Réalisation technologique des microcapteurs infrarouges

Les capteurs unitaires

Dans le cadre de la détection infrarouge, deux types de capteurs sont couramment utilisés : les capteurs pyroélectriques et les microcapteurs thermoélectriques.

Les capteurs pyroélectriques

Le phénomène de la pyroélectricité est connu depuis longtemps et a été observé par Théophrastus en -315 . En effet, il est le premier à avoir décrit une pierre, la tourmaline, ayant la propriété d’attirer des petits bouts de bois lorsqu’elle subit un changement de température. Le principe de fonctionnement des capteurs pyroélectriques est basé sur le phénomène de polarisation électrique spontanée en fonction de la température et en absence de tout champ électrique, dans les cristaux démunis de centre de symétrie. Les matériaux couramment utilisés sont des oxydes de plomb avec une structure cristalline pérovskite (cubique face centrée). C’est le cas des cristaux suivants : TGS, LiTaO3, BST, PST, PZT . La température de Curie de ces matériaux joue un rôle important. En effet, elle correspond à une phase de transition du matériau. Si la température ambiante est supérieure à la température de Curie du matériau, alors sa structure cristalline est centrosymétrique et paraélectrique donc non polaire. Dans le cas contraire, une distorsion apparaît, ce qui engendre un dipôle électrique élémentaire dans chaque cellule cristalline et la phase ferroélectrique apparaît. Lorsque le capteur est exposé au rayonnement issu d’une source chaude, des charges superficielles apparaissent sur les faces du matériau, ceci engendre un champ électrique interne qui déplace les charges mobiles jusqu’à la neutralisation des charges surfaciques. Cette variation de température permet d’obtenir un signal électrique important mais qui devient évanescent au cours du temps . Ce capteur n’est donc efficace que lors de régimes thermiques transitoires. Il n’est alors possible de détecter que des objets ou personnes en mouvement à l’aide d’une lentille de Fresnel multi-zone. Grâce à cette lentille, le signal est renouvelé à chaque changement de zone par la source chaude. Mais, si elle n’est plus en mouvement, le signal est interrompu : ce qui représente un inconvénient majeur dans le cadre de la vision infrarouge en continu. Pour détecter la présence de personnes immobiles, il est indispensable de lui associer un obturateur mécanique.

Les microcapteurs thermoélectriques

Tout d’abord, un peu d’histoire sur la thermoélectricité … En 1821, Seebeck a découvert l’effet thermoélectrique qui depuis porte son nom et a mis au point le premier thermocouple,. En 1829, Nobili  a réalisé la première thermopile en associant plusieurs thermocouples en série. Et c’est en 1833 que Melloni a optimisé les matériaux et créé le couple bismuth/antimoine qui est toujours utilisé.
Un thermocouple est composé de deux conducteurs différents . L’effet Seebeck met en évidence la génération d’une f.e.m. par ce thermocouple soumis à une différence de température ∆T entre deux jonctions consécutives.

Les capteurs imageants

Les capteurs infrarouges peuvent être associés en matrice de manière à pouvoir former une image thermique. Quatre types de détecteurs sont généralement utilisés : les microbolomètres, les capteurs à thermopiles, les capteurs pyroélectriques et les microcantilevers.

Les matrices microbolométriques

Le premier bolomètre a été mis au point en 1880 par Langley . Les microbolomètres sont des microcapteurs thermiques résistifs. Le principe de fonctionnement est basé sur la mesure de la variation de la résistance électrique de la membrane lorsque cette dernière est exposée au rayonnement infrarouge. Par conséquent, elle doit être constituée d’un matériau présentant un coefficient thermique de résistance élevé (TCR). L’injection d’un courant est nécessaire pour mesurer cette résistance. Ce courant parcourant la membrane provoque un échauffement , ce qui est un inconvénient majeur. C’est pour cette raison que les microbolomètres sont régulés en température à l’aide d’un module à effet Peltier. Pour augmenter le signal, une cavité optique résonnante en λ/4 est réalisée . Ce capteur est encapsulé de manière à le protéger des courants de convection et pour obtenir une bonne isolation thermique, un vide résiduel est nécessaire. La réalisation de ce type de capteur sous forme matricielle, destinée à l’imagerie infrarouge, est entièrement compatible avec la technologie CMOS . La première filière a été développée par Honeywell et est maintenant produite par Raytheon.
Le choix de l’oxyde de vanadium (Vox) est motivé par un TCR élevé (compris entre -1,5 et -2%/K), ainsi que sa résistivité électrique et une bonne reproductibilité en production. L’objectif actuel est de réduire la taille du pixel à 25 µm .
La seconde filière « silicium amorphe » développée par Texas Instrument et maintenant par Raytheon et le CEA-Léti  est orientée vers des coûts de fabrication faibles pour un développement à grande échelle et non vers des hautes performances. Le silicium amorphe est un bon candidat pour les microbolomètres : il possède un TCR élevé (-2,5%/K), comme l’oxyde de vanadium, mais sa résistivité est supérieure.
La troisième filière développée par Texas Instrument puis par Raytheon, est basée sur un microbolomètre hydride pyroélectrique/ferroélectrique. La structure est composée d’une matrice de détecteurs élémentaires en strontium et barium (BST), hybridée par microbilles sur un circuit de lecture. Cette structure hybride limite l’isolation thermique du détecteur et donc les performances potentielles alors que le coût de fabrication est élevé. Des efforts sont en cours pour produire le détecteur en couches minces avec les performances du matériau céramique massif. Le prix de ces dispositifs est compris entre 20 et 50 k€ en fonction de la résolution, de la qualité de l’optique et du système de traitement des images associé.

Les caméras à capteurs pyroélectriques

Dans le commerce, des caméras linéaires infrarouges pyroélectriques sont distribuées par la société Impac France. L’utilisation des matrices linéaires et d’un obturateur fonctionnant à une fréquence fixe est privilégiée dans ces caméras de type PYROLINE . Elles sont destinées à des applications industrielles pour des mesures de températures sans contact et très rapides pour des objets en déplacement sur un tapis roulant, par exemple. Les fréquences de mesure sont 256 Hz et 512 Hz. Leur coût reste élevé, compris entre 3000 € et 10000€ suivant la résolution et le système de traitement d’images associé.

Les matrices de microcantilevers

Depuis la fin des années 90, le développement des microsystèmes a connu un essor considérable. Ces MEMS (Micro-Electrical-Mechanical-System) ont touché divers domaines comme l’automobile avec les accéléromètres ou encore l’aéronautique avec les gyroscopes. En ce qui concerne la détection infrarouge, la Société SARCON a développé un microcapteur dont le principe de fonctionnement est basé sur les propriétés de déformation d’un microbilame. Ce dernier est composé d’aluminium et de carbure de silicium . Le déplacement en déflexion de cette poutre encastrée est observé lorsque celle-ci est exposée à un rayonnement infrarouge. Trois types de lecture de ce déplacement ont été exploités : l’effet capacitif, l’effet piézoélectrique et la lecture avec un laser et un photodétecteur. La formation de l’image est réalisée directement à partir des microcantilevers. Une lecture directe peut être effectuée lorsque le cantilever comporte une couche piézoélectrique.
Les microbilames les plus performants sont constitués d’aluminium et de SiO2/SiON . Pour ce dispositif, l’effet capacitif de chaque pixel permet de reconstituer l’image thermique. Les caméras développées ont une résolution comprise entre 16×16 et 60×120 pixels. Un autre type de caméra utilise aussi des microcantilevers composés de microbilames d’aluminium et de nitrure de silicium (SiNx) . La lecture des pixels est réalisée par un laser avec une cellule CCD. Le laser balaye les microcantilevers et en fonction de la déflexion de la poutre, le faisceau lumineux est dévié, ainsi la cellule CCD qui mesure la déviation et en déduit l’intensité du signal . Les matrices réalisées pour ce dispositif sont de 256×256 pixels. Cette dernière solution demande un dispositif conséquent et coûteux.

Microcapteur infrarouge multi-membranes 1ère génération (2002-2005)

Description et principe de fonctionnement du microcapteur

La structure tridimensionnelle de surface 6×5 mm², est réalisée à partir de la gravure du substrat de silicium jusqu’aux membranes bicouches (SiO2/SiNx) à contraintes mécaniques compensées. Afin de minimiser l’encombrement du microcapteur, les piliers soutenant les membranes doivent présenter des flancs droits. L’absorbant obtenu par dépôt de résine polyimide possède des propriétés spectrales adaptées au domaine infrarouge ainsi qu’une bonne compatibilité au procédé couches minces utilisé, notamment le dépôt des réflecteurs en or. La thermopile a été réalisée en polysilicium dopé N et P afin de bénéficier d’un pouvoir thermoélectrique important . Les jonctions des microthermocouples qui la constituent sont localisées au milieu des membranes, ce qui permet de délivrer un maximum de tension.
A l’intérieur de chaque bande absorbante, le flux radiatif incident est converti en chaleur, ce qui génère les zones « chaudes » . Au niveau des réflecteurs, il n’y a pratiquement pas de rayonnement absorbé, ce qui permet de créer les zones « froides ».

