Conclusion
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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