Rôle de SHH dans l’établissement des populations cellulaires ventrales du névraxe

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La neurogenèse

Le tube neural ainsi mis en place consiste toujours en un neuroépithélium pseudostratifié, formé de cellules morphologiquement identiques, lequel va générer l’ensemble des cellules neuronales et gliales du SNC mature. Cette phase qui succède à la neurulation est la neurogenèse. Elle ne se produit pas de manière simultanée dans toutes les régions du névraxe et débute par une période de prolifération active. Après un certain nombre de divisions cellulaires, les cellules neuroépithéliales deviennent déterminées vers un lignage spécifique, cessent généralement de se multiplier et commencent à se différencier. En effet, certains types cellulaires neuraux sont déterminés lors de leur dernier cycle de division, d’autres avant la fin des mitoses mais il en existe aussi pour lesquels ce processus a lieu après (pour revue, voir Edlund et Jessell, 1999). L’arrêt des divisions cellulaires coïncide souvent avec le moment où les cellules neuronales quittent le neuroépithélium pour migrer vers leur localisation finale où elles achèveront leur différenciation. Ces événements cellulaires (et d’autres tels que des changements de la forme de certaines cellules ou des phénomènes de mort cellulaire physiologique) conduisent à d’importantes modifications de la morphologie du tube neural, selon ses trois axes, aboutissant finalement au SNC adulte. Ainsi, la paroi du tube neural s’épaissit et devient composée de plusieurs couches cellulaires concentriques qui sont de l’intérieur vers l’extérieur (axe médio-latéral) (figure 5 ; pour revue, voir Poh et al., 2002):
– la zone ventriculaire ou assise germinative bordant la lumière du tube neural (futurs ventricules cérébraux, antérieurement et canal de l’épendyme, postérieurement) et qui contient les cellules neuroépithéliales. C’est le siège d’une prolifération intense. A la fin de la neurogenèse, les cellules de cette zone deviendront ciliées et formeront l’épendyme.
– la zone du manteau (également appelée zone intermédiaire) divisée en une zone sous-ventriculaire contenant les cellules neuronales post-mitotiques non différenciées -sauf dans le télencéphale où elle contient des cellules précurseurs en prolifération (pour revue, voir Campbell, 2003)- et en une région plus latérale où ces dernières se différencient. C’est la future substance grise, formée des corps cellulaires des neurones différenciés et de cellules gliales. Au fur et à mesure de sa formation, elle prend l’apparence d’un papillon avec deux cornes dorsales et deux cornes ventrales, dans la région de la moelle épinière.
– La zone marginale formée par les axones des neurones différenciés qui quittent le tube neural pour aller innerver leur cible. Elle deviendra la substance blanche au moment de la myélinisation. Cette topographie du tube neural (substance grise centrale et substance blanche périphérique) est retrouvée dans tout le SNC, à l’exception des hémisphères cérébraux et du cervelet dont le cortex (couche superficielle) est la substance grise.
Le fonctionnement correct du SNC nécessite l’établissement d’une grande variété de types cellulaires dont l’identité dépend de la position de leurs cellules précurseurs selon les axes rostro-caudal et dorso-ventral du tube neural et du moment de leur naissance. Les cellules neuroépithéliales sont informées de leur position selon ces axes par les signaux environnants auxquels elles répondent par l’expression de facteurs de transcription spécifiques. Ceux-ci mettront en route les processus moléculaires aboutissant à la différenciation de ces cellules selon un lignage neural bien précis. Les signaux environnants se comportent en quelque sorte comme des repères indiquant aux cellules le destin qu’elles doivent adopter et les facteurs de transcription qui y répondent, comme des interprètes de ces signaux.
Dans un premier temps, ces signaux émanent des structures non neurales (endo-mésoderme et ectoderme) et permettent une régionalisation grossière de l’ébauche neurale, marquée par l’expression de gènes dans des territoires limités. Ensuite, des signaux issus du mésoderme et des cellules neurales, elles-mêmes, vont se combiner aux premiers pour en moduler l’action et affiner cette régionalisation, aboutissant à un découpage du SNC en territoires de plus en plus précis, caractérisés par l’expression de gènes spécifiques. Divers neurones d’identité distincte seront produits dans ces différents territoires. Ainsi, la compartimentation moléculaire du tube neural est à l’origine de la diversité des types cellulaires du SNC. La régionalisation rostro-caudale du névraxe se met en place avant et indépendamment de sa régionalisation dorso-ventrale (pour revues, voir Lumsden et Krumlauf, 1996 ; Altmann et Brivanlou, 2001).

Régionalisation du système nerveux central selon l’axe rostro-caudal

Chez les vertébrés, la régionalisation rostro-caudale du SNC se traduit, aux plans macroscopique et fonctionnel, par la formation de différentes régions encéphaliques, dans sa partie antérieure et de la moelle épinière, dans sa partie postérieure. Cette organisation qui s’établit précocement, dès l’induction neurale, peut être mise en évidence morphologiquement mais aussi grâce à l’utilisation de marqueurs moléculaires (pour revues, voir Lumsden et Krumlauf, 1996 ; Altmann et Brivanlou, 2001).

Initiation de la régionalisation rostro-caudale du névraxe

Suite aux expériences d’embryologie classique de Hans Spemann et Hilde Mangold, plusieurs modèles ont été élaborés pour rendre compte de la mise en place de la régionalisation rostro-caudale du SNC, dont deux ont recueilli le plus grand nombre de partisans (figure 6 ; pour revues, voir Lumsden et Krumlauf, 1996 ; Sasai et De Robertis, 1997 ; Altmann et Brivanlou, 2001 ; Stern, 2002).
– Le modèle à deux inducteurs, fondé sur les observations d’Otto Mangold réalisées en 1933, propose l’existence de signaux inducteurs de tissu neural antérieur et de signaux inducteurs de tissu neural postérieur.
– Le modèle à deux étapes (ou activation-transformation), établi vingt ans plus tard d’après les expériences de Pieter Nieuwkoop, suggère l’intervention de signaux inducteurs de tissu neural de caractère le plus antérieur et de signaux caudalisants (n’ayant pas d’activité inductrice de tissu neural) dictant des destins plus postérieurs au tissu induit. Les FGFs, les Wnts et l’acide rétinoïque sont des candidats à la fonction caudalisante.

Description sommaire de la mise en place des différentes régions du névraxe selon l’axe rostro-caudal

La régionalisation rostro-caudale du SNC est déjà apparente au stade plaque neurale laquelle, dès sa formation, est large dans la région rostrale (futur encéphale) et étroite dans la région caudale (future moelle épinière). Des marqueurs moléculaires des différentes régions de l’encéphale et de la moelle épinière tels que OtxA, En-2, Krox20 et HoxB9 y sont même exprimés, au moins chez le xénope (pour revue, voir Altmann et Brivanlou, 2001). La mise en place du tube neural fait apparaître la vésicule cérébrale primitive, issue de la partie élargie de la plaque neurale. Celle-ci se divise très tôt en trois vésicules appelées, de la plus rostrale à la plus caudale, le prosencéphale (ou cerveau antérieur), le mésencéphale (ou cerveau moyen) et le rhombencéphale (ou cerveau postérieur).
Dans un second temps, la constriction de deux des trois vésicules cérébrales primitives aboutit à l’élaboration de cinq vésicules qui préfigurent les cinq grandes régions de l’encéphale. Le prosencéphale donne naissance au télencéphale, rostralement, et au diencéphale, qui contient les vésicules optiques, en arrière. Le télencéphale est à l’origine des hémisphères cérébraux, des bulbes olfactifs et des noyaux de la base et le diencéphale, du thalamus et de l’hypothalamus. Le mésencéphale qui fait suite au diencéphale, ne se subdivise pas et comprendra le tectum, lequel se différenciera en tubercules quadrijumeaux (relais des voies visuelles, auditives et de l’équilibre), chez les mammifères. Le rhombencéphale forme le métencéphale, en arrière du mésencéphale, duquel émergeront le cervelet (centre de l’équilibre) et les structures pontiques associées et le myélencéphale qui deviendra le bulbe rachidien, continuation rostrale peu différenciée de la moelle épinière. La partie caudale du tube neural conserve sa forme tubulaire et donnera la moelle épinière (figure 7 ; pour revue, voir Altmann et Brivanlou, 2001).
Une régionalisation rostro-caudale est également visible à plus petite échelle, aux niveaux anatomique, cellulaire et moléculaire, au sein de chaque division du SNC. Nous nous intéresserons ici uniquement à la moelle épinière.

Régionalisation rostro-caudale de la moelle épinière

En dépit d’une apparence relativement uniforme le long de l’axe rostro-caudal, la moelle épinière présente des variations dans sa composition cellulaire et moléculaire suivant cet axe. En particulier, il existe différents sous-types de neurones moteurs (ou motoneurones) spinaux dont les corps cellulaires sont arrangés en colonnes longitudinales discontinues qui occupent différents niveaux antéro-postérieurs (dorso-ventraux et médio-latéraux) (figures 8 et 9). Outre leur position stéréotypée, le trajet de leurs axones et les muscles qu’ils innervent distinguent ces sous-classes de neurones. Ainsi, les motoneurones situés aux niveaux brachial et lombaire de la moelle épinière ciblent les muscles des membres et sont différents de ceux qui se forment aux niveaux cervical et thoracique. Au sein de ces colonnes, les sous-types de motoneurones sont encore subdivisés en sous-groupes, localisés à différentes positions antéro-postérieures (et dorso-ventrales), sur la base de leur muscle cible. Chaque sous-classe de motoneurones peut être définie par l’expression de différents facteurs de transcription à domaine LIM et les sous-groupes de motoneurones à l’intérieur de ces sous-classes, identifiés par celle des protéines ETS. Des études génétiques montrent, de plus, que l’expression de différentes combinaisons de facteurs du groupe LIM spécifie l’identité des sous-types de motoneurones et détermine la trajectoire de leurs projections axonales (pour revues, voir Lumsden et Krumlauf, 1996 ; Altmann et Brivanlou, 2001).
De nombreux gènes de la famille Hox (homologues des gènes homéotiques du complexe HOM-C de la drosophile qui confèrent leur identité aux différents segments de la larve) sont exprimés le long de la moelle épinière, avec différentes limites antérieures d’expression, subdivisant la structure en territoires distincts, caractérisés par une combinaison spécifique de gènes Hox (figure 10). Cette dernière, par analogie avec les observations réalisées au niveau du rhombencéphale (pour revues, voir Lumsden et Krumlauf, 1996 ; Schneider-Maunoury et al., 1998 ; Catala, 1999 ; Altmann et Brivanlou, 2001), pourrait participer à l’organisation des différents types cellulaires selon l’axe antéro-postérieur dans la moelle épinière. La transposition des régions brachiale et thoracique présomptives du névraxe aboutit à la respécification de l’expression des gènes Hox et Lim et les sous-classes de motoneurones se développent en fonction de leur nouvelle position (pour revue, voir Lumsden et Krumlauf, 1996). Des résultats récents indiquent que le nœud, principalement via le FGF, initie la régionalisation rostro-caudale de l’expression des gènes du complexe Hox-c dans les neurones spinaux et que le mésoderme paraxial affine le profil d’expression de ces gènes, via l’acide rétinoïque, au niveau cervical et via l’activité de GDF11 (growth and differentiation factor 11), un membre de la superfamille du TGF-β (transforming growth factor-β), au niveau thoraco-lombaire (figure 11 ; Liu et al., 2001).

Initiation de la régionalisation dorso-ventrale du névraxe

L’organisation dorso-ventrale du névraxe commence à s’établir au stade plaque neurale, ébauche dont l’axe médio-latéral correspond au futur axe dorso-ventral. Elle se manifeste initialement par la mise en place des cellules de la floor plate dans la partie la plus médiane de la plaque neurale (depuis la région du futur cerveau moyen) et par la spécification des cellules des crêtes neurales, dans ses régions les plus latérales (c’est à dire à la bordure qu’elle forme avec l’ectoderme non neural), suivie de l’émigration de ces cellules avant ou juste après la fermeture dorsale du tube neural. Ensuite, les cellules les plus dorsales du tube neural forment la plaque du toit ou roof plate. Enfin, différentes populations neuronales se mettent en place dans le neuroépithélium, d’abord dans sa partie ventrale, puis dans sa partie dorsale (figure 12).
L’expression de différents marqueurs témoigne également de la régionalisation dorso-ventrale de l’ébauche neurale. Toutes les cellules de la plaque neurale nouvellement formée expriment les gènes codant les facteurs de transcription à homéodomaine Pax3, Pax7 (paired-homeobox), Msx1 et Msx2, quelle que soit leur position selon l’axe médio-latéral. Au stade gouttière neurale, ces gènes ne sont plus exprimés dans la partie la plus médiane de l’ébauche du SNC et dans le tube neural, leur expression est restreinte à la région dorsale du neuroépithélium (Liem et al., 1995 ; pour revue, voir Tanabe et Jessell, 1996).
Les étapes initiales de régionalisation dorso-ventrale du SNC dépendent de signaux sécrétés par la chorde (dans un premier temps accolée à la ligne médiane/ventrale de la plaque neurale/du tube neural) et par l’ectoderme non neural (qui flanque latéralement, puis recouvre l’ébauche neurale), puis par la floor plate et la roof plate qui prennent, en quelque sorte, le relais (pour revues, voir Tanabe et Jessell, 1996 ; Lee et Jessell, 1999 ; Jessell, 2000 ; Altmann et Brivanlou, 2001 ; Poh et al., 2002).

Mise en place des populations cellulaires ventrales du névraxe

Au début des années 1990, plusieurs études menées in vitro et in vivo ont mis en évidence l’influence ventralisante de la chorde et de la floor plate sur le développement du SNC. Par exemple, la greffe d’un segment de chorde ou de floor plate contre les régions latérale ou dorsale de la moelle épinière embryonnaire aboutissait à la formation d’une floor plate et de motoneurones ectopiques et à la disparition de marqueurs dorsaux (Yamada et al., 1991 ; Ericson et al., 1992). De manière intéressante, des expériences de culture ont montré que la floor plate acquérait sa capacité à induire la genèse de motoneurones plus tard que la chorde et qu’elle la conservait pendant une période développementale plus longue (Yamada et al., 1993). L’activité de ces structures axiales ventrales est médiée par la protéine Sonic hedgehog (SHH) (pour revues, voir Tanabe et Jessell, 1996 ; Jessell, 2000 ; Marti et Bovolenta, 2002 ; Poh et al., 2002).

Rôle de SHH dans l’établissement des populations cellulaires ventrales du névraxe

Des analyses détaillées de la distribution de la protéine SHH pendant le développement précoce du SNC ont révélé sa présence dans la chorde et la floor plate au moment où elles présentent leur influence ventralisante sur l’ébauche neurale (figure 14 ; Marti et al., 1995b ; Roelink et al., 1995). Diverses études de perte et de gain de fonction ont, par la suite, démontré que SHH était à la fois nécessaire et suffisante pour la genèse d’un certain nombre de types cellulaires neuraux ventraux (pour revues, voir Tanabe et Jessell, 1996 ; Jessell, 2000 ; Litingtung et Chiang, 2000a ; Poh et al., 2002). Ainsi, SHH induit le développement de cellules de floor plate, de motoneurones et d’interneurones ventraux dans des explants de plaque neurale, la genèse de chacun de ces types cellulaires nécessitant une concentration différente de la protéine (Marti et al., 1995a ; Roelink et al., 1995 ; Ericson et al., 1997). D’autre part, SHH réprime l’expression de Pax3, Pax7 et Msx1 dans les régions latérales de la plaque neurale (futur tube neural dorsal) en culture (Liem et al., 1995 ; Ericson et al., 1996). Inversement, l’inhibition in vitro de l’activité de SHH dans la chorde et la floor plate, au moyen d’anticorps bloquants, montre qu’elle est requise pour le développement de la floor plate et des motoneurones dans des explants de plaque neurale (Marti et al., 1995a ; Ericson et al., 1996). Confirmant les données précédentes, les conséquences de l’invalidation du gène SHH chez la souris indiquent que la protéine est requise pour le maintien de la chorde et le développement de la floor plate, des motoneurones et de certaines populations d’interneurones ventraux. De plus, chez ces mutants, le tube neural ventral est dit « dorsalisé » c’est à dire qu’il acquiert des caractéristiques dorsales telles que l’expression de marqueurs dorsaux dont Pax3 et Pax7 (Chiang et al., 1996 ; Pierani et al., 1999).
Dans le tube neural ventral, de la région la plus ventrale à la plus dorsale, se développent la floor plate, les interneurones V3, les motoneurones, les interneurones V2, les interneurones V1 et les interneurones V0. De manière frappante, les concentrations de SHH requises pour leur genèse in vitro reflètent la position dorso-ventrale à laquelle sont produites ces populations cellulaires in situ. De cette façon, le développement des cellules de floor plate (les plus proches de la source initiale de SHH -i. e. la chorde) demande une dose de SHH supérieure à celle nécessaire pour le développement des motoneurones, elle-même plus élevée que celle qu’il faut pour la production des interneurones V2 (Marti et al., 1995a ; Roelink et al., 1995 ; Ericson et al., 1997). Ceci a conduit à postuler que SHH, issue de la chorde puis de la floor plate, fonctionne comme un morphogène, avec un gradient de concentration décroissant de la partie ventrale vers la partie dorsale, pour mettre en place les différentes populations cellulaires du tube neural ventral (figure 15 ; pour revues, voir Briscoe et Ericson, 1999, 2001).
Bien qu’il ait été impossible de détecter SHH hors des cellules qui la produisent dans l’ébauche neurale (Marti et al., 1995b ; Roelink et al., 1995) -jusque récemment (Gritli-Linde et al., 2001)-, l’existence de ce gradient était soutenue par un certain nombre d’indications (pour revue, voir Goodrich et Scott, 1998). Par exemple, la genèse des motoneurones est inhibée par des anticorps bloquants anti-SHH dans des cultures de tube neural ventral (dans lequel on ne détecte ni le messager SHH, ni la protéine SHH), isolé de la floor plate (source de SHH), montrant ainsi une activité de SHH à distance de la ligne médiane ventrale (Ericson et al., 1996). Une autre mesure indirecte de l’activité de SHH est l’expression de Ptc, une cible transcriptionnelle de cette protéine. Ce gène est transcrit sous la forme d’un gradient décroissant dans la direction ventro-dorsale sur toute la hauteur du tube neural, suggérant une diffusion importante de SHH (Marigo et Tabin, 1996). Dans une étude plus récente, la distribution de SHH selon un profil graduel de la partie la plus ventrale de l’ébauche neurale jusqu’au sulcus limitans a pu être visualisée grâce à l’utilisation de conditions non dénaturantes pour les protéoglycanes/glycosaminoglycanes, confortant l’hypothèse que cette protéine agit sur de longues distances (Gritli-Linde et al., 2001). En outre, l’expression in vivo d’une forme de Ptc incapable de lier son ligand conduit à des effets opposés à ceux exercés par SHH jusque dans des régions dorsales du tube neural et de manière cellulaire autonome, démontrant que SHH fonctionne en effet sur des distances allant au-delà du sulcus limitans (Briscoe et al., 2001).

Modèle de spécification des populations neuronales ventrales de la moelle épinière

L’ensemble de ces résultats (et d’autres) est à la base de l’élaboration d’un modèle en trois étapes permettant d’expliquer comment le gradient morphogénique de SHH agit pour spécifier les cinq classes de neurones ventraux que sont les motoneurones (MN) et les interneurones V3, V2, V1 et V0 à des positions bien définies selon l’axe dorso-ventral (figure 16 ; pour revues, voir Briscoe et Ericson, 1999, 2001 ; Jessell, 2000 ; Poh et al., 2002). Initialement, SHH établit cinq domaines distincts de progéniteurs neuronaux dans le neuroépithélium ventral (p3, pMN, p2, p1 et p0, de la région la plus ventrale à la plus dorsale) par la régulation différentielle de l’expression d’un certain nombre de facteurs de transcription à homéodomaine. Les facteurs dont l’expression est réprimée par SHH sont appelés protéines de classe I et appartiennent aux familles Pax, Msx, Irx et Dbx, ceux qui s’expriment en réponse à SHH, les protéines de classe II, parmi lesquelles des membres de la famille Nkx. Ensuite, des répressions mutuelles, cellulaires autonomes, entre les facteurs de transcription de classe I et de classe II exprimés dans des domaines adjacents affinent et maintiennent les limites de ces domaines. Enfin, ces protéines à homéodomaine régulent l’expression de gènes déterminant l’identité neuronale des progéniteurs qui les expriment. Ce modèle est conforté par l’identification récente de facteurs de classe II supplémentaires dont Olig2 et par l’exploration de leur fonction.
Au cours de la première étape, SHH réprime l’expression des facteurs de classe I Pax3, Pax7, Msx1 et Msx2 (initialement présents uniformément le long de l’axe médio-latéral de la plaque neurale) dans la future région ventrale du tube neural ; ceux-ci ne seront alors plus exprimés que dans la partie dorsale du tube neural (Liem et al., 1995). Cet effet qui aboutit à la mise en place d’un domaine dorsal et d’un domaine ventral nécessite de faibles concentrations de SHH (Ericson et al., 1996). La protéine Pax6 est exprimée un peu plus tard, dans l’ensemble du tube neural à l’exception de la floor plate en cours de différenciation, selon une progression rostro-caudale qui suit l’individualisation des somites adjacents (Pituello et al., 1999). Son expression est ensuite réprimée ventralement par SHH, formant un gradient croissant de la région ventrale vers la région dorsale (Ericson et al., 1997). L’inhibition totale de l’expression de Pax6 requiert des quantités importantes de SHH ; il s’ensuit que la limite ventrale de son domaine d’expression est plus ventrale que celle du domaine exprimant Pax3 et Pax7. L’expression de Dbx1, Dbx2 et Irx3 est inhibée par des concentrations de SHH intermédiaires par rapport à celles requises pour la répression de l’expression de Pax6 et Pax7 (Pierani et al., 1999 ; Briscoe et al., 2000), leurs domaines d’expression ont par conséquent des limites ventrales localisées entre celles des domaines Pax7 et Pax6 positifs. Inversement, l’expression des protéines de classe II Nkx2.2 et Nkx6.1 est induite par SHH et requiert des doses différentes de la protéine ; leurs territoires d’expression présentent donc des limites dorsales distinctes (Ericson et al., 1997 ; Briscoe et al., 2000). La sensibilité différentielle des facteurs de classe I à l’effet répresseur et des facteurs de classe II à l’effet inducteur de SHH permet ainsi la mise en place de cinq domaines de progéniteurs dans le neuroépithélium ventral, caractérisés par la combinaison de facteurs de transcription qu’ils expriment (Briscoe et al., 2000).
Des études de perte et de gain de fonction in vivo montrent des interactions inhibitrices entre des facteurs de classe I et de classe II dont les domaines d’expression présentent une limite commune (pour revues, voir Briscoe et Ericson, 1999, 2001). Par exemple, la frontière ventrale du domaine d’expression de Pax6 (classe I) est confondue avec la limite dorsale du domaine exprimant Nkx2.2 (classe II). Chez les souris Sey/Sey (small eye), mutants naturels pour la fonction de Pax6, le domaine d’expression de Nkx2.2 s’étend dorsalement bien que la signalisation SHH apparaisse inchangée (Ericson et al., 1997). De plus, Pax6 est suffisante pour réprimer l’expression de Nkx2.2 in vivo de manière cellule-autonome et vice versa (Briscoe et al., 2000). De la même façon, Nkx6.1 (classe II) et Dbx2 (classe I) exprimés dans des domaines adjacents sont capables d’empêcher mutuellement leur expression (Briscoe et al., 2000 ; Sander et al., 2000). Ce jeu d’inhibitions réciproques et sélectives servirait à ajuster les frontières entre les domaines du neuroépithélium (ce qui expliquerait les limites franches observées entre les différents groupes de progéniteurs) et pourrait permettre de maintenir l’intégrité de ces domaines pendant la croissance rapide du tube neural (Briscoe et al., 2000).
Des analyses fonctionnelles suggèrent que la combinaison de facteurs de transcription présents dans chaque domaine de progéniteurs spécifie l’identité des neurones qui en dérivent (pour revues, voir Briscoe et Ericson, 1999, 2001 ; Jessell, 2000). Ils agiraient en induisant l’expression de protéines dirigeant la genèse d’un sous-type neuronal spécifique et en réprimant celle des déterminants nécessaires pour la formation des sous-types neuronaux qui doivent être produits par les territoires adjacents. Ces déterminants de l’identité des différentes classes de neurones de la moelle épinière commencent à s’exprimer au cours de la dernière division mitotique des progéniteurs neuronaux. Ces événements sont particulièrement bien connus concernant la spécification des motoneurones (figure 17).

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Table des matières

A. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DU SYSTÈME NERVEUX
I. L’induction neurale
II. La neurulation
III. La neurogenèse
IV. Régionalisation du système nerveux central selon l’axe rostro-caudal
1. Initiation de la régionalisation rostro-caudale du névraxe
2. Description sommaire de la mise en place des différentes régions du névraxe selon l’axe rostrocaudal
3. Régionalisation rostro-caudale de la moelle épinière
V. Régionalisation du système nerveux central selon l’axe dorso-ventral
1. Initiation de la régionalisation dorso-ventrale du névraxe
2. Mise en place des populations cellulaires ventrales du névraxe
a. Eléments de la voie de signalisation SHH
b. Rôle de SHH dans l’établissement des populations cellulaires ventrales du névraxe
c. Modèle de spécification des populations neuronales ventrales de la moelle épinière
d. Mode d’action de SHH
3. Mise en place des populations cellulaires dorsales du névraxe
a. Eléments sur la signalisation de type TGF-β
b. Rôle des facteurs de type TGF-β dans l’établissement des populations cellulaires dorsales du
névraxe
c. Modèle de spécification des populations neuronales dorsales de la moelle épinière
4. Etablissement des populations cellulaires intermédiaires de la moelle épinière
B. LE DÉVELOPPEMENT DU LIGNAGE OLIGODENDROCYTAIRE
I. Du précurseur à l’oligodendrocyte différencié
1. Le précurseur oligodendrocytaire
2. Le progéniteur oligodendrocytaire
3. Le préoligodendrocyte et l’oligodendrocyte immature
4. La maturation oligodendrogliale
5. Les facteurs de régulation extrinsèques
II. Origine embryonnaire et spécification des oligodendrocytes
III. Objectif de l’étude
RESULTATS
A. EFFETS DES PROTÉINES BMPS SUR LE DÉVELOPPEMENT DES OLIGODENDROCYTES
I. Analyses in vitro
1. Cultures de plaque neurale médiane (E1,5)
2. Cultures de tissu neural ventral (E3,5 à E4,5)
II. Analyses in vivo à E3
1. Greffe de cellules produisant BMP2 entre le tube neural ventral et les somites
2. Ablation de la partie dorsale du tube neural
3. Greffe de cellules produisant Noggin entre le tube neural dorsal et les somites
B. ETUDE DU MODE D’ACTION DES BMPS DANS LA RÉGULATION DE
L’OLIGODENDROGENÈSE
I. Effet de BMP4 sur l’induction des oligodendrocytes par SHH in vitro
1. Effet de BMP4 sur le neuroépithélium ventral stimulé par SHH avant la spécification
oligodendrocytaire
2. Effet de BMP4 sur le neuroépithélium ventral après la spécification oligodendrocytaire
II. Effet de BMP4 sur l’expression de facteurs de transcription dans le
neuroépithélium ventral
1. Effet de BMP4 sur l’expression de Pax6 dans le neuroépithélium ventral in vitro
a. Avant la détermination des oligodendrocytes
b. Après la détermination des oligodendrocytes
2. Effet de BMP4 sur l’expression de Nkx2.2 dans le neuroépithélium ventral in vitro
a. Avant la détermination des oligodendrocytes
b. Après la détermination des oligodendrocytes
3. Effet de BMP4 sur l’expression de Olig2 dans le neuroépithélium ventral in vitro
4. Effet de BMP4 sur l’expression de Nkx2.2 et de Olig2 dans le neuroépithélium ventral in vivo (E3)
DISCUSSION
I. Des facteurs dorsaux de la moelle épinière, dont des BMPs, participent à la régulation spatiale des étapes précoces de l’oligodendrogenèse
II. BMP4 est capable d’antagoniser l’induction du développement des oligodendrocytes médiée par SHH
III. Les BMPs inhibent la spécification des oligodendrocytes via la répression de l’expression du facteur de transcription Olig2
IV. Que deviennent les cellules normalement destinées à former des oligodendrocytes en présence de BMPs?
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
MATERIELS ET METHODES
I. Embryons
II. Milieux de culture
1. Plaque neurale médiane et neuroépithélium ventral
2. Tube neural ventral
3. Préparation du gel de collagène
4. Lignée cellulaire Q2bn
5. Lignée cellulaire CHO (Chinese Hamster Ovary)
III. Prélèvement des tissus embryonnaires
1. Plaque neurale médiane
2. Tube neural ventral
3. Neuroépithélium ventral
IV. Cultures cellulaires
1. Lignée Q2bn
2. Lignée CHO
3. Marquage des cellules au DiI
V. Cultures des tissus embryonnaires
VI. Manipulations des embryons in ovo à E3
1. Préparation des embryons
2. Greffe de cellules Q2bn et CHO-Noggin entre le tube neural ventral et les somites
3. Ablation de la région dorsale du tube neural
4. Prélèvement des tissus
VI. Immunohistochimie
1. Anticorps et révélateurs utilisés
a. Anticorps primaires
b. Anticorps secondaires et conjugats de streptavidine
2. Préparation des tissus
a. Cultures
b. Echantillons de tube neural
3. Procédure d’immunodétection
4. Observations
VII. Hybridation in situ
BIBLIOGRAPHIE

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