Synthèse et caractérisation de composés à caractère biradicalaire

Synthèse et caractérisation de composés à caractère biradicalaire

Techniques de caractérisation

Résonnance magnétique nucléaire (RMN)

La spectroscopie de résonnance magnétique nucléaire est basée sur la propriété de certains noyaux atomiques de posséder un moment cinétique de spin non nul, résultant de la proportion de protons et de neutrons le composant. Un atome possédant un tel spin peut exister dans un nombre d’états de spin égal à 2 S+1, où S est la valeur de spin du noyau. Par exemple, un atome d’hydrogène, de spin ½, pourra exister sous deux états quantiques de spin différents, soit un spin de ½ ou de -½.
En l’absence de champ magnétique externe, ces états de spin ont des niveaux d’énergie dégénérés, mais lorsqu’ils sont mis en présence d’un champ magnétique très puissant, ces niveaux d’énergie se dissocient les uns des autres, c’est ce que l’on appelle l’effet Zeeman. Ce faisant, dans ces conditions, un atome peut passer d’un état de spin à l’autre en absorbant de l’énergie. En revenant à l’équilibre, ce noyau réémet cette énergie sous forme de radiation, qu’il est possible de recueillir et d’analyser.
Un spectre RMN est une image des transitions possibles entre les niveaux énergétiques des noyaux d’une molécule. Ces transitions ne sont pas toutes équivalentes et l’énergie nécessaire pour les effectuer dépend de l’environnement chimique de l’atome étudié. La proximité d’atomes électronégatifs, l’influence de l’anisotropie magnétique générée par la proximité d’une liaison multiple ou d’un cycle aromatique ainsi que le solvant utilisé pour solubiliser le composé à analyser sont des facteurs qui modifient l’allure d’un spectre RMN.
La résonnance magnétique nucléaire est une technique intéressante pour faire la caractérisation de composés radicalaires. La présence de radicaux sur une molécule perturbe le champ magnétique local, venant changer de beaucoup l’allure d’un spectre.
Les présents travaux ont été effectués à l’aide des appareils spectromètre Varian Inova 400 MHz et spectromètre Agilent DD2 500 MHz à l’université Laval.

Résonnance paramagnétique des électrons (RPE)

La spectroscopie de résonnance paramagnétique des électrons (RPE) est une technique similaire à la RMN. Elle utilise la séparation des niveaux énergétiques de spin des électrons (½ ou -½) lorsqu’ils sont soumis à un champ magnétique externe (effet Zeeman). Il est par contre nécessaire de préciser que seuls les électrons libres (non appariés) sont sujets à ce phénomène ce qui rend cette technique très appropriée pour observer un caractère biradicalaire dans une molécule. Ces mesures ont été effectuées à l’université de Malaga, en Espagne, par le groupe du professeur Juan Casado et ses collaborateurs

Spectroscopie Raman

La spectroscopie Raman est une technique de spectrométrie de diffusion permettant de déterminer les fréquences vibrationnelles d’une molécule. C’est une technique semblable à l’infrarouge selon le principe que toutes deux donnent des informations sur les niveaux vibrationnels, mais elle se distingue de cette dernière par son principe de base. Afin d’obtenir la signature spectrale d’une molécule, un échantillon de celle-ci est placé dans un faisceau laser monochromatique. L’énergie de ce rayon lumineux est choisie afin d’être insuffisante pour amener la molécule à un niveau électronique réel excité, mais suffisante pour l’amener à un niveau virtuel excité. La relaxation depuis ce niveau virtuel laisse la molécule à un niveau vibrationnel excité ce qui réémet un photon d’énergie légèrement plus faible que le photon incident. La différence d’énergie entre le photon incident et le photon réémis correspond à l’énergie de la vibration de la molécule. La diffusion Raman étant un phénomène de faible intensité, il est nécessaire d’éclairer l’échantillon avec un faisceau laser, permettant ainsi d’atteindre une puissance assez élevée pour pouvoir la détecter.
Les mesures de spectroscopie Raman ont été effectuées à l’université de Malaga à l’aide d’un spectromètre dispersif Senterra de Bruker avec une résolution de 3 cm-1 sous atmosphère inerte. Les mesures effectuées sous pression ont été conduites à l’aide d’une cellule à enclumes de saphir en utilisant de petits morceaux de diamant comme calibrant.

Interféromètre quantique supraconducteur (SQUID)

L’interféromètre quantique supraconducteur, de l’anglais Supraconducting Quantum Interference Device (SQUID), est un magnétomètre permettant de détecter des champs magnétiques très faibles. Un matériau supraconducteur possède une phase quantique décrivant l’entièreté de ses électrons et l’application d’un champ magnétique comme celui généré par la présence d’espèces triplets perturbe cette phase. L’interprétation de cette perturbation de phase quantique permet de calculer la susceptibilité magnétique d’un matériau, conséquence du champ magnétique qu’il génère. Ces mesures ont été effectuées à l’université de Malaga, en Espagne, par le groupe du professeur Juan Casado et ses collaborateurs

Calculs computationnels

Les calculs computationnels peuvent être utilisés pour prédire les comportements de molécules étudiées dans le laboratoire. Dans le cadre de ce projet, la technique de calcul de la théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT) a été privilégiée puisqu’elle permet d’obtenir des informations sur les niveaux d’énergie d’un système de grande taille tout en gardant une bonne précision. Les différentielles et les bases utilisées seront détaillées dans les prochains chapitres. Ces calculs ont été effectués à l’université de Malaga, en Espagne, par le groupe du professeur Juan Casado et ses collaborateurs.

Chapitre 3 : Synthèse et caractérisation de composés à caractère biradicalaire

Approche

Notre approche consiste à employer une méthode qui est négligée dans la littérature pour parvenir à des composés biradicalaires, soit d’utiliser l’encombrement stérique comme force motrice. Le squelette de l’anthanthrone est très étendu, ce qui en fait un bon candidat pour notre approche. Nous pensons qu’installer des groupements volumineux en proximité de ce cœur moléculaire pourra faire parvenir à notre but de générer des radicaux stables.
Pour ce faire, nous voulons introduire des groupements aryles près du cœur moléculaire (voir Figure 20).
Figure 20 : a) Encombrement stérique important entre le cœur de la molécule d’anthanthrone et les phényles,
b) le bris des liaisons double génère des radicaux qui se recombinent pour donner le cœur anthanthrène, et c) composé biradicalaire : les fonctions biphényles peuvent tourner beaucoup plus librement.
Nous pensons que l’encombrement stérique généré par la proximité de ces groupements aryles agira comme force motrice pour effectuer le bris des deux liaisons doubles et ainsi générer quatre radicaux, dont deux pourront se recombiner et reformer le motif anthanthrène dans le cœur de la molécule. Ce bris de liaisons permet à la molécule d’être beaucoup plus libre de faire la rotation sur l’axe de la liaison double et permet donc de réduire l’encombrement stérique. Le bris des deux doubles liaisons vient naturellement laisser en place deux radicaux sur les carbones liés en positions méso de l’anthanthrone, générant ainsi le biradical souhaité. Ce processus est semblable à celui retrouvé pour l’hydrocarbure de Chichibabin tétrabenzannulé68 et les oligo(pérylène-N-annulé)quino-diméthanes présentés au chapitre 1.69
Un des points intéressants de cette approche pour générer des biradicaux est qu’il n’y a pas d’augmentation du nombre de sextets de Clar dans le cœur de la molécule. Comme on peut voir en bleu sur la Figure 20, le nombre de sextets reste le même lors du passage en couche ouverte. Cela est très rare dans la littérature.
Deux types de dérivés ont été imaginés dans cette optique soit ceux comportant un motif biphénylméthyle et ceux comportant un motif fluorényle.

Synthèse

La synthèse des différents composés d’intérêt à partir du 4,10-dibromoanthanthrone se fait en trois étapes simples misant sur la grande polyvalence des couplages oxydatifs au palladium. Elle commence par un couplage de Sonogashira permettant d’installer aux positions 4 et 10 de la molécule un groupement triisopropylsilyléthynyle (TIPSe). Il est important d’effectuer cette étape en premier, le 4,10-dibromoanthanthrone étant une molécule très peu soluble et donc difficilement utilisable dans des réactions organiques standards. En lui accrochant de gros groupements solubilisants, on diminue cet effet et on augmente de beaucoup les rendements des réactions suivantes. En raison de ce manque de solubilité, il est nécessaire d’effectuer la réaction dans l’ortho-diclorobenzène (o-DCB) et de la laisser agiter durant trois jours afin d’obtenir un rendement intéressant.La deuxième étape consiste à installer des partenaires de couplage dans les positions méso des atomes de carbone 6 et 12 de l’anthanthrone. Cet objectif est atteint en utilisant une oléfination de Ramirez afin d’installer deux chlores géminaux sur un carbone hybridé sp2.104 Cette réaction, très semblable à une réaction de Wittig pour la formation d’alcènes, s’effectue dans le tétrachlorométhane qui agit à la fois comme solvant et comme réactif. L’utilisation de tétrabromométhane dans cette réaction, afin d’installer des partenaires de couplage plus réactifs, n’est pas possible dans ce cas. Cela est dû au fait que l’encombrement stérique occasionné par les quatre atomes de brome est trop grand et nécessiterait une torsion plus importante du cœur moléculaire. La réaction avec le CBr4 donne comme résultat un très faible rendement et des produits de dégradation.34

Dérivés biphénylméthyles

La dernière étape pour les composés comportant des unités biphénylméthyles consiste en un couplage de Suzuki-Miyaura entre les atomes de chlore installés à l’étape précédente et un dérivé aryle possédant une fonction acide ou ester boronique. La réaction s’effectue dans des conditions standards de couplage de Suzuki-Miyaura, ne serait-ce qu’il est nécessaire d’ajouter du bromure de tétrabutylammonium (TBAB), jouant le rôle d’agent de transfert de phase et permettant d’obtenir un meilleur rendement. Le caractère biradicalaire d’une molécule pouvant apparaitre sous l’influence de plusieurs stimuli, comme la chaleur ou une longueur d’onde d’énergie suffisante, la réaction est effectuée à une température relativement basse de 50 à 60 °C, ainsi qu’à l’abri de la lumière. Une bonne protection vis-à-vis l’oxygène est aussi de mise puisque les radicaux ont tendance à réagir rapidement avec l’oxygène triplet de l’air (Figure 21).
Figure 21 : Schéma de synthèse général pour la préparation des différents composés biphénylméthyles (en haut) et différents substituant R ainsi que le rendement de la dernière étape pour chaque substituant (en bas).
Une grande partie des partenaires de couplage étaient disponibles commercialement, mais certains ont dû être préparés en laboratoire. C’est le cas des esters boronique des dérivés p-nitro, p-diméthylamino et p-fluoro qui ont été synthétisés à partir de leur analogue bromé à l’aide d’une procédure de borylation de Miyaura standard catalysée au palladium. Les rendements sont acceptables et sont retrouvés à la Figure 22.
Figure 22 : Schéma de synthèse de la borylation des différents partenaires de couplage préparés en laboratoire.
Nous avons tenté d’introduire plusieurs types de groupements aryles sur les positions méso de l’anthanthrone, soit des groupements riches, neutres et pauvres en électrons. Les rendements pour les réactions avec des groupements neutres et pauvres en électrons ont généralement bien fonctionné pour un quadruple couplage, avec des rendements allant jusqu’à 89 % pour le dérivé tert-butyle (composé 1). Cela correspond à un rendement de 97 % par couplage. Le dérivé 1-naphtyle (9) n’a pas pu être isolé, probablement dû au grand encombrement stérique induit dans la molécule. D’autres conditions seraient à essayer pour y parvenir. Le dérivé 4-nitro (10) a été synthétisé, mais jamais isolé sous sa forme pure. Il semble y avoir dégradation constante de la molécule lors de la purification, potentiellement due à la présence d’un caractère biradicalaire très facilement accessible. Le groupement nitro étant très électro-attracteur, la génération de radicaux est favorisée, rendant envisageables des réactions avec l’oxygène ou de la dimérisation.
En ce qui concerne les dérivés portant des groupements riches en électrons, nous avons tenté de reproduire la réaction avec les groupements 3-méthoxyphényle (7), 2-hexylthiophène (11), 4-diméthylaminophényle (12) et 4-méthoxyphényle (13). Cependant, seul le premier a été isolé. Les autres composés semblent s’oxyder très rapidement à l’air, et ce, dès l’ouverture du ballon réactionnel. Un groupement donneur en électrons a comme effet d’augmenter l’énergie des orbitales frontières, rendant l’oxydation du produit beaucoup plus aisée. Les différentes techniques de purification utilisées n’ont pas été fructueuses et ne mènent qu’à la dégradation des différents produits. En ce qui concerne le 3-méthoxyphényle, nous avons pu obtenir le produit pur, probablement dû à la plus faible conjugaison avec le reste de la molécule qu’offre un substituant en position méta.

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Table des matières

Chapitre 1 : Introduction
Pigments de cuve
4,10-dibromoanthanthrone
But du projet : anthanthrone et biradicaux
Composés biradicalaires
Applications potentielles
Stabilisation de biradicaux
Approche cinétique
Approche thermodynamique
Chapitre 2 : Techniques de caractérisation
Résonnance magnétique nucléaire (RMN)
Résonnance paramagnétique des électrons
Spectroscopie Raman
Interféromètre quantique supraconducteur (SQUID)
Calculs computationnels
Chapitre 3 : Synthèse et caractérisation de composés à caractère biradicalaire
Approche
Synthèse
Dérivés biphénylméthyles
Dérivés fluorényles
Caractérisation physicochimique des différents composés biphénylméthyles
Diffraction des rayons X et calculs théoriques
Résonance magnétique nucléaire
Spectroscopie Raman
Observation des propriétés magnétiques
Conclusion du chapitre
Chapitre 4 : Extension de la conjugaison de l’anthanthrone
Extension dans l’axe 6-12
Synthèse
Extension dans l’axe 4-10
Conclusion pour ce chapitre
Chapitre 5 : Conclusions et perspectives
Bibliographie
Annexes
Annexe 1 : Synthèse
Annexe 2 : Spectres RMN
Annexe 3 : Données cristallographiques du composé 2

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