Ressenti des Sapeurs-Pompiers sur les urgences obstétricales

Réorganisation territoriale des maternités

Répartition de l’offre de soin :Depuis de nombreuses années, la France a entamé un mouvement de restructuration de l’activité médicale, et notamment d’obstétrique dans une logique d’amélioration de la qualité et le l’efficience des soins.
En effet, nous pouvions compter 816 maternités en 1995 contre 517 en 2016, ce qui fait environ un tiers des structures qui ont été fermées, alors que le taux de natalité est resté stable sur cette période. Les raisons de ces fermetures sont multiples : il y a tout d’abord un problème de démographie médicale, avec une difficulté à recruter les médecins dans certaines zones, mais aussi une volonté de regrouper les maternités en de gros pôles plus performants et innovants . L’analyse du précédent schéma régional de santé (SROS) d’Ile-de-France, couvrant la période de 2013 à 2017, établi par l’agence régionale de santé (ARS) a mis en évidence une disparité territoriale importante concernant l’offre de soin en Ile-de-France. Les objectifs du nouveau SROS (2018-2022) sont de réduire ces inégalités, en veillant à la distance que devront parcourir les femmes enceintes pour recevoir leurs soins, ce qui permettra de contribuer à la réduction des indicateurs de morbidité périnatale . De plus, un des objectifs de ce plan est de réorganiser l’offre de néonatalogie (ce qui implique un rééquilibrage des différents types de maternité) afin de couvrir le territoire de façon équitable, sans concentrer le tout sur Paris et la petite couronne .
En 15 ans, le nombre de maternités franciliennes a diminué de 12%, avec un nombre de 81 maternités maillant le territoire, et la création d’un centre périnatal de proximité (CPP), qui n’accueille pas les patientes en urgence.
Le gouvernement français a donc pour souhait de rééquilibrer l’offre de soins en obstétrique et en pédiatrie tout en veillant à améliorer la qualité des soins prodigués. Il est donc important de garder un maillage territorial garantissant un accès égalitaire aux soins ainsi que des structures avec une activité suffisante pour permettre d’offrir des soins avec les meilleures compétences des soignants et des équipements modernes.

Prise en charge de la femme enceinte par le SP

De l’appel à l’intervention

Lorsqu’un individu compose les numéros 18 ou 112 d’un lieu, l’appel arrive au centre de traitement de l’alerte (CTA) du département de ce lieu. Ce centre travaille en relation étroite avec le centre opérationnel départemental d’incendie et de secours, dont les missions sont de coordonner l’activité opérationnelle des SDIS et d’assurer les relations avec les autorités compétentes (exemple : police, SAMU).
C’est un opérateur de salle opérationnelle qui répond à cet appel. Il doit être SP et avoir validé sa formation initiale, ainsi que des formations relatives au CTA. Sa fonction est de traiter cet appel d’urgence et de coordonner les opérations.
Le travail de l’opérateur est constitué de trois grandes étapes :
Réceptionner et traiter les appels reçus : c’est à l’issue de cette première étape que l’opérateur va décider d’un éventuel transfert de l’appel à un service compétent ;
Evaluer le degré d’urgence de cet appel : puis il va classifier les informations recueillies selon les protocoles adaptés ;
Elaborer une réponse opérationnelle et pertinente, adaptée à l’urgence : quels moyens humains et matériels mobiliser ?
Pour traiter l’appel, l’opérateur dispose d’arbres décisionnels concernant dix situations cliniques particulières, définies par l’arrêté du 5 juin 2015. Ces arbres permettent de trouver rapidement une réponse adaptée à la situation, mais aussi de définir les situations de «départ réflexe», qui consistent à envoyer automatiquement un moyen des CIS même avant la fin de l’appel, pour des situations particulièrement urgentes. Ainsi, les informations sont plus précises et recueillies plus rapidement, et les SP des CIS peuvent partir dès que possible.

L’intervention

Durant notre visite à la caserne de Meaux, nous avons pu comprendre le schéma de départ des SP pour une intervention.
Dans les CIS, l’alerte est envoyée sur les bips individuels des SP. La mission du SP commence par la lecture du ticket de départ puis le trajet pour se rendre sur les lieux de l’intervention avec le véhicule mentionné.
Généralement, pour le SAP, les SP partent avec un VSAV. A bord de ce VSAV, il y a un chef d’agrès (qui coordonne l’intervention), un conducteur et un équipier, qui ont chacun des formations spécifiques. Le chef d’agrès aura la fonction de premier commandant des opérations de secours. Une fois sur les lieux, le chef d’agrès réalise un bilan secouriste et le transmet au CTA ainsi qu’au CRAA, afin de déterminer l’état de la victime et, si besoin, d’engager une prise en charge médicale. Ensuite, lorsque la victime est transportée vers une structure (hospitalière par exemple), une copie de la fiche de bilan est remise à cet établissement pour qu’il ait toutes les données de l’intervention, en plus des transmissions orales interprofessionnelles.

Après l’intervention

De retour au CIS, les SP peuvent débriefer entre eux de toutes les interventions. Cependant, les équipes vont être très attentives à ce que ces débriefs aient lieu après des interventions difficiles (par exemple en cas de décès de la victime). Parfois, des manœuvres peuvent aussi être organisées pour revenir sur la prise en charge d’une intervention passée.
De plus, les SP peuvent saisir les infirmiers du CODIS par une fiche d’information à caractère psychologique, si l’état d’un SP de leur CIS les interpelle. Ainsi, l’infirmier pourra entrer en contact avec le SP concerné et lui proposer un psychologue ou un médecin du centre d’aide médico psychologique (CAMP) du SDIS.
Les SP ont donc de nombreuses missions et doivent connaitre les différents moyens du SDIS leur permettant de prendre en charge les victimes. Pour cela, ils reçoivent une formation particulière, que nous allons étudier maintenant.

Compétences et savoir-être

Agir avec compétence

La formation des SP s’appuie sur un référentiel de compétences. Il nous semble essentiel de définir la notion de compétence et ce qu’elle implique, pour comprendre les mécanismes d’apprentissage et de mobilisation des connaissances en situation lors des interventions en gynéco-obstétrique. La compétence professionnelle est traduite par G. Le Boterf (pédagogue et expert en sciences de l’éducation), comme la capacité d’un professionnel à gérer efficacement un ensemble de situations professionnelles. Il s’agit d’un savoir combiner des ressources externes (formations, ressources matérielles, outils d’aide) et ressources internes, de les organiser de la manière la plus efficiente aux différentes familles de situation.
Ainsi, ces compétences sont définies, puis réunies dans le référentiel de métier. Il représente donc des points de repère auxquels les professionnels doivent se référer : c’est un socle commun. Cependant, il est important de préciser que l’exercice d’un SP ne se limite pas à une simple capacité de mobilisation des savoirs lors des interventions, mais à prendre soin de la personne en situation de vulnérabilité où le pronostic vital est souvent engagé.
En réalité, ce sont les soignants du premier recours où prise en charge de l’«humain» est une priorité absolue. Dans ces conditions, les ressources internes pourront très souvent interagir sur la prise en charge des victimes par les SP. Le concept de ressources internes est défini en sciences de l’éducation et de psychologie de l’apprentissage comme l’histoire personnelle, la culture, les croyances, les opinions, les attitudes, les qualités mais aussi les connaissances et expériences antérieures . Ceux-ci convoquent la notion du savoir-être qui est largement explicitée dans la définition de la compétence professionnelle.

Savoir-être

Le savoir-être est la résultante de l’application des savoirs et savoir-faire, qui conduit à un savoir se comporter face aux différentes situations, avec les acquisitions que le professionnel a fait tout au long de l’exercice de sa profession .
Il correspond à des caractéristiques individuelles, qui sont acquises avant la formation, par l’expérience personnelle, l’identité personnelle et la prise en compte de l’unicité de chaque individu, puis par des valeurs inculquées lors des formations puis durant l’exercice de la profession.
Ainsi, les compétences sont influençables par le comportement individuel et par l’extérieur, de façon positive ou négative. Cela conduit, in fine, à l’influence des conditions de travail . Une autre définition de savoir-être a été apportée par le gouvernement, dans le référentiel des métiers de la fonction publique hospitalière, comme « l’ensemble des démarches et processus cognitifs affectifs, relationnels et physiques mobilisés par la mise en œuvre des savoir-faire », ce qui reprend les valeurs précédemment citées. Cela implique donc que le soignant, ici le SP, adapte son comportement aux situations et aux personnes qu’il a face à lui, pour adapter les soins qu’il apporte, au mieux. Cela influencera le vécu de la victime, mais aussi, le vécu du SP lui-même. Le savoir-être est donc un savoir en perpétuel mouvement, qui s’enrichit avec l’expérience et surtout, le vécu.

Situations d’urgence les plus courantes

Dans toutes nos recherches, nous avons pu constater que l’accouchement constituait la majorité des thèmes abordés lorsqu’il s’agissait de la prise en charge de la femme enceinte par les SP. Dans cette étude, nous aborderons la prise en charge des urgences gynéco-obstétricales ; il nous parait alors nécessaire de définir certaines d’entre elles, qui ne se limitent pas seulement à l’accouchement.

Pathologies du premier trimestre

En début de grossesse, deux urgences sont principalement retrouvées : la fausse couche spontanée (FCS) ainsi que de la grossesse extra-utérine (GEU).
La FCS concerne 10 à 20% des grossesses . Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) (1977), la fausse couche spontanée correspond à l’expulsion d’un embryon ou d’un fœtus de moins de 500g ou moins de 22 semaines d’aménorrhée (SA) .
Cela peut provoquer des douleurs intenses ainsi que des métrorragies, pouvant aller jusqu’à l’hémorragie et l’état de choc. De plus, la charge émotionnelle associée à la perte de la grossesse est importante pour la patiente ou le couple.
Les SP, après avoir évalué la quantité de saignement, doivent surveiller l’état hémodynamique de la patiente et la transporter jusqu’aux urgences gynécologiques rapidement .
La GEU concerne 2% des grossesses. Il s’agit de la nidation d’un œuf en dehors de l’utérus ; la plupart des GEU se font dans les trompes. Cela peut provoquer des douleurs abdominales et des métrorragies, ce qui s’apparente à la clinique de la FCS.
Cela peut également provoquer un hémopéritoine conduisant la patiente en état de choc. Il s’agit donc d’une urgence vitale.

Pathologies des deuxième et troisième trimestres

L’accouchement est un phénomène physiologique qui consiste en l’expulsion du mobile fœtal en dehors des voies génitales féminines.
En France, en 2016, 781 000 naissances ont eu lieu, dont 18 868 en Seine-et-Marne. Parmi ces naissances, environ 1% d’entre elles se sont déroulées en extra-hospitalier . Il est important de noter que dans ce pourcentage, les naissances inopinées n’ont pas été différenciées des naissances à domicile sur souhait de la patiente.
L’accouchement peut comporter des risques, et ne pourra être qualifié de « physiologique » qu’à postériori.
Il garde toujours un degré d’urgence et de potentiel danger, auquel les SP devront parfois faire face. Par exemple, un accouchement par le siège demande à l’équipe obstétricale d’être plus entrainée sur les manœuvres , mais peut aussi se compliquer d’une hémorragie du post-partum (HPP) dans environ 5% des accouchements, dont 2% d’hémorragie sévère . C’est la première cause de mortalité maternelle, mais aussi la plus évitable.
L’hémorragie du post-partum se caractérise par une perte de sang supérieure à 500 mL dans les 24 heures suivant l’accouchement . L’intervention médicale va donc être adaptée au volume de cette perte sanguine, mais aussi et surtout à la tolérance et à l’hémodynamique de la patiente . Afin de diminuer l’incidence de l’HPP, les recommandations du Collège National des Gynécologues-Obstétriciens Français (CNGOF( sont d’administrer une dose prophylactique d’ocytocine (de 5 à 10 UI) lors de l’accouchement, au dégagement de l’épaule antérieure ou immédiatement après la naissance, chose qui n’est pas faisable par les SP.

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Table des matières

1. Préambule 
2. Revue de la littérature
2.1. Réorganisation territoriale des maternités
2.1.1. Répartition de l’offre de soin
2.2. Organisation des SP en Seine-et-Marne
2.2.1. Moyens humains et missions du SP
2.2.2. Moyens matériels
2.2.3. Organisation du territoire seine-et-marnais
2.3. Prise en charge de la femme enceinte par le SP
2.3.1. De l’appel à l’intervention
2.3.2. L’intervention
2.3.3. Après l’intervention
2.4. Formation des SP en Seine-et-Marne sur l’obstétrique
2.4.1. Formation initiale
2.4.1.1. Formation générale
2.4.1.2. Formation obstétricale
2.4.1.3. Focus sur la Seine-et-Marne
2.4.2. Formation au maintien des acquis
2.5. Compétences et savoir-être
2.5.1. Agir avec compétence
2.5.2. Savoir-être
2.5.3. Ressenti des SP
2.6. Situations d’urgence les plus courantes
2.6.1. Pathologies du premier trimestre
2.6.2. Pathologies des deuxième et troisième trimestres
3. Matériel et méthode
3.1. Objectifs de l’étude
3.2. Méthodologie de l’étude
3.2.1. Nature de l’étude
3.2.2. Choix et élaboration de l’outils
3.2.3. Population cible
3.2.4. Modalités de l’enquête
3.2.4.1. Lieu de l’étude
3.2.4.2. Caractéristiques des lieux de l’étude
3.2.4.2.1. La Chapelle-la-Reine
3.2.4.2.2. Meaux
3.2.4.2.3. Vulaines-sur-Seine
3.2.4.3. Durée de l’étude
3.2.4.4. Phase de pré-enquête
3.2.4.5. Déroulement de l’enquête
3.2.4.6. Méthode d’analyse
4. Analyse et résultats 
4.1. Population interrogée
4.1.1. Caractéristiques personnelles
4.1.2. Caractéristiques professionnelles
4.1.3. Formation des professionnels
4.2. Avant l’intervention : transmission de l’information par le CTA-CODIS
4.2.1. Qualité de l’information reçue
4.2.2. Ressenti à la réception de l’information
4.2.3. Traitement de l’information par le SP
4.3. Pendant l’intervention
4.3.1. Intervention pour fausse couche spontanée
4.3.2. Intervention pour accouchement inopiné
4.3.3. Réalisation de la délivrance naturelle
4.3.4. Intervention pour rupture prématuré des membranes
4.3.5. Analyse de la perception de l’accouchement inopiné par le SP à l’aide d’autres types d’interventions
4.3.5.1. Arrêt cardio-respiratoire chez l’enfant
4.3.5.2. Prise en charge de personnes exposées à un risque NRBC
4.3.5.3. L’accouchement inopiné et l’Accident de la Voie Publique (AVP)
4.3.5.3.1. L’accouchement inopiné
4.3.5.3.2. AVP avec plusieurs personnes impliquées
4.3.5.4. ACR chez l’adulte
4.3.6. Collaboration multi professionnelle
4.3.7. Interprofessionnalité
4.3.8. Interventions marquantes et femme enceinte
4.3.9. Vécu des interventions auprès des femmes enceintes par les SP
4.4. Gestion des émotions
4.4.1. Après une intervention difficile
4.4.2. Un outil à disposition des SP : La fiche de liaison à caractère psychologique
4.5. Collaboration avec la sage-femme
4.6. Ressenti par rapport à l’éloignement géographique du CIS
4.7. Prise en charge des aspects socio-culturels des victimes
5. Discussion
5.1. Discussion de la méthodologie
5.1.1 Biais et limites
5.1.2 Points forts de l’étude
5.2. Discussion des résultats
5.2.1 Réorganisation territoriale de l’offre de soins et conséquences
5.2.2 Moyens humains, matériels : organisation des SP
5.2.3 Gestion de l’intervention
5.2.4 Formation obstétricale des SP
5.2.5 Situations gynéco-obstétricales rencontrées
5.3. Propositions des équipes
5.3.1 Transmission de l’information
5.3.2 Formation
5.3.3 Stage en salle de naissance
6. Conclusion 
Bibliographie

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