Réactivité de H2(g) dans le contexte du stockage

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Utilisation d’une barrière argileuse

Propriétés des argiles

Généralités

Les roches argileuses dénommées argilites sont des roches sédimentaires dont la teneur en argile dépasse généralement 50%. Elles présentent une grande proportion de minéraux argileux (>50%) et possèdent des comportements mécaniques et physiques situés entre ceux des roches et des sols (Bergaya et al., 2006). L’argile à Opalinus (Suisse) et l’argilite du Callovo-Oxfordien, retenues pour l’enfouissement des déchets nucléaires en Suisse et en France respectivement, présentent des caractéristiques plus proches de celles des roches.
Les minéraux argileux sont constitués de deux unités de base : des tétraèdres composés d’un atome de silicium (Si4+) entouré de quatre atomes d’oxygène (O2-) et des octaèdres, comprenant un atome d’aluminium (Al3+) lié à six groupements hydroxyles (OH-) (Figure 3).
Quand ces unités de base se combinent pour former des feuillets, ces aluminosilicates feuilletés ou phyllosilicates sont communément appelés « argiles ». On distingue trois familles de feuillets d’argile : les feuillets 1:1 ou TO constitués d’une couche tétraédrique (T) et d’une couche octaédrique (O), les feuillets 2:1 ou TOT et les feuillets 2 :1 :1 (Figure 4).
La substitution isomorphique d’ions Al3+ ou Si4+ par des cations de charge moindre (Mg2+ ou Al3+ par exemple) conduit à ce que ces feuillets soient déficitaires en charges positives d’où la présence de cations interfoliaires interchangeables (K+, Na+, Mg2+ majoritairement) pour compenser la charge structurale négative. Il existe une grande variété de minéraux argileux qui varient selon différents paramètres : la nature du cation et des liaisons interfoliaires, l’orientation et l’arrangement des feuillets et la surface accessible à l’eau. Il existe quatre grandes familles qui sont nées des modes d’assemblage et des substitutions entre ces différents paramètres (Thomassin et al., 2008; Uddin, 2008):
– Kaolinite Si2Al2O5(OH)4 (1 :1)
– Illite (Si,Al)4(Mg,Al)2O10(OH)2 (2:1)
– Smectite (montmorillonite, vermiculite) (Si,Al)4(Mg,Al)2O10(OH)2(Na,Ca) (2:1)
– Chlorite (Si,Al)4(Fe,Mg,Al)6O10(OH)8 (2:1:1)
La couche octaédrique peut être occupée par des cations trivalents (Al3+ principalement, ou Fe3+) ou par certains cations divalents (Fe2+ ou Mg2+ par exemple). Ceci conduit à distinguer les phyllosilicates dioctaédriques où les cations trivalents dominent dans la couche octaédrique (un site octaédrique sur trois est alors vacant) des phyllosilicates trioctaédriques où tous les sites octaédriques sont occupés par des ions divalents.
Les cations interfoliaires ou « échangeables » ont la propriété d’être hydrophiles. En partant d’une argile déshydratée, mise en présence ne serait-ce que de vapeur d’eau, les molécules d’eau vont donc pouvoir pénétrer facilement dans l’espace interfoliaire, permettant ainsi le gonflement de l’ensemble. Les molécules d’eau peuvent également interagir avec la surface chargée négativement par diverses liaisons (liaison hydrogène, de Van der Waals, adsorption polaire), formant ainsi une couche d’eau non mobilisable. Seules les argiles de la famille des smectites sont gonflantes comparées à l’illite, la kaolinite et la chlorite qui présentent des distances interfoliaires stables.

Milieu poreux

Un milieu poreux est défini comme un solide de forme complexe renfermant des cavités appelées pores. Ces cavités peuvent communiquer entre elles et contenir une ou plusieurs phases fluides pouvant s’écouler. Un milieu poreux est caractérisé par sa porosité, généralement notée ε, définie comme le rapport entre le volume total de vide et le volume total du solide. La répartition du volume poral en fonction du diamètre effectif des pores est également un paramètre qui caractérise la porosité (Tableau 2). Il existe différentes méthodes de caractérisation de la porosité, la plus utilisée est la porosimétrie au mercure qui consiste en l’introduction de mercure au sein du matériau (Schlömer et Krooss, 1997). Cette technique se base sur la loi de Laplace (37). Le volume de mercure pénétrant à l’intérieur nous indique la distribution des méso et macropores avec une précision de 5%. Cette méthode n’indique cependant pas la proportion de micropores, étant donné que son caractère non mouillant implique l’utilisation de pressions trop importantes pour atteindre les plus petits pores. La détermination de l’espace poral peut aussi se faire en mesurant l’adsorption d’azote et de vapeur d’eau. La détermination de l’espace poral se fait alors par la mesure de la teneur en eau et des masses volumiques (Bear, 1988).

Production de gaz

Origine

Une des évolutions géochimiques qui va intervenir au cours de la vie du stockage et qui pourra l’affecter ainsi que son environnement géologique est la production de gaz. Différents mécanismes produiront des gaz comme la corrosion des aciers, l’activité des micro-organismes et la radiolyse de l’eau et des matières organiques (production de méthane, dioxyde de carbone et hydrogène), la radiolyse alpha (production d’hélium)… On peut noter également la présence d’une faible quantité de radionucléides à l’état gazeux tel que 3H2, 36Cl2, 129I2, 39Ar… mais les quantités sont moindres par rapport aux quantités d’hydrogène gazeux produites. Celui-ci provient principalement de la corrosion des matériaux métalliques en conditions anoxiques après la fermeture des galeries. Les vitesses de corrosion sont faibles (de l’ordre de 2 à 3 μm.an-1 ), et ce phénomène va perdurer pendant de nombreuses années (de quelques dizaines d’années à environ 105 ans).
La production d’hydrogène est en premier lieu associée à la corrosion des aciers non alliés qui constituent le surconteneur de déchets vitrifiés et le chemisage qui assure le soutènement des alvéoles. Pour les déchets HA, l’essentiel de la production d’hydrogène se fait sur une période d’environ 5000 ans. Pour les déchets MAVL, la production d’hydrogène provient de la corrosion de différents composants métalliques qui constituent les déchets eux même et certains colis primaires mais également dans des proportions significatives suivant la nature des déchets de la radiolyse des matières organiques (ANDRA, 2005).
A la fermeture des alvéoles, l’oxygène est consommé par les différents composés réducteurs présents au sein des alvéoles de déchets tels que le fer métallique, la pyrite, la sidérite… et le milieu va ainsi devenir réducteur. Cette transition de conditions d’oxydo-réduction intervient assez rapidement après la fermeture du stockage (moins d’une dizaine d’années). La corrosion des aciers en conditions réductrices est régie à pH < 8 pour PH2 = 1 atm (alvéoles HA) par l’équation suivante (Bataillon et al., 2001; Reardon, 1995) : Fe(s) + 2H2 O(aq) → Fe2+ (aq) + 2OH− (aq) + H 2 (g) (1)
Les ions hydroxyles produits, peuvent en partie réagir avec les ions bicarbonates de la formation argileuse pour former des carbonates et on pourrait observer une précipitation de sidérite (FeCO3) à l’interface externe du conteneur (Figure 9):
Une autre partie peut réagir avec les ions ferreux pour former l’hydroxyde de fer Fe(OH)2(s), composé métastable qui en condition anoxique va réagir pour former de la magnétite Fe3O4(s) selon la réaction de Schikorr (Truche, 2009): 3Fe(OH)2 (s) → Fe3O4 (s) + 2H2 O(aq) +H 2 (g) (2) d’où la réaction globale de corrosion qui donne de l’hydrogène gazeux et de la magnétite: 3Fe(s) + 4H2 O(aq) → 4H 2 (g) + Fe3O4 (s) (3)

Conséquences de la présence de gaz

L’hydrogène gazeux, produit en continu pendant environ une centaine de milliers d’années, va entraîner une augmentation de pression de gaz dans les ouvrages du stockage. L’argilite, matériau très peu perméable (voir Chapitre 2), va fortement limiter la migration du gaz au sein de la couche géologique. Il va y avoir formation d’une bulle de gaz à l’interface colis de déchets/argilite et celle-ci peut conduire à une désaturation partielle de l’argilite et dans certains cas engendrer des dommages mécaniques tels que des micro-fissures au sein de la formation argileuse (Dridi, 2005; Rodwell, 2003). Les différentes étapes du transport d’un gaz au sein d’un matériau argileux sont schématisées dans la Figure 10. Dans un premier temps, le gaz est produit en faible quantité et va être dissous en totalité par l’eau du site, le transport est régi par un mécanisme de convection/diffusion (Figure 10A). Puis la solubilité de H2 dans l’eau étant faible et la production du gaz continuant, la pression de gaz devient suffisamment élevée pour vaincre les forces capillaires associées aux pores de plus grandes tailles connectés, un écoulement diphasique se met en place et le gaz pénètre au sein des pores (Figure 10B). Cette pression est définie comme la pression d’entrée. Si la pression du gaz continue à augmenter, elle peut entrer en compétition avec les forces assurant la cohésion entre certaines particules d’argile et créer ainsi des microfissures (Figure 10C). Enfin pour des pressions élevées, il peut y avoir apparition de ruptures au sein du milieu (Figure 10D). Ce dernier mécanisme intervient lorsque la pression est supérieure à la pression lithostatique qui est de 120 bar.
La présence d’une phase gazeuse, à une certaine pression, peut donc endommager la roche de couverture et ainsi accélérer le relâchement des radionucléides gazeux vers la biosphère, entraîner des phases liquides contaminées et libérer des gaz inflammables à la surface (hydrogène et méthane).

Effet de la température

Il a été mis en évidence dans le chapitre 1 que les conditions dans le stockage vont évoluer au cours du temps et notamment la température. L’hydrogène va être produit assez rapidement après la fermeture du stockage quand la température aura déjà atteint son maximum (proche de 90°C). Le transport du gaz peut-être influencé par ces variations de conditions de température.
Au cours d’un essai de perméation, on va obtenir une valeur du flux molaire Ng qui nous permettra de calculer le coefficient de perméabilité apparent ka d’après les expressions (17) et (18). On a besoin pour le calcul de ka de la viscosité du gaz étudié, qui varie avec la température selon la loi de Sutherland (Macrossan, 2003; van Itterbeek et Claes, 1938) : 1 T 1 + Sh / To 2 μ = μ (20) 1 + S / T o T h avec To = 273,15 K (température de référence)
Sh : température effective nommée constante de Sutherland (K), caractéristique du gaz étudié. Pour H2(g), Sh = 72 K (Crane, 1988).

Transferts d’espèces au sein d’une phase

Dans un milieu donné, le transfert de matière peut s’effectuer suivant deux processus : la perméation et la diffusion. La perméation est représentative d’un mouvement d’ensemble sous l’effet d’un gradient de pression. La diffusion correspond au mouvement propre d’un constituant par rapport aux autres constituants dû à un gradient de concentration et a généralement lieu lors de la présence de deux espèces au sein du milieu. Comme pour la perméation, la diffusion existe en phase liquide et en phase gazeuse.
Le flux molaire total NiT d’un élément correspond donc à la somme du flux advectif et du flux diffusif NiD : NiT = xi Ni + NiD (21)
avec xi : fraction molaire du composant i

Quelques notions sur la diffusion en phase liquide

La diffusion sous forme dissoute correspond au mécanisme initial de transport de l’hydrogène produit au sein du stockage de déchets radioactifs (voir Chapitre 1). La compétition entre la production d’hydrogène et sa diffusion sous forme dissoute régit l’apparition d’une bulle de gaz dans le stockage. Dans ce paragraphe, nous allons donner quelques notions de ce processus.
La concentration d’un élément dans un solvant peut être hétérogène et va tendre à s’homogénéiser avec le temps par le processus de diffusion. Il va y avoir création d’un flux diffusif NiD défini par la première loi de Fick (22) : NiD = −Di gradCi (22)
où NiD est la densité de flux molaire dû à la diffusion (mol.m-2.s-1), Di est le coefficient de diffusion moléculaire de l’espèce i au sein du fluide considéré (m2.s-1) et Ci la concentration de l’espèce diffusante i (mol.m-3).
Cette loi est valable dans un milieu continu libre. Dans un milieu poreux, on utilise un coefficient de diffusion effectif Die au lieu du coefficient de diffusion moléculaire Di. Le solide va s’opposer à la diffusion du fluide, d’où un coefficient de diffusion effectif Die petit voire très petit devant Di. La loi de Fick peut alors s’écrire sous la forme suivante : Ni = −θl τDi gradCi (23)
avec Die = θl τDi , où τ est la tortuosité du milieu (sans unité).
La tortuosité est définie comme le rapport de la longueur à parcourir sur la longueur réellement parcourue par l’élément présent dans le solvant. Elle met en évidence que le trajet suivi par l’espèce n’est pas une ligne droite, comme attendu dans un milieu homogène, mais suit un chemin plus long (Figure 13). C’est un facteur intrinsèque du milieu considéré.
Les méthodes de mesure du coefficient de diffusion d’une espèce dans une phase liquide sont nombreuses (Shackelford, 1991), on trouve plusieurs méthodes en régime permanent ou transitoire, basées sur la mesure d’un flux aux bornes de l’échantillon ou d’un profil de concentration au sein de celui-ci. Le cas d’un gaz sous forme dissoute pose des problèmes particuliers tels que la mise en solution du côté amont et la récupération et le dosage du côté aval de l’échantillon. Ceci conduit donc à des dispositifs expérimentaux plus ou moins complexes (Hildenbrand, 2003; Jacops et al., 2010). Dans le cas de l’hydrogène, on a la possibilité d’utiliser le gaz tritié comme traceur radioactif (Berne et al., 2009; Ikeda et al., 2011). La technique de détection est relativement simple et sensible mais il y a la problématique de la manipulation de la radioactivité. Pierre Boulin présente une expérience dite « d’écho de diffusion », qui met en jeu une simple mesure de pression mais les résultats se sont avérés très difficiles (voire impossibles) à exploiter (Boulin, 2008).
Au cours de ce travail, nous n’avons pas eu le temps de faire des expérimentations sur ce sujet. Cependant, à partir des données de diffusion dans l’eau de Wise et Houghton (Wise et Houghton, 1966), Pierre Boulin estime un coefficient de diffusion de l’hydrogène dans l’eau à 20°C de l’ordre de 5*10-11 m2/s (Boulin, 2008). Cette valeur va nous être utile par la suite (cf Chapitre 8).

