La schizophrénie, un enjeu majeur de santé publique

La schizophrénie, un enjeu majeur de santé publique

Épidémiologie : Selon les données de l’OMS, ce sont 21 millions de personnes qui sont atteintes dans le monde entier par cette maladie en 2014 (World Health Organisation, 2015). Pour l’Europe, on parle de 3 mio de personnes (Llorca, 2014, p. 3). La schizophrénie n’est donc pas rare puisqu’elle touche environ 1% de la population. Cette prévalence6 varie toutefois selon les études entre 2 et 10 pour 1000 (Favrod & Maire, 2012, p. 3). Si l’on considère une incidence annuelle moyenne de 15 pour 100’000 habitants (Tandon, Keshavan & Nasrallah, 2008, p. 1), cela représente pour la Suisse environ 1200 personnes nouvellement diagnostiquées chaque année pour un total de 80’000 malades (prévalence à 1%). Ces données montrent bien que le faible nombre de nouvelles maladies et les chiffres relativement élevés de prévalence indiquent que cette maladie, qui débute chez le jeune adulte, a un risque élevé de chronicisation(Rössler, Salize, van Os & Riecher-Rössler, 2005). La prévalence à vie est de 0.7% (Favrod & Maire, 2012, p. 4).
Maladie grave des jeunes adultes : Les pathologies de la santé mentale atteignent en particulier la jeunesse. Dans 75% des cas, les maladies se déclarent avant l’âge de 25 ans (The Economist Intelligence Unit, 2014, p. 9). La schizophrénie apparaît elle aussi majoritairement entre 16 et 30 ans, plus rarement avant l’adolescence ou après 45 ans (Mueser & McGurk, 2004).
Selon l’OMS, elle est la première cause de handicap chez l’adulte jeune qui se trouve dans une étape de vie où se construit son avenir professionnel ainsi que son tissu social et familial (Profamille, 2012).

La schizophrénie, un enjeu majeur sur le plan économique

D’une manière générale, le coût des maladies mentales est très important. Une étude européenne révèle que les coûts directs (60%) et indirects (40%) en Europe pour 2010 s’élèvent à 798 milliards d’Euros, soit le 3,4% du PIB total (Gustavsson et al., 2011, p. 720). Ces mêmes auteurs concluent que chaque année, ce sont 38,2% de la population en Europe qui souffrent au moins d’une maladie mentale, que le fardeau lié à l’handicap est immense, et que la plupart des malades ne reçoivent pas de traitement. Selon l’European Brain Council (EBC) (cité dans The Economist Intelligence Unit, 2014), seul un quart des malades reçoivent un traitement dont le 10% peut être considéré comme «adéquat ».
Pour l’EBC, cela soulève un défi éthique qui ne génère pas la réponse qu’on serait en droit d’attendre. Le professeur Wittchen (Wittchen et al., 2011, p. 656) déclare que les troubles mentaux sont le défi du 21ème siècle, non pas parce qu’ils se détériorent, mais parce que nous sommes incapables d’agir dans la prévention et le traitement de ces maladies. L’OMS place la schizophrénie dans les dix premières maladies contribuant de façon probante au nombre total de jours d’invalidité de la population mondiale. C’est donc une maladie invalidante, et on estime à 80% le nombre de personnes qui n’arriveront pas à travailler (Profamille, 2012).
A l’échelle mondiale, il existe un paramètre pour calculer le poids d’une maladie en termes économiques. Il s’agit de la mesure DALY(Disability Adjusted Life Years). Elle combine le nombre d’années perdues conséquemment à l’handicap et à la mortalité causés par la maladie. La schizophrénie représente le 1,1% de tous les DALY (toutes catégories de maladies confondues, dans le monde entier) et le 2,8% des années vécues avec l’handicap (Rössler, Salize, van Os & Riecher-Rössler, 2005, p. 399).

Évolution des paradigmes : de la famille coupable à la famille partenaire

L’histoire de la psychiatrie montre qu’elle a joué un rôle important dans la stigmatisation et la culpabilisation des proches. Le rôle attribué à la famille dans l’apparition ou l’évolution de la schizophrénie a toujours été tributaire du contexte scientifique et social de l’époque (Profamille, 2012). La croyance principale longtemps répandue a prétendu qu’un environnement familial perturbé durant l’enfance pouvait être la cause de la schizophrénie.
Dès les années 1940, les premières publications mettent en avant des théories basées sur les relations entre les parents et l’enfant schizophrène. L’hypothèse alors avancée est que les parents sont à l’origine des troubles. Un texte classique paru en 1948 et écrit par la psychanalyste Frieda Fromm-Reichmann utilise pour la première fois le terme de «mère schizophrénogène» (Ausloos, 2001, p. 4). Cette mère est décrite comme à la fois surprotectrice et en même temps froide, distance et hostile, qui dans le fond déteste ses enfants à qui elle transmet angoisse et insécurité. Malgré l’absence de preuves suffisantes attestant la notion de «mère schizophrénogène», les parents se voient dès lors attribuer la responsabilité de l’apparition de la schizophrénie (Profamille, 2012). Actuellement, cette théorie est dépassée : elle a confondu la réaction normale d’une mère face à un enfant handicapé avec la cause du handicap (Ausloos, 2001, p. 4).
Les années 1950 voient émerger les théories de la communication ainsi que les approches systémiques et les thérapies familiales. Ces modèles ne s’intéressent plus seulement au patient, mais également au système familial. On observe et on attribue alors les relations perturbées dans la famille à l’apparition de la maladie. On vise à traiter le système familial, ce qui va, de ce fait, renforcer le sentiment de culpabilité des proches : «Il est malade à cause de nous». Cette relative stigmatisation de la famille va certes l’intégrer au traitement, mais plutôt comme problème supplémentaire que comme ressource (Pedroletti, 1999, p. 2). L’idée que la communication familiale puisse entraîner une schizophrénie a été progressivement abandonnée par les fondateurs américains de ces modèles. Les parents, la famille dans son ensemble, ne sont plus considérés comme étant les responsables potentiels de la maladie (Grivois & Grosso, 1998, cités dans Profamille 2012).

LA PSYCHOÉDUCATION DES PROCHES AIDANTS EN PSYCHIATRIE

La psychoéducation est née dans le contexte des années 1980. Le mouvement de désinstitutionalisation a poussé à la création de programmes de réhabilitation psychosociale pour les malades (Grasset, Orita, Veillon & Cucchia, 2004). Les familles prennent de leur côté toujours plus le relais. Il devient urgent de les former avec des programmes efficaces pour alléger à la fois leur fardeau et tenter également de prévenir les retours du malade à l’hôpital (rechutes).
En 1980, Anderson, Hogarty et Reiss (p. 490) proposent le terme de psychoéducation pour qualifier certains programmes d’intervention familiale dans le cadre de la schizophrénie. La psychoéducation se distance des thérapies familiales car il n’y a pas de dysfonctionnement primaire du système familial (…) la psychoéducation n’appartient donc pas au domaine de la thérapie mais à celui de l’éducation thérapeutique28 (Hodé, 2011, p.198).
Le but de la démarche psychoéducative est d’amener progressivement la famille d’un sentiment d’impuissance et d’une position de passivité ou de révolte face à la maladie à une position de collaboration active à travers une vision réaliste de la maladie, des moyens d’y faire face au quotidien, des possibilités de traitement et des perspectives d’avenir (Profamille, 2012 ).La psychoéducation s’oriente sur trois dimensions complémentaires (Deleu, 2012):
Dimension pédagogique :Au moyen de matériel didactique, apporter des informations claires et actualisées, des données étayées scientifiquement. La démarche d’enseignement est structurée, progressive et étendue dans le temps.
Dimension comportementale :Les proches reçoivent non seulement des informations sur la maladie mais également une formation sur plusieurs mois pour y faire face. On vise à modifier les comportements dans le but de diminuer les tensions intrafamiliales par un entraînement à la communication et à la résolution de problèmes.
Dimension psychologique :Les interventions visent à soulager le fardeau subjectif des familles et notamment le fardeau émotionnel. Les proches apprennent à gérer leurs émotions, à adapter leurs cognitions (représentation de la maladie, s’adapter à un projet de vie face aux pertes liées à la maladie) et leurs comportements (prendre soin de soi, établir des limites). Ils sont encouragés à rejoindre des associations de proches pour diminuer la solitude et combattre la stigmatisation.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE –  L’ITINÉRAIRE D’UN PRATICIEN…LES QUESTIONNEMENTS D’UN DIRIGEANT
CONTEXTE DE LA RECHERCHE
MOTIVATION
OBJET DE L’ÉTUDE
QUESTION DE LA RECHERCHE
DEUXIÈME PARTIE – REVUE DE LITTÉRATURE
SCHIZOPHRÉNIE- PROCHES AIDANTS – PSYCHOÉDUCATION
POURQUOI S’INTÉRESSER À LA SCHIZOPHRÉNIE ? 
LA SCHIZOPHRÉNIE, UN ENJEU MAJEUR DE SANTÉ PUBLIQUE
ÉPIDÉMIOLOGIE
MALADIE GRAVE DES JEUNES ADULTES
LES PERSONNES SOUFFRANT DE SCHIZOPHRÉNIE VIVENT MOINS LONGTEMPS
LES PERSONNES ATTEINTES ONT DES MALADIES ASSOCIÉES
LA SCHIZOPHRÉNIE, UN ENJEU MAJEUR SUR LE PLAN ÉCONOMIQUE
LA SCHIZOPHRÉNIE PRÉSENTE UN ENJEU SOCIÉTAL MAJEUR
LA STIGMATISATION EST UNE DOUBLE PEINE
LA SCHIZOPHRÉNIE, UN ENJEU MAJEUR EN TERMES DE PRATIQUES DE SOINS
LA SCHIZOPHRÉNIE EST DIAGNOSTIQUÉE AVEC RETARD ET LA PHASE DE MALADIE NON
TRAITÉE PEUT ATTEINDRE PLUSIEURS MOIS
LA PLUPART DES PERSONNES NE SE RECONNAISSENT PAS COMME MALADE
SCHIZOPHRÉNIE : POURQUOI S’INTÉRESSER AUX PROCHES AIDANTS ? 
UN ENJEU DE SANTÉ
LE CONCEPT DU FARDEAU
LES IMPACTS PHYSIQUES ET PSYCHOLOGIQUES
LE CONCEPT DES ÉMOTIONS EXPRIMÉES (EE)
UN ENJEU ÉCONOMIQUE
UN ENJEU DE SOCIÉTÉ
LA STIGMATISATION : AUSSI UNE DOUBLE PEINE POUR LES FAMILLES
ÉVOLUTION DES PARADIGMES : DE LA FAMILLE COUPABLE À LA FAMILLE PARTENAIRE
LA PSYCHOÉDUCATION DES PROCHES AIDANTS EN PSYCHIATRIE 
ORIGINE, DÉFINITION ET CARACTÉRISTIQUES
PSYCHOÉDUCATION : QUELLE LÉGITIMITÉ ?
LA PSYCHOÉDUCATION DES FAMILLES FAIT PARTIE DES RECOMMANDATIONS
INTERNATIONALES DE BONNES PRATIQUES CLINIQUES
LA PSYCHOÉDUCATION DES FAMILLES A DÉMONTRÉ SON EFFICACITÉ
LA PSYCHOÉDUCATION DES FAMILLES EST RENTABLE SUR LE PLAN ÉCONOMIQUE
PROFAMILLE (programme le plus utilisé en francophonie)
HISTORIQUE
UN PROGRAMME EN CONSTANTE ÉVOLUTION
LE CONTENU DU PROGRAMME
L’ÉVALUATION DU PROGRAMME
EXEMPLE D’UNE PRATIQUE À BIENNE
L’AUTO-EFFICACITÉ OU LE SENTIMENT D’EFFICACITÉ PERSONNELLE
TROISIÈME PARTIE – HYPOTHÈSES ET MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
HYPOTHÈSES 
MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE 
QUESTIONNEMENT ET MISE EN PROBLÉMATIQUE
CHOIX MÉTHODOLOGIQUE
L’ANALYSE QUALITATIVE
L’INTERVIEW SEMI-DIRIGÉ
L’INTERVIEW EXPLORATOIRE
L’ANONYMAT
RECUEIL DE DONNÉES
CHOIX DES INSTITUTIONS ET DES PERSONNES INTERVIEWÉES
DÉROULEMENT DE L’ENQUÊTE
QUATRIÈME PARTIE –  PRÉSENTATION ET ANALYSE DES RÉSULTATS
PRÉSENTATION ET ANALYSE DES RÉSULTATS 
QUELQUES MOTS EN PRÉAMBULE
LES RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE
PLACE DE LA FAMILLE ET DES ASSOCIATIONS DANS LA PRISE EN SOINS EN PSYCHIATRIE:
UN CHANGEMENT DE PARADIGME
LA PSYCHOÉDUCATION DES FAMILLES, UNE VISION PARTAGÉE ?
CONNAISSANCE DES ASPECTS CONCRETS : QUELS IMPACTS ET QUELLE MESURE DE CEUX-CI ?
LIMITES DES APPROCHES FAMILIALES PSYCHOÉDUCATIVES ?
LE PROGRAMME PROFAMILLE, EXPÉRIENCES EN SUISSE ROMANDE
Implémentation de Profamille et travail en partenariat
Visibilité institutionnelle de Profamille
Quelle est l’offre actuelle du programme Profamille ?
Mesure des objectifs cibles du programme Profamille par les directions ?
Implication des directions pour le programme Profamille
POSTURE DES AUTORITÉS CANTONALES
Le lobby des associations
Financement versus reconnaissance ?
EN GUISE DE CONCLUSION 
VALIDATION DES HYPOTHÈSES ET RECOMMANDATIONS
VALIDATION DES HYPOTHÈSES N° 1-2 / RECOMMANDATIONS N° 1-7
VALIDATION DE L’HYPOTHÈSE N° 3 / RECOMMANDATIONS N° 8-9
VALIDATION DE L’HYPOTHÈSE N° 4 / RECOMMANDATIONS N° 10-13
RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES
PISTES D’EXPLORATION ET PERSPECTIVES

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *