Représentation de la variabilité individuelle dans les modèles de fonctionnement du troupeau

L’individu, une réponse reproductive

Un premier ensemble de modèles formalise l’individu par sa fonction reproductive. Cette fonction est considérée soit comme le moteur de la dynamique des stades physiologiques, soit comme le moteur de la dynamique des effectifs du troupeau ou encore comme la combinaison de ces deux composantes.
Les modèles envisageant la reproduction comme le moteur de la dynamique des stades physiologiques représentent l’individu par son stade physiologique, sans considération de son âge. La structure démographique du troupeau n’est donc pas prise en compte. Le modèle de Benoit (1998) simule la dynamique des effectifs de femelles vides ou gestantes dans deux groupes de lutte. Ces groupes ont des fertilités différentes (effet de la saison). Une proportion donnée de femelles restées vides après la lutte peut être transférée dans l’autre groupe de lutte afin d’avoir une nouvelle opportunité de reproduction. Le modèle de Denham et al. (1991) considère également les femelles gestantes ou vides mais distingue en plus les femelles cyclées. Ces deux approches sont déterministes : les femelles ont toutes la même probabilité de cyclicité ou de conception. Pleasants (1997) va plus loin et propose une approche stochastique dans laquelle des distributions de probabilité de conception et de durée de gestation permettent de prédire la distribution des mises-bas.
Les modèles envisageant la reproduction comme le moteur de la dynamique des effectifs du troupeau représentent l’individu principalement par son âge. Les modèles matriciels d’Upton (1993), de Schmitz (1997) et de Lesnoff (1999) répartissent les individus dans des classes d’âges et de sexe. Les transitions entre classes sont gérées par des probabilités de fertilité ou de survie, fonction de l’âge. Ces modèles testent l’effet des probabilités de survie ou de fertilité sur l’évolution des effectifs. La probabilité de fertilité est le moteur de génération des individus dans chaque classe d’âge.
Les modèles envisageant la reproduction comme le moteur de la dynamique des stades physiologiques et des effectifs intègrent à la fois l’âge et le statut physiologique des individus. Le modèle d’Azzam et al. (1990) repris par Werth et al. (1991) considère des classes d’individus basées sur l’âge. Au sein de ces classes, les individus ont une probabilité d’atteinte de la puberté, de cyclicité et de fécondation. Dans cette approche, le processus de reproduction est décomposé en une succession d’états physiologiques (pubère, cyclique, fécondée, …). Les transitions entre états dépendent de l’âge ou encore de certains traits déterminés de façon stochastique (e.g. l’occurrence d’une dystocie à la mise-bas, générée par une distribution de probabilité, influence la durée de l’anœstrus post-partum). La décomposition du processus de reproduction en une succession d’états physiologiques a été approfondie par les approches individu-centrées. Le modèle de Johnson et Notter (1987) représente chaque individu par un taux de conception à la première saillie et une durée d’anœstrus post-partum. Ces traits sont déterminés aléatoirement afin d’analyser la relation entre leur variance et la variance du taux de mise bas annuel du troupeau.

Le troupeau, niveau agrégé de gestion de la reproduction et du renouvellement

Le troupeau est le niveau le plus agrégé de raisonnement des pratiques formalisé dans les modèles. C’est également le niveau obligatoire de gestion dans les modèles qui représentent les individus regroupés en classe (e.g. d’âge, de statut). La gestion de la reproduction est le plus souvent formalisée à l’échelle du troupeau où elle correspond à une période et une durée pendant laquelle les individus peuvent changer de statut (Denham et al., 1991 ; Pleasants, 1997). Cette représentation n’est pas seulement présente dans les modèles de classe (e.g. Sanders et Cartwright, 1979) mais également dans les modèles individu-centrés (e.g. Villalba et al., 2009). L’intégration d’indicateurs relatifs au taux de détection des chaleurs ou à la qualité de l’inséminateur est une alternative pour enrichir la représentation de la gestion de la reproduction au niveau du troupeau (Oltenacu et al., 1980).
La plupart des modèles intègrent une structure démographique dynamique qui implique de représenter les pratiques de renouvellement. La gestion du renouvellement s’appuie nécessairement sur le niveau troupeau pour définir un nombre d’animaux sortant du troupeau et un nombre d’animaux immatures intégrant le troupeau. La gestion des effectifs réformés et des effectifs de nouvellement est représentée la plupart du temps sous forme d’un taux.
Comme pour la reproduction, la représentation du renouvellement sous forme d’un taux n’est pas uniquement utilisée dans les modèles représentant des classes d’individus (e.g. Chardon, 2008 ; Rotz et al., 1999 ; 2005) mais également dans les modèles individu-centrés (e.g. Johnson et Notter, 1997). Certains modèles basés sur des classes ont raffiné cette représentation en déclinant le taux par classe d’âge (Lesnoff, 1999, Ezanno, 2005) ou en utilisant un processus markovien pour simuler différentes stratégies de réforme et déterminer les probabilités de transition entre classes d’âge (Azzam et al., 1990).

L’individu, niveau fin de gestion de la reproduction et du renouvellement

Le niveau individuel est le niveau le plus fin de raisonnement des pratiques. Il est exclu des modèles basés sur des classes d’individus. Cette représentation permet d’approfondir la formalisation des interactions entre le système décisionnel et le système biotechnique. Les pratiques de reproduction s’appuyant sur des informations individuelles sont surtout représentées dans les modèles d’élevages bovins laitiers où la reproduction est raisonnée à l’échelle de la vache. La date de première insémination est déterminée par rapport à la date de vêlage de la femelle et à l’intervalle vêlage-insémination déterminé en entrée du modèle (Oltenacu et al., 1980 ; 1981 ; Marsh et al., 1987). La prise en compte du niveau individuel pour raisonner les pratiques de réforme permet de déterminer de façon qualitative le nombre d’individus à réformer ou à intégrer dans le troupeau. La représentation des pratiques de réforme s’appuie sur des critères comme le nombre de jours vides (e.g. Congleton, 1984), le niveau de production laitière (e.g. Sorensen et al., 1992), l’état corporel (e.g. Romera et al., 2004) ou encore l’âge (e.g. Blackburn et Cartwright, 1987b). Certains modèles intègrent également des critères individuels de sélection des femelles de renouvellement tel que le potentiel laitier (Congleton, 1984 ; Sorensen et al., 1992), le potentiel de croissance (Tess et Kolstad, 2000b) ou encore la période de lutte ayant donné naissance à la femelle (Cournut et Dedieu, 2004).

Le lot, niveau de gestion de l’alimentation ou de la reproduction et du renouvellement

Le niveau du lot est explicitement modélisé soit pour gérer l’alimentation soit pour gérer la reproduction et le renouvellement du troupeau. Deux types de modèles intègrent le lot pour formaliser les pratiques d’alimentation. Le premier type s’appuie sur le lot pour représenter l’alimentation nécessaire au fonctionnement des modèles animaux qui simulent les réponses aux apports alimentaires (e.g. Sanders et Cartwright, 1979 ; Blackburn et Cartwright, 1987a ; Bosman et al., 1997). Ces modèles permettent de regrouper les individus (par âge, par sexe, par statut physiologique) pour leur attribuer différents types et quantités d’aliments (e.g. Sorensen et al., 1992). Le second type de modèles s’appuie sur le lot pour représenter des systèmes au pâturage ou pour représenter le fonctionnement de l’exploitation agricole. Dans les modèles s’intéressant au pâturage, le lot correspond à un type de femelles (e.g. génisses, vaches taries, vaches en lactation) qui exploite un type de ressource (White et Bowman, 1983 ; Cacho et al., 1995 ; Romera et al., 2004 ; Jouven et Baumont, 2008). Le lot permet alors d’identifier un type de prélèvement et de simuler l’effet de ce prélèvement sur une ressource donnée. Le même type de logique se retrouve dans les modèles à l’échelle de l’exploitation agricole. L’identification des types d’animaux grâce au lot permet de discriminer différents postes de consommation des ressources de l’exploitation ainsi que différents postes d’achat de ressources à l’extérieur. Cette représentation permet alors de simuler les flux de matières dans l’exploitation agricole (Rotz et al., 1999 ; 2005; Shalloo et al., 2004 ; Schils et al., 2007; Chardon, 2008 ; Vayssières et al., 2009).
Le lot est également un support de représentation des pratiques de reproduction et de renouvellement. Ce niveau de gestion est utilisé pour simuler des systèmes avec plusieurs périodes de reproduction dans l’année et n’a été modélisé que dans le contexte des élevages de petits ruminants. Chaque lot correspond à une période de lutte et la gestion du renouvellement est déclinée pour chaque lot. La gestion des différents lots peut donner lieu à une formalisation simplifiée, sur la base de taux de fertilité et de renouvellement différentiels (Benoit, 1998 ; Guimaraes et al., 2009). La gestion des différents lots peut faire l’objet d’une modélisation explicite des évènements de conduite (e.g. lutte, diagnostic de gestation, tarissement, réforme dans le modèle de Cournut et Dedieu, 2004). La représentation de différentes périodes de reproduction s’appuie également sur la représentation des échecs de reproduction et de leur gestion. Les femelles échouant à la lutte sont transférées dans un autre lot pour avoir une opportunité supplémentaire de se reproduire. Cette pratique a été initialement conceptualisée dans des systèmes ovins allaitants par Girard et Lasseur (1997) qui ont défini la notion de calibre, c’est-à-dire la proportion de femelles susceptibles de changer de lot de lutte. Ce concept a été repris et implémenté par Benoit (1998) qui représente la gestion des échecs de reproduction par un flux de femelles entre lots. La même formalisation sur la base de flux de femelles est reprise dans le modèle caprin de Guimaraes et al. (2009). Le modèle individu-centré de Cournut et Dedieu (2004) approfondit la formalisation de la gestion des échecs de reproduction puisque la décision de changement de lot est prise sur la base d’indicateurs individuels du statut physiologique, déterminés lors du diagnostic de gestation.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I REPRESENTATION DE LA VARIABILITE INDIVIDUELLE DANS LES MODELES DE FONCTIONNEMENT DU TROUPEAU
1 Introduction 
2 Représentation de la composante biologique dans les modèles de fonctionnement du troupeau
2.1 L’individu, une réponse reproductive
2.2 L’individu, une réponse productive potentielle
2.3 L’individu, une réponse productive réalisée
3 Représentation de la composante décisionnelle dans les modèles de fonctionnement de troupeau 
3.1 Le troupeau, niveau agrégé de gestion de la reproduction et du renouvellement
3.2 L’individu, niveau fin de gestion de la reproduction et du renouvellement
3.3 Le lot, niveau de gestion de l’alimentation ou de la reproduction et du renouvellement
3.4 Le lot, entité de gestion à l’interface d’un projet d’élevage et d’un système de pratiques
4 Cahier des charges pour la construction d’un simulateur permettant d’étudier la variabilité individuelle
5 Références bibliographiques
CHAPITRE II MODELISATION DES PERFORMANCES INDIVIDUELLES 
1 Introduction
2 Représentation des priorités entre fonctions physiologiques
2.1 Cas des femelles matures
2.1.1 Priorité relative des fonctions de gestation et de gestion des réserves
2.1.1.1 Expression du potentiel
2.1.1.2 Environnement contraignant
2.1.2 Priorité relative des fonctions de lactation et de gestion des réserves
2.1.2.1 Expression du potentiel
2.1.2.2 Environnement contraignant
2.1.3 Priorités relatives des fonctions de gestation, de lactation et de gestion des réserves
2.2 Cas des femelles en croissance
2.2.1 Priorités relatives des fonctions de croissance et de gestion des réserves
2.2.1.1 Expression du potentiel
2.2.1.2 Environnement contraignant
2.2.2 Modulation des priorités relatives des fonctions de gestation et de gestion des réserves par la croissance
2.2.2.1 Expression du potentiel
2.2.2.2 Environnement contraignant
2.2.3 Modulation des priorités relatives des fonctions de lactation et de gestion des réserves par la
croissance
2.2.3.1 Expression du potentiel
2.2.3.2 Environnement contraignant
2.2.4 Modulation des priorités relatives des fonctions de gestation, de lactation et de gestion des
réserves par la croissance
2.3 Conclusion
3 Modélisation des performances de la chèvre laitière au cours de sa vie productive 
3.1 Sous-système régulateur
3.2 Sous-système opérant
3.2.1 Principe général
3.2.2 Conversion de la ration distribuée en énergie ingérée
3.2.3 Ventilation du différentiel d’énergie entre les fonctions physiologiques
3.2.4 Réponse des flux de matière au différentiel d’énergie
3.2.5 Variables permettant la connexion avec le niveau troupeau
3.3 Evaluation du modèle de chèvre laitière
3.3.1 Analyses de sensibilité
3.3.2 Confrontation aux courbes individuelles du troupeau expérimental de l’UMR PNA
3.3.3 Niveaux de potentiel laitier et d’apports d’aliment concentré
3.3.4 Confrontation des dynamiques d’évolution des réserves corporelles aux données de la littérature
3.3.5 Conduite en lactation longue
3.4 Conclusion
4 Références bibliographiques
CHAPITRE III SIGHMA, SIMULATION OF GOAT HERD MANAGEMENT
1 Analyse du système réel : la gestion du troupeau caprin dans un système laitier intensif
1.1 Pratiques de reproduction
1.1.1 Organisation des mises-bas et projet de production
1.1.2 Techniques de mise à la reproduction et gestion des échecs de reproduction
1.2 Pratiques d’allotement
1.3 Pratiques de renouvellement
1.3.1 Politique d’effectifs
1.3.2 Composition du troupeau
1.3.3 Causes de réforme
1.4 Pratiques d’alimentation
1.4.1 Systèmes alimentaires
1.4.2 Adaptation de la ration pendant la campagne et entre les lots
1.4.3 Combinaison entre système alimentation et stratégie de reproduction
1.5 Conclusions sur l’analyse du système réel
1.6 Références bibliographiques
2 Modèle conceptuel de gestion technique du troupeau caprin laitier 
2.1 Du projet d’élevage à la configuration du troupeau en lots fonctionnels
2.2 Planification et pilotage des opérations techniques au sein des lots fonctionnels : motif élémentaire de gestion
2.3 Conclusion
2.4 Références bibliographiques
3 Simulateur du fonctionnement du troupeau caprin
3.1 Introduction
3.2 The dairy goat herd management model SIGHMA
3.2.1 General framework
3.2.2 Management sub-model: a planned set of discrete events formalizing decision rules and
technical operations
3.2.3 Animal sub-model: a set of compartmental models formalizing individual variability
3.2.4 Outputs and simulations
3.3 Results
3.3.1 Sensitivity analysis
3.3.2 Factorial experimental design
3.3.3 Exploring individual variability underlying herd performance
3.4 Discussion
3.4.1 Simulation results
3.4.2 Modelling approach
3.5 Conclusion
4 Introduire l’efficacité dans l’analyse de la variabilité des carrières individuelles : une clé pour le diagnostic de la conduite du troupeau
4.1 Introduction
4.2 Matériels et méthodes
4.2.1 Description du simulateur
4.2.2 Utilisation du simulateur pour trois plans d’expérience
4.2.3 Analyse des sorties
4.3 Résultats
4.3.1 Caractérisation de la variabilité des carrières individuelles
4.3.2 Effets des options de conduite sur la variabilité des carrières individuelles
4.3.3 Performances globales du troupeau
4.4 Discussion
4.4.1 Résultats des simulations
4.4.2 Intérêt de la variabilité individuelle pour le diagnostic des pratiques
4.5 Conclusion
4.6 Références
DISCUSSION GENERALE
1 Démarche de modélisation
1.1 Développement du simulateur
1.1.1 Composante biotechnique
1.1.2 Composante décisionnelle
1.2 Utilisation du simulateur pour la recherche
1.3 Utilisation du simulateur pour le terrain
2 Pistes d’améliorations 
2.1 Composante biotechnique
2.1.1 Animal
2.1.2 Ressources du système d’élevage
2.2 Composante décisionnelle
2.2.1 Questions de recherche autour de la variabilité individuelle
2.2.2 Questions de recherche futures
3 Contribution de la variabilité individuelle aux questionnements de la zootechnie des
systèmes d’élevage
4 Références bibliographiques
CONCLUSION

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