Spécificités de l’animation socioculturelle

L’animation socioculturelle

Je décris l’histoire de l’ASC et puis je définis cette profession, plus particulièrement dans le domaine culturel et artistique ainsi que ses rôles et ses fonctions. 2.1.1 Histoire et évolution La notion de travail social est apparue au XIXème siècle pour répondre aux changements sociaux liés à l’émergence du capitalisme, selon J.-C. Gillet (2008, p.109), chercheur et enseignant en sciences de l’éducation. L’ASC émerge, elle cherche une redistribution du savoir ainsi que du pouvoir, dans une démocratie par un accès partagé à la culture, continue l’auteur (2008, p.109). Dans les années 1950, l’urbanisation change les paysages des campagnes en villes, ce qui a une répercussion sur les relations entre les personnes, décrit N. Bourriaud (1998), commissaire d’exposition, historien de l’art et critique d’art français, spécialisé dans l’art contemporain. Le nombre d’individus dans un même espace augmente mais les interactions diminuent. Tout est à disposition chez soi, ce qui nécessite moins de sortir : télévision, cuisine. Les gens se connaissent moins, ce qui provoque une absence de dialogue et des incompréhensions, d’où naissent certains conflits.

Pour rétablir le lien social et la proximité, G. Poujol (1996, p.30), sociologue et auteure de livres de référence sur l’ASC, l’éducation populaire et le militantisme associatif, explique que des collectivités de personnes se regroupent dans les quartiers pour exercer des activités. Selon l’auteure, il s’agit de groupes de jeunes qui font de la musique, de la danse et d’autres activités ensemble. Ces regroupements, qui étaient, à la base, formés de jeunes, s’ouvrent également dans d’autres lieux et à diverses populations : personnes âgées, personnes en situation de handicap, personnes migrantes, etc. Au départ, continue G. Poujol, ces groupes de personnes étaient gérés par des instances religieuses de manière non lucrative, puis ces bénévoles se sont ensuite laïcisés et ils sont devenus les animateur∙trice∙s socioculturel∙lle∙s d’aujourd’hui. Les travailleurs sociaux se professionnalisent par l’ouverture des premières formations en travail social en 1960 et les spécialisations en ASC aux alentours de 1969-1970 (Poujol, G., 1966, p.30). Durant une certaine période, selon l’auteure, on trouve des animateur∙trice∙s socioculturel∙lle∙s qui exercent de manière amateure et d’autres de manière professionnelle, c’est-à-dire avec l’obtention d’un diplôme. Selon F. Lebon (2009, p.4), maître de conférences en sciences de l’éducation, c’est en 1988 par la convention collective de l’animation socioculturelle que la profession s’impose. Il ne s’agit plus de « militantisme » ou de « vocation » bénévole dans une optique sociale désintéressée mais d’un engagement professionnel salarié.

Définition : L’ASC est une des trois filières de l’orientation Travail social. Pour définir ce domaine, je me base sur la définition internationale de l’éthique en travail social, qui a été établie en 2003 à Copenhague par la Fédération Internationale des Travailleurs sociaux : « Le professionnel du travail social oeuvre pour le changement social. Ce sont les principes des droits de l’homme et de justice sociale qui fondent le travail social. Il faut défendre le droit à la participation pour les personnes qui utilisent leurs services de façon à les rendre autonomes dans les décisions et les actions qui concernent leur existence, ce qui suppose de contester la discrimination négative, de reconnaître la diversité et de distribuer les ressources équitablement. » (Gillet, J.-C., 2008, p.108) Cette spécialisation qui débouche du travail social est ainsi inscrite dans cette définition et oriente la profession dans sa pratique, toutefois, continue l’auteur (2008, p.109), elle se différencie de celle d’une éducateurtrice sociale ou d’une assistante sociale.

Ainsi il en découle des philosophies de l’action spécifiques à chaque champ. Cette éthique est dirigée sur des actions auprès des publics les plus vulnérables en les accompagnant, en les soutenant, en les aidant, alors que les animateur∙trice∙s se retrouvent plutôt sur des valeurs orientées vers la promotion par les bienfaits du savoir, de la culture et des arts. Le terme « animation socioculturelle » est difficile à définir, tant il touche à différents domaines et manières de faire, explique le sociologue P. Besnard : « L’animation socioculturelle désigne les actions menées dans le cadre des équipements socioculturels (maisons des jeunes et de la culture, maisons pour tous, maisons de quartier, centres socioculturels) par des animateurs socioculturels (l’une des familles du travail social) en vue de favoriser des pratiques amateures, d’organiser l’expression active des individus et des groupes, de créer ou de recréer une vie de quartier, d’encadrer les loisirs des enfants ou des jeunes, de favoriser la reconnaissance des cultures minoritaires. » (Besnard, P., 1986, p.77) Par cette définition, je comprends que les animateur∙trice∙s socioculturel∙le∙s agissent dans un espace donné et auprès d’une population afin d’animer un lieu par la gestion de projets et d’activités. Il peut s’agir d’institutions (personnes âgées, personnes en situation de handicap, requérants d’asile), d’associations et d’organisations non-gouvernementales, de centres de loisirs, de maisons de quartiers et de structures (socio-)culturelles. Les populations sont au centre des actions, elles sont actrices de leurs propres besoins par la création de nouveaux liens et d’un réseau d’entraide. Dans le milieu culturel, les projets sont axés sur le domaine de la culture et de l’art (danse, théâtre, musique), contrairement aux structures plus communes, où des activités peuvent être en lien avec le sport, la couture, etc. Mais les objectifs et finalités restent identiques, il ne s’agit que de la forme qui change (Della Croce, C., Libois, J. & Mawad., R., 2011).

Rôles : Après avoir défini l’ASC, je comprends que l’animateur∙trice socioculturel∙elle est chargé d’animer une structure par la gestion et la coordination des différentes activités. Pour cela, il peut prendre différents rôles. De manière générale, il est à la fois responsable de l’administration et de la gestion des projets, de la mise en place du matériel et des infrastructures, ainsi que de la communication et de la régulation des échanges entre les différents acteurs en présence, au préalable, et le jour même d’une activité (Manisa, M., 2002). A travers des actions collectives, ce∙tte professionnel∙le amène les personnes et populations à s’exprimer, développer leur créativité et se socialiser par différents biais (théâtre, danse, dessin). Il∙elle accompagne des événements sportifs et sensibilise à des préoccupations d’ordre local (environnement, urbanisme) (Manisa, M., 2002). Pour réaliser son rôle, il peut assurer toute une série de tâches variées : repérer les besoins des populations, négocier le financement auprès des partenaires, assurer le suivi, évaluer les retombées, etc. (Manisa, M., 2002). La Charte valaisanne de l’ASC définit les rôles suivants : « développement personnel, promotion citoyenne, développement local, promotion culturelle, militance, conscientisation, intégration, médiation, animation de groupes, réalisation et appui à des projets » (Association Valaisanne des animateur∙trice∙s socioculturel∙elle∙s [AVANIMS], 2012, p.2). Comme étudié précédemment, si l’ASC est présente dans différents champs très variés, dans le domaine culturel, les animateur∙trice∙s socioculturel∙lle∙s ont un rôle de médiateur∙trice culturel∙le (Della Croce, C. & al., 2011, pp.77-78) que je définis dans la partie théorique destinée à la médiation culturelle.

Degré de participation

L’important est la forme que peut prendre cette implication, qui s’exprime sous la notion de « degré de participation », explique C. Mörsch (2012, p.86). Si ce degré, dépend des possibilités liées à l’institution et à ses publics, il est également question des médiateur∙trice.s culturel∙le∙s selon les différentes théories de l’enseignement et de l’apprentissage auxquelles a recourt le∙la professionnel∙le. Cela résulte également de l’expérience des professionnel∙le∙s et des dynamiques émergeant lors du projet, ce qui n’est pas planifiable à l’avance. Les degrés de participation définis ci-dessous sont à prendre avec parcimonie, insiste l’auteure, puisqu’ils sont peu systémiques. Tout comme les objectifs et les résultats ne sont pas fixes. J’énonce les degrés de participation, du moins élevé au plus élevé (réceptif, interactif, participatif, collaboratif et revendicatif), selon C. Mörsch (2012, p.86). Je précise que l’auteure ne porte aucun jugement de valeur et qu’il ne s’agit en aucun cas d’un ordre d’importance. Le degré de participation réceptif signifie que des informations sont communiquées et écoutées ou lues par le public en présence. L’auteure insiste que la position d’écoute ne signifie pas qu’un public est passif (Mörsch, C., 2012, p.87).

L’interactif se différencie du réceptif dans le sens où il dépasse la simple écoute où le public reçoit des informations ; définit C. Mörsch (2012, p.88). L’interaction, c’est-à-dire la possibilité d’échanger sur un sujet, est au centre. Pour mettre en place ce style de médiation, continue l’auteure (2012, p.88), le∙la médiateur∙trice collabore avec des expert∙e∙s d’un domaine ou par le biais d’objets à expérimenter, qui déclenchent le processus interactif. Par participatif, C. Mörsch (2012, p.89) suggère la possibilité pour les visiteurs « d’intervenir sur les contenus, les formes et même les règles d’action » à l’intérieur d’un cadre, établi à l’avance par un∙e médiateur∙trice culturel∙elle, dans lequel ils devront s’organiser de manière autonome. Dans ce cas, l’auteure indique qu’il faut être attentif à ne pas confondre la notion de production artistique et de médiation artistique, dont la frontière est fine. Dans mon travail, je me concentre plus particulièrement sur le degré de participation collaboratif, qui implique selon C. Mörsch, que le cadre, le thème et les méthodes du projet de médiation envisagé ont été élaborées avec les participant∙e∙s (2012, p.90).

Selon C. Mörsch (2012, p.90), ces projets doivent veiller à la gestion des rapports de pouvoir et des conflits d’intérêts afin d’être réellement « collaboratifs » et « constructifs » pour l’ensemble des acteurs. Elle cite les différences de statuts, de coutumes et d’opinions présents au sein d’un groupe. Il est ainsi important d’échanger autour de la notion des rapports de pouvoir et de définir la place de chacun au sein du processus, ce qui demande une certaine transparence au niveau de la transmission des informations et d’être clair sur les objectifs visés. Il faut également, continue l’auteur, veiller à ce qu’il y ait des ressources nécessaires à la réalisation du projet. Je donne comme exemple fictif un groupe de jeunes qui se rendraient régulièrement au théâtre pour des entretiens avec un∙e médiateur∙trice, après avoir visionné la pièce de théâtre Phèdre de J. Racine. Après s’être mis d’accord, ils décident d’élaborer un café-discussion autour du thème « faut-il suivre sa raison ou ses passions ?

Un questionnement toujours d’actualité pour les jeunes d’aujourd’hui. Même si le premier entretien était amené par un∙e médiateur∙trice culturel∙le, il y aurait ensuite une réelle collaboration qui permette aux jeunes de définir la démarche, les conditions de travail et les contenus, qu’impliquent la notion de collaboration selon C. Mörsch (2012, p.90). Bien que ce style de médiation ne soit pas facile à mettre en place, exprime C. Mörsch (2012, p.90), il peut être porteur de nombreux points positifs. Le potentiel de pérennité est élevé par une forte implication des participants, qui peuvent s’identifier à un projet. Cela redonne du pouvoir d’agir en donnant la parole à des publics qui ne se retrouvent pas dans le contexte de l’institution culturelle, de créer leur place dans cet espace et se l’approprier à leur manière. Du côté de l’institution, cela permet d’en tirer des réflexions concernant les aspects positifs de son intervention et des points à améliorer ; et d’ainsi se restructurer en conséquence. Toutefois C. Mörsch (2012, p.90) insiste qu’il existe un danger d’instrumentalisation du public par la structure afin de mettre son image en avant. Pour cela, elle préconise qu’il est essentiel de tenir compte des réels besoins de la collectivité qui doivent être mis au centre de l’intervention et non le contraire ; même si l’institution par son action reçoit de façon indéniable des répercussions positives. Elle explique que le degré de participation collaboratif demande une réelle posture professionnelle de gestion des tensions et des conflits, afin d’amener des réflexions, et d’aboutir à des décisions communes.

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Table des matières

1 Introduction générale
1.1 Motivations et constat de départ
1.2 Problématique
1.3 Question de recherche
1.4 Hypothèses
1.5 Objectifs
2 Partie théorique
2.1 L’animation socioculturelle
2.1.1 Histoire et évolution
2.1.2 Définition
2.1.3 Rôles
2.1.4 Fonctions et sous-fonctions
2.2 Théâtre en tant qu’institution publique
2.2.1 Histoire et évolution
2.2.2 Définition
2.2.3 Fonctions
2.2.4 Contextes
2.3 Médiation culturelle
2.3.1 Histoire et évolution
2.3.2 Définition
2.3.3 Rôles et fonctions
2.4 Comparaison entre médiation et animation
2.4.1 Similitudes
2.4.2 Différences
2.4.3 Spécificités de l’animation socioculturelle
2.5 Participation dans les actions de médiation culturelle
2.5.1 Le degré de participation
2.5.2 Evaluation du degré de participation
3 Terrain d’observation
3.1 Choix du terrain
3.2 Description du terrain
3.2.1 Théâtre du Crochetan
3.2.2 Théâtre Les Halles
3.2.3 Théâtre du Raccot
3.2.4 Théâtre du Vide-Poche
4 Méthodologie
4.1 Récolte des données
4.1.1 Critères de sélection de l’échantillon
4.1.2 Guide d’entretien
4.1.3 Atmosphère de l’interview
4.2 Traitement des données
4.2.1 Tableau d’analyse
4.2.2 Interprétations des données
4.3 Limites et biais de la recherche
4.3.1 Limites
4.3.2 Biais
4.4 Ethique
5 Analyse des entretiens et retour sur les hypothèses
5.1 Place de l’ASC dans un théâtre en tant qu’institution publique
5.1.1 Projets mis en place
5.1.2 Rôle de l’ASC dans un théâtre en tant qu’institution publique
5.1.3 Fonctions de l’ASC dans un théâtre en tant qu’institution publique
5.1.4 Enjeux de l’ASC dans un théâtre en tant qu’institution publique
5.1.5 Retour sur l’hypothèse principale 1 et réponse à la première question de recherche
5.2 Plus-value de l’ASC dans un théâtre en tant qu’institution publique
5.2.1 Méthodes et outils
5.2.2 Connaissance des publics et des (non-)publics
5.2.3 Objectifs et finalités sociaux
5.2.4 Principes et modes d’actions de l’éducation populaire
5.2.5 Participation
5.2.6 Retour sur l’hypothèse principale 2 et réponse à la deuxième question de recherche
5.3 Retour général sur l’analyse
6 Conclusion
6.1 Bilan de la démarche et positionnement critique
6.2 En guise de conclusion générale
6.3 Ouvertures et perspectives
7 Bibliographie
7.1 Monographies

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