La diffusion en phase gazeuse

Définitions

Dans la méthode expérimentale retenue (cf Chapitre 7), on mesure le débit d’hydrogène par dilution dans un autre gaz (hélium ou azote). L’utilisation de deux gaz va donc entraîner une diffusion mutuelle qui implique l’étude de la diffusion en phase gazeuse.
Comme dans un liquide, on peut relier le flux diffusif d’un gaz dans un mélange binaire à son gradient de concentration via la loi de Fick : Px i NiD = −Di, j grad (24)
avec PxRTi qui correspond à la concentration molaire dans le cas d’un gaz parfait et Di, j : coefficient de diffusion moléculaire pour un mélange binaire constitué des composants i et j (m2.s-1).
Plusieurs auteurs ont défini le coefficient de diffusion moléculaire (Bird et al., 1960; Karaiskakis et Gavril, 2004) comme étant dépendant des masses molaires des différents composants du mélange. On retiendra la formule semi-empirique de Fuller et al. (Fuller et al., 1966) reprise par Karaiskakis et Gavril (Karaiskakis et Gavril, 2004) qui utilise la somme de volumes de diffusion atomique ∑υ tabulée dans leur article: D1,2 = 0,00143T1,75 (1/M1 +1/M2 ) 1 1 2 (25) P (∑ υ)13 + (∑υ)23
On peut remarquer que le coefficient de diffusion moléculaire varie avec l’inverse de la pression et varie comme une puissance de la température. De plus, le coefficient de diffusion est indépendant de la composition du mélange.
Ces expressions sont valables dans un milieu libre, pour un milieu poreux, on admet que l’on peut remplacer D1,2 par un coefficient de diffusion effectif D1,2e .
Le problème est que l’équation (24) implique que les flux diffusifs des deux gaz soient opposés et de même module sachant que x2 = 1-x1. Or, d’après la loi de Graham (Piiper et Worth, 1980), ceci n’est pas vérifié dans le cas de deux gaz de masse molaire différente. Le flux diffusif du gaz 1 peut s’exprimer selon l’équation suivante : N1D =− M 2 N 2D (26)

Variation avec la température

Si on se base sur les deux processus de diffusion, tous deux sont dépendants de la température : la diffusion moléculaire est proportionnelle à T1,75 (25) et la diffusion de Knudsen est proportionnelle à T0,5 en se basant sur le modèle DGM (30). L’expression du phénomène de diffusion global avec la température est assez complexe à évaluer avec la prise en compte des deux processus. On peut simplifier en prenant en compte l’expression du coefficient de diffusion apparent extraite de la 1ère loi de Fick avec une dépendance en T.