Réalisation de ces microcapteurs en technologie silicium

Suivant les directives de fonctionnement d’INTERLAB, seuls des procédés de fabrication standards sur silicium ont été utilisés. La réalisation des microcapteurs a requis 12 opérations différentes avec 8 niveaux de masquage. Les premières étapes ont été prises en charge par le LAAS. Sur des substrats 3 pouces d’orientation cristalline, des repères ont été tout d’abord gravés pour permettre d’aligner les membranes suivant le plan d’attaque au KOH à flancs droits. En effet, en réalisant les ouvertures avec une orientation de 54,70° par rapport au méplat, les plans cristallins , les plus denses qui sont gravés moins rapidement que les autres, permettent d’obtenir les flancs droits. Selon le process de membrane développé par le LAAS, l’oxydation des substrats a été effectuée sur une épaisseur de 1,4 µm, suivie d’un dépôt de nitrure de 0,5 µm. Pour constituer les matériaux de la thermopile, une couche de polysilicium de 0,33 µm a été déposée puis dopée par implantation suivant une mosaïque de zones N et P . Enfin, le réseau linéique des 100 microthermocouples d’une largeur de 70 µm a été gravé.
Les wafers ont été ensuite transmis à l’IEMN pour les étapes suivantes. Afin d’assurer la continuité électrique de la thermopile, des plots de contacts en or ont été déposés par lift-off sur les jonctions PN. La couche absorbante (15 µm) a été obtenue par dépôt à la tournette d’une résine polyimide liquide photosensible. Cette couche a été partiellement recouverte par la technique de lift-off de bandes réflectrices en or.
La gravure profonde au KOH à 80°C en face arrière a été effectuée à l’IEF. Cette dernière étape a permis de libérer les membranes et de creuser les traits de prédécoupe autour des microcapteurs . L’étalonnage a été enfin effectué à l’IEMN. La sensibilité au flux de rayonnement infrarouge est comprise entre 50 et 55 µV/(W/m²) et la température équivalente de bruit est voisine de 0,26 mK. Le facteur de dispersion et la qualité de fabrication sont donc excellents puisque ces résultats qui sont parfaitement reproductibles coïncident avec les valeurs prévues par la modélisation avec une erreur inférieure à 5%.

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Table des matières

Introduction générale 
Chapitre I : Etat de l’art des dispositifs de vision infrarouge
1 Introduction
2 Les capteurs unitaires
2.1 Les capteurs pyroélectriques
2.2 Les microcapteurs thermoélectriques
3 Les capteurs imageants
3.1 Les matrices microbolométriques
3.2 Les réseaux de microcapteurs thermoélectriques
3.3 Les caméras à capteurs pyroélectriques
3.4 Les matrices de microcantilevers
4 Conclusion
Bibliographie du chapitre I
Chapitre II : Modélisation des microcapteurs de rayonnement infrarouge
1 Introduction
2 Microcapteur infrarouge multi-membranes 1ère génération (2002-2005)
2.1 Description et principe de fonctionnement du microcapteur
2.2 Réalisation de ces microcapteurs en technologie silicium
3 Structure des microcapteurs infrarouge mono-membrane de nouvelle génération 
4 Choix des matériaux pour la thermopile
5 Principe de modélisation des microcapteurs IR
5.1 Hypothèses et simplifications du modèle
5.2 Détermination du profil de température le long de la membrane
6 Etude de différentes configurations de microcapteurs
6.1 Définitions des principales caractéristiques à optimiser
6.2 Etude d’un microcapteur comportant une seule zone absorbante
6.3 Etude d’un microcapteur à deux zones
6.4 Etude d’un microcapteur à trois zones
6.5 Etude d’un microcapteur à quatre zones
6.6 Etude d’un microcapteur à six zones
6.7 Conclusion
7 Nouvelle structure permettant d’optimiser la détectivité spécifique 
7.1 Paramètres influents dans l’optimisation des microcapteurs
7.2 Nouvelle modélisation pour l’optimisation
7.2.1 Calcul de la conductivité thermique de la nouvelle couche équivalente
7.2.2 Résultats des simulations des microcapteurs optimisés
8 Conclusion 
Bibliographie du chapitre II
Chapitre III : Réalisation technologique des microcapteurs infrarouges
1 Introduction
2 Les étapes technologiques 
2.1 Nettoyage des substrats
2.2 Réalisation de la membrane et de la couche de polysilicium
2.3 Gravure des pistes de la thermopile
2.4 Métallisation de la sonde Platine (PT1000)
2.5 Métallisation des thermoéléments et des plots d’accès en or
2.6 Dépôt de la partie absorbante
2.7 Réalisation de la partie réflectrice
2.8 Micro-usinage du substrat par la face arrière
3 Réalisation des microcapteurs à détectivité spécifique améliorée
4 Conclusion
Bibliographie du chapitre III
Chapitre IV : Caractérisation, applications et perspectives
1 Introduction
2 Banc de mesure
2.1 Détermination de la sensibilité à l’éclairement
2.2 Etude de l’influence de la température d’air
2.3 Détermination du coefficient d’influence lié à la vitesse d’air
3 Caractérisation des microcapteurs à pistes rectilignes
3.1 Sensibilité à l’éclairement
3.2 Influence de la température d’air
3.3 Coefficient d’influence lié à la vitesse d’air
3.4 Conclusion
4 Caractérisation des microcapteurs à détectivité spécifique améliorée
5 Conclusion sur les microcapteurs
6 Applications
6.1 Première application : la domotique
6.2 Seconde application : Mesure directe des échanges radiatifs entre surfaces
7 Perspectives : Etude d’un microcapteur sub-millimétrique
8 Conclusion 
Bibliographie du chapitre IV
Conclusion générale

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