Structuration multi-échelle de la connaissance in-extenso d’entreprise

Le secteur industriel est aujourd’hui à un moment charnière qui révolutionne le mode traditionnel de fonctionnement de l’usine. La mutation engendrée par conséquent, donne naissance à des multiples visions et plans stratégiques autour de l’usine du futur traitant le mode de fonctionnement de l’usine de demain. Que ce soit à l’échelle nationale ou européenne, des roadmaps ont été établies afin d’esquisser le chemin vers une usine intelligente qui intègre les technologies de l’information au cœur des processus industriels [IFFRA, 2013] [AFM, 2015]. Certainement, le concept de l’usine du futur apportera des éléments de réponse pour les industriels qui pâtissent aujourd’hui des difficultés pour faire face aux lacunes dans la production, notamment, imputables à l’être humain. Au milieu de cette révolution numérique la compétence du capital humain et du savoir-faire restent des éléments catalyseurs dans les systèmes de production. La structuration et l’exploitation intelligente des connaissances métiers de l’entreprise sont désormais au cœur des verrous industriels et problématiques de recherche. Dans le domaine manufacturier en particulier, la réutilisation optimale de connaissances devient de plus en plus un enjeu important notamment avec l’expansion de l’utilisation des outils numériques favorisant la capitalisation du savoir-faire métier. Dans ce contexte, la thèse présentée à travers ce manuscrit porte sur les systèmes à base de connaissances (SBC). L’ingénierie des systèmes à base de connaissances selon [Bernard et Tichkiewitch, 2008] est un thème de recherche qui vise à concevoir des modèles de connaissances qui incorporent et formalisent les connaissances des experts. Selon Labrousse [Labrousse, 2004], la connaissance est l’émergence de l’utilisateur d’un SBC et l’information interprétée. Cette interprétation peut être dégradée si l’information délivrée ne correspond pas au contexte adéquat dans lequel le SBC est sollicité. Parmi les causes majeures de cette dégradation, et par conséquent de l’échec de la mise en place d’un SBC, est la surcharge des connaissances. Ce problème souligné par certains auteurs comme [Eppler et Mengis, 2004] est dû au manque d’anticipation, lors de la conception d’un SBC, des situations (très souvent dynamiques) dans lesquelles ce dernier est utilisé. Ce qui rend le processus de réutilisation de la connaissance dans certains cas plus complexe.

La compétitivité industrielle 

Dans un contexte concurrentiel assez rude, les industriels sont toujours en quête d’optimiser et fiabiliser leurs systèmes de production pour assurer leur maintien dans le marché. Ce maintien est conditionné aujourd’hui par le franchissement de certains caps en lien avec le triplet « Qualité | Coût | Délai ». Parmi les facteurs majeurs qui influencent ce triplet figure le coût de la non-qualité (CNQ). Le CNQ est généralement défini comme le coût engendré suite à un écart par rapport à une qualité de production cible. À l’échelle nationale, des estimations relèvent que ce coût représente 20 % du chiffre d’affaires (CA) des entreprises industrielles tous domaines confondus. Aux États Unis, il représente 15 % du CA contrairement à 8 % au Japon. Le besoin de réduire ce coût a suivi depuis longtemps les avancées technologiques et la numérisation de systèmes de production. Ainsi, conscients de déficits de cet objectif, les industriels mettent en faveur de leur patrimoine humain des outils de support et d’assistance tout au long du cycle de vie du produit : des outils de collaboration, de gestion de flux d’information, de simulation, etc. dans le but de les aider à bien accomplir leurs tâches et à monter en compétence. La communauté scientifique contribue considérablement pour faire face à ce verrou industriel. Dans [Benhabib et Ghomrassi, 2004], les auteurs concluent après une étude conduite auprès de nombreuses lignes de production dans différents domaines industriels, sur certaines causes majeures derrière le CNQ imputable à la main d’œuvre, parmi lesquelles :
• la prime accordée à la quantité produite et non à la qualité,
• les carences en matière de suivi de normes et réglementations,
• les lacunes dans la formation des employés,
• et le manque de documentation et les difficultés de l’acheminement de l’information au niveau machine dans les lignes de production. Ceci est dû principalement au manque des outils ergonomiques pour accéder à l’information.

Visions autour de l’usine du futur 

Aujourd’hui, les verrous industriels de produire à moindre coût, mais aussi plus rapidement, se croisent avec des visions mutuelles industrielles et scientifiques visant à moderniser l’outil industriel à travers le concept de l’usine du futur. L’usine du futur repose sur des visions complémentaires exploitant, entre autres, les atouts des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) en faveur de l’industrie. Ce concept s’appuie principalement sur des initiatives et roadmaps fournissant des préconisations autour d’une usine idéaliste et des réponses concrètes aux défis de l’avenir [IFFRA, 2013] [AFM, 2015] [Westkämper, 2014]. L’ensemble des initiatives exprimées autour du concept de l’usine du futur comporte deux concepts révolutionnaires :

L’usine intelligente : l’usine intelligente s’appuie sur l’intégration des nouvelles technologies de l’information au cœur de processus industriels. Ce concept adopte les bases de l’internet des objets ou les technologies de « Big Data» dans le but d’atteindre une gestion optimale du processus de fabrication [Zuehlke, 2010].

L’usine virtuelle : l’usine virtuelle repose sur l’emploi de technologies de l’ingénierie virtuelle (réalité virtuelle, augmentée ou mixte) dans l’objectif de réaliser des simulations avancées de processus de fabrication, de collaborer dans un environnement virtuel ou pour former les acteurs de l’usine à travers des techniques d’interactions avancées. En outre, ce concept se base sur le fait que dans l’usine du futur, le numérique sera un moteur pour la formation, la collaboration et l’innovation. Ceci essaime modélisation et maquettage 3D produits-processus et approche PLM (Product Lifecycle Management).

Le concept de l’industrie 4.0 est parmi les initiatives autour de l’usine du futur. Il s’agit d’une vision issue de l’esprit allemand visant à définir les périmètres d’une usine intelligente. En effet, ce concept englobe une vision où les mondes physique et virtuel dans l’usine interagissent dans le même environnement [Kagermann et al., 2013]. Selon cette vision, la métamorphose de l’usine de demain sera marquée à travers la mise en communication omniprésente de différents acteurs impliqués dans le processus industriel (machines, produits, humains, etc.) dans l’objectif de gérer efficacement les lacunes dans la production et anticiper toute cause de défaillance. Cette communication est assurée par le biais des nouvelles technologies de l’information. Par conséquent, leur maîtrise assurera certainement la différenciation et présentera un fort levier de compétitivité.

Ce dernier lustre, des grands groupes manufacturiers, des PME et des ETI , commencent à s’intéresser par les aspects issus de l’usine du futur. À l’échelle nationale, la volonté des industriels de gagner en compétitivité via ce concept est accompagnée par un écosystème constitué de plusieurs organismes scientifiques, centres de recherche et pôles de compétitivité à l’instar de l’IRT Jules Verne , le pôle EMC2 ou aussi le CEA LIST . Cet écosystème est soutenu par le programme européen Horizon 2020 qui comporte plusieurs projets de recherche visant à répondre à des enjeux industriels économiques, sociétaux et environnementaux.

Facteur humain dans l’usine du futur 

Malgré l’« invasion » de l’usine par les outils numériques depuis plusieurs années, l’implication de l’être humain reste incontestable. Les avis des experts exprimés à travers les visions autour de l’usine du futur sont unanimes pour conclure à la nécessité de donner plus d’ampleur au rôle de l’être humain et améliorer ses conditions de travail. L’usine du futur apportera donc des éléments de réponse à la fois technologiques mais aussi humains aux enjeux industriels actuels. Westkämper dans [Westkämper, 2014] discute le concept de futurs systèmes de production centrés sur l’humain et souligne l’importance de la prise en compte de la dimension humaine dans l’usine du futur :

« Factories are the place of humans work. Humans generate and drive factories. Humans are the most flexible resource in the manufacturing system […] but their cognitive, physical and tactile perceptions are limited […] Humans can use computational intelligence to learn and overcome « oblivion » and taking advantages of computational knowledge. Humans are able to learn, to forget, to communicate and cooperate in the digital environment […] Their motivation and their creativity as well as their experience are the driving forces for innovation, adaptation and optimization in manufacturing. »