Méthodes expérimentales de détermination

Expérimentalement pour déterminer le coefficient de diffusion d’une espèce présente au sein d’une phase gazeuse, on peut utiliser le même dispositif que pour la phase liquide. Concernant les cellules de diffusion, il en existe plusieurs sortes qui se différencient essentiellement par l’appareil de mesure en aval du système. Par exemple, l’équipe de Soukup présente les cellules de Wicke-Kallenbach et de Graham les plus couramment utilisées pour les systèmes binaires (Figure 14) (Soukup et al., 2008). Elles sont constituées de deux compartiments entre lesquels est placé l’échantillon poreux à analyser et à l’intérieur desquels circulent des flux de gaz différents. Dans le cas de la cellule de Wicke-Kallenbach, le flux sortant est analysé à l’aide d’un chromatographe en phase gazeuse alors que pour la cellule de Graham, l’analyse se fait uniquement avec un débitmètre après avoir atteint le régime permanent. Globalement, les deux cellules présentent une incertitude de mesure assez faible et une bonne reproductibilité des mesures. Ces cellules utilisent une succession de disques poreux imperméables (1) et d’échantillons (2) afin de limiter le gradient de pression entre la partie amont et aval de la cellule.

Méthodes expérimentales

Il existe de nombreuses méthodes de caractérisation de la pression d’entrée. La plus simple est la porosimètrie au mercure qui permet de caractériser la distribution de tailles de pores d’un matériau, et d’en déduire une estimation de la pression d’entrée (Dana et Skoczylas, 2002a; Egermann et al., 2006; Li et al., 2005). Elle consiste à injecter du mercure, liquide non mouillant, au sein d’un matériau dans lequel le vide a été préalablement réalisé. L’injection se fait par augmentation progressive de la pression en mercure et ce dernier va envahir successivement les gros puis les petits pores. La courbe du volume de mercure pénétrant le milieu poreux en fonction de la pression appliquée permet, à l’aide de la loi de Laplace et des valeurs de tension superficielle et d’angle de contact du système mercure/vide/roche, d’obtenir le diamètre de (méso et macro) pore minimal à partir duquel le mercure commence à envahir le matériau. La pression d’entrée est estimée à partir du moment où le mercure envahit de manière significative le matériau. Les avantages de cette technique sont sa simplicité et sa rapidité. Par contre, il s’agit d’une estimation qualitative étant donné que l’estimation de la pression à partir de laquelle le mercure envahit le matériau est assez subjective. De plus, les paramètres σ et γ ne sont pas forcément connus pour tous les systèmes binaires.
La méthode pas à pas, appelée également approche standard, consiste à augmenter la pression du gaz en amont de l’échantillon saturé par paliers et à mesurer le débit du liquide en aval (Carles et al., 2010; Egermann et al., 2006; Gallé, 2000; Li et al., 2005). Le débit en aval est nul tant que le gaz n’a pas pénétré dans l’échantillon. Lorsque la pression en amont atteint la pression d’entrée, le gaz a pénétré dans l’échantillon et un premier débit d’eau est mesuré. La pression en amont continue à augmenter et on va observer une hausse importante du débit en sortie accompagnée de l’apparition de bulles de gaz dans le liquide qui indique que la percée du gaz a bien eu lieu. La pression d’entrée correspond à la différence de pression entre l’amont et l’aval au moment de la percée (Figure 17). Cette méthode présente l’avantage d’être simple d’interprétation, par contre le débit liquide en sortie est souvent difficile à détecter pour des argiles à faible macroporosité, sachant que le débit juste après avoir atteint la pression d’entrée est faible. L’expérience peut être assez longue étant donné que pour être le plus précis possible les paliers de pression doivent être graduels.
Dans la Figure 17, on peut remarquer que la pression de percée est atteinte au bout d’environ 35 jours lorsque le débit d’eau en aval augmente fortement. La pression d’entrée pour cet essai est estimée à 41 bar.
La méthode par injection continue est une autre possibilité pour déterminer la pression d’entrée d’un gaz au sein d’un matériau donné (Egermann et al., 2006; Rudd et Pandey, 1973). Elle consiste à injecter de façon continue le gaz en amont de l’échantillon à un débit très faible. La pression en amont est mesurée et on peut observer des sauts qui correspondent aux différentes pressions d’entrée si le matériau est très hétérogène. Les différents sauts correspondent au passage du gaz à travers les différentes hétérogénéités au sein du matériau (pores, inclusions d’un minéral…). L’inconvénient majeur de cette technique est sa tendance à surestimer la pression d’entrée parce qu’elle néglige le gradient visqueux dans la phase liquide.
Une autre approche est la méthode de pression capillaire résiduelle (Hildenbrand et al., 2002). Le principe est de mettre un échantillon saturé en eau entre deux réservoirs de gaz entre lesquels on impose une différence de pression supérieure à la pression d’entrée. Le réservoir en aval de l’échantillon est fermé et celui de l’amont, peut être fermé ou maintenu à pression constante (Figure 18). On va observer une augmentation de pression en aval due au passage du gaz à travers l’échantillon. La différence de pression entre les deux réservoirs va tendre à diminuer, le phénomène de réimbibition se met alors en place. A la fin de l’essai, la différence entre ces deux pressions correspond donc à la pression résiduelle, au-dessus de laquelle la phase mouillante peut être déplacée. Cette méthode a l’avantage d’être rapide comparée aux autres techniques et présente une bonne reproductibilité, par contre elle tend à sous-estimer la pression d’entrée (Zweigel et al., 2004). La relation entre la pression résiduelle et la pression d’entrée n’est pas vraiment définie et elle dépend de beaucoup de paramètres tels qu’entre autres le réseau de pores et les conditions expérimentales (pression de confinement, température…). Certains auteurs estiment qu’au maximum la pression résiduelle correspond à la moitié de la pression d’entrée (Boulin et al., 2011; Vassenden et al., 2003).

Caractéristiques physico-chimiques

Généralités

Le dihydrogène est un gaz dont la température de fusion est de -259,14°C et celle d’ébullition de -252,87°C sous une atmosphère. Sa masse volumique est de 0,08988 g.L-1 à 15°C et 1 atm. Il est très léger et ceci peut être un inconvénient au niveau des manipulations pour les fuites. La liaison H-H est très forte (436 kJ.mol-1) et la molécule présente un caractère apolaire. Il faut donc franchir une barrière énergétique élevée pour initier des réactions impliquant l’hydrogène (Weast, 1982). L’hydrogène, sous forme gazeuse, est peu visqueux (μ = 8,65×10-6 Pa.s) et présente un coefficient de diffusion dans l’air de 6,1×10-5 m2.s-1 dans les conditions normales de température et de pression (Foh et al., 1979). Par comparaison, le gaz naturel CH4 (g) présente un coefficient de diffusion de 1,6×10-5 m2.s -1, l’hydrogène diffuse donc très vite s’il y a une fuite dans une pièce et vu sa faible densité, s’échappera par le haut. L’hydrogène sous forme dissoute présente un coefficient de diffusion beaucoup plus faible (5,0×10-9 m2.s-1 à 20°C) (cf paragraphe suivant) comme le gaz naturel (2,4×10-9 m2.s-1 à 20°C) (Wise et Houghton, 1966)

Solubilité de l’hydrogène

L’hydrogène est un gaz très peu soluble dans l’eau. Dans les conditions normales de température et de pression (1 atm et 25°C), la solubilité est de 0,784 mol.m-3 dans l’eau (Ortiz et al., 2002) et de 37 mol.m-3 sous P = 50 bar et T = 30°C. Une expression de la loi de Henry (40) met en avant la relation entre la quantité de gaz solubilisée (mH2(aq) en kg(H2) / kg(H2O)) et sa pression en équilibre au-dessus de la solution (PtotalxH2(g) en bar) dans un solvant quelconque (Jauregui-Haza et al., 2004; Purwanto et al., 1996). Dans le cas du solvant eau, on obtient : mH2 (aq) = K H Ptotal x H2 (g) (40)
avec mH2 (aq) : fraction massique d’hydrogène gazeux dissous dans l’eau (kg(H2) / kg(H2O))
K H : constante de Henry de l’hydrogène dans l’eau à 20°C (bar-1)
Ptotal : pression totale de la phase gaz (bar)
x H2 (g) : fraction molaire d’hydrogène dans la phase gaz (sans unité)
Cette loi n’est valable que pour les gaz et solutions avec des comportements idéaux, elle ne s’applique pas aux solutions salines concentrées et des corrections doivent être appliquées pour des pressions partielles élevées. La variation du logarithme de la constante de Henry associée à l’hydrogène est présentée dans la Figure 20 : fonction de la température et de la pression (swvp : pression de vapeur saturante). Les symboles proviennent de données expérimentales et les courbes sont issues des calculs de Stefánsson et Seward basés sur les équations d’état pour les gaz (Stefánsson et Seward, 2003).
La constante de Henry diminue faiblement dans la gamme 25-80°C ce qui implique que la solubilité de l’hydrogène dans l’eau va diminuer de façon limitée dans cette gamme de température.
On utilise également la notion de coefficient de solubilité de Bunsen (β) qui est défini par le volume de gaz, dans les conditions de pression et température normales, dissous à l’équilibre par litre de liquide à une température donnée et sous la pression atmosphérique. D’après Crozier et al. (Crozier et Yamamoto, 1974), le coefficient de Bunsen peut être exprimé en fonction de la température et de la salinité selon la relation suivante, qui dérive de l’équation de Clapeyron : ln β = A1 + A2 ( )+A3 ln( ) + Sa B1 + B2( )+B3 ( ) (41) où A et B sont des constantes, T la température en K et Sa la salinité (ou concentration totale de sels dissous) en g.L-1.
Les coefficients pour l’hydrogène sont les suivants : A1 = -39,96, A2 = 53,94, A3 = 16,31, B1 = -0,036, B2 = 0,017 et B3 = -0,0023. Dans le COx, Sa est typiquement égal à 2,39 g.L-1 (d’après Tableau 4).
La loi de Henry et la notion de coefficient de Bunsen sont deux définitions courantes pour estimer la solubilité d’un gaz dans un solvant. Par la suite, nous avons choisi d’utiliser la notion du coefficient de Bunsen pour calculer la solubilité de l’hydrogène dans nos conditions expérimentales. Dans nos conditions de température et pression (90°C et proche de 1 bar), 0,109 mmoles de H2 peut se dissoudre dans 200 mL d’une solution NaCl(aq) à 40 mM.

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Table des matières

Liste des Tableaux
Première partie: Contexte de l’étude
Chapitre 1 : Le stockage géologique des déchets radioactifs
1.1. Classification et solutions actuelles de gestion
1.2. Principe du stockage profond
1.3. Utilisation d’une barrière argileuse
1.3.1. Propriétés des argiles
a. Généralités
b. Milieu poreux
1.3.2. Argilite du Callovo-Oxfordien
a. Généralités et porosité
b. Minéralogie
c. Eau porale
1.4. Dynamique du stockage
1.4.1. Température
1.4.2. Production de gaz
a. Origine
b. Conséquences de la présence de gaz
c. Relâchement des radionucléides
1.5. Objectifs de la thèse
Chapitre 2 : Transfert de gaz dans les milieux poreux
2.1. Lois d’écoulements : Notion de perméation/advection
2.1.1. Définition générale
2.1.2. Interactions avec la paroi des pores – Effet Klinkenberg
2.1.3. Cas d’un système biphasique – Effet de la saturation
2.1.4. Méthodes de détermination expérimentales
2.1.5. Effet de la température
2.2. Transferts d’espèces au sein d’une phase
2.2.1. Quelques notions sur la diffusion en phase liquide
2.2.2. La diffusion en phase gazeuse
a. Définitions
b. Interactions avec les pores, le Dusty Gas Model
c. Variation avec la température
d. Méthodes expérimentales de détermination
2.3. Pression d’entrée et percée capillaire
2.3.1. Définitions
2.3.2. Méthodes expérimentales
2.4. Bilan sur le transfert en milieu poreux
Chapitre 3 : Réactivité de H2(g) dans le contexte du stockage
3.1. Caractéristiques physico-chimiques
3.1.1. Généralités
3.1.2. Solubilité de l’hydrogène
3.1.3 Potentiel d’oxydo-réduction
3.2. Réactions avec les espèces présentes au sein de l’argilite de Bure
3.2.1. Pyrite
3.2.2. Matières organiques
3.2.3. Les ions ferriques Fe(III)
3.2.4. Eau porale
3.2.5. Conteneurs en acier et en titane
3.3. Conclusions sur la réactivité de l’hydrogène
Deuxième partie: Réactivité de l’hydrogène gazeux dans le contexte du stockage
Chapitre 4 : Propriétés des matériaux argileux étudiés
4.1. Résumé
4.2. High Pressure Hydrogen Sorption on synthetic Na-montmorillonites and CallovoOxfordian clayrock (Article 1)
Abstract
1. Introduction
2. Materials and methods
2.1 Clay samples
2.2 Chemical and morphological characterization
2.3 Nitrogen adsorption isotherms and thermogravimetric analyses
2.4 Hydrogen sorption isotherms
3. Results and discussion
3.1 Energy Dispersive Spectrometry
3.2 X-Ray Diffraction
3.3 Thermo-gravimetric analysis
3.4 Specific Surface area and porosity
3.5 High pressure hydrogen sorption
Conclusions
Chapitre 5 : Réactivité de l’hydrogène gazeux vis-à-vis de matériaux argileux
5.1. Objectifs de l’étude
5.2. Montage expérimental et techniques utilisées
5.3. L’interaction entre l’hydrogène et les matériaux argileux en conditions sèches
5.3.1. Résumé
5.3.2. Adsorption of hydrogen gas and redox processes in clays (Article 2)
Abstract
Experimental section
Materials
Experimental set-up
57Fe Mössbauer spectrometry
Results and discussion
Hydrogen Adsorption
Reactivity of hydrogen gas
Environment relevance
5.3.3. Essais de sorption à 25°C
5.4. L’interaction hydrogène / suspension d’argile
5.4.1. Mode opératoire
5.4.2. Evolution de la pression partielle d’hydrogène avec la durée de réaction
5.4.3. Etude de la réduction du Fe(III) structural
