Les avantages et les limites de l’établissement d’un processus de recensement d’accidents

Retour d’expérience d’accidents et presqu’accidents au profit de la prévention en éducation physique et sportive au secondaire I

Terminant ma formation à la HEP-BEJUNE située à Bienne, j’ai réalisé ce mémoire de Master en vue de l’obtention de mon diplôme d’enseignement pour le degré secondaire I. Après l’obtention d’un bachelor à l’Université de Neuchâtel en sciences et sport (mathématiques), j’ai débuté la HEP-BEJUNE afin de me spécialiser dans l’enseignement de ces deux branches. Pour ce mémoire de Master, j’ai décidé de me focaliser sur l’enseignement du sport lors des leçons d’EPS et plus particulièrement sur les accidents qui se déroulent durant celles-ci. En effet, en tant que future enseignante d’EPS, ce sujet me concerne directement par son risque d’occurrence lors des leçons. De plus, cette thématique est en lien direct avec la notion de responsabilité. Je trouve cette dernière très importante tout particulièrement en EPS où les accidents semblent survenir de manière imprévisible et aléatoire. Il est donc utile et nécessaire de trouver des moyens pour s’y préparer.

L’éducation physique et sportive (EPS) fait partie des disciplines hebdomadaires enseignées tout au long de la scolarité obligatoire des élèves. Elle se distingue des autres cours par la mise à contribution physique des élèves. L’enseignant est en charge non seulement du bon déroulement des leçons, mais également de la sécurité et la mise en œuvre des moyens de prévention liés aux accidents. En vue d’améliorer la sécurité durant les heures d’EPS, nous nous demandons dans ce travail si le retour d’expérience peut être utilisé afin d’informer et d’aider d’autres enseignants à réduire le nombre d’accidents. Etudiant à la HEP-BEJUNE, mon directeur de Mémoire et moi-même avons décidé de limiter notre recherche aux trois cantons concernés à savoir Berne francophone, Jura et Neuchâtel. Bien que ce travail soit centré sur ces trois cantons, celui-ci pourrait s’étendre à un plus vaste territoire par sa thématique, son importance a priori et son omniprésence. Nous nous sommes tout d’abord interrogés sur l’existence d’une base de données sur les accidents au sein des établissements scolaires de l’espace BEJUNE. Cependant, il ne semblait pas a priori exister de telles données, fait qui sera traité durant ce travail. Suite à cela, nous avons interrogé les enseignants d’EPS ainsi que les directions par le biais de questionnaires. Supposant l’absence d’une base de recensement d’accidents, nous avons souhaité mettre en place un prototype destiné à imiter un recensement réel d’accidents. Pour finir, nous avons analysé et discuté les différents résultats obtenus afin d’extraire les avantages et les limites d’un tel processus.

Plus précisément, dans un premier temps, ce travail définira des notions clés de la thématique des accidents ainsi que des concepts qui lui sont associés. Des sections seront ensuite dédiées aux différentes responsabilités auxquelles doit répondre les enseignants d’EPS. Le concept de retour d’expérience sera présenté et la façon dont celui-ci est par exemple utilisé dans des entreprises. Le questionnement principal de la recherche sera ensuite exposé. Une fois les hypothèses et les questions formalisées, nous détaillerons la méthodologie utilisée. Celle-ci présentera la manière dont les questionnaires ont été élaborés ainsi que la façon d’analyser les résultats. Dans ce chapitre sera aussi expliquée la mise en place du prototype du recensement d’accidents.

La suite de ce travail présentera l’analyse des questionnaires et du prototype en exposant et discutant les résultats obtenus. Cette partie a pour but de mettre en évidence les limites et les avantages d’un tel processus et donc que de répondre aux questionnements principaux de ce travail. Cette analyse nous permettra également de dresser une esquisse d’un futur recensement d’accidents basée sur le prototype et les remarques des enseignants ayant participé à celui-ci. Finalement, nous terminerons ce travail par la conclusion récapitulant les principaux résultats, certaines problématiques observées ainsi que les limites de ce travail. Elle donnera également quelques pistes d’ouverture vers de futures recherches.

Définition et importance de l’objet de recherche

Point de départ de la réflexion

Les accidents font partie des événements malheureux de la pratique de toute activité physique. En effet, le bureau de prévention des accidents (bpa) recense, en Suisse, 300’000 accidents se déroulant lors de la pratique d’une activité sportive, ce qui n’est pas négligeable. La pratique d’activités sportives à l’école se déroule pendant les leçons d’éducation physique dont un quota minimal est fixé par l’article 12 de la loi fédérale sur l’encouragement du sport et de l’activité « L’enseignement à l’école obligatoire doit prévoir au moins trois périodes hebdomadaires d’éducation physique ». Cela implique, que des accidents apparaissent également dans l’enseignement de l’EPS à l’école. Les enseignants d’EPS doivent suivre les recommandations formulées par le Plan d’études romand (PER, Conférence Intercantonale de l’Instruction Publique de la Suisse romande et du Tessin (CIIP), 2010). En effet, celui-ci détermine ce que les élèves doivent acquérir au cours de leur scolarité et donc, ce que les enseignants doivent leur enseigner. Il permet aux enseignants de discerner les apprentissages et d’organiser leur enseignement. Il rassemble plusieurs domaines, tant dans des branches spécifiques comme le français, les mathématiques ou l’EPS, que de la formation générale ou des capacités transversales.

Le sport dans le PER

Deux aspects du PER sont en lien avec ce travail. Premièrement, le PER recommande aux enseignants d’EPS de pratiquer différents sports avec les élèves. Divers objectifs et diverses intentions sont rédigés à ce sujet. Cela amène les élèves à une confrontation directe à des risques d’accidents dans les leçons d’EPS. L’enseignement de l’EPS « participe en effet des mêmes valeurs que l’école : dépassement de soi, goût de l’effort, respect de l’autre et des règles, esprit d’équipe,… Il contribue aussi à développer l’esprit d’initiative et de responsabilité, tout comme le sens de l’engagement. Enfin il peut être un facteur particulièrement efficace d’équilibre et de santé et un formidable vecteur de réussite scolaire pour de nombreux élèves » (Lecou, 2012, p. 7). Il est vrai que les leçons d’EPS comportent des particularités que l’on ne retrouve pas dans les autres disciplines, ce qui pourrait expliquer les chiffres du bpa qui évaluent que 64% des accidents scolaires se déroulent pendant les leçons d’EPS. Ce phénomène peut se comprendre par les particularités de l’EPS : le lieu, le matériel, les activités choisies, l’apprentissage avec le corps, etc. Toutes ces caractéristiques amènent des risques potentiels qu’on ne retrouve pas dans d’autres branches. L’âge des élèves du secondaire I n’est sûrement pas un facteur anodin. En pleine croissance et puberté, le corps humain subit d’importants changements pouvant mener à la perte temporaire de certains repères spatiaux chez l’individu ainsi qu’une fragilité physique. Tous ces faits peuvent engendrer des accidents (Ernst & Bücher, 2000). De plus, il est bien connu que le risque zéro n’existe pas et l’on retrouve donc inévitablement des accidents dans les établissements scolaires, notamment lors des leçons d’EPS.

Deuxièmement, la sécurité, la prévention et la gestion des situations à risque font partie des recommandations du PER et sont donc des concepts que les enseignants d’EPS doivent enseigner aux élèves. Voici un extrait des commentaires généraux du domaine disciplinaire « corps et mouvement » tiré du PER (CIIP, 2010, pp. 49-50) : Vu la spécificité de ces enseignements, une attention particulière est portée à la prévention des accidents. L’atmosphère et l’organisation de la leçon, le respect des mesures de sécurité, la promotion de l’aide et de la surveillance par les pairs et l’apport de consignes précises constituent des facteurs de sécurité à ne pas négliger.

Le but de ce travail

Les deux aspects précédents mettent en évidence la thématique de l’accident lors de l’enseignement de l’EPS à l’école, d’une part le risque d’accident est omniprésent lors de la pratique du sport et d’autre part, le PER recommande de travailler certains aspects liés à la gestion du risque. Pour rappel, environ deux tiers des accidents scolaires se déroulent durant le sport scolaire ce qui représente environ 32’000 accidents par année (d’après le bpa). Initialement, ce travail avait pour but d’utiliser des statistiques d’accidents se déroulant en EPS afin d’identifier certaines récurrences dans les diverses situations. Ce projet se destinait aux écoles du secondaire I des trois cantons BEJUNE (Berne francophone, Jura et Neuchâtel). L’idée était de faire une base de données et des statistiques sur les accidents se déroulant durant les leçons d’EPS. Celle-ci aurait pu servir comme base d’analyse mettant en lien certains facteurs tels que l’heure de l’accident, l’âge de l’accidenté, la discipline sportive pratiquée, la gravité de la blessure, etc. Le but aurait été de trouver des récurrences parmi les accidents répertoriés afin de mettre en place des moyens de prévention liés à chacune de ces récurrences. La mise en place d’une base de données permettrait une analyse statistique plus approfondie des accidents, mais cela n’est finalement pas souhaité. Ce sujet sera discuté dans l’analyse de ce travail. De plus, la réalisation d’une telle base de données semblait difficilement réalisable d’autant plus que le bpa ne possède pas suffisamment de données. En effet, il souligne que « contrairement à d’autre pays (p. ex. l’Allemagne), le bpa possède peu d’informations détaillées en raison d’un manque de données en la matière » (cf. site internet du bpa). De même, il semble qu’une base de données d’accidents commune n’existe pas dans les trois cantons BEJUNE. Il est toutefois possible que les établissements conservent individuellement des données à ce sujet, cependant, dans les lois scolaires, rien ne stipule que : – les enseignants doivent déclarer les accidents se déroulant pendant leurs leçons à la direction ou à un autre organe de surveillance, il se peut néanmoins que, localement, certaines directions exigent cela de leurs enseignants ; – les directions sont tenues de recenser les données concernant les accidents afin d’en constituer une base de données. Comme il n’existe pas de réglementations dans les établissements scolaires, rien ne suppose la présence d’une base de données. Nous trouvons cependant, dans certaines entreprises, des procédures formelles à appliquer en cas d’accident. Des groupes de recherches sur la même thématique sont créés afin d’analyser les différentes données récoltées et de gérer la sécurité des employés. En France, une étude menée par l’Observatoire national de la Sécurité et de l’Accessibilité des établissements d’enseignement (ONS) recense depuis 1995 les accidents corporels se déroulant sur des élèves lors des activités scolaires. Dans ce recensement, sont pris en considération uniquement les accidents suivants : « Pour limiter la charge de travail des établissements, seuls les accidents ayant eu pour conséquence, a minima, un acte médical (consultation, soin, radio…) sont saisis dans la base de données » (ONS, 2016, p. 221). Dans son rapport 2016, l’ONS (2016, p. 226) constate que 58,5% des accidents scolaires se déroulent en EPS pour les élèves ayant des âges similaires à ceux des élèves du secondaire I. Dans les écoles primaires, les accidents en leçon d’EPS représentent 15,1% du total d’accidents (ONS, 2016, p. 223). C’est une preuve de la fréquence importante des accidents dans ce milieu. Cela montre donc l’intérêt de traiter, dans les établissements du secondaire I des trois cantons BEJUNE, les accidents qui surviennent durant les leçons d’EPS. En résumé, il semble utile de réaliser une recherche sur les accidents se déroulant durant les leçons d’EPS dans les établissements du secondaire I des trois cantons BEJUNE. Plus précisément, d’essayer d’utiliser ces événements malheureux afin d’en prévenir d’autres et donc, de réduire le nombre d’accidents.

Quelques définitions

Par souci de clarté, certaines notions qui sont communément utilisées dans la vie courante, des termes tels que danger, risque ou encore accident vont être définis. Certaines définitions seront affinées par la suite.

L’accident
Pour définir la notion d’accident, la définition donnée dans les conditions générales des assurances-accidents a été retenue (AXA-Winterthur, 2011, p. 6) : « Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort. […] ». Il faut savoir que cette définition est identique pour les différentes compagnies d’assurance-accidents et c’est pourquoi c’est celle-ci qui va être considérée dans ce travail.

Le presqu’accident
Le Plan d’amélioration sécurité (PASE) de la société Lumen l’enseigne (2014, p. 33) définit le presqu’accident comme « Tout événement survenu sur le lieu de travail ou du fait du travail qui aurait pu entraîner un dommage (aux personnes, et/ou aux biens, et/ou à l’environnement) ». Le presqu’accident se diffère de l’accident par son impact. En effet, l’accident a comme finalité un dommage, qu’il soit léger ou grave. Contrairement à l’accident, le presqu’accident est une situation où il n’y a pas de dommage. Un presqu’accident peut-être associé à l’expression “il y a eu plus de peur que de mal”. Dans ce travail, la notion de presqu’accident est utilisée dans le processus de partage d’expérience. En effet, il n’y a pas forcément besoin qu’un élève se blesse pour profiter de l’expérience que cela peut apporter à d’autres enseignants.

Le danger
Dans ce travail, la notion de danger intervient de manière sous-jacente lorsqu’il est question de risque et d’accident, notions qui seront traitées dans les prochains paragraphes. Le danger est défini comme « ce qui constitue une menace, un risque qui compromet l’existence de quelqu’un, de quelque chose » (Larousse, 1989). Bien que cette définition soit brève, elle semble avoir pour inconvénient que chaque danger représente une menace pour la vie de la personne, alors qu’il pourrait juste être handicapant. C’est pourquoi, la définition suivante semble plus adaptée au cadre de l’enseignement de l’EPS : « Le danger est considéré comme une menace, un événement dommageable susceptible de se produire. […] Chacun de ces événements est susceptible d’entraîner un impact plus ou moins conséquent : de la contusion au décès, en passant par l’entorse, la perte de conscience, la fracture, etc. » (Soulé, 2009, p. 15). En effet, cette dernière caractérise mieux la généralité de l’événement et donne un critère de gravité. D’autre part, il semble important d’inclure la notion de sécurité dans la définition, comme l’ont fait Pfefferlé et Liardet (2011, p. 15) : « ce qui menace ou compromet la sécurité, l’existence d’une personne ou d’une chose ». Il est important de comprendre que le danger peut compromettre l’intégrité physique ou morale d’un individu, cependant, il n’apporte pas de caractère individuel. S’il y a un danger pour une personne, il le sera tout autant pour une autre. Cela ne dépend pas du sujet.

Conclusion

L’objectif principal du présent travail visait à identifier les avantages supposés et les limites de l’établissement d’un processus de recensement d’accidents sous forme de retour d’expérience. Nos analyses permettent de répondre que les principaux points positifs de cette structure portent notamment sur le savoir d’expérience, le partage de données entre enseignants et un apport formatif. Nos résultats indiquent également certaines limites liées à la mise en place d’une procédure de recensement. Cependant, les discussions du présent travail donnent des pistes de réflexions afin d’y remédier notamment en ce qui concerne l’anonymat et le besoin d’un formulaire complet mais également pratique.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction 
1. Problématique 
1.1 Définition et importance de l’objet de recherche
1.2 Etat de la question
1.2.1 Aspects didactiques
1.2.2 Aspects pédagogiques
1.2.3 Responsabilités juridiques et pédagogiques de l’enseignant d’EPS
1.2.4 Prévention et retour d’expérience
1.3 Questions et objectifs de la recherche
2. Méthodologie
2.1 Méthodologie de l’enquête
2.2 Nature du corpus
2.2.1 Présentation des questionnaires
2.2.2 Protocole et procédure de recherche
2.2.3 Questionnaires en ligne
2.2.4 Limites de la collecte de données par questionnaires en ligne
2.2.5 Description des questionnaires
2.3 Démarche d’analyse
3. Analyse et résultats
3.1 Présence d’un outil de recensement d’accidents
3.2 Habitudes et pratiques des enseignants d’EPS en termes de sécurité et d’accidents
3.2.1 Résultats n°1 : Les recommandations du PER
3.2.2 Résultats n°2 : Les pratiques et ressentis des enseignants d’EPS
3.2.3 Résultats n°3 : La responsabilité juridique
3.2.4 Résultats n°4 : La sécurité et la prévention
3.2.5 Résultat n°5 : Le prototype de recensement d’accidents
3.3 Prototype de recensement d’accidents sous forme de retour d’expérience
3.3.1 Savoirs d’expérience par l’exploitation d’exemples tirés des questionnaires et analyse
3.4 Analyse du prototype de recensement d’accidents
3.5 Synthèse des résultats
3.6 Projet d’élaboration d’un nouvel outil de recensement d’accidents
Conclusion

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *