Structuration morphologique et microbiologique des biofilms multi-espèces

Dans la nature, les microorganismes peuvent se retrouver sous deux formes : planctonique ou fixée. Dans le cas de microorganismes planctoniques, ceux-ci sont libres et en suspension dans un milieu liquide. Le second mode de vie correspond à une forme fixée des microorganismes qui sont alors adhérés à un support et plus ou moins intégrés dans une matrice de substances extracellulaires. Cette seconde forme, appelée biofilm, représente le mode de vie microbien majoritaire dans la plupart des écosystèmes aquatiques. Cette tendance prédominante à vivre sous forme fixée et organisée en biofilm témoigne de l’intérêt crucial que ces microorganismes y trouvent. Ce mode de vie confère une meilleure résistance face aux agressions de l’environnement, par exemple des agressions chimiques par des acides, bases ou des antibiotiques ou encore des agressions biotiques, tels que des virus. Ce faisant, il permet de coloniser un milieu de manière plus durable. De plus, grâce à sa structuration spatiale, différents habitats peuvent se créer au sein même de cette organisation biologique qu’est le biofilm. Cette diversité de conditions environnementales peut également permettre de pérenniser le temps de résidence dans le milieu considéré.

Comme pour décrire un paysage, un biofilm peut être caractérisé par sa topologie, que l’on appellera alors morphologie, et par les populations qui le composent, ici sa composition microbiologique. De nombreux paramètres, plus ou moins en interaction, vont participer à la structuration du biofilm, et ce depuis la première étape, l’adhésion microbienne, jusqu’au biofilm mature. Les conditions hydrodynamiques vont, par exemple, influencer l’accès au support par les microorganismes ou encore exercer des contraintes plus ou moins fortes sur le biofilm se traduisant par des phénomènes de détachement. Ces mêmes paramètres d’écoulement vont aussi influer sur la distribution du substrat au sein du biofilm, ceci se traduisant par des structures architecturales variées et des phénomènes de compétition entre les populations microbiennes. D’autres facteurs comme la prédation et l’histoire même du biofilm jouent aussi un rôle primordial dans sa structuration morphologique et microbiologique, notamment lors de son développement et de sa maturation.

Dans les milieux anthropisés, deux types de biofilms sont distingués selon que leur action est néfaste ou bénéfique. Les biofilms sont dits négatifs lorsque leur apparition est indésirable et leur impact préjudiciable. Ils sont retrouvés notamment dans les domaines de la santé où ils sont responsables de maladies infectieuses, ou dans diverses industries (ex : agro-alimentaires, papetières) où ils sont responsables de risques sanitaires et pertes économiques. Cependant, dans certains cas, l’homme a mis les biofilms à son service et a su en faire un outil précieux :

on parle alors de biofilms positifs. Ils sont par exemple bénéfiques dans certains domaines de l’environnement où ils peuvent être utilisés pour traiter l’eau, les déchets ou encore dépolluer les sols. Une meilleure compréhension de ce système biologique peut ainsi permettre à la fois, dans le cas de biofilms négatifs, de prévenir son développement et limiter ses conséquences mais aussi d’améliorer les performances de procédés et d’optimiser le fonctionnement des biofilms positifs.

Les deux types de structures, morphologique et microbiologique, ont toutes deux une importance capitale quant à l’activité du biofilm, qu’il soit positif ou négatif. Dans le domaine médical, la présence d’un biofilm constitue déjà un problème en soi mais sa composition microbiologique, si par exemple il s’agit de bactéries pathogènes et infectieuses, est une question essentielle. La même problématique vaut pour les industries agro-alimentaires. Dans le cas de biofilms positifs, la composition microbiologique est tout aussi importante. Les capacités épuratoires pour une pollution donnée ne sont pas les mêmes d’une population bactérienne à l’autre. D’autre part, la maîtrise de la structure morphologique est déterminante. Par exemple dans des procédés de type échangeur thermique ou filtration membranaire, un biofilm que l’on arrive à maintenir fin et peu étendu sera moins problématique, les risques de colmatage étant maîtrisés.

C’est donc dans ce contexte que ce projet de thèse trouve son sens. L’objectif général de ces travaux est d’approfondir la connaissance des phénomènes régissant la structuration des biofilms. Une meilleure compréhension de ces mécanismes doit permettre d’appréhender le système biofilm avec plus de pertinence. La morphologie et la composition microbiologique sont deux descripteurs essentiels pour le contrôle et la gestion de l’activité des biofilms. Ces structures sont la résultante de divers évènements qui entrent en action dès les phénomènes d’adhésion des microorganismes sur le support et le resteront tout au long de la vie du biofilm. Cette problématique s’avère pertinente aussi bien pour les biofilms néfastes que pour les biofilms bénéfiques. La logique de cette étude vise à s’intéresser à la structure des biofilms aux différentes étapes de son cycle de vie que sont l’adhésion, le développement et la maturation. Pour chaque cas, le travail s’est concentré sur un paramètre clé de la structuration du biofilm.

Tel que défini par Characklis and Marshall (1990), un biofilm est constitué de cellules immobilisées sur un support et généralement ancrées dans une matrice de polymères organiques d’origine microbienne. Ce terme de « biofilm » apparaît pour la première fois dans un article scientifique en 1975 dans la revue Microbial Ecology (Mack et al., 1975). Si le terme existe depuis une quarantaine d’années seulement, les biofilms quant à eux représentent un mode de vie bactérien bien plus ancien, retrouvé notamment dans des fossiles vieux de plus de 3,3 milliards d’années (Hall Stoodley et al., 2004). Ainsi, à la différence des bactéries dites planctoniques, c’est à-dire libres et en suspension dans un milieu liquide, un biofilm est un regroupement plus ou moins dense et organisé d’individus sur un support solide. Avec plus de 99% des espèces bactériennes capables de s’organiser sous forme de biofilm, ce mode de vie est omniprésent au sein des procaryotes (Costerton et al., 1987). Preuve de l’avantage stratégique que ce mode de vie confère, la majorité des bactéries dans les milieux naturels se retrouve sous forme de biofilms (Costerton et al., 1978).

Le support constitue la phase solide sur laquelle les microorganismes vont s’adhérer. Il peut être lui-même mobile ou fixe. Dans certains cas, ce support est fait de matières inertes issues de la dégradation et minéralisation de microorganismes : il s’agit d’un biofilm autoporté communément appelé granule (Liu and Tay, 2002). Le biofilm basal est une couche de faible épaisseur, celle la plus proche du support. Ces propriétés en termes de composition microbiologique, composition des polymères de la matrice, cohésion, densité sont généralement sensiblement différentes à celles du biofilm pris dans son ensemble (Besemer et al., 2009a; Derlon et al., 2008; Ras et al., 2013; Rochex et al., 2009). Le biofilm de surface quant à lui peut présenter des architectures diverses : des microcolonies séparées par des canaux, des streamers, des bouquets de protozoaires… (Böhme et al., 2009; Rusconi et al., 2011; Stewart, 2012). Il est beaucoup plus sujet aux agressions que le biofilm basal, notamment la prédation, le détachement, l’érosion ou l’action de produits chimiques. La phase liquide est en contact direct avec le biofilm. Grâce aux phénomènes de convection et de diffusion, elle permet aux microorganismes d’accéder à des substances solubles indispensables à leur croissance. De la même manière, elle est aussi le vecteur des produits chimiques et antibiotiques s’attaquant aux biofilms. La phase liquide permet en outre d’alimenter le biofilm en gaz dissous issus du dernier compartiment, la phase gaz. Les échanges gazeux se font en effet généralement par l’intermédiaire de la phase liquide. Ces échanges vont dans les deux sens, par exemple pour un biofilm phototrophe, l’oxygène est apporté et le dioxyde de carbone évacué.

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Table des matières

Introduction
I. Synthese bibliographique
I.1 Le biofilm : sa vie, son œuvre
I.1.1 Généralités sur les biofilms
I.1.1.1 Définition
I.1.1.2 Composition
I.1.1.3 Avantages du mode de vie biofilm
I.1.2 Les biofilms, un système biologique omniprésent
I.1.2.1 Les biofilms en milieu naturel
I.1.2.2 Les biofilms « négatifs »
I.1.2.3 Les biofilms « positifs »
I.1.3 Le cycle de vie du biofilm
I.1.4 Introduction aux diversités structurelles des biofilms
I.2 L’adhésion microbienne
I.2.1 La théorie de l’adhésion microbienne
I.2.1.1 L’accès au support
I.2.1.2 L’adsorption réversible
I.2.1.3 L’adhésion irréversible
I.2.2 Les paramètres clés de la structuration
I.2.2.1 Notions d’hydrodynamique
I.2.2.2 Les paramètres structurants en regard des conditions hydrodynamiques
I.2.3 Les techniques d’études de l’adhésion microbienne
I.2.3.1 Les dispositifs expérimentaux
I.2.3.2 La caractérisation chimique des surfaces
I.2.3.3 Les techniques d’observation
I.3 Le développement et le biofilm mature
I.3.1 Des microcolonies au biofilm mature
I.3.1.1 La formation de microcolonies
I.3.1.2 L’acquisition de structures différentiées : la maturation
I.3.1.3 Le biofilm mature
I.3.2 Les différents facteurs modifiant la structuration du biofilm
I.3.2.1 Les conditions hydrodynamiques
I.3.2.2 L’histoire du biofilm
I.3.2.3 Les phénomènes de prédation
I.3.3 Les techniques d’études adaptées
I.3.3.1 Les dispositifs expérimentaux
I.3.3.2 Les techniques d’observation
I.3.3.3 Les techniques d’investigation du biofilm
I.4 Les objectifs de l’étude
II. Materiel et methodes
II.1 Les dispositifs expérimentaux
II.1.1 L’adhésion : réacteur de Couette-Taylor
II.1.1.1 Présentation du réacteur
II.1.1.2 Les paramètres hydrodynamiques dans le CTR
II.1.2 Le développement et les biofilms matures : colonne à bulles
II.1.2.1 Présentation du réacteur
II.1.2.2 Description du régime hydrodynamique
II.2 La conduite des réacteurs
II.2.1 Le déroulement d’un essai d’adhésion
II.2.1.1 Les différentes contraintes appliquées
II.2.1.2 L’inoculum
II.2.1.3 Le protocole d’adhésion
II.2.2 L’opération des colonnes à bulles
II.2.2.1 Les deux types de conditions hydrodynamiques testés
II.2.2.2 L’inoculation des réacteurs
II.2.2.3 La conduite continue
II.2.3 Les caractérisations physico-chimiques
II.3 La caractérisation morphologique
II.3.1 Les techniques d’observation
II.3.1.1 La microscopie à épifluorescence
II.3.1.2 La stéréomicroscopie
Conclusion

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