SERVICES ECOSYSTEMIQUES ET BIODIVERSITE DANS UN PAYSAGE

SERVICES ECOSYSTEMIQUES ET BIODIVERSITE DANS UN PAYSAGE

Mesure des SE

Dans la suite de l’exposé, toute mention du terme SE fera référence à la composante « fourniture » de celui-lui. C’est en effet cette composante que nous avons choisi d’étudier au cours de nos travaux. Il en va de même de la majorité des études traitant des SE, la composante « demande » n’étant abordée que plus rarement (mais voir par exemple Locatelli et al. (2014), où les deux composantes sont prises en compte). Avant de chercher à quantifier les bénéfices issus des SE (éventuellement en termes monétaires), il s’agit de mesurer les SE en termes biophysiques. Des indicateurs de la production de SE sont utilisés à cette fin. La pertinence du choix des indicateurs est conditionnée par une compréhension fine des SE, une étude de ceux-ci étant de fait nécessaire préalablement à leur mesure.

Le cadre conceptuel de cette étude a été dessiné par Kremen (2005) qui propose de (1) identifier les fournisseurs (espèces, entités, etc.) de SE, (2) déterminer l’influence de la structure des communautés sur le fonctionnement des écosystèmes, (3) étudier les facteurs environnementaux qui ont une influence majeure sur la production de SE, et (4) mesurer l’échelle spatio-temporelle à laquelle les SE, ainsi que leurs fournisseurs, agissent. Ainsi, des quantifications de SE ont régulièrement été réalisées, à une échelle pouvant être locale comme globale (voir par exemple Kremen et al., 2002; Naidoo et al., 2008). De même, la valeur économique des bénéfices que l’Homme retire des SE a également pu été estimée pour divers SE et à des échelles variées (voir par exemple Costanza et al., 1997; Barbier et al., 2011). Parce que les indicateurs les plus pertinents de production des SE ne sont pas toujours facilement mesurables, des substituts (« proxies » en anglais) sont régulièrement employés.

Les types d’occupation ou d’utilisation des sols sont par exemple souvent utilisés pour rendre compte de la production de certains SE, chaque type se voyant attribuer une valeur moyenne de production du SE en question (cas du stockage de carbone; voir Naidoo et al., 2008). Or, certains substituts ne présentent qu’une correspondance partielle, tant d’un point de vue qualitatif (patrons de répartition) que quantitatif (ordre de grandeur et variabilité) avec les données primaires qu’ils sont censés représenter (Figure 1.3). Ceci peut avoir des répercussions importantes, notamment dans le cadre de l’étude des relations entre SE multiples (Eigenbrod et al., 2010).

Etude des relations entre SE

Dès lors qu’au moins deux SE ont été mesurés par le biais d’indicateurs ou de substituts, il est possible d’en étudier les relations. La nature de ces relations, si tant est qu’il y en ait, diffère selon la dimension spatiale (ponctuelle vs. étendue, autrement dit au niveau de parcelles de mesure vs. sur des zones plus étendues) et temporelle (statique vs. dynamique) de l’étude. Selon les cas, ces relations peuvent être alternativement des corrélations, congruences/divergences ou synergies/trade-offs (Figure 1.4). Figure 1.4. Quatre approches pour l’étude des relations entre services : (1) Corrélation entre services; (2) Synergies et trade‐offs entre services dans le temps; (3) Congruence ou divergence spatiale entre service; (4) Synergies et trade‐offs entre services dans le temps et l’espace (Locatelli, 2013) L’étude des congruences/divergences spatiales entre SE se fait souvent en examinant le chevauchement (« overlap ») des zones présentant, pour les distributions respectives, les plus hautes valeurs de production de SE (« hotspots »).

On parlera de congruence (divergence) spatiale entre les SE X et Y quand le chevauchement des zones à la fois « hotspots » de X et de Y sera supérieur (inférieur) au chevauchement attendu, c’est-à-dire celui de « hotspots » de SE aux distributions spatiales aléatoires. Il y a interaction entre SE lorsque plusieurs SE sont sensibles aux variations d’un même paramètre extérieur (par exemple, une augmentation de la température), ou bien que des changements dans la production d’un SE modifient celle de SE tiers. Ces interactions sont appelées synergies si les productions de SE augmentent conjointement, et trade-offs si elles évoluent en sens contraire (Raudsepp-Hearne et al., 2010). Si la présence (ou absence) de corrélations et congruences n’implique pas qu’il y ait interaction entre les SE concernés, des synergies/trade-offs entre SE témoignent a contrario d’une interaction entre ceux-ci. Le type de relation entre SE (l’absence de relation en faisant partie) dépend bien évidemment des services étudiés. Ainsi, il existe souvent des trade-offs entre les services d’approvisionnement et ceux de régulation ou culturels (Raudsepp-Hearne et al., 2010).

Mais alors, comment expliquer que pour une même paire de SE, les relations puissent être différentes ? Cela peut notamment provenir du fait, comme expliqué précédemment, que les SE sont mesurés par le biais d’indicateurs ou de « proxies ». La congruence entre SE peut ainsi être différente selon que l’on a utilisé, pour les mesurer, des données primaires ou des « proxies » (Eigenbrod et al., 2010). De même, les dimensions spatiales et temporelles ont une influence prépondérante dans la nature de la relation entre SE (Figure 1.5), et des conclusions différentes peuvent par exemple être tirées en fonction du site d’étude (par exemple, Sud-Est vs. Nord-Ouest du Royaume-Uni; Anderson et al., 2009), de l’échelle de travail (par exemple, Bornéo vs. toute l’Indonésie; Murray et al., 2015) ou encore de la résolution temporelle de l’étude (par exemple, un mois ou un an pour l’étude du service de protection du littoral; Koch et al., 2009).

Les forêts tropicales : contexte et enjeux

Les forêts tropicales, qui couvrent moins de 10% de la surface des terres émergées (Lewis, 2006), ne forment pas un ensemble homogène. Il existe plusieurs types de forêts tropicales : les forêts tropicales humides, les forêts tropicales de mousson, et enfin les forêts tropicales sèches (Figure 1.6). Aux forêts tropicales s’ajoutent, dans la zone intertropicale (c’est-à-dire entre les tropiques du Cancer et Capricorne situés à environ 23° de latitude Nord et Sud, respectivement), d’autres types de végétation naturelle, tels les savanes herbeuses ou arborées. Au sein de la zone intertropicale, la discrimination entre les différents types de végétation naturelle est en grande partie liée aux différences de conditions climatiques (température et précipitations, tant leurs valeurs annuelles que leurs variations au cours de l’année, mais aussi durée/intensité de la saison sèche). Les recherches se sont en premier lieu concentrées sur les forêts tropicales du fait de la biodiversité importante et originale qu’elles renferment. Une étude récente estime que les forêts tropicales comptent entre 40 000 et 53 000 espèces d’arbres (Slik et al., 2015). En comparaison, il n’y a que 124 espèces d’arbres dans l’ensemble des forêts tempérées d’Europe (Latham & Ricklefs, 1993).

Depuis 10 ans, la nécessité de préserver les forêts tropicales a pris un nouveau tournant. En effet, les importants stocks de carbone qu’elles renferment, tant dans leurs sols (Lal, 2005) que dans la biomasse aérienne (Pan et al., 2011), font des forêts tropicales l’une des composantes clé des stratégies d’atténuation du changement climatique. Afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre liées à la déforestation qui touche les forêts tropicales, les Nations-Unies ont créé en 2005 le programme REDD (devenu depuis REDD+), qui vise à « Réduire les Emissions liées à la Déforestation et à la Dégradation de la forêt ».

Preuve de l’effort investi dans l’estimation des stocks de carbone contenus dans les forêts tropicales, plusieurs cartes pantropicales de biomasse – le carbone représentant environ 47% de la masse sèche de biomasse (McGroddy et al., 2004) – sont à présent disponibles (Saatchi et al., 2011; Baccini et al., 2012). Si les forêts tropicales sont intrinsèquement des puits de carbone (Lugo & Brown, 1992; Lewis et al., 2009), on envisage désormais le biome « forêt tropicale » comme une source de carbone, dès lors que l’on tient compte des émissions brutes liées à la déforestation (Pan et al., 2011). Ainsi, la déforestation qui touche les forêts tropicales (Figure 1.7) et parmi les multiples causes de laquelle figurent notamment l’expansion de l’agriculture et l’extraction non-encadrée de bois (Vitousek, 1994; Geist & Lambin, 2002), est une menace tant pour la conservation de la biodiversité que la protection des stocks de carbone.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
RESUME DU MANUSCRIT
THESIS ABSTRACT
RESUME SUBSTANTIEL
SOMMAIRE
LISTE DES ABREVIATIONS
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
CHAPITRE 1. INTRODUCTION GÉNÉRALE, OBJECTIFS ET PLAN DU MANUSCRIT
1.1 LES SERVICES ECOSYSTEMIQUES
1.1.1 Contexte et définitions
1.1.2 Mesure des SE
1.1.3 Etude des relations entre SE
1.1.4 Biodiversité et SE
1.2 LES FORETS TROPICALES ET LES SERVICES ECOSYSTEMIQUES ASSOCIES
1.2.1 Les forêts tropicales : contexte et enjeux
1.2.2 Autres SE fournis par les forêts tropicales
1.3 CARACTERISTIQUES DE LA ZONE D’ETUDE
1.3.1 Bornéo
1.3.2 Kapuas Hulu
1.4 OBJECTIFS DE LA THESE ET PLAN DU MANUSCRIT
CHAPITRE 2. SERVICES ECOSYSTEMIQUES ET BIODIVERSITE DANS UN PAYSAGE DU NORD DE BORNEO EN RAPIDE MUTATION
CONTEXTE DE L’ETUDE
RÉSUMÉ
ABSTRACT
2.1 INTRODUCTION
2.2 MATERIALS AND METHODS
2.2.1 Ethics statement
2.2.2 Study site and plot selection
2.2.3 Vegetation plots: estimating aboveground carbon stocks and tree species diversity Erosion plots: soil
2.2.4 loss monitoring and topsoil carbon stock estimation

2.2.5 Statistical analysis
2.3 RESULTS
2.3.1 Tree species diversity and composition
2.3.2 Carbon storage
2.3.3 Relationship between aboveground carbon stocks and species richness
2.3.4 Soil erosion
2.4 DISCUSSION
2.4.1 Service production is highest in natural forest
2.4.2 Logged-over forests and swidden agriculture system outperform monocultures in terms of service production
2.4.3 Is the swidden system in Keluin close to a sustainability threshold?
2.5 CONCLUSION
ACKNOWLEDGMENTS
2.6 REFERENCES
2.7 APPENDICES
CONCLUSIONS DE L’ETUDE
CHAPITRE 3. CONGRUENCE SPATIALE ENTRE CARBONE ET BIODIVERSITÉ DANS UN PAYSAGE FORESTIER DE BORNÉO
CONTEXTE DE L’ETUDE
RESUME
ABSTRACT
3.1 INTRODUCTION
3.2 MATERIALS AND METHODS
3.2.1 Study area
3.2.2 Field sampling and index computation for carbon and tree diversity
3.2.3 Potential explanatory variables to be tested for model building
3.2.4 Explanatory variable selection and model building
3.2.5 Correlations, spatial congruence and potential threat analysis
3.3 RESULTS
3.3.1 Response variable predictions over the study area
3.3.2 Response variable correlations and hotspot spatial congruence
3.4 DISCUSSION
3.4.1 Ecological insight about the relationship between ACD and TAD
3.4.2 Potential threats over carbon and tree diversity hotspots
3.4.3 Implications for conservation and development
3.4.4 Limitations of our predictions and those from existing maps
3.5 CONCLUSION
ACKNOWLEDGMENTS
3.6 REFERENCES
3.7 APPENDICES
CONCLUSIONS DE L’ETUDE
CHAPITRE 4. EROSION DES SOLS DANS LES TROPIQUES HUMIDES
CONTEXTE DE L’ETUDE
RESUME
ABSTRACT
4.1 INTRODUCTION
4.2 MATERIALS AND METHODS
4.2.1 Materials
4.2.2 Data analysis
4.3 RESULTS
4.4 DISCUSSION
4.4.1 Soil erosion is concentrated in space and time
4.4.2 What matters in soil erosion control by vegetation?
4.4.3 Soil erosion under human-impacted or managed vs. natural vegetation
4.4.4 Differences in soil erosion control between tropical vs. temperate regions
4.4.5 Limitations of the study
4.5 CONCLUSION
ACKNOWLEDGEMENTS
4.6 REFERENCES
4.7 APPENDICES
CONCLUSIONS DE L’ETUDE
CHAPITRE 5. SYNTHESE, DISCUSSION GENERALE ET PERSPECTIVES
5.1 SYNTHESE DES TRAVAUX DE THESE
5.1.1 Retour sur les objectifs et moyens mis en oeuvre pour y parvenir
5.1.2 Principaux résultats
5.2 DISCUSSION GENERALE ET PERSPECTIVES
5.2.1 Limites du type d’occupation ou d’utilisation des sols comme indicateur de production de SE
5.2.2 Vers une étude dynamique de la production de SE
5.2.3 Relier composantes « fourniture » et « demande
5.2.4 Traits fonctionnels et production de SE
CHAPITRE 6. CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE

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