Sonder un environnement par suivi de particules uniques

Sonder un environnement par suivi de particules uniques

Origines et prétentions du suivi de particules

La microscopie optique constitue un outil majeur pour la caractérisation de la matière jusqu’à une limite fixée par la diffraction et caractéristique des rayons utilisés pour conduire l’imagerie. En effet, selon le critère de Rayleigh [Rayleigh, 1896], la diffraction des rayons lumineux dans un système d’imagerie conduit à une limite de la résolution de l’ordre de λ/(2N A), où λ est la longueur d’onde du rayonnement et N A l’ouverture numérique du système utilisé pour l’imagerie. Ce critère est basé sur la simple étude de la diffraction par une ouverture et constitue une limite basse, à laquelle doivent s’ajouter l’effet de la pixelisation ou encore du bruit [Stelzer, 1998]. Pour l’imagerie de fluorescence à λ ∼ 500nm via un objectif à immersion d’ouverture numérique N A = 1.4, l’application de ce critère conduit à une limite de la résolution dans le plan focal de l’ordre de 200 nm, trop haute pour l’investigation de processus moléculaires dans le domaine de la biophysique pour ne citer que cet exemple. Différentes approches ont été suivies dans le but de dépasser cette limite. Revenant sur la définition de la résolution, on s’aperçoit que ce critère n’est consistant que pour distinguer deux objets proches. S’intéressant à une particule unique et de taille sub-longueur d’onde, il est possible de repérer son centre de masse plus précisément par déconvolution de la figure de diffraction (ou fonction d’étalement du point ou PSF en anglais) qu’elle produit au plan image du système d’imagerie (voir par exemple [Frisken Gibson and Lanni, 1992], [Kirshner et al., 2013]). Pour des molécules uniques, la PSF est particulièrement bien reproduite par une gaussienne, et des résolutions de l’ordre du nm ont été atteintes [Yildiz et al., 2003]. Cette idée est à la base de nouvelles techniques de microscopie dites de super-résolution, et notamment celle basée sur la photo-activation séquentielle de fluorophores individuels (PALM) [Betzig et al., 2006] [Hess et al., 2006]. Ces outils contribuent au domaine de la nanoscopie optique en champ large [Hell, 2007] [Schermelleh et al., 2010].

Le suivi de particules est aujourd’hui largement utilisé, pour, à titre d’exemple, l’étude de la diffusion de protéines membranaires [Ghosh and Webb, 1994], ou encore de fibres d’actine [Work and Warshaw, 1992] et se trouve revu dans des articles de Saxton et Jacobson [Saxton and Jacobson, 1997] (avec un application particulière à l’étude de membranes) ou encore par Levi et Gratton [Levi and Gratton, 2007] [Levi and Gratton, 2009]. Compte tenu de leur taille, la caractérisation de la dynamique de particules sub-micrométriques requiert un formalisme particulier, incluant à la fois les mouvements d’origine diffusive mais aussi dus à l’advection.

Caractérisation de microenvironnement à l’aide de particules 

Nous reverrons ici quelques méthodes expérimentales, où les particules employées font office de sondes et servent à déterminer un micro-environnement. Cette liste n’est pas exhaustive, elle n’en a pas la vocation, nous nous restreindrons ici à la dynamique de colloïdes sphériques et solides pour la caractérisation d’une viscosité, d’une température, mais surtout d’un écoulement de fluide, afin de rester au plus proche des éléments de cœur de ce rapport.

Mesure des propriétés rhéologiques et température 

Une propriété fondamentale de tout matériau est donnée par sa réponse à une contrainte. Par exemple, un solide stocke l’énergie transmise sous forme élastique, alors qu’un fluide s’écoule et dissipe l’énergie transmise sous forme de cisaillement via des forces visqueuses.

Ainsi, caractériser les fluctuations de particules uniques diffusant dans un fluide purement visqueux, permet de remonter à la viscosité du fluide moyennant la connaissance de la température et de la taille de la particule sonde. Utilisant un système de pinces optiques, des cartes de viscosité peuvent ainsi être construites [Nemet et al., 2002]. Cette potentialité peut paraître anecdotique, mais cette mesure est d’importance dans deux cas particuliers : celui des systèmes où la viscosité n’est pas homogène et dans le cas où il n’est pas possible de travailler avec des quantité macroscopique de fluide, comme par exemple au sein de cellules.

Non homogénéité de la viscosité La mesure de la viscosité est d’importance dans la compréhension des matériaux non-homogène comme les émulsions [Moschakis et al., 2006], ou en présence d’un gradient de température [Ługowski et al., 2002]. Plus proche des considérations qui seront les nôtres dans ce manuscrit sont l’influence des interactions hydrodynamiques sur la viscosité apparente d’une particule en mouvement proche d’une paroi. Comme nous aurons par la suite l’occasion de le développer, la condition de non glissement imposée par la présence d’une paroi amène à redéfinir la viscosité apparente du milieu dans lequel une particule se meut [Happel and Brenner, 1983]. La mise en évidence de cet effet pour des particules sub-microniques a suscité de nombreux travaux [Faucheux and Libchaber, 1994] [Lin et al., 2000] [Lançon et al., 2001] [Banerjee and Kihm, 2005] [Huang and Breuer, 2007] [Carbajal-Tinoco et al., 2007] tous basés sur le suivi de particules uniques.

Micro-rhéologie Les matériaux sont rarement purement visqueux. Les cellules du corps humain sont constamment soumises à des contraintes venant d’actions mécaniques extérieures ou même à des changements physiologiques internes. Pléiade de techniques se sont donc développées afin de sonder les propriétés mécaniques des matériaux vivants à l’échelle de la cellule unique [Lim et al., 2006]. Souvent, ces mesures se font en appliquant des contraintes externes et maîtrisées, en utilisant une micropipette, la pointe d’un microscope à force atomique ou encore des billes maintenues par des pinces optiques. Avec la promesse de pouvoir mesurer les propriétés rhéologiques internes de matériaux, s’est développée la technique de micro-rhéologie par suivi de particules [Mason and Weitz, 1995]. À l’aide d’un formalisme basé sur une équation de Langevin généralisée, introduisant une dépendance temporelle de l’amortissement visqueux .

La température apparaît alors proportionnelle à MSD, de manière cohérente avec sa définition de mesure de l’agitation moléculaire. Comme nous le verrons dans le paragraphe qui suit, la microvélocimétrie par image de particule (d’acronyme anglais µ-PIV) est une méthode pour la caractérisation d’écoulements de fluide basée sur la corrélation d’images de particules ensemencées dans ce dernier. La corrélation croisée de deux images consécutives conduit à un pic dont la position est caractéristique du mouvement par advection des particules. Toutefois, cette mesure peut être entachée par le mouvement brownien des particules, effet se retrouvant directement dans la largeur du pic de corrélation. Hohreiter et al. [Hohreiter et al., 2002] ont été les premiers à mettre en avant qu’une mesure de température était possible si l’on s’attachait à la largeur du pic de corrélation. Toutefois cette technique reste essentiellement ratiométrique, non-absolue. Cette méthode a été développée par la même équipe dans [Chamarthy et al., 2009] et adaptée pour s’affranchir de cette procédure de calibration. Park et al. [Park et al., 2005] ont proposé une méthode de suivi tridimensionnel de particules, basée sur la reconnaissance de la figure de diffraction produite par les particules au plan focal image. Une particule hors du plan focal produit une figure (tâche d’Airy) typique tel qu’il est possible, après une procédure de calibration, de déduire la position selon l’axe optique de cette dernière en repérant le rayon du cercle le plus extérieur de la tâche de diffraction. Ceux-ci ont alors construit des déplacements quadratiques moyens de particules et déduit la température du système via cette méthode non invasive. Notons qu’à cette fin, les auteurs ont utilisé une expression de la viscosité donnée par µ = A10B/(T −C) avec T la température absolue, et A, B, C des constantes, afin de considérer la variation de viscosité inhérente à l’augmentation de température  . Ceux-ci ont de cette manière démontré la possibilité de mesurer une température avec des incertitudes de 5.54 %, 4.26 % et 3.19 % dans les cas où le positionnement a été conduit à 1, 2 ou 3 dimensions. Un même type de méthode, s’affranchissant de l’algorithme de localisation par étude de la figure de diffraction a été conduite pour cartographier la température au sein d’un canal microfluidique en contact avec des dispositifs de chauffage [Chung et al., 2009]. Les auteurs ont pu ainsi revendiquer des déviation mesure/modèle de l’ordre de 1% sur la température.

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Table des matières

1 Introduction
1.1 Origines de l’étude
1.2 Sonder un environnement par suivi de particules uniques
1.2.1 Origines et prétentions du suivi de particules
1.2.2 Caractérisation de microenvironnement à l’aide de particules
1.2.3 Caractérisation d’écoulements
1.3 Dynamique de particules proche d’une paroi : forces transverses
1.3.1 Forces de volume et forces de surface
1.3.2 Migration sous cisaillement
1.4 Séparation par taille de molécules d’ADN
1.4.1 Taille d’un polymère
1.4.2 Électrophorèse, séparation sur gel et analogues technologiques
1.4.3 Séparation sans matrice
1.5 Bilan et introduction des travaux expérimentaux
2 Matériels et méthodes
2.1 Fabrication et intégration des puces microfluidiques
2.1.1 Photolithographie optique
2.1.2 Gravure du silicium
2.1.3 Perçage et oxydation des puces
2.1.4 Capotage des dispositifs et connexions fluidiques
2.2 Banc expérimental
2.2.1 Optique
2.2.2 Imagerie
2.3 Fluides et particules
2.3.1 Solutions tampon
2.3.2 Marquage de l’ADN
2.3.3 Contrôle en taille des colloïdes
3 Caractérisation d’écoulements micro-nano fluidiques à l’aide de traceurs sphériques
3.1 Introduction
3.2 Hydrodynamique et dynamique de particule à bas nombre de Reynolds : quelques fondements nécessaires à notre étude
3.2.1 Hydrodynamique à bas nombre de Reynolds : équation de Stokes
3.2.2 Écoulement fluidique au sein de fente fine
3.3 Dynamique d’une bille entre deux parois
3.3.1 Impact des interactions hydrodynamiques sur la dynamique d’une bille confinée
3.3.2 Vitesse de translation d’une sphère confinée entre deux murs dans un écoulement de Poiseuille
3.4 Construction d’un modèle d’ajustement des données expérimentales
3.4.1 Densité de probabilité de vitesse du traceur
3.4.2 Ajustement des données expérimentales
3.5 Validation du modèle par dynamique brownienne
3.5.1 Équation de Langevin et non-homogénéité du coefficient de diffusion
3.5.2 Résultats des simulations
3.6 Confrontation à l’expérience pour des fluides Newtoniens
3.6.1 Conditions expérimentales
3.6.2 Application de notre méthode de caractérisation pour différentes fentes microfluiques
3.6.3 Migration transverse
3.6.4 Conclusion partielle
3.7 Application au suivi de la déformation d’une canalisation
3.7.1 Le Poly-diméthylsiloxane : matériau déformable
3.7.2 Conditions expérimentales
3.7.3 Résultat
3.8 Conclusion du chapitre
4 Conclusion

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