Restauration écologique des communautés végétales herbacées méditerranéennes

Structuration et dynamique de la communauté

   Une communauté est un assemblage d‟espèces dont l‟organisation (distribution, composition, structure) est régit aléatoirement par des interactions abiotiques (climat, topographie), biotiques (facilitation, compétition, prédation) et des régimes de perturbation (e.g. incendies, fauches, labours, marées, etc.) (Lortie et al. 2004 ; Gaudet & Keddy 1988 ; Callaway & Walker 1997). Les processus responsables de la construction d‟une communauté, appelés règles d‟assemblages, sont souvent comparés aux processus utilisés dans la théorie de l‟évolution, plus particulièrement à la sélection naturelle (Keddy 1992). La communauté est une structure hétérogène où des espèces apparaissent et coexistent. A l‟instar de nombreuses théories qui se focalisent sur une cause unique, la théorie de la coexistence des espèces est basée sur une combinaison de mécanismes régissant la structure des communautés (Kuang & Chesson 2010). Une communauté évolue en  fonction des capacités physiologiques des espèces (Dislich et al. 2010) à s‟adapter aux conditions environnementales et aux interactions biotiques (Shmida & Ellner 1984). En intégrant les dimensions spatiale et temporelle, on pourra distinguer différents modèles de structuration des communautés en fonction de l‟apparition et de la coexistence des espèces et de leur stabilité dans la communauté. Pour les systèmes herbacés ouverts, on différencie quatre mécanismes principaux (Figure 3). Les deux premiers pouvant évoluer, on parlera de « non-equilibrium », les deux autres représentants des états stables on parlera d‟ « equilibrium » (Chesson & Case 1986). Ces mécanismes, pouvant également être décrits comme des états de la dynamique végétale se différencieront des uns des autres par la biomasse, la richesse spécifique et l‟hétérogénéité (Alard & Poudevigne 2002 ; Chabrerie 2002 ; Henri 2009).
1) « Non-equilibrium cooccurrence » : Dans un premier temps, l‟écosystème récemment perturbé (stade pionnier) sera colonisé par les espèces à partir des réservoirs séminaux (banque de graines, pluie de graines). Leur installation s‟effectuera dans un habitat qui ne sera pas saturé et dépendra de leur capacité à s‟adapter aux conditions du milieu. Il présentera une faible hétérogénéité, biomasse et richesse spécifique.
2) « Non-equilibrium coexistence » : Cet état intermédiaire qui suit le stade pionnier est conditionné principalement par les relations biotiques et en particulier par la réponse compétitive des espèces. Cet état est caractérisé par un chevauchement de l‟ensemble des niches des espèces et présente une augmentation de la biomasse, de la richesse spécifique et de l‟hétérogénéité.
3) « Equilibrium coexistence » Cet état stable apparaît généralement suite à une perturbation mineure ou un apport en nutriments. L‟exclusion compétitive qui régnait au précédent stade intermédiaire a conduit à une perte de richesse spécifique et d‟hétérogénéité corrélée à une augmentation de la biomasse. Cette augmentation de la biomasse est généralement due à l‟espèce dominante de la matrice qui a conduit à l‟exclusion de nombreuses espèces.
4) « Equilibrium cooccurrence » Cette alternative au stade précédent apparaît pour des communautés soumises à des perturbations récurrentes. L‟installation des espèces est dépendante de ce régime de perturbation qui crée de nouveaux micro-habitats favorable au maintien des espèces. Ce stade est généralement décrit avec une hétérogénéité importante à petite échelle et une très grande richesse spécifique.

Les perturbations et la résilience

   Les perturbations sont des évènements qui affectent tous les écosystèmes sur des échelles spatio-temporelles plus ou moins importantes (White & Jentsch 2004). Elles sont sources d‟hétérogénéité en changeant les schémas d‟organisation des communautés végétales (Vécrin 2003). White & Jentsch (2004) différencient les perturbations exogènes abruptes et ponctuelles, des régimes de perturbations à caractère continu souvent assimilés à des stress. Ces régimes de perturbations participent à l‟évolution et donc à l‟adaptation de la végétation à son milieu (Lavorel et al. 1997). Après perturbation, l‟écosystème qui présente la capacité de récupérer une trajectoire de référence, en un intervalle de temps variable, est qualifié de résilient (Hirst et al. 2003). La notion de résilience est à dissocier de celle de la résistance qui est la capacité d‟un écosystème à faire face à une perturbation (Holling 1973). Ces deux caractères sont mesurables dès lors que l‟écosystème est suceptible de retourner à l‟état antérieur à sa perturbation, en d‟autres termes, qu‟il n‟a pas franchit un seuild‟irréversibilité. Dans le cas contraire, la restauration spontanée n‟est plus possible.Selon White & Jentsch (2004), lorsqu‟un écosystème est affecté par une perturbation d‟intensité plus ou moins forte, sa dynamique change suivant l‟hétérogénéité des ressources disponibles et l‟influence des relations biotiques au sein des différentes communautés d‟espèces. Anticiper et ordonner les successions des communautés végétales nécessite donc une bonne connaissance des stratégies de réponse aux perturbations et au stress de chaque espèce (Barbaro et al. 2000). Une perturbation ne provoque pas pour autant une perte de diversité. Lorsqu‟elle est modérée en termes de fréquence, intensité ou amplitude, elle permet aux espèces résidentes et aux espèces pionnières de coexister et ainsi favorise une plus grande richesse spécifique (théorie de la perturbation intermédiaire).

Les facteurs responsables de la structure et de la composition de la communauté

   Différents filtres agissent lors de la formation, la structuration et l‟évolution d‟une communauté (Callaway & Walker 1997). Ces filtres varient selon l‟espace mais aussi le temps, ce qui crée des difficultés pour les répertorier et pour établir des schémas généraux de l‟assemblage des communautés (Keddy 1992 ; Lortie et al. 2004) . Ils peuvent être des processus stochastiques, liés à des événements biogéographiques ou liés à des limites de dispersion, et opèrent en particulier à l‟échelle continentale ou régionale (Lortie et al. 2004 ; Forey et al. 2010). A l‟échelle locale, les filtres intervenant dans l‟assemblage des communautés sont des interactions abiotiques et biotiques (Hraber & Milne 1997 ; Zobel 1997 ; Lortie et al. 2004 ; Sargent & Ackerly 2008 ; Roscher et al. 2009). Ils engendrent une adaptation des espèces traduite par des variations de leurs caractéristiques morphologiques, physiologiques ou phénologiques regroupés sous le terme de traits fonctionnels (Gross 2010 ; Liancourt et al. 2009).

La production et la dispersion des graines

   L‟absence d‟une espèce dans une communauté peut être liée à un manque de graines, qui peut être dû à une limitation de la production ou de la dispersion de graines (Pärtel et al. 1998 ; Turnbull et al. 2000 ; Foster & Tilman 2003 ; Eskelinen & Virtanen 2005 ; Gross et al. 2005 ; Ehrlen et al. 2006 ; Viard-Crétat 2008). La dispersion est un paramètre à ne pas négliger dans l‟étude d‟une communauté car elle a un effet sur la richesse spécifique mais aussi sur la diversité génétique (Saatkamp 2009). De nombreux vecteurs sont susceptibles d‟influencer la dispersion des graines tels que le vent, l‟apesanteur, l‟eau ou les animaux, chacun de ces vecteurs étant eux même soumis au contexte paysager (Munzbergovà 2004).

Les interactions biotiques

   Les filtres biotiques sont des interactions entre les différents individus dans une communauté ou un écosystème. Ces interactions peuvent intervenir entre espèces au niveau d‟une même population (interactions intra-spécifiques), entre espèces de la même communauté (interactions interspécifiques) et entre espèces végétales et/ou animales au sein de l‟écosystème. Les interactions peuvent avoir un impact négatif (compétition ou allélopathie) ou positif (facilitation) sur l‟établissement et/ou la croissance des individus (Callaway & Walker 1997). Qu‟elles soient négatives ou positives, ces interactions jouent un rôle primordial dans la structure et la dynamique des communautés (Holzapfel et al. 2006). On parlera d‟interactions directes ou indirectes suivant si l‟espèce, par son action sur l‟habitat (e.g. modifications de l‟intensité lumineuse, de l‟humidité du sol, de la richesse en nutriments, de la température, de la structure et texture du sol) influencera directement la plante cible (interaction directe) ou si elle agira sur un troisième individu (animal ou végétal) qui modifiera à son tour ses relations avec la plante cible (interaction indirecte).

Les facteurs abiotiques

   Les filtres abiotiques sont des filtres environnementaux qui nécessitent une adaptation physiologique des espèces pour tolérer ces contraintes (Levin & Muller-Landau 2000). Ces contraintes peuvent être de nature chimique ou physique (e.g. type de sol) et ont elles-mêmes un rôle dans les relations biotiques des espèces (Callaway & Walker 1997 ; Olofsson et al. 1999 ; Laughlin & Abella 2007 ; Rajaniemi & Allison 2009). La nature géologique du sol et le macroclimat sont principalement responsables de ces filtres, d‟où l‟importance des projets multidisciplinaires, alliant écologues, géologues, géographes, pédologues, climatologues pour une meilleure prise en compte de l‟environnement dans l‟évolution des systèmes biologiques (Lévêque 2001). Le relief et la nature du sol sont les facteurs abiotiques géologiques incontournables pour toutes études écologiques. La genèse des sols, l‟altération de la roche mère et l‟apport en matière organique, va influencer les propriétés des sols et en particulier les quantités de minéraux qui sont disponibles pour la vie des végétaux et des animaux. La réciproque a également été démontrée ; les végétaux et les animaux influencent la nature du sol. Les paramètres climatiques, tels que la température, l‟insolation, les précipitations, le vent et l‟humidité de l‟air joueront donc un rôle direct ou indirect sur la répartition des végétaux et des animaux. En effet, le climat intervient également dans les phénomènes d‟érosion qui déterminent les aspects du relief et la disponibilité en nutriments.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction générale
Objectifs de la thèse
Organisation de la thèse
Cadre conceptuel
La théorie des successions et les règles d‟assemblages au cœur de l‟écologie de la restauration
Structuration et dynamique de la communauté
Les perturbations et la résilience
Les successions
Les facteurs responsables de la structure et de la composition de la communauté
L‟Ecologie de la restauration et la restauration écologique
L‟écosystème de référence
Site d‟étude : La pseudo-steppe de la plaine de la Crau et ses faciès dégradés
Les écosystèmes steppiques méditerranéens
La plaine de la Crau
Méthode générale
Démarche de l‟étude
Les outils d‟analyse des données
Partie 1 : Etude de la résilience et des facteurs responsables de l’assemblage de la communauté végétale steppique
Résumé
Abstract
Introduction
Methods
Study area
Vegetation survey
Statistical analyses
Results
Effect of pipeline disturbance on soil characteristics
Structure and community composition changed by pipeline construction
Discussion
Disturbance impact on soil properties
Disturbance impact on plant community succession
Conclusion
Première inter-partie
Partie 2 : Réintroduction potentielle d’un maximum d’espèces de la steppe par transfert de foins
Résumé
Abstract
Introduction
Methods
Study area
Protocol
Results
Soil nutrient status and plant community characteristics just after disturbance
Species richness
Vegetation composition among the different treatments
Comparisons of donor site, pipeline, steppe and cultivated hay samples
Discussion
Soil properties and consequences for restoration
Consequences of hay transfer for steppe community
Grazing effect
Conclusion
Appendix A
Deuxième inter-partie
Partie 3 : Réintroduction d’espèces structurantes
Résumé
Abstract
Introduction
Methods
Study area
Experimental design
Germination tests in laboratory
Field measurements
Statistical analyses
Results
Controlled germinations
Foundation species establishment
Foundation species impact on plant community
Complemental species establishment results
Discussion
Foundation species establishment and their impact on plant community
Impact of restoration protocol on complemental species
Conclusion
Appendix B
Troisième inter-partie
Partie 4 : Tests des interactions biotiques
Résumé
Introduction
Matériel et méthodes
Origine et caractéristiques des espèces testées
Dispositif expérimental
Analyses statistiques
Résultats
Caractéristiques des sols
Interactions biotiques et abiotiques
Discussion
Conclusions et perspectives
Discussion générale
Synthèse des résultats obtenus sur les règles d‟assemblages de la communauté herbacée steppique
1. La production, la dispersion des graines et leur viabilité dans le sol
2. Les propriétés physico-chimiques du sol
3. Les interactions entre espèces végétales
4. Le pâturage ovin 
La dynamique de la communauté herbacée steppique n‟est donc pas un phénomène aléatoire
Synthèse des résultats obtenus en écologie de la restauration
Perspectives
Etudes à envisager pour approfondir les connaissances sur les règles d‟assemblages
Perspectives en écologie de la restauration
Bibliographie

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *