STRUCTURE DE L’ARGUMENTATION CHEZ LES TRANSHUMANISTES KURZWEIL ET NAAM

STRUCTURE DE L’ARGUMENTATION CHEZ LES TRANSHUMANISTES KURZWEIL ET NAAM

La position extrême des transhumanistes 

Toutes les applications des nanotechnologies convergentes pour l’augmentation des performances humaines sont possibles et acceptables en raison de la nature et de l’autodétermination (l’autonomie sans contrainte) des personnes, si l’on se réfère aux courants transhumanistes ou posthumanistes (comme Naam ou Kurzweil). L’Association mondiale du transhumanisme (AMT; voir www.transhumanisme.org), société à but non lucratif, compte plus de 3000 membres autour de la planète depuis sa création officielle en 1998. Elle se fonde sur un bris de paradigme, soit celui de l’humanisme qui veut que la nature de l’être humain soit une constante intouchable et inaltérable. Le terme « transhumanisme », issu des mots « humain » et « transition », évoque la génération d’êtres qui effectuera la jonction entre l’Homme tel qu’on l’entend aujourd’hui et l’Homme de demain : le posthumain, pouvons-nous lire sur le site Internet de l’AMT. Les transhumanistes considèrent que nous sommes arrivés à l’instant où les technologies convergentes NBIC peuvent nous donner les moyens d’échapper à la condition humaine originelle. Ils argumentent donc au nom de la nature
humaine et de l’autonomie sans contrainte en faveur d’une condition posthumaine dans laquelle le respect de la liberté de la science et des progrès sont considérables. Ainsi, sous le mot « transhumanisme », ils déclarent que, selon les droits de l’homme, nous sommes libres de profiter des technologies dans le but d’améliorer l’humain. Les transhumanistes prônent les transformations humaines afin d’arriver à une amélioration du corps, de la santé, de la qualité de vie et finalement de réussir à obtenir un être supérieur (le posthumain ou cyborg immortel) comme une finalité ultime qui dépasse les limites de la finitude (la fragilité de l’être, les maladies et la mort)19. Comme le note le rapport de la NSF, dans le discours transhumaniste, nous retrouvons ainsi d’une certaine manière le fantasme originel d’immortalité :
And perhaps as an example of both mental and physical enhancement, we should also consider life extension, whether it comes by curing fatal pathologies (such as cancer) or rejuvenating the body/mind or developing anti-aging medicine, and whether it enables us to live another 20 or 100 or 1,000 years (radical life extension). This is a particularly contentious issue in the human engineering debate, not just for obvious concerns related to the burden of overpopulation on quality of life or loss of meaning in life, but also because it seems that we are already—and presumably unproblematically—extending our lives through better nutrition, medicine, exercise, sanitation, and so forth; yet there is some-thing troubling to many about the prospect of radical life extension, even if we can all agree that, in principle, more life is better than less life.

La position extrême des humanistes radicaux 

Contrairement aux transhumanistes, des humanistes comme Fukuyama ou Besnier argumentent contre le développement des NBIC en mettant uniquement l’accent sur les risques négatifs et les désavantages de ces technologies de l’amélioration humaine. Leur argumentation tourne autour de l’argument de la dignité humaine pour signifier que l’humain n’est pas un moyen d’expérimentation, mais une fin en soi. Cet humain tel qu’il existe aujourd’hui dans sa condition biologique de fmitude ne doit jamais être traité comme un pur objet d’expérimentation vers le posthumain comme finalité. L’intervention sur l’humain doit plutôt servir une finalité propre à sa nature d’être limité et mortel. Il n’est donc pas légitime de manipuler l’homme dans le but d’arriver à une nouvelle espèce posthumaine21. Peu importe les avantages que la convergence des NBIC peut apporter, car celle-ci ne risque-t elle pas de violer la dignité humaine et l’égalité morale entre les humains? « Fukuyama has repeatedly argued that human beings with greatly enhanced capacities would threaten the equal moral status of the unenhanced. »

Problématique spécifique

Comme nous l’avons démontré dans la problématique générale, les arguments moraux entre humanistes et transhumanistes s’opposent radicalement quant à l’utilisation des NBIC pour l’amélioration de l’être humain, alors que ceux des modérés proposent un compromis possible entre ces deux positions. Est-il possible de comprendre en quoi ces auteurs divergent? Lorsque des auteurs mobilisent des arguments moraux pour justifier l’acceptabilité ou non des NBIC, font-ils intervenir les mêmes composantes structurales du jugement d’acceptabilité? En mobilisant le cadre conceptuel d’analyse des arguments moraux, nous pourrons mieux identifier la problématique spécifique de la recherche sur ces différents points.

Cadre conceptuel d’analyse de la problématique des arguments moraux

Quatre concepts centraux constituent le cadre d’analyse de la problématique des arguments dans le débat entre le transhumanisme et l’humanisme.
Amélioration humaine : Toute évaluation morale porte sur quelque chose d’avéré ou d’appréhendé. Dans le cas des NBIC, il s’agit de l’amélioration humaine. Qu’est-ce que l’amélioration humaine?
Habituellement, dans le cadre éthique de la recherche avec des êtres humains dans le monde médical, on distingue la thérapie et Y amélioration humaine afin de déterminer ce qui est moralement acceptable. Mais cette conception d’une distinction entre la thérapie et l’amélioration humaine est fort discutable : « La frontière peut être mouvante et ténue entre ce qui relève du domaine de la thérapie — guérir, soigner, rendre normal à nouveau — et ce qui appartient à l’optimisation des performances humaines — améliorer, rendre supérieur à la norme23. » N’est-ce pas l’emploi de cette conception d’une distinction entre l’amélioration et la thérapie que refusent les transhumanistes parce qu’elle ne permet pas de relever le défi intellectuel et humain qui nous est aujourd’hui lancé par le développement possible des NBIC, dès lors que ces technologies veulent optimiser les performances humaines? Mais le concept d’amélioration humaine, tel qu’il est défini par les transhumanistes ou les humanistes ne renvoie-t-il pas aussi à des cas plus ou moins problématiques d’amélioration par l’incorporation des NBIC? Quels sont-ils? La tâche d’analyse consiste ici à déterminer ce qu’est l’amélioration humaine par un concept bien défini ou d’après des cas conformes à cette définition. Il peut alors être important de distinguer le produit favorisant l’amélioration, le procédé de fabrication de ce produit, le processus comme le développement technoscientifique dans lequel s’inscrivent le produit et les usages.

Risque et bienfait 

Non seulement une évaluation morale porte sur quelque chose d’avéré ou d’appréhendé, elle s’intéresse aussi aux conséquences que celle-ci introduit. Ainsi, l’amélioration de l’être humain aura des conséquences positives et négatives sur les personnes et leur environnement naturel et social.
La tâche sera d’analyser s’il y a, par exemple, une définition donnée à cette notion de risque qui est éminemment présente dans toute réflexion consacrée à l’émergence de technologies nouvelles, davantage encore quand celle-ci porte sur les enjeux éthiques qui peuvent y être associés : « Fondamentalement, le risque peut être défini comme un événement éventuel, incertain, dont la réalisation ne dépend pas exclusivement de la volonté des parties et [qui peut] causer un dommage». La tâche d’analyse éthique ne consiste pas alors seulement à vérifier quels sont, selon les humanistes ou les transhumanistes, les dommages possibles. Elle consiste aussi à se demander s’il n’y a pas des bienfaits de l’amélioration. Il s’agit des avantages portés par ces améliorations nanotechnologiques dans plusieurs domaines et surtout dans le domaine de l’industrie pharmaceutique, des biotechnologies et des soins de la santé. L’évaluation morale nous
renvoie ainsi à la tâche d’analyser non seulement les risques, mais aussi les bienfaits des améliorations humaines qui sont causées par de nouveaux médicaments basés sur des nanostructures, des systèmes de diffusion des médicaments qui ciblent des endroits précis dans le corps humain, des matériaux de remplacement biocompatibles avec les organes humains et des matériaux pour la régénération des os et des tissus.
N’y a-t-il pas une panoplie d’impacts possibles? Quels sont les risques (ou dangers) potentiels et les bienfaits éventuels? Les transhumanistes, par exemple, n’ont-ils pas tendance à maximiser les bienfaits et à minimiser les risques pour rendre acceptable l’amélioration humaine? Et si les humanistes radicaux grossissent les risques pour l’humanité, s’agit-il de risques avérés? Y a-t-il une preuve permettant d’établir le lien causal entre l’amélioration par les technologies et les risques? Ne s’agit-il pas de risques hypothétiques?

Évaluation 

Dans toute argumentation morale, il y a un jugement de valeur qui porte sur les risques et les bienfaits identifiés précédemment. Nous pouvons assister non seulement à une pluralité de jugements de valeur différents qui distinguent les auteurs, mais aussi une diversité dans la façon d’appliquer une même valeur au cas concret.
Les arguments moraux : liberté et autonomie, santé et sécurité, justice et équité, disruption sociale et dignité qui sont mis en jeu dans le débat entre le transhumanisme et l’humanisme constituent des critères d’évaluation servant à évaluer si l’amélioration humaine est acceptable ou non. Par exemple, l’évaluation à partir de l’argument de la dignité dans son sens humaniste cherche d’abord à établir si le risque de l’amélioration est en soi inacceptable. Si l’amélioration peut provoquer la mort, on jugera que ce risque est inacceptable en soi, car on ne peut pas soumettre quelqu’un à un tel risque. Les jugements moraux face aux améliorations, comme l’argument de la nature humaine ou l’argument de la dignité dans leur sens humaniste, servent à évaluer que certains risques ou dangers sont inacceptables en soi. Mais lorsque les risques ne sont pas évalués comme inacceptables en soi, on passe alors au jugement d’une acceptabilité d’une amélioration par les arguments de l’utilité et de la justice qui impliquent le calcul des bienfaits escomptés versus les dangers et les risques (coûts-bénéfices) pour l’humain, l’individu et la société. Est-il alors possible
de défendre une acceptabilité globale de l’amélioration humaine par les NBIC1
L’acceptabilité globale de l’amélioration humaine consiste à juger de l’acceptabilité du développement d’un nanoproduit (par exemple, une puce implantée pour améliorer la vision) à la lumière de l’ensemble des impacts possibles causés non seulement par ce nanoproduit, mais aussi par les différents produits finaux qui s’ensuivent (procédé) au sein du développement de la technoscience en général (processus) et des différents usages que les humains pourront en faire (usages).

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Table des matières

RESUME
REMERCIEMENTS
LISTE DES TABLEAUX
INTRODUCTION
1. Le contexte du débat
1.1 Problématique générale
1.2 Problématique spécifique
2. Objectif principal et objectifs spécifiques
3. Méthodologie
4. Plan
CHAPITRE 1 STRUCTURE DE L’ARGUMENTATION CHEZ LES TRANSHUMANISTES KURZWEIL ET NAAM : PRÉSENTATION ET COMPARAISON DES CONVERGENCES ET DIVERGENCES 
1.1 Transhumanisme
1.2 La structure de l’argumentation chez Ramez Naam
1.2.1 Qu’est-ce que l’amélioration humaine?
1.2.2 Quelles conséquences positives ou négatives sont attribuées à ces améliorations?
1.2.3 Quelle évaluation fait-on de ces améliorations? A partir de quel jugement de valeur ou à partir de quelle norme morale?
1.2.4 Quel est le rôle des représentations de l’être humain dans le fondement du jugement de valeur? 
1.3 La structure de l’argumentation chez Ray Kurzweil
1.3.1 Qu’est-ce que l’amélioration humaine?
1.3.2 Quelles conséquences positives ou négatives sont attribuées à ces améliorations?
1.3.3 Quelle évaluation fait-on de ces améliorations? A partir de quel jugement de valeur ou à partir de quelle norme morale?
1.3.4 Quel est le rôle des représentations de l’être humain dans le fondement du jugement de valeur?
1.4 Comparaison de l’argumentation entre ces deux représentants transhumanistes : Kurzweil etNaam
Conclusion
CHAPITRE 2 STRUCTURE DE L’ARGUMENTATION CHEZ LES HUMANISTES FUKUYAMA ET BESNIER : PRÉSENTATION ET COMPARAISON DES CONVERGENCES ET DIVERGENCES 
2.1 Humanisme
2. 2 La structure de l’argumentation chez Francis Fukuyama
2.2.1 Qu’est-ce que l’amélioration humaine? 56
2.2.2 Quelles conséquences positives ou négatives sont attribuées à ces améliorations?
2.2.3 Quelle évaluation fait-on de l’amélioration humaine réalisée par les technologies? A partir de quel jugement de valeur ou à partir de quelle norme morale?
2.2.4 Quel est le rôle des représentations de l’être humain dans le fondement du jugement de valeur?
2.3 La structure de l’argumentation chez Jean-Michel Besnier
2.3.1 Qu’est-ce que l’amélioration humaine?
2.3.2 Quelles conséquences positives ou négatives sont attribuées à ces améliorations?
2.3.3 Quelle évaluation fait-on de l’amélioration humaine réalisée par les technologies? A partir de quel jugement de valeur ou à partir de quelle norme morale?
2.3.4 Quel est le rôle des représentations de l’être humain dans le fondement du jugement de valeur?
2.4 Comparaison de l’argumentation entre ces deux représentants humanistes : Fukuyama et Besnier
Conclusion
CHAPITRE 3 ANALYSE COMPARATIVE DE LA COMPATIBILITÉ DES ARGUMENTATIONS ENTRE TRANSHUMANISTES ET HUMANISTES
3.1 Quelles sont les convergences et les divergences entre les transhumanistes et les humanistes à propos de la question de l’amélioration humaine?
3.2 Quelles sont les convergences et les divergences entre les transhumanistes et les humanistes à propos de la question de conséquences positives ou négatives attribuées à ces améliorations?
3.3 Quelles sont les convergences et les divergences entre les transhumanistes et les humanistes à propos de la question de faire une évaluation de l’amélioration humaine réalisée par les technologies?
3.4 Quelles sont les convergences et les divergences entre les transhumanistes et les humanistes à propos de la question du rôle des représentations de l’être humain dans le fondement du jugement de valeur?
Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE

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