Structures et variations des réseaux trophiques des poissons en zones côtières

Les milieux paraliques

Les milieux paraliques décrivent essentiellement des zones littorales en relation plus ou moins étroite avec la mer. Ces milieux, représentant une valeur patrimoniale et un intérêt majeur pour les activités anthropiques et la biodiversité, ont été définis pour la première fois par Nauman (1954) puis en 1975 par Perthuisot. Le terme «écosystèmes paraliques» englobe une variété de milieux côtiers de formation et de morphologie diverses (Perthuisot et Guelorget, 1992), tels que les lagunes, estuaires, bahiras (dépressions continentales subfermées), fjords ou rias, deltas et mangroves. À l’interface terre-mer, ces écosystèmes remarquables, sont comme le signale La Jeunesse et al. (2015), impactés par le changement climatique et par les activités anthropiques. Leur proximité des agglomérations urbaines, menace ; comme le montrent Brook et al. (2008a) leur pérennité et modifient leurs structures et leurs fonctionnements et par conséquent les biens et services qu’ils pourvoient. Parmi les milieux paraliques les plus représentés en Europe figurent les estuaires et les lagunes. Les estuaires, de par leur configuration entre terre et mer, sont des milieux complexes et fluctuants (McLusky et Elliott, 2004). Ils ont des fonctionnements physicochimique et hydrodynamique particuliers, structurés en grande partie par les fleuves qui les forment. Fairbridge (1980) définit les estuaires comme un bras de mer pénétrant une vallée fluviale jusqu’à la limite amont de propagation de la marée. Hopkinson et Hoffman (1984) élargissent cette définition en y incluant dans la zone côtière l’influence directe des eaux fluviales, c’est-à-dire la zone où l’eau marine est diluée par l’eau douce. La limite avale est déterminée par l’affluence des régimes tidal et fluvial. Une autre classification a été proposée par Hayes en 1975 basée sur le critère de la marée, où 4 types d’estuaires sont classés en fonction du marnage : microtidal (marnage < 2 m), mésotidal (marnage entre 2 et 4 m), macrotidal (marnage entre 4 et 6 m) et hypertidal (marnage > à 6 m). La classification communément utilisée pour décrire les estuaires français est celle de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE), qui distingue neuf types de milieux en croisant sept critères qui sont : la salinité, le marnage, le mélange des masses d’eau, le pourcentage de la masse d’eau couverte par la zone intertidale, le débit, la surface du bassin versant et la turbidité. Une autre classification a été mise en place par Hume et al. (2007) afin de préciser celle de la DCE, il s’agit de l’Estuarine Environment Classification (EEC). Cette méthode est basée sur 10 caractères physiques de l’estuaire, impliquant : la latitude, le réchauffement et le refroidissement, les précipitations, l’évaporation, les apports et les exports des eaux continentales et océaniques au sein de l’estuaire, la stratification, l’écoulement, la circulation, le mélange et la sédimentation (érosion et dépôt). Les estuaires, considérés comme sites de transition privilégiés des poissons migrants cycliques, tels que les anguilles (Bultel et al., 2014) et comme aire de nourricerie pour les juvéniles de poissons tels que la sole commune (Cabral et al., 2021), ont fait l’objet de nombreuses études à travers le monde tant pour leur caractéristiques fonctionnelles que biologiques. De la synthèse de ces différentes études, une nouvelle notion spécifique à ces écosystèmes a émergé, celle du « paradoxe écologique ».

Étude des réseaux trophiques

Importance de l’étude des réseaux trophiques

Il a été établi depuis un certain temps que les relations alimentaires entre les différentes espèces créent une multitude de chaînes alimentaires qui, en interagissant, forment des réseaux trophiques complexes. À l’intérieur de ces réseaux trophiques, les organismes qui les composent ont un ordre bien précis selon leur rôle dans le transfert d’énergie qui leur octroie une position nommée niveau trophique (Bowen, 1997 ; Layman et al., 2012). En se basant sur ces études, les espèces d’un réseau trophique son souvent regroupées en catégorie fonctionnelle (Trites, 2003). Plus simplement, la hiérarchie trophique se compose de producteur primaire (1er niveau), de consommateur primaire (2ème niveau) et de consommateur secondaire (3ème niveau). En réalité, ce schéma linéaire n’est pas représentatif des réseaux trophiques et de leur complexité avec, comme exemple des organismes qui peuvent se nourrir sur plusieurs niveaux trophiques ou les omnivores. Dans un réseau trophique, l’identification de l’origine de la matière organique et de sa minéralisation, permet de comprendre les compartiments qui soutiennent ce réseau. Les flux de matières organiques, notamment son export, mettent en évidence les caractéristiques fonctionnelles de l’écosystème ainsi que les liens trophiques. En outre, ces flux permettent de mesurer l’importance relative des différents transferts d’énergie pouvant exister entre les compartiments biologiques et de comprendre le fonctionnement trophique des écosystèmes. En effet, l’accès à la nourriture et sa disponibilité conditionne la stabilité et la maturité d’un écosystème. En 1927, Elton stipulait déjà que les relations entre les organismes d’une communauté sont essentiellement d’ordre trophique. Puis, en 1942, Lindeman montre que les flux d’énergie entre les niveaux trophiques d’une chaîne alimentaire constituent la principale caractéristique de l’organisation des écosystèmes. Ces deux dernières décennies ont été marquées par d’importantes avancées et de nombreux concepts trophiques ont vu le jour, on peut citer les fonctions de contrôle « bottomup», «top-down» et «wasp waist», la notion d’espèces clés au sein des réseaux trophiques (Power et al., 1996), les phénomènes de cascades trophiques (Pace et al., 1999 ; Polis et al., 2000) et l’importance et/ou les conséquences de l’omnivorie dans un réseau trophique (Vandermeer, 2006). La compréhension des interactions trophiques entre les différents compartiments d’un réseau trophique dans un écosystème et la mise en évidence des différents processus pouvant avoir lieu, sont des étapes clés dans la compréhension du fonctionnement des écosystèmes.

Approches trophiques en estuaires

Les estuaires ont une fonction de nourricerie importante (Costanza et al., 1998). La notion de paradoxe de la qualité estuarienne estime que seules les espèces adaptées à cet écosystème stressé peuvent y survire avec en général une abondance importante (Lobry et al., 2008). La capacité d’accueil d’un estuaire est sous l’influence de plusieurs facteurs : des facteurs stables dans le temps comme la nature du sédiment (Rijnsdorp et al., 1992 ; Rochette et al., 2010), mais aussi des facteurs qui fluctuent de nature abiotique (ex. température, salinité) et biotique (ex. la prédation) (Kostecki et al., 2010). De ce fait, la capacité trophique dans les estuaires évolue dans le temps (Nash et al., 2007). En revanche, le rôle joué par le facteur trophique fait l’objet de débats (Gibson, 1994). La question dans ces milieux est alors de savoir si les ressources alimentaires sont limitantes, et jouent un rôle de régulation dans l’abondance des juvéniles de poissons et donc, sur la capacité d’accueil trophique de la nourricerie. Pour cela, il est nécessaire de connaître le fonctionnement de chaque niveau trophique et les interactions que peuvent avoir les différents niveaux entre eux. Les approches trophiques en estuaire sont basées sur la compréhension du fonctionnement du réseau trophique dans son intégralité (Dauvin et Desroy, 2005 ; Akin et Winemiller, 2006). Ces approches peuvent aussi répondre à des questions bien spécifiques comme celle de l’origine de la matière organique qui soutient les réseaux trophiques (Hoffman et al., 2008), de comprendre la connectivité entre le milieu estuarien et le milieu maritime (Conway-Cranos et al., 2015), ou encore de connaître les différences saisonnières du réseau trophique (Sooria et al., 2015). Enfin, l’utilisation de modèles tels que «Ecopath with Ecosim» s’avère utile afin de comprendre les évolutions, d’identifier les espèces clés de voûte par habitat fonctionnel, et de corréler cela avec différents stress (ex. anthropisation) engendrés dans les environnements estuariens (Tecchio et al., 2015).

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Table des matières

CHAPITRE 1 INTRODUCTION
1. Les milieux paraliques
2. Étude des réseaux trophiques
2.1. Importance de l’étude des réseaux trophiques
2.3 Approches trophiques en estuaires
2.4 Approches trophiques en lagunes
3. Zones d’étude
3.1. Estuaire de la Canche
3.2. Lagune Mellah
4. Objectifs et organisation de la thèse
CHAPITRE 2 FONCTIONNEMENT TROPHIQUE DE L’ESTUAIRE DE LA CANCHE
1. Résumé étendu relatif à Bouaziz et al. 2021
2. Bouaziz et al. 2021: Structure and seasonal variability in fish food webs in a small macrotidal estuary (Canche estuary, Eastern English Channel) based on stable carbon and nitrogen isotope analysis
CHAPITRE 3 DIVERSITE ET FONCTIONNEMENT TROPHIQUE DE LA LAGUNE DE MELLAH
SOUS CHAPITRE 3.1 CARACTERISATION DES PEUPLEMENTS ICHTYOLOGIQUES DE LA LAGUNE DE MELLAH ET DES PARAMETRES QUI LES STRUCTURENT
1. Introduction
2. Matériel et méthode
2.1. Zone d’étude
2.1.1. Morphométrie et climatologie
2.1.2. Caractères physico-chimique
2.1.3 Hydrodynamisme
2.1.4. Nature du fond
2.1.5. Aménagement et exploitation
2.2 Echantillonnage
2.2.1 Paramètres environnementaux
2.2.2 Macrofaune benthique
2.2.3 Ichtyofaune
2.3. Caractérisation des peuplements
2.3.1. Paramètres descriptifs
2.3.2. Analyses statistiques
3. Résultats
3.1. Caractéristiques environnementales
3.2. Macrofaune benthique
3.2.1 Composition du peuplement
3.2.2 Densité et diversité spécifique
3.2.3 Analyse spatiale
3.3. Environnement biotique et abiotique de la lagune
3.4. Ichtyofaune
3.4.1 Composition du peuplement
3.4.2 Densité et diversité spécifique
3.4.3 Longueurs et biomasses
3.4.4 Analyse spatiale
4. Discussion
4.1. Composition du peuplement ichtyologique
4.2 Influence de l’environnement abiotique et biotique sur la répartition spatiale des peuplements ichtyologiques
5. Conclusion
SOUS CHAPITRE 3.2 ÉTUDE DE LA STRUCTURE DU RESEAU TROPHIQUE DES POISSONS D’UNE LAGUNE DU SUD DE LA MEDITERRANEE (LAGUNE EL MELLAH, ALGERIE) PAR ANALYSES DES ISOTOPES STABLES
STUDY OF THE FISH FOOD WEB STRUCTURE OF A SOUTHERN MEDITERRANEAN LAGOON (EL MELLAH LAGOON, ALGERIA) USING STABLE ISOTOPE ANALYSIS
CONCLUSION

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