5.5. La spectrométrie Mössbauer du 57Fe
5.5.1. Résumé
5.5.2. Abiotic reduction of Fe-claystone. Differentiation of reactive species by 57Fe Mössbauer spectrometry (Article 3)
Abstract
Introduction
Experimental section
Materials
Reduction with Na2S2O4 and H2(g)
57Fe Mössbauer spectrometry
Literature review
Structural Fe in natural and synthetic materials
Structural or adsorbed Fe on montmorillonites
Results and Discussions
Reduction of structural Fe(III)
Hyperfine parameters for Fe in clay complex systems: Overview of the data
Example of a natural system: the Callovo-Oxfordian clayrock
5.6. Effet de l’hydrophobicité sur la sorption d’hydrogène gazeux
5.6.1. Matériaux étudiés
5.6.2. Essais de sorption de H2(g) sur des matériaux argileux avec différents degrés de saturation
5.6.3. Essais de sorption de H2(g) sur des matériaux avec différents degrés d’hydrophobicité
5.7. Conclusions sur la réactivité de H2(g)
Chapitre 6: L’hydrogène gazeux: futur vecteur énergétique?
6.1. Production et utilisations industrielles de l’hydrogène
6.2. Importance sociétale du stockage
6.3. Le principe du confinement de gaz
6.3.1. Exemple du CH4
6.3.2. Exemple du CO2
6.3.3. Exemple de H2
6.4. Les matériaux de stockage de gaz
6.4.1. Les plus couramment étudiés
6.4.2. L’argile comme matériau de stockage et de confinement
6.5. Les mécanismes de sorption de gaz
6.5.1. Principe
6.5.2. Isothermes de sorption de H2 à T = 77K
6.5.3. Essais de diffusion des neutrons
a. Théorie
b. Premiers résultats
6.6. Comparaison entre la sorption de H2, CH4 et CO2 sur des matériaux argileux
Troisième partie: Essais de transfert de l’hydrogène à travers l’argilite du Callovo-Oxfordien
Chapitre 7 : Essais de transfert de l’hydrogène gazeux à travers l’argilite du CallovoOxfordien compacte
7.1. Dispositif expérimental
7.2. Echantillons de Callovo-Oxfordien étudiés
7.3. Saturation des échantillons
7.4. Tests de perméation
7.4.1. Protocole expérimental
7.4.2. Exploitation des résultats
7.4.3. Incertitudes
a. Evaluation des incertitudes expérimentales
b. Calcul de l’incertitude sur la mesure de ka
7.4.4. Effet de la température
7.4.5. Effet de l’humidité relative
7.5. Tests de diffusion
7.5.1 Protocole expérimental
7.5.2. Exploitation des résultats
7.5.3. Incertitudes sur la mesure de D app et Di,k
7.5.4. Effet de la température
7.5.5. Effet de l’humidité relative
7.6. Conclusions sur le transfert de gaz
Chapitre 8 : Essais de mesure de pression résiduelle en hydrogène Estimation de la pression d’entrée de H2(g)
8.1. Méthodes de détermination
8.2. Mesure de la pression résiduelle
8.2.1. Montage expérimental
8.2.2. Essais réalisés et résultats
a. C5B111
b. C5B143
c. C5B182
d. C5B173
e. C5B163
8.3. Conclusions sur la pression d’entrée de l’hydrogène au sein du COx
Chapitre 9 : Effet de l’état consolidé sur la réduction de Fe(III) structural par l’hydrogène gazeux
9.1. Méthodes expérimentales
9.1.1. Préparation des échantillons
9.1.2. Conditions expérimentales
9.2. Résultats des essais de perméation
9.3. Résultats de la spectrométrie Mössbauer du 57Fe
9.4. Conclusions sur l’effet de l’état consolidé sur la réactivité du COx
Conclusions générales
Perspectives
Références bibliographiques

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