Représentations des sages-femmes concernant le projet de naissance

Définition du projet de naissance

Une demande d’accouchement alternatif

Le projet de naissance est associé, selon les professionnels interrogés, à une demande d’accouchement «physiologique» (SFL1) et «naturel» (SFH8). Il permet pour les couples de faire part, à l’équipe qui va les suivre, de certaines demandes particulières. Le projet de naissance signifie «un ras le bol de l’hyper-médicalisation» (SFL3,SFH9) et une volonté pour ces couples d’être pris dans leur spécificité : «les femmes ont l’impression d’être une femme parmi tant d’autres, à la chaîne» (SFL6, SFH12), «une façon de ne pas se laisser faire tout du long» (SFL2, SFH12).

L’ensemble des envies et des attentes du couple, une idéalisation de l’accouchement

Selon les sages-femmes interrogées, le projet de naissance regroupe l’ensemble des envies et les attentes du couple concernant principalement l’accouchement : «choix que fait la patiente pour son accouchement» (SFH3, SFH16), mais également la grossesse et le post-partum «le fait de vouloir un enfant et tout ce qui entoure cette naissance» (SFL1), «ce que les parents ont comme souhaits pour leur travail, l’accouchement, les suites de couches et l’accueil de leur bébé» (SFL4,SFL7, SFH1, SFH2, SFH4, SFH6, SFH9, SFH13, SFH15, SFH16). L’accouchement est alors idéalisé, avec ses avantages et ses inconvénients «c’est un accouchement idéalisé, un accouchement idéal» (SFL10), «ils idéalisent l’accouchement» (SFL1, SFH9).

D’un outil pour être acteur de son accouchement vers une démarche vers la parentalité

Le projet de naissance repose sur une réflexion de la femme et du couple, avec un accompagnement de la sage-femme qui les suit afin de se préparer à la naissance : «une préparation des parents à la naissance de leur bébé, de façon plus ciblée, plutôt que d’arriver à la maternité sans trop savoir ce qui va se passer» (SFL2). Ces couples sont désignés comme étant acteur de leur accouchement et ayant réfléchi à la façon dont ils voulaient faire naître leur enfant : «des gens qui ont déjà une idée sur la question» (SFL2), «qui ont réfléchi» (SFL2, SFL8, SFH8), «c’est une manière de montrer qu’ils affirment leur choix, qu’ils ont besoin d’autonomie, d’être reconnu comme acteur de quelque chose, par rapport au pouvoir médical» (SFH14). Une sage-femme libérale (SFL7) précise «ce n’est pas seulement un outil, c’est une démarche vers la parentalité», cette notion est reprise par une sage-femme exerçant en maternité de niveau III (SFH14) «pour manifester leur parentalité».

Informations autour du projet de naissance

Systématiquement pour certaines sages-femmes

La possibilité d’écrire un projet de naissance au cours de la grossesse est proposé de façon systématique aux parents par 10 sages-femmes sur 27 interrogées (cinq sages-femmes libérales et cinq sages-femmes hospitalières). «Pour que l’équipe adapte au mieux leur pratique aux besoins des parents» (SFL6), «informations sur ce qui se fait ou ne se fait pas»(SFL10).
L’information est transmise pendant l’entretien individuel prénatal précoce (EIPP), appelé entretien du 4ème mois. L’EIPP permet d’aborder la notion de projet de naissance, d’évoquer les souhaits, les attentes, voire mêmes les craintes concernant la naissance : «l’EIPP permet d’éclore ce projet» (SFL1, SFL3, SFL4, SFL5, SFL7), «l’EIPP c’est le moment pour parler des attentes et des craintes» (SFL2). Le projet de naissance est un outil de consultation : «C’est un support de consultation et d’observation» (SFL11), «qu’est ce qui se cache derrière, qu’est ce qui pose problème ?» (SFL11), «debriefing sur chaque point» (SFL11). Cependant cet entretien, n’est pas toujours le moment propice pour parler de l’accouchement : «je leur en parle au début de grossesse, puis autour du 7ème mois» (SFL11), «pas au 4ème mois, elles ne savent rien à ce moment là» (SFH1, SFH8, SFH16), «ils me regardent sans savoir de quoi je parle» (SFL9).

En fonction des besoins des couples, des profils ou lieu d’accouchement pour d’autres sages-femmes

Bien que certaines sages-femmes en parlent systématiquement, d’autres sages-femmes hospitalières ou libérales en parlent en fonction des demandes et des besoins des couples. Les primipares ou encore les multipares avec un antécédent d’accouchement difficile ou de mauvais vécu font partie de celles qui reçoivent l’information en priorité. «Je leur propose de noter, si mauvais vécu, si elles insistent, des angoisses, des appréhensions» (SFH3), «n’allez pas écrire quelque chose alors que tout va bien, ça stigmatise le projet de naissance» (SFH16). Le projet de naissance permet, selon les sages-femmes, de rassurer les couples qui sont angoissés, qui appréhendent le moment de la naissance. «Le projet de naissance c’est un anxiolytique, c’est un calmeur d’angoisse» (SFH13) «ça peut les rassurer» (SFH1, SFH16). Selon les sages-femmes il y a un «type» de patientes qui écrit un projet de naissance et c’est ce «type» de patiente avec des envies particulières à qui l’on propose plus facilement d’écrire un projet de naissance : «les patientes savent qu’il y a un «type» de patientes, je le pense aussi» (SFH4), «pour les personnes avec des attentes particulières» (SFL4, SFH8, SFH16). L’exemple de «ne pas vouloir de péridurale» est pris pour préciser le terme d’«attentes particulières».
Parmi les sages-femmes hospitalières, plusieurs nous confient avoir une appréhension des projets de naissance, appréhension partagée par leurs collègues de salle de naissance : «ça serait peut être biaisé par rapport à mon expérience et l’appréhension des sages-femmes» (SFH15), «j’aurais presque peur de mettre en difficulté le couple sachant les retours qu’il peut y avoir par les collègues» (SFH15).

Accompagnement autour du projet de naissance par les professionnels

Le projet de naissance se travaille en couple, avec la sage-femme et avec l’équipe

Lorsqu’un couple exprime le souhait de faire un projet de naissance ou qu’on lui conseille d’en écrire un, il entre alors dans un parcours «particulier». Les sages-femmes interrogées proposent une consultation en plus des consultations de suivi de grossesse (SFL4, SFH3, SFH8, SFH9, SFH11, SFH16) dans le but d’accompagner les couples dans la rédaction du projet de naissance. «Quand il y a des choses un peu particulières, on a un peu le temps pour s’organiser» (SFH5). Ces consultations s’accompagnent parfois d’une visite de la maternité «pour diminuer ce qui peut provoquer du stress» (SFL8) et parfois d’un entretien avec la sage-femme cadre (SFH16), «si ce n’est pas cohérent avec la prise en charge ultérieure, le couple va tomber des nus» (SFH15, SFH16), «il faut l’anticiper, en lien avec le lieu d’accouchement et ceux qui font l’accouchement» (SFH15).
Le travail autour du projet de naissance est nécessaire selon les sages-femmes interrogées : «ce n’est pas un simple jet, ça se travaille» (SFL5, SFL7, SFL8, SFH2, SFH11, SFH14), mais les objectifs de ces consultations sont variés : «faire que cela soit bien présenté» (SFL3,SFL6), «elles ne savent pas pour un premier bébé» (SFH12), «sous forme de conseils» (SFH16), «je leur donne des outils» (SFL1, SFL7), «je le valide» (SFH2, SFH8), «on ne les aide pas à rédiger mais à éliminer» (SFH13). Plusieurs sages-femmes interrogées relèvent le fait qu’il y a un manque de connaissance de la part des couples, «une méconnaissance de ce qui se passe actuellement dans les hôpitaux» (SFL7, SFH13), et qu’il est important de les mettre en garde sur les imprévus qui peuvent survenir : «ça ne sert à rien de faire quelque chose d’utopique» (SFH15), «il y a toujours une part d’imprévu et c’est ce qu’on va travailler ensemble… c’est le fait d’accepter ce qu’il est» (SFL1, SFL9,SFH1).

Lien avec les structures d’accouchement et les équipes de garde

Les couples suivis par des sages-femmes libérales savent déjà où ils vont accoucher. Les couples suivis par des sages-femmes à l’hôpital sont suivis dans la structure où ils vont accoucher. Les sages-femmes ont un rôle de conseiller concernant la structure d’accouchement. Concernant le projet de naissance, une sage-femme libérale précise que «le type de structure conditionne l’accueil du projet de naissance» (SFL6). De plus, le fait d’accoucher à l’hôpital entraîne de la médicalisation «on leur dit que si elle accouche à l’hôpital il faut un minimum de médicalisation, il y a des choses qu’on est obligé» (SFH3). En plus du contexte hospitalier, l’activité en salle de naissance et le type de structure sont des paramètres qui influent sur la prise en charge des projets de naissance : «on est tributaire de l’activité» (SFH5), «en petite maternité on les connaît déjà» (SFH8, SFH9, SFH11). Bien que la structure soit un élément clé de l’accueil du projet de naissance, il est également dépendant de la sage-femme, comme nous le précise des sages-femmes interrogées: «il ne dépend pas de la structure mais de la sage-femme» (SFL7, SFH8), «il faut s’adapter à la sage-femme, c’est sage-femme dépendante» (SFL1, SFL2, SFL6, SFL7), «l’idée qu’elles arrivent avec leur feuille, ça ne plaît pas aux sages-femmes de garde» (SFL1).

Le projet de naissance en salle d’accouchement

Le suivi global étant peu répandu dans les structures du Finistère et du Morbihan, le plus souvent la sage-femme, qui a suivi le couple pendant la grossesse, n’est pas présente au moment de l’accouchement. Au cours des entretiens, nous remarquons l’importance de la délivrance d’une information sur les limites de l’accouchement à l’hôpital «si elles écrivent comment elles veulent que leur accouchement se passe, dans ce cas, il faut qu’elles accouchent à l’hôpital» (SFH1), il faut
tenir compte aussi des imprévus liés à l’obstétrique, «ne pas tracer un chemin tout fait» (SFL6), «l’accouchement est un lâcher prise, certaines idéalisent trop, il y a alors moins de lâcher prise» (SFL10, SFH3). Le manque d’information peut créer une déception pour le couple : «c’est compliqué quand il n’y a pas de discussion avant, cela entraîne des déceptions» (SFL5).
L’accouchement à l’hôpital est soumis à des règles et des protocoles, parfois systématiques, qui peuvent mettre en difficulté les couples, mais surtout les professionnels, dans la gestion des projets de naissance : «On travaille en fonction des recommandations de bonnes pratiques» (SFL9), «on ne peut pas déroger sur certaines choses» (SFL5). Les demandes des couples se retrouvent face à des obligations de pratiques liées au contexte hospitalier et aux recommandations : «c’est pas elles qui décident» (SFH1). Le poids du médico-légal entraîne des interrogations chez les sages-femmes, «c’est quoi le cadre, pour nous professionnels ? Qu’est ce que je tolère ? » (SFH15), «quelle marge de manœuvre on tolère ? cela peut leur porter préjudice, il y a une petite perte de chance» (SFH15).

Représentation du projet de naissance par les différents professionnels de santé

Le projet de naissance stigmatise, comme relevé précédemment. Les propos recueillis au cours des entretiens nous le prouvent. Nous remarquons que les représentations des autres professionnels présents en salle de naissance (auxiliaire de puériculture, collègues sage-femme etc.) influencent l’attitude de la sage-femme qui accueille le couple, «ça porte la poisse» (SFL4), «ça ne se passera pas comme prévu» (SFL4). Il existe des appréhensions de la part des sages-femmes concernant le projet de naissance (SFH6, SFH15), «quand on a une attitude défiante, à la limite il ne vaut mieux pas le lire» (SFL11), «si on va à l’encontre du projet de naissance on va les frustrer» (SFL9), «c’est comme ci on nous attendait au tournant, comme ci on allait être jugé» (SFL4). De plus, les demandes des couples ne sont pas toujours bien vécues par les professionnels qui les reçoivent : «j’ai des collègues pour qui ça ferme des portes» (SFH12), «le manuscrit m’embête» (SFL3), « l’équipe soignante est infantilisée, infériorisée sur leurs compétences et leurs connaissances» (SFL3), une sage-femme libérale rajoute : «je suis agacée par le fossé entre les demandes et ce qui se passe en salle de naissance» (SFL3). Le terme de contrat revient dans les réponses recueillies. Cependant, certaines sages-femmes font fies de ces représentations «j’essaye de faire abstraction de ce qui se dit dans l’équipe» (SFH15), «parfois je le ressens comme des ordres, parfois c’est juste des envies» (SFH1), «ce ne sont pas des choses farfelues, compliquées» (SFL4, SFL7, SFL8, SFH8, SFH9). Les sages-femmes admettent que les demandes se rapprochent de plus en plus de ce qui se fait maintenant en salles de naissances. Une sage-femme libérale (SFL11) précise «ils sont très rigoureux, ils veulent ci ou ça, je ne vois pas pourquoi un soignant devrait se sentir blessé par ça, une histoire d’ego encore, l’ego n’a rien à voir dans le soin».

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Table des matières

INTRODUCTION 
POPULATION ET METHODE
I.Les sages-femmes
II.Méthode
RESULTATS ET ANALYSE
I.Description de la population de l’étude
II.Définition du projet de naissance
1.Une demande d’accouchement alternatif
2.L’ensemble des envies et des attentes du couple, une idéalisation de l’accouchement
3.D’un outil pour être acteur de son accouchement vers une démarche vers la parentalité
4.Une aide à la prise en charge, un support de communication
5.Un «contrat» avec l’équipe, un reflet du manque de confiance ?
6.Un document écrit
III.Informations autour du projet de naissance
1.Systématiquement pour certaines sages-femmes
2.En fonction des besoins des couples, des profils ou lieu d’accouchement pour d’autres sages-femmes
3.Absence d’information autour du projet de naissance
IV.Accompagnement autour du projet de naissance par les professionnels
1.Le projet de naissance se travaille en couple, avec la sage-femme et avec l’équipe
2.Un document à la mode ?
3.Lien avec les structures d’accouchement et les équipes de garde
4.Le projet de naissance en salle d’accouchement
5.Prise en charge du couple en salle d’accouchement
6.Représentation du projet de naissance par les différents professionnels de santé
V.Les avantages et les difficultés du projet de naissance relevés par les sages-femmes
1.Un outil pour la sage-femme et pour le couple
2.Le copier/coller d’internet et la formulation parfois perçues comme «violente»
3.La méfiance des couples et les couples fermés
4.Le poids du médico-légal et du système actuel
5.Une idéalisation de l’accouchement
DISCUSSION 
I.Forces et limites de l’étude
II.Synthèse des principaux résultats
III.Réflexions et améliorations possibles
1.Une information pour tous
2.Choisir le moment adapté au cheminement du couple
3.L’impact des représentations par les professionnels et le droit du patient
4.Trouver un équilibre entre sécurité physique et psychique
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE 

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