Après un état de l’art de plusieurs roadmaps, nous pouvons conclure sur trois points visionnaires mettant en valeur le rôle de l’être humain dans l’usine du futur :
• L’innovation organisationnelle : il s’agit de révolutionner la manière de répartir les missions et les responsabilités avec plus de flexibilité et d’adaptabilité des tâches en tenant compte des changements dynamiques en environnement de travail. Ce point inclut aussi l’instauration des nouvelles démarches collaboratives et nécessite de repenser les relations interhumaines.
• Le concept de l’usine apprenante ou « Learning Factory » : ce concept vise à aider les acteurs de l’usine à monter en compétence tout en s’appuyant sur une synergie entre les besoins en terme de formation et l’apprentissage par la pratique.
• Les interactions homme-machine : promouvoir l’utilisation des interfaces homme machine intuitives et sophistiquées. Ce point consiste aussi à dynamiser les modalités des interactions homme-robot et des moyens à travers lesquels les acteurs de l’usine accèdent à l’information.

Dans ce cadre, le premier des enjeux industriels de nos travaux identifié consiste à renforcer le positionnement de l’être humain dans l’usine. L’achèvement de la solution à ce verrou s’appuie sur le postulat que l’homme et le numérique, dans les systèmes de production actuels et futurs, ont vocation à s’enrichir tous les deux sans pour autant passer dans le monopole du machinisme où l’automatisation et la numérisation vont remplacer l’homme.

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Table des matières

1 Introduction Générale
2 Contexte Industriel et Problématique de Recherche
I Connaissance, Ubiquité & Contexte : État de l’Art
3 Gestion et Ingénierie des Connaissances de l’Entreprise
3.1 Introduction
3.2 Définition de la connaissance
3.3 Typologie de la connaissance
3.4 Valeur et granularité de la connaissance
3.5 Méthodes de gestion et d’ingénierie des connaissances
3.6 Techniques de modélisation de la connaissance
3.7 Modélisation de connaissances métiers
3.8 Synthèse et questions de recherche
4 Ubiquité et Notion du Contexte
4.1 Introduction
4.2 Ubiquité et notion de contexte
4.3 La notion de situation de travail
4.4 Modélisation de contextes et de situations de travail
4.5 Synthèse et questions de recherche
II Vers un Accès Ubiquitaire à la Connaissance
5 Structuration Multi-échelle de la Connaissance In-extenso
5.1 Introduction
5.2 Connaissances in-extenso de l’entreprise
5.3 Notion de compétence
5.4 Structuration multi-échelle de la connaissance in-extenso
5.4.1 Principe et définitions
5.4.2 Formalisation mathématique
5.4.3 Modèle conceptuel
5.4.4 Formalisation avec les graphes conceptuels
5.5 Conclusion
6 Modélisation des Contextes Métiers
6.1 Introduction
6.2 Contexte et situation : définitions proposées
6.3 Identification des dimensions contextuelles
6.4 Modèle de contexte proposé
6.4.1 Modèle de contexte centré utilisateur
6.4.2 Modèle de contexte opérationnel
6.4.3 Modèle de contexte organisationnel
6.4.4 Modèle de contexte global
6.5 Conclusion
7 Vers un Mécanisme d’Adaptation Contexte/Connaissance
7.1 Introduction
7.2 Le cycle de vie du contexte
7.3 Mapping contexte-connaissances
7.4 Approche globale et modèle de référence
7.4.1 Approche globale de mise en place d’un SBC sensible au contexte
7.4.2 Le modèle de référence
7.5 Conclusion
8 Expérimentations d’un Assistant Ubiquitaire d’Entreprise
8.1 Introduction
8.2 Architecture conceptuelle
8.2.1 Visualisation des connaissances
8.2.2 Conception de la base de contextes
8.3 Expérimentations
8.3.1 Fonctionnalités de l’assistant
8.3.2 Réutilisation ubiquitaire de la connaissance
8.3.3 Accès ubiquitaire à la documentation technique
8.3.4 Accès ubiquitaire à la simulation numérique
8.4 Conclusion
9 Conclusion générale

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