Synthèse de nanoparticules d’oxydes de fer par voie aqueuse – Optimisation pour l’hyperthermie magnétique

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Théorie de l’hyperthermie des nanoparticules monodomaines

Un échantillon de nanoparticules magnétiques placé dans un champ magnétique alternatif de fréquence f et d’amplitude µ0Hmax décrit un cycle d’hystérésis. Sous l’effet du champ, les particules s’aimantent et leurs moments s’alignent progressivement suivant la direction du champ appliqué. Ce déplacement d’aimantation s’effectue par déplacement de parois magnétiques dans le cas de particules multidomaines, et par retournements cohérents dans le cas de particules monodomaines. La quantité de chaleur A délivrée par les nanoparticules durant un cycle d’hystérésis complet correspond simplement à l’aire de ce cycle d’hystérésis et s’exprime comme ceci où M(H) est l’aimantation des nanoparticules. La puissance spécifique absorbée par les nanoparticules (SAR, Specific Absorption Rate) s’exprimant en W/g est la grandeur significative communément utilisée pour décrire le pouvoir hyperthermique des nanoparticules magnétiques. Le SAR s’exprime et est donc directement dépendant de l’aire d’hystérésis. Comme nous le verrons dans cette partie, A est complexe à décrire et dépend principalement de l’anisotropie effective des particules Keff, de leur volume V, leur température T, de la fréquence et l’amplitude du champ magnétique appliqué et des interactions magnétiques interparticulaires.
Nous détaillerons dans cette partie les différentes théories de l’hyperthermie dans le cas de nanoparticules indépendantes magnétiquement, fixes ou en mouvement. Ensuite nous introduirons l’influence des interactions magnétiques dans les calculs de puissances de chauffe. Enfin nous présenterons les récents travaux effectués sur la diffusion de chaleur autour d’une (plusieurs) nanoparticule(s) soumise(s) à un champ magnétique alternatif.

Hyperthermie des nanoparticules sans interactions magnétiques

Cas de nanoparticules fixes

Reprenons la schématisation d’une nanoparticule dans un champ magnétique extérieur H (cf. Figure I. 2) en introduisant un angle # entre la direction du champ appliqué et l’axe de facile aimantation comme représentation en Figure I. 6(a). L’équation (I. 6) devient [4]:
Nous pouvons voir l’évolution de cette énergie magnétique réduite sur le diagramme Figure I. 6 (c) avec $ variant entre 0 et 2, un angle # = 30° et % = 1. Nous remarquons que
lorsque le champ appliqué est supérieur au champ d’anisotropie , le diagramme énergétique ne possède qu’un seul minimum dans la direction de l’axe d’anisotropie. A l’inverse, lorsque est inférieur à , le profil énergétique possède deux minima notés (!1, E1) et (!2, E2) et deux maximas dont le plus petit est noté (!3, E3). En l’absence de champ appliqué (soit $ = 0), nous retrouvons que l’énergie prend deux minima équivalents pour !1 = 0° et !2 = 180° (Figure I. 6(c) et (d)). Quand $ > 0, un des deux minima est favorisé par rapport à l’autre, et on remarque qu’en augmentant l’amplitude du champ magnétique appliqué, l’abscisse du minima (!1, E1) se déplace pour favoriser un alignement de l’aimantation selon la direction du champ . Ainsi on tend progressivement dans cet exemple vers !1 = # = 30°. A l’inverse, pour $ < 0, la position (!2, E2) est favorisée et !2 tend vers 210°.

Calcul de cycles d’hystérésis dynamiques utilisant l’approximation à deux niveaux

Nous avons vu que les cycles d’hystérésis de nanoparticules purement superparamagnétiques peuvent être calculés à partir des fonctions d’équilibre pour des orientations quelconques des moments magnétiques. Dans le cas limite T = 0 K, nous avons établi le calcul des cycles grâce au modèle de Stoner-Wohlfarth. Cependant entre ces deux cas limites, la description du comportement magnétique n’est pas simple. L’activation thermique du renversement magnétique due à une barrière énergétique faible (relaxation de Néel-Brown)
pour des températures supérieures à 0 K, entrainant une baisse du champ coercitif , est compliqué à intégrer dans un modèle. Dans bon nombre de modèles théoriques, le modèle de Stoner-Wohlfarth a été adapté aux températures supérieures à 0 K. Souvent, la variation du champ coercitif en température et en fréquence est exprimée comme dépendante du temps de mesure [9]. De ce fait, la valeur du champ coercitif dépendrait de la valeur du pas considéré ou de l’amplitude maximale du champ magnétique appliqué. Cette description est donc reliée à la définition du temps et entraine nécessairement des conséquences non physiques.
Le modèle proposé par J. Carrey et al. [5] est similaire à ceux de Usov et al. [9] et Lu et al. [8], et repose sur l’approximation à deux niveaux. Le calcul des hystérésis ne dépend alors plus que des énergies des minima (!1, E1) et (!2, E2) et du maxima local (!3, E3) (cf. Figure I. 6(b)). On néglige pour cela les états excités à l’intérieur de chaque puit énergétique.
Pour une amplitude de champ magnétique appliqué inférieure à , l’aimantation passe de la position !1 à la position !2 à une fréquence et inversement de « 2 à « 1 à une fréquence avec.

Aires d’hystérésis dans le cas général

Nous venons de constater que la LRT ne peut s’utiliser que pour des systèmes où < 1.  Parallèlement, les modèles basés sur la théorie de Stoner-Wohlfarth ne sont valables que pour & > 0,7 pour des cycles d’hystérésis majeurs. Hormis cela, seules les simulations numériques nous permettent d’obtenir les cycles et aires d’hystérésis. Nous allons maintenant voir le comportement des cycles d’hystérésis en fonction des paramètres du champ appliqué; étape indispensable dans la plupart des études d’hyperthermie magnétique. Il n’existe pas de paramètre universel sans dimension pour de telles études, en raison de la dépendance des cycles aux différents paramètres internes et externes des systèmes.
La Figure I. 10(a) représente les résultats des aires d’hystérésis en fonction du rayon des nanoparticules et de leurs températures. La Figure I. 10(b) représente l’évolution de l’aire en fonction du rayon et de l’amplitude du champ magnétique appliqué. Dans les deux cas, on se place à # = 0. Pour cette étude, les paramètres choisis, sont: , I.20 , , , et . Les deux figures montrent clairement que les valeurs d’aires les plus grandes sont obtenues pour de larges nanoparticules ferromagnétiques. Pour ce type de nanoparticules, une transition abrupte entre un régime avec de petites aires et un régime avec de fortes valeurs d’aire est remarquée en fonction de la température ou du champ magnétique. Suivant que la valeur du champ coercitif est plus petite ou plus grande que l’amplitude du champ appliqué, l’aire prendra respectivement de petites ou de fortes valeurs. Maintenant, pour un jeu de paramètres donné de champ appliqué, il est possible d’optimiser le rayon des nanoparticules pour maximiser l’aire d’hystérésis. Cette étude est primordiale en hyperthermie magnétique pour optimiser les caractéristiques propres aux nanoparticules adaptées aux différents types d’études.
Figure I. 10 Profils d’aires d’hystérésis obtenus par simulations numériques. (a) Evolution de l’aire en fonction du rayon et de la température pour # =0. La ligne en pointillé représente le profil d’aire maximale pour chaque température. (b) Evolution de l’aire en fonction de l’amplitude du champ magnétique et du rayon pour # =0. La ligne représente le profil d’aire maximale pour chaque pas d’amplitude de champ. (c) et (d) Aires d’hystérésis normalisées en fonction du champ magnétique normalisés pour différentes valeurs de rayons respectivement pour # =0 et # aléatoire. (Figure tirée de [5])
Les Figure I. 10(c) et Figure I. 10(d) montrent la dépendance de l’aire d’hystérésis en champ magnétique appliqué, pour différentes valeurs de rayons de nanoparticules, pour # = 0 et # aléatoire. Le champ appliqué va de 0 mT à (dans cet exemple = 26mT) et est normalisé par . Pour de très petites particules, les équations (I. 39) et (I. 41), ainsi que de nombreux travaux ([16], [17]) prévoient que l’application de la LRT implique une dépendance de l’aire d’hystérésis au carré de l’amplitude du champ appliqué. C’est également ce que nous pouvons constater dans cet exemple pour de faibles rayons. Pour des nanoparticules ferromagnétiques à larges rayons, on observe une aire quasi nulle pour de faibles valeurs de champ appliqué, puis une pente abrupte de la courbe au champ critique, se terminant par un plateau pour de plus fortes amplitudes de champ. Dans le cas de tailles de nanoparticules intermédiaires, la transition entre deux régimes présente des évolutions pouvant être linéaires. Le régime de transition de chaque courbe a été simulé numériquement pour déterminer le facteur de puissance correspondant (cf. Figure I. 11). Pour de très petites particules de rayon 3 nm, on retrouve une dépendance au carré, prévue par la LRT sur tout le domaine d’amplitude de champ balayé. Pour des particules plus grosses, cette dépendance reste observable pour de faibles valeurs de champ appliqué mais diminue ensuite. En effet, en Figure I. 11, on constate que pour des particules entre 4 nm et 9 nm, le facteur de puissance diminue progressivement de 2 à 0,6. Pour ces cas là aussi, l’ajustement numérique offre une très bonne superposition avec les simulations. Dans le cas de grosses particules ferromagnétiques (rayons supérieurs à 9 nm), l’évolution de l’aire présente une inflexion abrupte à la valeur du champ coercitif. Il n’est donc pas possible de sortir un facteur de puissance constant sur tout le domaine d’amplitude de champ. Cet ajustement n’est alors effectué que jusqu’au point d’inflexion. Le facteur de puissance augmente très rapidement en fonction du rayon des particules à partir de 9 nm (cf Figure I. 11). Nous verrons expérimentalement qu’une large plage de facteur de puissance peut être observée. Par exemple, les valeurs d’exposant supérieures à 2 ne seront pas forcément la preuve formelle de particules multi-domaines.

Utilisation des modèles théoriques en fonction de la taille des nanoparticules

Après voir exposé les différents modèles utilisables pour décrire les cycles d’hystérésis de nanoparticules fixes et indépendantes, nous allons résumer graphiquement leurs domaines de validité en fonction des paramètres du problème. Nous allons nous appuyer pour cela sur la Figure I. 12.
Commençons par le cas de petites nanoparticules, soit quand & > 1,6. Pour ces particules, le cycle d’hystérésis est réversible, et le champ coercitif peut être considéré comme nul. On utilise alors les fonctions d’équilibres (décrites en 1.2.1.1.1) pour décrire l’évolution des cycles. Ces particules sont inutiles en hyperthermie à cause de leur cycle complètement réversible. On se sert néanmoins des fonctions d’équilibres pour déterminer la susceptibilité statique ainsi que pour simuler numériquement le comportement de ces particules dans le régime superparamagnétique.
Quand le rayon augmente tout en gardant & > 1,6,≪ le cycle d’hystérésis commence à s’ouvrir, l’aire devient donc non nulle. Dans les cas de $ $ < 1, la LRT permet à la fois de décrire le cycle d’hystérésis et d’en calculer l’aire suivant le degré de précision requis par l’analyse (cf. 1.2.1.1.4). La validité et l’exactitude de la LRT se réduisent ensuite au fur et à mesure que le volume des particules augmente comme décrit en Figure I. 9(e) et (f) et marqué en zone sur la Figure I. 12. La transition entre un régime superparamagnétique et un régime ferromagnétique se situe à . Aucun changement abrupt ne se produit à cette limite, le champ coercitif ayant commencé à augmenter avant et continuant après. Pour , les particules sont donc dans un régime ferromagnétique où le cycle d’hystérésis s’ouvre de plus en plus à mesure que le volume augmente. Ces particules sont de fait les plus intéressantes pour l’hyperthermie car elles présentent les pertes d’hystérésis les plus importantes. Dans ce régime, on décrit préférentiellement le cycle d’hystérésis grâce au modèle basé sur la théorie de Stoner-Wohlfarth quand le volume des particules est loin de la transition superparamagnétique-ferromagnétique à & < 0,7. L’utilisation de cette théorie est valable si le cycle est saturé soit pour dans le cas # = 0 et pour dans le cas de # aléatoire. La description de cycles mineurs (à faible amplitude de champ appliqué) pourra se faire en utilisant la LRT.
Quand le volume des particules augmente encore, un mode de retournement magnétique incohérent prend place, ce qui a pour effet de décroitre rapidement la valeur du champ coercitif et donc l’aire d’hystérésis. Des modèles analytiques permettent de calculer l’aire dans ces cas-là (marqué sur le graphe). A partir d’un certain volume, l’évolution du champ coercitif ne dépend plus du volume et correspond simplement au champ coercitif des particules à T = 0 K. Si le phénomène apparait pour des particules dont le volume est inférieur au volume où le retournement incohérent apparait, le champ coercitif décrit un maximum sous la forme d’un plateau (marqué sur le graphe). Si le mode de retournement incohérent apparait avant ce plateau, on pourra observer à la place un pic dans l’évolution du coercitif.
Pour des volumes encore plus importants, les particules pourront présenter un mode vortex [18] puis une configuration magnétique multidomaine. Les aires d’hystérésis correspondantes à ces configurations étant faibles, les nanoparticules correspondantes ne présenteront pas d’intérêt pour l’hyperthermie magnétique.

Cas nanoparticules dans un liquide visqueux

Nous venons de voir la description de cycles d’hystérésis dans le cas idéal de nanoparticules fixes. Dans le cas de l’application biomédicale, il est cependant probable que les nanoparticules soient comme piégés, dans l’incapacité de se mouvoir physiquement. Néanmoins, la majorité des mesures d’hyperthermie magnétique (principalement des mesures de SAR) s’effectue sur des échantillons de nanoparticules en milieu liquide visqueux. Nous développons ici certains aspects théoriques relatifs à la dynamique des nanoparticules magnétiques soumis à un champ extérieur en milieu liquide [19].
Plongées dans un milieu visqueux, les nanoparticules ont la possibilité de se retourner physiquement grâce à l’action du couple magnétique et des fluctuations thermiques, décrits respectivement par les couples et . Pour décrire l’évolution dynamique des nanoparticules, on étudie les solutions aux équations stochastiques du mouvement à partir des vecteurs unitaires d’aimantation et de direction de facile aimantation .
Nous présentons maintenant l’évolution dynamique des vecteurs et en fonction des paramètres propres aux nanoparticules et au champ magnétique appliqué. Le vecteur unitaire d’aimantation est décrit par la loi stochastique de Landau-Lifshitz avec , étant la constante d’amortissement et le rapport gyromagnétique. et sont respectivement les vecteurs de champ effectif et de champ magnétique aléatoire associé aux fluctuations thermiques du système.
L’équation de mouvement du vecteur unitaire tenant compte de la petite des particules magnétiques s’exprime avec , étant le coefficient de friction tel que avec la viscosité dynamique d’un liquide.
A partir de ce jeu d’équations à résoudre, nous pouvons décrire le comportement de nanoparticules magnétiques plongées dans un milieu visqueux sous l’influence d’un champ magnétique extérieur.

L’approximation magnéto-dynamique (AMD)

A titre comparatif, nous allons présenter l’approximation magnéto dynamique (AMD) qui consiste à décrire la dynamique de nanoparticules magnétiques dans un liquide visqueux en négligeant les effets de fluctuations thermiques. On annule donc les termes et des équations (I. 42) et (I. 43). Nous verrons plus loin que l’AMD se révèle utile pour comprendre l’évolution des cycles prenant en compte les fluctuations thermiques. Dans l’AMD, le comportement des nanoparticules est étroitement dépendant de l’amplitude du champ magnétique appliqué. Nous distinguerons donc deux cas: et .

Champ appliqué de faible amplitude:

Comme nous le détaillerons plus tard, cette condition sur le champ appliqué implique un mode d’aimantation que nous appellerons « mode visqueux » car la puissance absorbée dans ce cas est principalement due des nanoparticules en rotation dans leurs milieux. Dans les exemples suivants en Figure I. 13, on fixe .

Les conséquences sur le SAR

Comme vu précédemment avec l’équation (I. 9), le SAR dépend directement de l’aire d’hystérésis. Dans le régime visqueux et pour une fréquence de l’ordre de 10 kHz, le SAR résultant d’une assemblée de nanoparticules est assez faible. De plus, l’augmentation de la fréquence du champ appliqué abaisse l’aire d’hystérésis. Le régime visqueux n’est donc pas optimal pour les applications d’hyperthermie. A l’inverse, de larges valeurs de SAR sont obtenues en se plaçant dans le régime magnétique. Du fait de l’orientation complète des nanoparticules, les cycles décrits sont de forme carrée. Ce régime permet cependant d’atteindre des valeurs de SAR intéressantes pour des amplitudes de champs pas trop élevées avec des nanoparticules ayant de faibles anisotropies. De plus, d’un point de vue physiologique pour l’application sur le vivant, des conditions de champ trop extrêmes peuvent provoquer l’apparition de courants de Foucault dans le corps. Il est conclu dans cette étude que la condition intermédiaire est optimale, avec des cycles d’hystérésis de formes carrées, et ce à des niveaux de fréquences et de champs acceptables. Nous montrons en Figure I. 18 un exemple d’étude en SAR de nanoparticules dispersées dans l’eau (+ = 0,01 g/(cm.s)). En Figure I. 18(a) est présentée l’étude du SAR en fréquence à différentes valeurs d’amplitude de champ appliqué. On peut constater que pour , les valeurs de SAR sont assez faibles, et augmentent significativement pour . La dépendance en fréquence est linéaire sur toute la gamme étudiée. La Figure I. 18(b) représente le SAR en fonction de l’amplitude du champ, à deux fréquences fixes. Nous constatons de même manière qu’en se plaçant à une fréquence trop faible, le SAR prend de faibles valeurs. Pour une fréquence suffisante, une augmentation nette du SAR est observée vers , due à la transition entre les deux modes et au caractère ferromagnétique de l’échantillon étudié.

Hyperthermie des nanoparticules magnétiques en interactions

Nous avons développé les théories de l’hyperthermie dans le cas de nanoparticules magnétiquement indépendantes. Néanmoins, pour un échantillon de nanoparticules magnétiques plongées ou non dans un solvant et soumis à un champ magnétique alternatif, il convient de ne pas ignorer les effets des interactions inter-particulaires. Expérimentalement, les études en SAR montrent que l’efficacité en pertes augmente [20], ou au contraire diminue [21] avec la concentration des échantillons.
Les effets sur le SAR dépendant de la concentration, des paramètres du champ magnétique, du diamètre des particules et de l’anisotropie magnétique (paramètre que nous développerons en 1.3), peuvent être résumés en un modèle simplifié: si les particules sont suffisamment éloignées les unes des autres, on peut les considérer comme des entités magnétiques sans interactions et le SAR augmente en fonction de la concentration. Puis pour de plus fortes concentrations, quand les interactions magnétiques deviennent comparables ou supérieures au champ d’anisotropie, on peut observer une diminution du SAR.
Par ailleurs, les interactions interparticulaires ont pour effet d’organiser les particules sous l’effet d’un champ magnétique. On assiste ainsi à un réarrangement spatial des particules, sous formes d’agrégats ou « d’aiguilles » notamment comme montré dans l’exemple ci-dessous:
L’intensité des interactions dipolaires est primordiale pour la formation de chaines de nanoparticules et représente la clé pour comprendre les propriétés magnétiques de ces systèmes. Nous allons voir comment le dimensionnement des aiguilles influence le cycle d’hystérésis en comparaison à d’autres types de réarrangements (cubes, agrégats, etc.).

Influence de différents types d’agrégation sur le cycle d’hystérésis

L’énergie magnétique des chaines est dominée par les interactions interparticulaires. Elles permettent au système de garder les aimantations parallèles à la direction du champ appliqué. Il a également été montré que ces chaines pouvaient se tordre et former ainsi des anneaux de nanoparticules. Par ailleurs, dû au caractère anisotropique des nanoparticules, différents réarrangements sont possibles. L’influence de la géométrie sur le cycle d’hystérésis est montrée théoriquement ci-dessous en Figure I. 20 pour quelques exemples [23]:
Figure I. 20 Courbes d’hystérésis pour différents arrangement: chaines (en bleu), cube (en rouge), anneau (en vert) et en hexagone (en rose); comparées dans les mêmes conditions N = 8 et = 90°. Le cycle d’hystérésis dans les mêmes conditions de nanoparticules sans interaction est représenté en ligne noire. L’angle – définit un cône de distribution d’axe facile d’aimantation pour chaque particule. Il est fixé à 90° pour cette étude. (Figure tirée de [23])
Pour des configurations en cube, en anneau ou hexagone, les interactions dipolaires tendent à refermer les cycles et en diminuer l’aire par rapport aux mêmes nanoparticules sans interactions. La géométrie en aiguilles est la seule à présenter un cycle plus carré avec une augmentation du champ coercitif et une valeur d’aimantation rémanente qui se rapproche de l’aimantation à saturation. Pour cette étude, Serantes et al. ont montré qu’avec N = 8, on tend vers le maximum de pertes d’hystérésis, et donc vers le nombre optimal de nanoparticules par chaines.

Comportement d’aiguilles de nanoparticules d’oxydes de fer

Les nanoparticules d’oxydes de fer sont majoritairement utilisées pour des applications biomédicales en tant qu’agents de contraste IRM ou en tant que vecteurs d’hyperthermie magnétique. Nous développerons ultérieurement les études correspondant à l’optimisation de ces particules. Considérons pour l’instant le fait que les oxydes de fer sont des particules avec une faible anisotropie magnétocristalline, et que l’on peut synthétiser sous forme de sphères ou de cubes.
Pour minimiser leurs énergies globales, elles ont tendances à se réarranger en aiguilles. Par la suite, on s’intéresse aux pertes d’hystérésis d’une chaine de nanoparticules cubiques de longueur variable. Les cycles d’hystérésis obtenus par simulation numérique sont présentés en Figure I. 21(a) [24]. On constate que l’élongation de la chaine de nanoparticules augmente considérablement l’aire du cycle grâce notamment à de fortes valeurs de champs coercitifs.
Pour des amplitudes de champ appliqué suffisamment importantes (0,48 < < , la valeur optimale dépendant de la concentration), le réarrangement en chaines peut permettre d’optimiser le SAR. Figure I. 21 (a) Cycles d’hystérésis de chaines de nanoparticules d’oxydes de fer de longueur N variable. Les nanoparticules possèdent un axe facile contenu dans un angle de [24]. (b) Chaines de magnétosomes extraites de bactéries magnétostatiques AMB-1 (image TEM). (Figure tirée de[25]) Ces résultats sont en accord avec les travaux sur les magnétosomes d’Alphandéry et al. [25]. Les magnétosomes sont des nanoparticules d’oxyde de fer entourés de matériel biologique, synthétisés par des organismes vivants. Par ce biais, ses organismes ont la possibilité de suivre les lignes de champs magnétiques terrestres. Parmi eux, certaines bactéries magnétotactiques synthétisent ces magnétosomes en chaines, que l’on peut extraire par la suite pour étude (voir Figure I. 21(b)). Ces particules sont particulièrement intéressantes car elles présentent de fortes valeurs de SAR en comparaisons d’autres oxydes de fer de synthèses (environ 400W/g à 183 kHz et 40 mT [25]). Il a également été montré que leur efficacité hyperthermique est nettement moins bonne quand les chaines sont cassées et que l’on récupère des nanoparticules seules. Ce dernier résultat est donc en accord avec la Figure I. 21(a) où le cas N = 1 présente le minimum de pertes d’hystérésis. Dans le cadre des travaux d’Alphandéry et al., l’utilisation des magnétosomes en chaines dans un traitement par hyperthermie magnétique permet de réduire le volume des tumeurs chez la souris.

L’influence de l’anisotropie magnétique sur les pertes d’hystérésis

Le comportement de nanoparticules magnétiques en interactions résulte de la compétition entre l’anisotropie magnétique du système et des interactions inter particulaires. Considérons donc des aiguilles de nanoparticules de même taille, mais d’anisotropies magnétiques différentes. C’est un moyen différent de pouvoir étudier l’influence des interactions magnétiques dans des systèmes couplés. En Figure I. 22 sont présentés des cycles d’hystérésis d’aiguilles de nanoparticules calculés pour différentes valeurs d’anisotropies individuelles [26]. On différencie également deux types de configurations (6 6 6 en Figure I. 22(a) et 6 6 42 en Figure I. 22(b)). Dans le cas de fortes anisotropies individuelles, on constate que la forme des cycles n’est pas dépendante de la longueur de chaine et présente des champs coercitifs faibles de l’ordre de la moitié du champ d’anisotropie . A l’inverse, pour de faibles anisotropies individuelles, l’aire d’hystérésis est fortement influencée par la longueur de chaines et est optimisée pour des chaines longues.
A partir des simulations numériques de cycles d’hystérésis, en prenant en compte différentes longueurs de chaines, on présente en Figure I. 23 l’évolution de la rémanence (normalisée par , l’aimantation à 42 mT) et de la pente des cycles au champ coercitif en fonction de l’anisotropie individuelle des particules.
On définit également la rectitude des cycles d’hystérésis (Squareness en anglais sur la figure) comme étant le rapport de l’aire du cycle sur l’aire maximale théorique (l’aire du rectangle) pour un jeu de paramètres et donné. Soit:
On constate Figure I. 23(a) que, dans le cas d’arrangements en cube (Z = 6), la rémanence augmente avec l’anisotropie des nanoparticules. A noter également que la rectitude Figure I. 23(c) d’un cube subit la même évolution. A l’inverse, pour des chaines plus longues, la rémanence et la rectitude sont maximales pour de faibles valeurs de et décroissent ensuite. De plus, on constate en Figure I. 23(b) que les pentes au coercitif sont plus importantes pour des chaines plus longues et pour des anisotropies plus faibles. Ces pentes diminuent ensuite pour des anisotropies croissantes.
Pour corréler ces résultats avec les configurations magnétiques des nanoparticules, nous présentons en Figure I. 24 la répartition des moments magnétiques de chaque particule pour quatre cas de figures caractéristiques: faible et forte anisotropie, faible et forte longueur de chaines. A forte anisotropie (Figure I. 24 (a) et (b)) la répartition des moments des particules est aléatoire et ne dépend pas de la longueur de chaines, alors qu’à faible anisotropie (Figure I. 24(c) et (d)), une organisation collective des moments est constaté pour une longueur de chaines suffisante. On observe alors une anisotropie uniaxiale dans l’axe de l’aiguille.
Nous pouvons tirer deux conclusions de ces observations. Tout d’abord, à forte anisotropie, le comportement des chaines est indépendant de leurs longueurs et se rapporte simplement à des nanoparticules sans interactions magnétiques (Figure I. 22 et Figure I. 23)
avec un ratio égal à 0,5, une rectitude égale à 0,25 et un champ coercitif du même ordre que le champ d’anisotropie. De plus quelle que soit la longueur de chaine, les moments magnétiques sont orientés de manière aléatoire dans l’aiguille (Figure I. 24). Ces informations nous montrent que dans ce cas, la forte anisotropie des nanoparticules domine les effets dipolaires. Les aiguilles se comportent donc comme un échantillon de nanoparticules indépendantes magnétiquement. Pour de faibles anisotropies, on constate cette fois ci que le comportement magnétique des aiguilles est hautement dépendant de la longueur de chaines. On constate ainsi Figure I. 22(a) que, pour le cas d’un réarrangement cubique, l’organisation des moments magnétiques individuels favorisent un état désaimanté pour un champ appliqué nul, ce qui réduit notablement le coercitif et la rémanence. Ceci a pour effet de réduire la rectitude du cycle (Figure I. 23(c)). Dans le cas de chaines longues, l’anisotropie uniaxiale résultante de l’alignement des moments magnétiques individuels (Figure I. 24(c)) augmente considérablement la rectitude du cycle, sa rémanence, et optimise du même coup l’aire d’hystérésis. En conclusion, dans le domaine de l’hyperthermie magnétique, les nanoparticules en interaction ayant une anisotropie suffisamment petite seront plus efficaces.

Diffusion de chaleur autour de la nanoparticule

Après avoir présenté les aspects individuels et collectifs de l’hyperthermie magnétique, nous nous intéressons maintenant à la diffusion de chaleur et à la température dans le proche environnement de la nanoparticule. Pour beaucoup d’applications, comme la catalyse de réactions chimiques (cf I.3) ou même pour la compréhension des conséquences d’une hausse de température sur les mécanismes intracellulaires, il serait d’un grand intérêt de pouvoir accéder à la température de surface des nanoparticules. Malheureusement, peu ou pas de modèles traitent de ce sujet actuellement. Les théories avancées jusque-là utilisent l’équation de diffusion classique de la chaleur [24]–[26] avec la densité massique du milieu, le coefficient de conductivité thermique, T la température et la capacité calorifique du milieu. On considère l’élévation de température comme continue avec comme source de chaleur une unique particule. On estime la température d’une position dans le milieu proche de la nanoparticule. La résolution de l’équation (I. 45) donne [27]: avec dissipation de chaleur surfacique moyenne, le temps de relaxation effectif. Comme nous pouvons le constater, décroit en exponentiel carré en s’éloignant de la surface de la nanoparticule. On présente en Figure I. 25 des exemples de résultats obtenus pour ces calculs. Ils représentent tout deux des élévations de température, dans un cas à la surface d’un cluster magnétique, et dans l’autre à la surface de la nanoparticule.

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Table des matières

Chapitre I : Etude bibliographique
1 Hyperthermie magnétique des nanoparticules
1.1 Magnétisme des Nanoparticules
1.2 Théorie de l’hyperthermie des nanoparticules monodomaines
1.3 Principaux travaux d’optimisation du SAR de nanoparticules magnétiques
2 Induction de mort cellulaire par hyperthermie magnétique
2.1 Mécanismes cellulaires essentiels à la mise en place du traitement par hyperthermie magnétique
2.2 Expériences in vitro de mort cellulaire par hyperthermie magnétique
3 Catalyse de chaine carbonée par nanoparticules magnétiques
3.1 Réaction Fischer-Tropsch
3.2 Réactions chimiques activées par induction magnétique
Chapitre II : Développement d’instrumentation pour l’optimisation de nanoparticules d’oxydes de Fer et l’application à des systèmes biologiques – Projet Multifun
1 Conception d’un électroaimant à large entrefer :
1.1 Banc de mesure d’hyperthermie du LPCNO.
1.2 Cahier des charges et conception de l’électroaimant à large entrefer :
1.3 Fonctionnement et démarches expérimentales
1.4 Conclusion et perspectives
2 Bobine de mesures de cycles d’hystérésis hautes fréquences
3 Synthèse de nanoparticules d’oxydes de fer par voie aqueuse – Optimisation pour l’hyperthermie magnétique
4 Conclusion
Article II-1
Article II-2
Chapitre III : Hyperthermie magnétique in vitro: induction de mort cellulaire et observations en temps réel
1 Traitement d’hyperthermie magnétique sur cellules adhérentes
1.1 Propriétés magnétiques et mesures de concentrations de nanoparticules internalisées
1.2 Installation expérimentale
1.3 Présentation des résultats obtenus
2 Visualisation de cellules cancéreuses pendant le traitement hyperthermique
2.1 Développement d’un électroaimant miniaturisé
2.2 Présentation des résultats obtenus
3 Conclusion
Article III-1
Article III-2
Chapitre IV : Catalyse de réaction Fisher-Tropsch par échauffement de nanoparticules soumises à un champ magnétique haute fréquence
1 Synthèses et caractérisations des catalyseurs
2 Propriétés magnétiques des catalyseurs
3 Propriétés catalytiques des nanoparticules durant la synthèse Fischer- Tropsch
4 Discussion et conclusion

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