Rappels sur la cytologie et le test de tzanck

Le cytodiagnostic de Tzanck consiste en l’étude morphologique de cellules recueillies par raclage d’une lésion et étalées directement sur lame. Cet examen doit son nom à un hématologue des hôpitaux de Saint-Louis, fondateur de la transfusion sanguine, Arnault Tzanck, qui mit au point en 1947 une méthode de diagnostic cytologique rapide fondée sur l’analyse de frottis obtenus par grattage des lésions. [23] Cette technique est simple et rapide. Elle offre l’avantage d’être peu couteuse et donc représente un moyen diagnostic très intéressant dans le contexte particulier de pays sous-médicalisés où l’accès aux examens paracliniques reste difficile soit par manque de personnel médical spécialisé ou par manque de moyen financiers de la population. Le cytodiagnostic permet d’établir le diagnostic dans certaines maladies. Dans d’autres, il permet seulement une orientation du diagnostic et nécessite une confirmation histologique [19]. Il peut être utilisé dans le diagnostic de différentes maladies érosives, vésiculo-bulleuses, tumorales, granulomateuses. Il peut remplacer des méthodes couteuses comme l’histopathologie et la PCR qui sont inaccessibles dans certains cas [11, 12, 13, 14, 15, 34]. Malgré les progrès exponentiels en dermatopathologie, l’intérêt porté à la cytologie cutanée est resté très limité. Ceci est probablement dû à plusieurs facteurs, incluant la facilité à obtenir une biopsie, le peu ou l’absence d’enseignement portant sur la cytologie dans les programmes de dermatologie et de dermatopathologie ainsi que le développement d’outils diagnostics avancés comme la PCR (polymerase-chain reaction), l’immunomarquage, l’immunofluorescence, la microscopie confocale qui restent cependant couteux et peu disponibles.

RAPPELS SUR LA CYTOLOGIE ET LE TEST TZANCK

La cytologie est la branche de biologie qui étudie la cellule dans ses caractéristiques intrinsèques et ses fonctions. Elle consiste en l’examen microscopique de cellules, isolées ou en petits amas, étalées sur lame de verre et colorées pour permettre de distinguer plus aisément leur aspect, leur origine et leurs anomalies afin d’établir un cytodiagnostic. Elle a l’avantage de montrer les détails cellulaires et l’inconvénient de ne fournir aucune indication sur l’organisation tissulaire, les anomalies architecturales et les aspects d’envahissement. La cytologie doit être considérée comme une méthode de dépistage, d’approche ou de complément pour le diagnostic d’une lésion. Son avantage est de pouvoir donner un résultat urgent le jour même voire dans l’heure qui suit le prélèvement car les méthodes et les techniques sont rapides. Le cytodiagnostic repose sur les connaissances des caractères morphologiques des cellules normales ou pathologiques isolées de leur contexte tissulaire : la taille et la forme des cellules, leur mode de groupement, ainsi que le type des substances intercellulaires. Il permet donc de détecter la présence de cellules anormales mais ne peut pas déterminer si un cancer est invasif ou pas.  N’ayant pas de valeur médico-légale, il a surtout une valeur d’orientation diagnostique.

Cytologie normale de la peau

L’épiderme et le derme constituent les deux couches basiques de la peau.
● Au niveau de l’épiderme, la couche la plus superficielle est constituée par le stratum corneum composé de cellules laminaires aplaties kératinisées. La couche basale est constituée par la couche germinative avec ses petites cellules cuboïdes attachées à la membrane basale. Les mélanocytes sont localisés entre les cellules de la couche germinative.  Entre ces deux couches, on retrouve les couches épineuse et granuleuse constituées de cellules intermédiaires.
● Le derme consiste en un tissu conjonctif composé d’un réseau de plusieurs types de fibres et contenant les follicules pileux, les glandes sébacées, les glandes sudorales, les vaisseaux, les cellules nerveuses et le tissu lymphoïde.

En conditions normales, les seules cellules qui se détachent de la peau sont les cellules anucléées (cornéocytes) de la couche cornée. Le produit de grattage de la surface d’une peau normale contient des cornéocytes et quelques kératinocytes nucléés superficiels et intermédiaires. Les grattages vigoureux de la surface de la peau, les frottis de bulles, les empreintes à partir de biopsies contiennent d’autres types de cellules. Ceux-ci incluent les cellules granuleuses, les cellules épineuses, et les cellules basales. Les cellules de la couche cornée sont larges, polyédriques, anucléées et montrent des plicatures. Les cellules granuleuses sont plus petites que les cornéocytes, avec un noyau hyperchromatique dense mais qui peut laisser entrevoir certains modèles (patterns) de chromatine. Le cytoplasme prend habituellement plus les colorants et peut rarement contenir des fragments de kératohyaline. La présence de kératohyaline est difficile à apprécier puisque la kératinisation précoce apparait en cytologie comme une augmentation de la hyalinisation du cytoplasme. Le rapport nucléo-cytoplasmqiue reste diminué. Les cellules de la couche épineuse constituent la grande partie de l’épiderme. Elles sont de ce fait fréquemment retrouvées sur les cytologies de vésicules intra- épidermiques et les empreintes faites à partir de biopsies. Les noyaux montrent un pattern bien défini de chromatine en dentelle. Les contours sont irrégulièrement bipolaires avec des surfaces plates. Au sein d’un amas de cellules, les connexions intercellulaires peuvent être encore présentes.

Les cellules basales normales sont rarement retrouvées sur les cytologies cutanées. Elles sont très peu nombreuses. Ce sont des cellules immatures qui reflètent un pattern de chromatine irrégulièrement agglutinée avec un rapport nucléo-cytoplasmique élevé. Le cytoplasme est basophile ou amphophile contrairement aux autres kératinocytes dont le cytoplasme est acidophile. Outre les cellules kératinocytaires, un petit nombre de cellules inflammatoires peut être occasionnellement observé sur les cytologies de peau normale, ceci inclut les lymphocytes, les histiocytes et parfois les mastocytes.

Historique d’Arnault Tzanck

La cytologie a été initialement introduite dans le domaine de la dermatologie en 1947 par Arnault Tzanck qui décrivit une méthode de diagnostic cytologique rapide fondée sur l’analyse de frottis obtenus par grattage ou ponction de lésions cutanées. Ses travaux étaient plus axés sur les dermatoses vésiculo-bulleuses et les tumeurs cutanées. [23] Arnault Tzanck est né en 1886 au nord de la Géorgie, dans le Caucase russe. Il immigra avec sa famille à Paris à l’âge de 4 ans. Il avait comme vocation les études médicales et il étudia la dermatologie et les maladies vénériennes, notamment avec Jean Darier. Après la guerre, il a d’abord servi en dermatologie aux hôpitaux de Broca et Saint-Louis à Paris ; mais il était de plus en plus intéressé par l’hématologie et particulièrement la transfusion sanguine. Dans le domaine de la dermatologie, les contributions de Tzanck incluaient le développement du concept de « l’intolérance » pour expliquer diverses réactions cutanées, qui fut un grand pas vers la compréhension de l’hypersensibilité qu’il a décrit dans un livre en 1932. En 1947, il a décrit un test simple se basant sur l’examen microscopique de produit de grattage à partir de tumeurs cutanées et de certaines dermatoses, particulièrement le pemphigus. Ce test de Tzanck reste utilisé à nos jours dans le diagnostic de l’herpès, entre autres maladies.

Son nom en hématologie est rattaché à un appareil qu’il a inventé et qui fut largement utilisé en France pour la transfusion sanguine entre les deux guerres. Tzanck a également expérimenté différentes méthodes pour la préservation du sang et de ses substituts. Sa plus grande contribution en hématologie était l’organisation de la transfusion sanguine en France qui a abouti à la création du Centre National de Transfusion Sanguine en 1949, dont il a été le premier directeur. Il a créé la “Revue d’hématologie” et en a été le premier éditeur. Il a occupé le poste de président de la société de dermatologie ainsi que la société d’hématologie. Arnault Tzanck est décédé en 1954, à la veille du cinquième congrès international de transfusion sanguine.

TECHNIQUE DU CYTODIAGNOSTIC DE TZANCK

Les prélèvements cytologiques sont généralement réalisés par des médecins spécialistes au cours de leur consultation ou au chevet du patient.

Matériel

– Lames de bistouri N°10 ou 15 ou vaccinostyle de forme triangulaire à base large ou curette plate.
– Lames de verre propres et sèches.

Réalisation des prélèvements
Le cytodiagnostic de Tzanck peut être réalisé sur des lésions cutanées ou muqueuses, érosives ou vésiculo-bulleuses. Aucune application préalable sur la lésion à prélever, ni anesthésie locale. Le choix de la lésion est primordial pour l’obtention d’un bon prélèvement. Il est préférable de choisir une lésion récente, non infectée et non croûteuse pour obtenir le plus grand nombre de cellules analysables. Les lésions anciennes sont souvent surinfectées et secondairement inflammatoires pouvant altérer la qualité du prélèvement et influencer l’interprétation. Nettoyage de la lésion avec une compresse alcoolisée. Pour les lésions vésiculo-bulleuses, ôter le toit de la lésion par un vaccinostyle ou l’inciser avec une lame bistouri, éliminer le contenu puis en racler le fond et les bords jusqu’à faire saigner légèrement.

Pour les lésions tumorales suspectes, plusieurs méthodes sont possibles :
– Les lésions ulcérées et bourgeonnantes sont nettoyées pour enlever toute croûte. Des empreintes peuvent être réalisées par apposition de lame porte- objet directement sur la surface de la lésion. Des empreintes peuvent également être réalisées à partir de pièces de biopsies qui seront délicatement appliquées contre les lames de verre. Des « écrasi » peuvent également être réalisés à partir de produit de curettage.
– Les lésions non ulcérées et nodulaires peuvent être incisées par une lame de bistouri pointue (l’incision doit être superficielle pour éviter un saignement excessif) ; ainsi un échantillon peut être prélevé par grattage de la base de l’incision par une lame ou par une curette.

Confection des étalements

L’étalement est un temps capital de la cytologie. Ce geste simple doit être parfaitement maîtrisé pour éviter un écrasement des cellules ou des amas en plusieurs couches peu interprétables. Les étalements doivent être réalisés sur des lames propres et sèches sans trace d’empreintes digitales.
– Étalement à l’aide du matériel de prélèvement : le produit de grattage est déposé en frottant le bistouri sur une lame.
– Les écrasi sont réalisés à partir d’un fragment tissulaire écrasé ou étiré entre deux lames : le matériel est déposé sur une première lame, une seconde lame est appliquée dessus par pression verticale ferme puis les deux lames sont séparées horizontalement.
– Empreinte ou apposition : Elle est obtenue par application sur lame d’un fragment biopsié avant sa fixation. La réalisation d’une apposition n’entraîne aucune déformation des cellules.

La qualité des étalements conditionne la qualité de l’étude morphologique. Les frottis hémorragiques, trop épais ainsi que les superpositions cellulaires peuvent gêner l’interprétation microscopique. L’étalement forcé des prélèvements sur lame de verre entraine un écrasement des cellules donnant un aspect de noyaux broyés au microscope.

Fixation des étalements

Ce sont les protéines de la sérosité, enserrant les cellules, qui favorisent l’adhésion de celles-ci à la lame. Il est primordial de fixer les lames préparées immédiatement pour prévenir la dénaturation et l’autolyse des protéines. En l’absence de fixation, les cellules s’altèrent très vite, perdent leurs caractéristiques morphologiques et deviennent ininterprétables. La fixation se fait généralement par séchage à l’air ou par l’utilisation de solutions fixatrices. Elle est déterminée par le choix des colorations employées dont elle conditionne la qualité.
– Pour une coloration au MGG ou au Diff Quik® : Séchage à l’air libre et à température ambiante, par agitation manuelle ou séchage avec un séchoir à cheveux en position « air froid » ; le séchage des étalements en les chauffant est à éviter car il peut entrainer une détérioration des structures cellulaires
– Pour une coloration au Papanicolaou : Immersion immédiate des lames encore humides dans un flacon d’éthanol à 95° pendant au moins 1 heure.

Un défaut de fixation est perceptible après la coloration par le manque de détails cellulaires associé à une pâleur, une éosinophilie nucléaire et cytoplasmique.

Coloration
Les colorations standard colorent un type de charge. Elles permettent de voir la morphologie de la cellule, la position du noyau et sa forme. Selon les conditions particulières de chaque laboratoire, une même méthode peut avoir des variantes de procédés techniques, de formules de colorant, de concentrations des solutions, de temps, etc. Plusieurs colorations ont été utilisées pour le cytodiagnostic de Tzanck. La coloration au May-Grünwald-Giemsa (MGG) ou au Giemsa seul est la plus communément utilisée, le papanicolaou et l’hématoxyline-éosine (HE) sont de très bonnes alternatives et permettent une bonne visualisation des détails nucléaires, mais leur technique est longue et difficile de réalisation dans un cabinet, nécessitant un laboratoire de cytologie.

D’autres colorations utilisées comprennent le Diff-Quick®, le bleu de toluidine et le bleu de méthylène qui permettent une coloration facile et rapide des lames.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
1. RAPPELS SUR LA CYTOLOGIE ET LE TEST DE TZANCK
2. TECHNIQUE DU CYTODIAGNOSTIC DE TZANCK
3. AVANTAGES ET INCONVENIENTS DU CYTODIAGNOSTIC
4. INDICATIONS DU CYTODIAGNOSTIC DE TZANCK
4.1.Dermatoses bulleuses
4.2.Dermatoses infectieuses
4.3.Génodermatoses
4.4.Lésions tumorales
4.5.Dermatoses granulomateuses
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
METHODOLOGIE
1. Cadre d’étude
2. Type et durée d’étude
3. Population d’étude
4. Recueil de données
5. Déroulement de l’étude
6. Traitement et analyse des données
7. Aspects éthiques
RESULTATS
1. Aspects épidémiologiques
2. Aspects cliniques
2.1.Durée d’évolution
2.2.Itinéraire thérapeutique
2.3.Signes fonctionnels
2.4.Signes physiques
3. Cytodiagnostic de Tzanck
4. Paraclinique
4.1.Biopsie cutanée
4.2.Immunologie
4.3.Sérologie rétrovirale
5. Diagnostic étiologique
5.1.Dermatoses bulleuses
5.2.Dermatoses infectieuses
5.3.Les génodermatoses
DISCUSSION
1. Limites
2. Aspects épidémiologiques
3. Aspects cliniques
4. Cytodiagnostic de Tzanck
4.1.Les dermatoses bulleuses
4.2.Infections du groupe des herpes virus
4.3.Maladie de Hailey-Hailey
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES

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