Suivi médical après chirurgie bariatrique

Suivi médical après chirurgie bariatrique

INTRODUCTION

L’obésité est une maladie chronique, complexe et évolutive qui intègre des dimensions comportementales, biologiques et sociales différentes. Elle est définie comme une augmentation excessive de la masse grasse, ayant des répercussions somatiques, psychologiques, sociales et un retentissement sur la qualité de vie des individus. Cette augmentation est estimée par l’indice de masse corporelle (IMC) ou indice de Quételet ou body mass index chez les Anglo-saxons, qui est égale au rapport du poids en kg sur la taille au carrée du mètre. Plus l’IMC augmente plus les risques liés à l’obésité sont importants, on parle d’obésité à partir de 30 kg/m² [1]. Les valeurs de référence de l’IMC sont représentées par le Tableau I
Tableau I : Les valeurs de référence de l’IMC pour l’adulte entre 18 et 70 ans selon l’OMS.

IMC en kg/m² Statut pondéral
<18.5 Insuffisance pondérale
18,5 – 24,9 Corpulence normale
25,0 – 29,9 Surpoids
30,0 – 34,9 Obésité modérée : classe I
35,0 – 39,9 Obésité sévère : Classe II
>40 Obésité morbide ou massive : Classe III

La détermination de l’IMC est importante dans la prise en charge de l’obésité et de ses conséquences. Néanmoins, son interprétation doit être adaptée en fonction de l’âge, du sexe,mais aussi en fonction de l’origine ethnique des individus ou encore de leur niveau d’activité physique car l’IMC ne permet pas de faire la distinction entre l’excès de poids associé à la masse musculaire et celui associé au tissu adipeux.La confirmation de l’obésité sur la base de l’IMC n’est pas suffisante pour la prendre en charge, un examen clinique détaillé est indispensable, il permettra d’évaluer les aspects morphologiques des patients notamment la répartition du tissu adipeux qui est un critère majeur dans l’évaluation des risques liés à cette maladie. [2] L’obésité abdominale ou «androïde» : Définie par un excès de masse grasse au niveau du tronc et plus particulièrement en intra abdominal, cette augmentation est liée à un risque important de maladies cardiovasculaires, d’hypertension artérielle, de syndrome métabolique associant souvent : l’Insulino-résistance, le diabète type 2 et les dyslipidémies surtout mixte avec hypertriglycéridémie prédominante HDL bas et LDL petites et denses [1] L’obésité gynoïde : Définie par une répartition du tissu adipeux au niveau des hanches et des cuisses, elle ne se complique qu’exceptionnellement de diabète et très rarement de maladies cardiovasculaires, mais favorise, de par la masse graisseuse totale et l’excès pondéral les complications ostéo-articulaires et respiratoires. [1] L’obésité est identifiée comme axe prioritaire des politiques mondiales de la santé, il s’agit du cinquième facteur de risque de décès au niveau mondial, au moins 2,8 millions d’adultes en meurent chaque année. [3]Selon l’OMS, en 2014 plus de 1,9 Milliards d’adultes étaient en surpoids, 375 millions de femmes et 266 millions d’hommes étaient obèses et ces chiffres continuent à augmenter. [3]Au Maroc, selon les résultats de l’Enquête Nationale sur l’Anthropométrie (ENA) 10,3 millions de marocains adultes sont en situation d’obésité et 3,6 millions d’adultes sont en obésité grave. [4]L’augmentation du taux de l’obésité dans le monde est secondaire aux changements du mode de vie. En effet, les changements des habitudes alimentaires, le développement des moyens de transport et l’industrialisation ont eu comme résultats une réduction importante du niveau d’activité physique, la sédentarisation des individus et des gains pondéraux conséquents. Le traitement de l’obésité est actuellement bien codifié, alliant de nombreuses stratégies thérapeutiques, dont les buts principaux sont : la perte pondérale durable, le maintien d’un poids acceptable au long cours, la prévention et le traitement des complications de l’obésité et d’une manière plus globale l’amélioration de la qualité de vie des patients. [2]L’échec fréquent des traitements classiques (diététique, approche comportementale et traitement médicamenteux) a favorisé le développement, depuis les années 90, de différentes techniques chirurgicales. Peu pratiquées dans un premier temps, elles connaissent un vrai essor depuis le milieu des années 2000 ouvrant l’horizon à de nouvelles possibilités.

Évaluation des voies aériennes supérieures

  Juvin et al. [115] ont démontré que le risque d’intubation difficile était plus élevé chez le sujet obèse, avec un risque important de désaturation. La difficulté d’intubation est évaluée à 15%, mais peut atteindre 30% chez les patients porteurs d’un syndrome d’apnée de sommeil [72]. Les critères usuels sont peu sensibles et peu spécifiques. Seulement 47% des intubations difficiles sont détectées par un score de Mallampati de 3 ou 4. Par contre La mesure de la circonférence du cou serait un meilleur critère prédictif d’intubation difficile. Ce risque serait de 35% pour un patient dont la circonférence du cou dépasse 60 cm [72]. Brodsky et al. [116] ont regroupé les facteurs prédictifs d’intubation difficile chez l’obèse :
Une circonférence du cou dépassant 40 cm ;
Un score de Mallampati ≥3 ;
Une distance thyro mentonnière inférieure à 6 cm. (figure 10)
Dans notre série, aucun des patients n’avait de critères de risque d’intubation difficile.

Évaluation cardiaque

  L’évaluation cardiovasculaire préopératoire a pour but de dépister une éventuelle dysfonction ventriculaire demeurée latente jusqu’alors, d’en évaluer l’importance et de rechercher des tares associées qui en aggraveraient l’évolution (HTA, coronaropathie, diabète).Même en l’absence d’une cardiomégalie sur le cliché du thorax et d’une hypertrophie ventriculaire gauche à l’électrocardiogramme, une échocardiographie est utile dans le bilan préopératoire de l’obèse, en particulier chez l’hypertendu âgé. [118] L’hypertrophie myocardique, surtout si elle est associée à une hypoxémie, augmente le risque d’extrasystoles ventriculaires. Si l’on suspecte l’existence d’une coronaropathie, une épreuve d’effort est souhaitable, mais de réalisation souvent difficile. On peut alors avoir recours à une scintigraphie myocardique.Dans notre série, l’évaluation cardiaque s’est basée sur l’examen clinique qui a retrouvé un cas d’HTA non suivi et qui a été normal chez le reste des patients, l’ECG a été demandé pour tous nos patients, les résultats ont été comme suite : Un cas de sus-décalage du segment ST, Un cas d’HVG et des ECG normaux chez les 8 autres patients. L ’ETT a été aussi demandé chez tous les patients mis à part un cas qui présentait une FE à 62% avec insuffisance mitrale, cet examen n’a pas détecté d’anomalie significative chez le reste des patients.

Prémédication

Antiacides
Ces médicaments permettent de neutraliser le résidu gastrique, en augmentant le pH de 3 à 5. Le citrate de sodium 0,3 molaire est le produit de référence. Son délai d’action est rapide (5 à 15 minutes), sa durée d’action varie de 2 à 3 heures selon les études.

Antiulcéreux
Les antagonistes des récepteurs H2 diminuent la sécrétion d’acide gastrique. Ces produits ont de longues durées d’action (4 à 12 heures) mais leur délai d’action est supérieur à 30 minutes par voie orale. Les formes effervescentes où l’anti-H2 est associé au citrate de sodium, permettent de réduire le délai d’action tout en conservant une durée d’action suffisante pour couvrir la période per- et postopératoire immédiate. La ranitidine et la cimétidine existent sous cette forme.

Inhibiteurs de la pompe à proton
L’oméprazole est un puissant inhibiteur de la sécrétion gastrique. L’utilisation de ce type de produit n’est pas compatible avec les situations d’urgence car, pour être efficace, il doit être administré au moins 4 heures avant l’intervention.La prémédication à visée anxiolytique peut aussi être prescrite. Il faut néanmoins éviter les agents pouvant être responsables d’une sédation postopératoire prolongée, compte-tenu des risques particulièrement élevés d’hypoxémie postopératoire en cas d’obésité [124]. Il faut plutôt opter pour des médicaments peu dépresseurs respiratoires (hydroxizine) et de courte durée d’action éventuellement sous surveillance de la SpO2. Dans notre série, tous les patients ont bénéficié d’une prémédication à base d’antihistaminique H2 à la dose recommandée de 300 mg et d’hydroxyzine à la dose de 1 mg/kg la veille de l’intervention.

Antibioprophylaxie
Tableau XIX : Antibioprophylaxie pour la chirurgie bariatrique

Acte chirurgical Produit Dose initiale Ré-injection et durée
Mise en place d’un
anneau gastrique
Céfazoline 4g (perfusion 30 min) Dose unique (si durée> 4h,
réinjecter 1,5 g)
Céfuroxime
Ou
Céfamandole
3g (perfusion 30 min) Dose unique (si durée>2h,
réinjecter 1,5g
Allergie :
Vancomycine
15mg/kg/60 min Dose unique
Sleeve
gastrectomie
Court circuit
gastrique
Céfoxitine 4 g (perfusion 30 min) Dose unique (si durée > 2h,
réinjecter 2g)
Allergie:
clindamycine +
gentamicine
900 mg
5 mg/kg/j
(dose max 500mg)
Dose unique
Dose unique
Chirurgie de
réduction du
tablier abdominal
Céfazoline 4 g (perfusion 30 min)* Dose unique (si durée > 4h,
réinjecter 2g)
Céfuroxime ou
céfamandole
3 g (perfusion 30 min)* Dose unique (si durée > 2h,
réinjecter 1,5g)
Allergie :
clindamycine +
gentamicine
900 mg
5 mg/kg/j
(dose max 500mg)
Dose unique
Dose unique

*Dose réduite de moitié si l’IMC passe en dessous de 35 kg/m².
La technique anesthésique choisie dans notre série était l’anesthésie générale avec induction à séquence rapide et manœuvre de Sellick. Cette conduite a été dictée par le risque important de reflux gastro œsophagien avec risque d’inhalation.Les agents utilisés étaient : l’hypnotique de choix chez tous les patients était le propofol, le choix des opiacés était le sufentanil chez 70% des patients et le fentayl chez 30%. Le myorelaxants choisi pour tous les patients était le Rocuronium et le choix de l’halogéne était le sevoflurane utilisé chez 70% des patients et l’isoflurane 30%.La Ventilation s’est faite en pression contrôlée, en circuit semi-fermé avec une fréquence respiratoire comprise entre 8 et 12 cycle/min et une PEEP ajustée entre 5 et 8 cm d’H2O. Le Volume total a été réglé entre 6 ml/kg et 10 ml/ml du poids idéal et selon les données de la surveillance hémodynamique. L’antibioprophylaxie était à base de Céfazoline 4g en une perfusion de 30 min débuté 1h avant l’induction.Le monitorage comportait une mesure automatisée de la pression artérielle avec brassard adapté aux grandes circonférences brachiales, électrocardioscope, capnographie, oxymétre de pouls et monitorage de la curarisation.

CONCLUSION

Notre étude s’accorde avec les données de la littérature pour affirmer l’augmentation considérable de la prévalence de l’obésité, de sa gravité et l’important taux de comorbidités qui y sont associées.La chirurgie bariatrique est le traitement de choix en cas d’obésité sévère ou d’obésité modérée associée à des comorbidités importantes,  ce qui explique l’augmentation du nombre d’interventions par année. En plus de la perte du poids la chirurgie bariatrique permet de diminuer la mortalité, d’améliorer les comorbidités et la qualité de vie des patients.Avant d’envisager d’étendre les indications opératoires à des patients avec des seuils d’IMC plus bas, il faut pouvoir s’appuyer sur de nouvelles études prospectives, randomisées et suffisamment prolongées, qui permettront de confirmer les bénéfices de cette chirurgie en terme de mortalité cardiovasculaire, d’amélioration du diabète type 2 et des autres troubles métaboliques. Les patients candidats à la chirurgie bariatrique suivent un parcours de soin bien établi,incluant une évaluation multidisciplinaire assurée par L’endocrinologue, le gastroentérologue, le psychiatre, l’anesthésiste réanimateur et le chirurgien. Une attention particulière a été porté dans notre travail sur la prise en charge anesthésique pré, per et postopératoire. La chirurgie bariatrique n’est pas dénuée de risques, Elle impose une prise en charge anesthésique efficace et adaptée aux particularités des patients obèses.La technique chirurgicale choisie dans notre série et proposée par plusieurs auteurs comme technique de choix est la sleeve gastrectomie, étant donné son faible taux de mortalité et de complications métaboliques, son efficacité, son temps opératoire réduit et la facilité de sa réalisation.Bien que le taux de complications pour cette chirurgie soit faible, elles sont pour la plupart redoutables et peuvent engager le pronostic vital, ce qui impose une prise en charge rapide et efficace pour éviter leurs aggravations.Le suivi des patients permet d’affirmer l’efficacité de la chirurgie au long terme, de surveiller le régime alimentaire, de guetter les complications tardives et de palier précocement aux carences vitaminiques et en oligoéléments.

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Table des matières

INTODUCTION
PATIENTS ET METHODES
I. Type de l’étude
II. Objectifs de l’étude
III. Critères d’inclusion
IV. Critères d’exclusion
V. Recueil et analyse des données
VI. Fiche d’exploitation
RESULTATS
I. CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES DES PATIENTS
1. L’âge
2. Le sexe
II. Étude de l’obésité
1. Les mesures de bases en pratique clinique
2. Les mesures paracliniques de la composition corporelle
III. Évaluation multidisciplinaire
1. Consultation en endocrinologie
2. Consultation de psychiatrie
3. Consultation en gastro-entérologie
IV.Consultation pré-anesthésique
1. Antécédents
2. Examen clinique
3. Évaluation du risque d’intubation difficile
4. Évaluation de la fonction respiratoire
5. État de la fonction cardio-vasculaire
6. Évaluation des risques opératoires
7. Bilans biologiques
8. Comorbidités liées à l’obésité
9. La Prémédication
V. PRISE EN CHARGE ANESTHÉSIQUE PER OPÉRATOIRE
1. Installation du malade
2. Abord veineux
3. Monitorage
4. Préoxygénation
5. Protocole anesthésique
6. Mise en place du tube de faucher
7. Antibioprophylaxie
8. Réanimation per opératoire
VI.PRISE EN CHARGE CHIRURGICALE
1. La voie d’abord
2. Technique chirurgicale
3. Durée opératoire
4. Complications per opératoires
VII. PRISE EN CHARGE POSTOPÉRATOIRE
1. Extubation
2. Réveil
3. Analgésie
4. Thromboprophylaxie
5. Complications postopératoires précoces
6. Complications postopératoires tardives
7. Décès
8. Séjour en réanimation
9. Séjour hospitalier
DISCUSSION
I. Épidémiologie
1. Prévalence
2. Age
3. Sexe
II. Étude de l’obésité
1. Définition
2. Les mesures de base en pratique clinique
3. Étude de la composition corporelle
III. Physiopathologie de l’obésité
IV. Complications liées au terrain
1. Complications cardiovasculaires
2. Complications respiratoires
3. Complications métaboliques
4. Répercussions endocriniennes
5. Troubles gastro-intestinaux
6. Complications rénales
7. Les cancers
8. Les complications ostéoarticulaires
9. Complications dermatologiques
10. Répercussions psychologiques
11. Mortalité
V. Modifications pharmacologiques chez le sujet obèse
1. Modifications pharmacocinétiques
2. Choix des agents anesthésiques
VI. La prise en charge de l’obésité morbide
1. Objectifs thérapeutiques
2. Méthodes thérapeutiques
3. Critères de sélection des patients
VII. Évaluation multidisciplinaire
1. Consultation en endocrinologie
2. Consultation psychiatrique
3. Consultation en gastro-entérologie
VIII.Consultation pré-anesthésique
1. Interrogatoire
2. Information du patient
3. Évaluation des voies aériennes supérieures
4. Évaluation respiratoire
5. Évaluation cardiaque
6. Évaluation métabolique
7. Evaluation des facteurs de risque opératoire
8. Prémédication
IX. Prise en charge anesthésique per opératoire
1. Installation
2. Abord veineux
3. Monitorage
4. Préoxygénation
5. Induction
6. Entretien de l’anesthésie
7. Ventilation peropératoire
8. Antibioprophylaxie
X. Prise en charge chirurgicale
1. Voies d’abord chirurgical
2. Techniques chirurgicales restrictives
3. Techniques chirurgicales malabsorptives
XI. Prise en charge anesthésique postopératoire
1. Extubation
2. Réveil et analgésie
3. Thromboprophylaxie
XII. Les complications postopératoires
1. Mortalité
2. Complications per opératoires
3. Complications postopératoires précoces
4. Complications postopératoires tardives communes
5. Complications postopératoires tardives spécifiques
6. Complications psychologiques et troubles émotionnels
XIII.Suivi post-opératoire
1. Succès en termes de chirurgie
XIV. Suivi médical après chirurgie bariatrique
1. Modalité et rythme du suivi
2. Recherche et prise en charge des carences nutritionnelles
3. Suivi éducatif
4. Désire de grossesse
5. Demande de chirurgie réparatrice
CONCLUSION
RESUMES
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE

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