Etude cinétique et modélisation de l’hydrofluoration du dioxyde d’uranium

Procédé Comurhex dans le cycle du combustible

   L’usine Comurhex de Malvési transforme les concentrés en provenance de la mine en tétrafluorure d’uranium. La production annuelle est de l’ordre de 15000 tonnes d’uranium par an. Le schéma du procédé proposé sur la Figure 2 détaille les différentes transformations que subissent les concentrés miniers. On peut classer ces transformations en deux grandes étapes qui sont la purification et la conversion des concentrés miniers d’uranium. La première s’effectue en phase liquide. Les concentrés miniers sont dissout dans l’acide nitrique jusqu’à l’obtention d’une solution de nitrate d’uranyle impur. L’étape de purification s’effectue par extraction liquide/liquide dans un solvant organique circulant à contrecourant : le tributylphosphate qui, associé aux ions nitrates, a la capacité de complexer sélectivement l’ion uranyle. Suite à la désextraction, on obtient une solution de nitrate d’uranyle purifié. La seconde grande partie du procédé concerne la précipitation puis la transformation successive de composés uranifères sous forme solide. La première étape consiste à précipiter l’uranium sous forme de diuranate d’ammonium (ADU) par ajout d’ammoniac. Puis la décomposition thermique de l’ADU, menée dans un four tournant à environ 400°C aboutit à la formation de trioxyde d’uranium. Après compactage sous forme de boulet, ce trioxyde d’uranium subit encore deux transformations qui se déroulent dans le même four : la réduction par l’hydrogène puis l’hydrofluoration qui permet d’obtenir le tétrafluorure d’uranium. Le four est un four à lit coulant, ou four LC (Figure 3), dans lequel les boulets d’uranium se déplacent par l’action de la gravité. En bas du four, une vis sans fin horizontale permet d’extraire le tétrafluorure d’uranium. La réduction s’effectue par l’action de l’hydrogène, formé in situ par craquage thermique de l’ammoniac, à environ 800°C. Le dioxyde d’uranium obtenu passe dans une zone tampon, puis entre en zone d’hydrofluoration. Le fluorure d’hydrogène gazeux qui circule à contrecourant dans le four réagit avec le dioxyde d’uranium pour former du tétrafluorure d’uranium et de la vapeur d’eau. Les températures d’entrée et de sortie de four sont respectivement d’environ 470°C et 620°C, puis la zone horizontale est maintenue vers 400°C. Dans ces conditions, le tétrafluorure d’uranium produit présente une pureté supérieure à 96%, les impuretés étant essentiellement du dioxyde d’uranium non converti et du fluorure d’uranyle provenant de l’hydrofluoration d’UO3 n’ayant pas été correctement réduit. La connaissance approfondie des caractéristiques de toutes les réactions faisant intervenir les composés uranifères sous forme solide est d’une importance capitale pour bien appréhender la réaction d’hydrofluoration qui fait l’objet de cette thèse. En effet, les caractéristiques physico-chimiques de la poudre impliquée dans chacune des étapes dépendent fortement des conditions dans lesquelles s’est déroulée l’étape précédente. Ainsi on propose de détailler les étapes de calcination et de réduction.

Dioxyde d’uranium UO2

   Le dioxyde d’uranium est sans doute l’oxyde d’uranium qui a été le plus étudié du fait qu’il est le constituant du combustible nucléaire utilisé notamment dans les réacteurs à eau pressurisée. Il est le plus souvent obtenu par réduction d’un oxyde de degré d’oxydation plus élevé tel qu’UO3 ou U3O8, via l’action d’un gaz réducteur comme l’hydrogène, l’ammoniac ou le monoxyde de carbone. Le dioxyde d’uranium possède une structure cubique de type fluorine (Figure 10) avec comme paramètre de maille a = 5.468 Å. Une manière de décrire la structure de l’UO2 est de considérer que les ions uranium constituent un réseau cubique faces centrées (ils occupent les sites au sommet du cube et au centre des faces de la maille) et possèdent une coordination de 8 tandis que les ions oxygène occupent les sites tétraédriques et ont une coordination de 4.

Modélisation des réactions solide-gaz dans les milieux poreux

   Nous avons vu dans la partie C comment déterminer le modèle de transformation isotherme isobare d’une poudre. Dans la réalité, les grains de poudre ne sont pas toujours parfaitement dispersés et l’hypothèse d’une transformation isotherme et isobare n’est pas toujours valable durant la totalité de la transformation. Les grains de poudre sont souvent agglomérés, formant un milieu poreux dont la structure est parfois complexe à décrire. Ainsi pour atteindre certains grains denses, le gaz doit diffuser à travers l’agglomérat poreux, et des gradients de pression partielle de gaz peuvent apparaître entre l’extérieur et le centre du milieu poreux. De même les réactions produisent ou consomment de la chaleur, ce qui engendre des gradients thermiques. La diffusion des gaz au sein des milieux poreux répond à des modèles qui suivent la seconde loi de Fick et ont abouti à la définition du « Dusty gas model »[46]. La théorie cinétique des gaz de Chapman-Enskog [47] permet de calculer les coefficients de diffusion moléculaires des mélanges binaires ou multi-composants. Ainsi connaissant la structure poreuse, il est possible de déterminer les coefficients de diffusion effectifs des gaz, c’est-à-dire à travers le milieu poreux. Il en va de même pour le transport de la chaleur au sein du milieu poreux. La température et les pressions partielles locales impactent directement la réactivité de la poudre. Les effets de la diffusion des gaz et de la chaleur sont importants dans de nombreux procédés industriels, en particulier le procédé d’hydrofluoration pour lequel les variations spatiales de température et de pression de gaz sont importantes dans le four. Nous allons voir dans cette partie comment se sont développés les modèles permettant de décrire les réactions hétérogènes dans les milieux poreux. Deux grand types de modèles existent : historiquement ont été utilisés les modèles nommés « continuum » par Gavalas et Sahimi [48] qui représentent l’approche classique utilisée en ingénierie qui consiste à appliquer les équations de transports à chaque capillaire du milieu poreux et à en déduire les propriétés macroscopiques de transport du milieux poreux. Dans ces modèles, on distingue deux types qui ne sont finalement pas si différents l’un de l’autre : les modèles basés sur la représentation du solide comme un ensemble de pores (modèles de pores) et ceux basés sur la somme d’objets denses (modèles de grains). La seconde approche propose d’envisager le milieu poreux par un réseau que l’on modélise et dont on connaît les propriétés. On peut ainsi y appliquer les théories et les concepts de la physique statistiques dans les milieux désordonnés, et en particulier ceux de la percolation qui permettent de rendre compte des changements topologiques et de la fermeture totale des pores lors des changements structuraux du milieu. Ces derniers développements sont plus récents, mais nous n’allons pas aborder cette approche précisément car le code de calcul CIN4 qu’on utilisera en modélisation s’appuie sur des modèles de « continuum ». Dans un premier temps, nous allons décrire de manière qualitative la structure d’un milieu poreux en rappelant un certain nombre de définitions concernant la poudre et les pores avant de développer l’état de l’art sur les modèles de continuum.

Réactivité du dioxyde d’uranium

   Les premières études [37, 38, 74] ont mis en évidence que la réactivité du dioxyde d’uranium dépend fortement de la surface spécifique développée par la poudre, et en particulier de la température de réduction et de l’origine et la structure de l’UO3 de départ. Des températures trop élevées dans la phase de calcination ou de réduction du trioxyde d’uranium abaissent la surface spécifique et limitent la réactivité du dioxyde d’uranium. Tomlinson [38] a aussi montré qu’au-delà de 2,1 m².g-1, la surface spécifique n’a plus d’influence sur la réactivité du dioxyde d’uranium, et que toutes les réactions se déroulent à la même vitesse. Il explique ce résultat par la disparition très rapide des petits pores en début de réaction. Cependant, Dell et Wheeler [74] ont montré qu’une surface spécifique élevée ne suffit pas à assurer une bonne conversion en UF4. Malgré une réactivité plus grande, certaines poudres de haute surface spécifique ne parviennent pas à un taux de conversion de 1. Les pores de petite taille situés en périphérie d’agglomérat se bouchent rapidement du fait du coefficient de Pilling et Bedworth élevé (Z=1,88), empêchant l’HF de diffuser jusqu’au centre de l’agglomérat.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Synthèse bibliographique et objectifs
A. Procédé Comurhex dans le cycle du combustible
A.1 Calcination du diuranate d’ammonium
A.2 Réduction du trioxyde d’uranium
B. Propriétés des oxydes et fluorures d’uranium intervenant dans le procédé
B.1 Trioxyde d’uranium UO3 et ses hydrates
B.2 Octooxyde de triuranium U3O8
B.3 Dioxyde d’uranium UO2
B.4 Tétrafluorure d’uranium UF4 et ses hydrates
B.5 Fluorure d’uranyle UO2F2
C. Modélisation cinétique de la transformation de grains denses
C.1 Transformation de grains denses
C.2 Approche expérimentale et méthodologie
D. Modélisation des réactions solide-gaz dans les milieux poreux
D.1 Description des milieux poreux
D.1.1 Structure de la poudre
D.1.2 Structure poreuse
D.2 Les modèles de grains
D.3 Les modèles de pores
E. Hydrofluoration du dioxyde d’uranium
E.1 Aspects thermodynamiques
E.2 Etudes cinétiques
E.2.1 Réactivité du dioxyde d’uranium
E.2.2 Effet de la température
E.2.3 Effet de la pression
E.2.4 Modèle géométrique
E.2.5 Aspects mécanistiques
E.2.6 Modélisation de la réaction dans les milieux poreux
E.3 Conclusion
F. Le code de calcul CIN4
F.1 Les trois échelles de modélisation
F.1.1 Echelle micro
F.1.2 Echelle méso
F.1.3 Echelle macro
F.2 Déshydroxylation de la kaolinite
F.3 Carbonatation de l’oxyde de calcium
F.4 Oxydation sèche de nanoparticules de cuivre
G. Conclusion de l’étude bibliographique
Chapitre 2 Etude cinétique et modélisation à l’échelle des grains denses
A. Etude expérimentale
A.1 Caractérisation des poudres initiales
A.1.1 Récapitulatif des techniques de caractérisation
A.1.2 Choix du solide initial
A.1.3 Etude par microscopie électronique à transmission
A.1.4 Etude par microscopie électronique à balayage
A.1.5 Etude diffractométrique
A.1.6 Isothermes d’adsorption d’azote
A.1.7 Etude granulométrique
A.1.8 Conclusion
A.2 Etude thermogravimétrique
A.2.1 Définition du protocole expérimental
A.2.2 Influence de l’épaisseur du lit de poudre
A.2.3 Répétabilité des expériences et forme des courbes cinétiques
A.2.4 Etude de l’influence de la température
A.2.5 Etude de l’influence de la pression
A.3 Caractérisation des poudres en cours de réaction
A.3.1 Evolution des phases par diffraction des rayons X
A.3.2 Evolution des interfaces réactionnelles
A.3.3 Evolution de la surface spécifique
A.3.4 Evolution de la porosité
B. Modélisation cinétique de la réaction
B.1 Les tests de cinétiques hétérogènes
B.1.1 Test de pseudo-stationnarité
B.1.2 Test du Ф-Sm
B.1.3 Test du cas limite
B.2 Choix du modèle géométrique
B.2.1 Forme et dimension des grains denses
B.2.2 Germination et croissance
B.2.3 Sens de développement
B.2.4 Etape limitant la vitesse de croissance
B.2.5 Conclusion sur le modèle géométrique
B.3 Modélisation physico-chimique
B.3.1 Obtention des valeurs de Φ par optimisation
B.3.2 Variation de Φ avec la pression en HF
B.3.3 Evolution de Φ avec la température
B.1 Simulation à l’échelle micro des courbes cinétiques
B.1.1 Influence de la distribution granulométrique
B.1.2 Simulation dans différentes conditions de température et de pression partielle d’HF
B.1.3 Prise en compte du remplissage de la thermobalance
B.1.4 Proposition d’un mécanisme réactionnel de croissance d’UF4
B.2 Expression de la vitesse
C. Conclusion
Chapitre 3 Modélisation à l’échelle de l’agglomérat et de la thermobalance
A. Couplage à l’échelle de l’agglomérat
A.1 Calcul du coefficient de diffusion des gaz
A.2 Calcul de la conductivité thermique de l’agglomérat
A.3 Résultats
A.3.1 Simulation du comportement d’un agglomérat de référence
A.3.2 Etude de la sensibilité de la vitesse aux paramètres de l’agglomérat
A.4 Conclusion
B. Couplage avec l’échelle de la thermobalance
B.1 Etude expérimentale
B.1.1 Transformation des tas de poudre
B.1.2 Transformation des pastilles
B.2 Modélisation des transformations
B.2.1 Transformation des tas de poudre
B.2.2 Transformation des pastilles
B.3 Conclusion
Conclusion générale

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