psychiatrie et spiritualité 

GÉNÉRALITÉS

contexte historique

Historiquement, il y a des raisons à ce que des questions d’ordre religieux et ou spirituel ne soient pas prises en compte par une médecine exigeante aspirant à délaisser l’irrationnel au profit du rationnel.
La psychiatrie a progressivement émergé de sa carapace d’histoire et d’un empirisme lié à la nature particulière de la maladie mentale. Les écoles médicales de l’antiquité, essentiellement grecques avaient amorcé la connaissance clinique en refusant le fatalisme de l’époque. Car bien que de nombreuses découvertes indiquent que des pratiques médicales existaient en Mésopotamie et en Egypte notamment dès le troisième millénaire avant J-C, c’est Hippocrate qui jette en quelque sorte les bases de la médecine moderne, faites de sémiologie, de physiologie et de thérapeutique empirique.
Le millénaire suivant était envahi par les croyances surnaturelles, la démonologie qui était un outil qui expliquait les troubles de l’esprit. En occident, les interdits religieux qui concernaient la connaissance du corps, étaient à l’origine du retard de la médecine par rapport aux progrès qu’elle connaissait dans le reste du monde (la médecine de la civilisation arabe par exemple). [4]
Au XVe siècle, on a commencé à voir les maladies mentales comme ‘’ naturelles’’ avec une objectivation de leurs aspects cliniques, la création des premières institutions consacrées aux malades mentaux.
Avec le début du XXe siècle, on a connu l’avènement de la description des mécanismes de l’inconscient et de leurs rôles dans la compréhension du fonctionnement du psychisme, avec Freud (1856- 1939) qui était à l’origine de la psychanalyse.
La découverte historique qui objective le rôle du neurone comme étant l’unité fondamentale du cerveau grâce aux travaux de Jan Evangelista Purkinje (1787-1869) et de l’anatomopathologiste et neuroscientifique Santiago Ramon y Cajal (1852- 1934), a été le point de départ des sciences du cerveau, suivie de la synthèse de la chlorpromazine en 1950.

Définitions

Spiritualité

Le mot spirituel prend sa source du latin « spiritus », soit le souffle : le souffle vital, le principe de la vie, l’essence de la vie. C’est un concept qui fait référence aux questions de sens et aux valeurs, à ce qui relie la personne au monde et la guide au delà de l’humain comme être physique, social et psychosocial.
La spiritualité est un concept variable, qui connait un changement permanent, puisqu’il s’agit d’un processus personnel, un espace subjectif où chacun construit le sens de sa vie, et cherche des réponses sur son existence et la présence éventuelle d’une vie après la mort.
Elle renvoie à cet espace intérieur où s’élaborent de façon dynamique la quête de sens, les croyances et les sources d’espérance. Elle se traduit entre autres par le rapport de la personne avec la transcendance, avec ce qui donne un sens ou une direction à sa vie et avec les différentes formes d’engagement et de pratiques qui en découlent. [1]
Il y a des auteurs qui considèrent la spiritualité comme une démarche cognitive de l’homme, en terme de la recherche d’un sens et d’un but pour son existence. Une recherche de sens qui peut être basée sur des croyances, religieuses ou non, ou sur une attitude philosophique, morale, artistique ou scientifique.
Dans l’approche philosophique, elle rejoint le concept de l’opposition de la matière et de l’esprit ou encore de l’intériorité et de l’extériorité : « délimiter la notion de spiritualité et se demander à quels champs de signification elle se rattache , la notion d’âme , l’opposition matière et esprit , l’opposition intériorité et extériorité. »[8]
Des études se sont intéressées à étudier les moyens d’expression de la spiritualité.
Les domaines concernés comportent le soutien religieux, les valeurs et croyances, le pardon, les pratiques religieuses en privé, l’engagement, les expériences spirituelles journalières, les préférences religieuses ou les pratiques institutionnelles.
En outre, certains auteurs parlent d’une spiritualité indépendante de la foi en Dieu, « la notion de spiritualité est neutre par rapport à celle de foi en Dieu. »
Pour l’OMS : « On qualifie de “spirituels” les aspects de la vie humaine liés aux expériences qui transcendent les phénomènes sensoriels. Ce n’est pas la même chose que le – religieux -, quoique pour de nombreuses personnes la dimension spirituelle de leur vie comporte un élément religieux. L’aspect spirituel de la vie humaine… est souvent perçu comme ayant un rapport avec le sens et le but de l’existence… »

Religion

La religion est l’ensemble des croyances, sentiments, dogmes et pratiques qui définissent les rapports de l’être humain avec le sacré ou la divinité. Une religion particulière est définie par les éléments spécifiques à une communauté de croyants : dogmes, livres sacrés, rites, cultes, sacrements, prescriptions en matière de morale, interdits, organisation, etc.
Le mot religion prend sa source du latin « religare » qui signifie : qui attache ou relie, donc qui relie l’humain à la divinité. Koening et ses collègues (2002) décrivent les caractéristiques de la religion comme étant un système organisé, centré sur des pratiques et des comportements, et s’appuyant sur une doctrine. Pour Fallot (1998) il s’agit d’une adhésion aux croyances et aux pratiques d’une institution religieuse, influencée par l’ethnie et la culture. Dans cette perspective, la dimension religieuse est l’expression de la vie spirituelle. Mais une personne peut vivre une expérience spirituelle sans association avec une religion quelconque.
Selon le dictionnaire des religions, le mot religion est dérivé du latin « religio » (ce qui attache ou retient, lien moral, inquiétude de conscience, scrupule).
D’après Cicéron, ça vient de « relegere » (relire, revoir avec soin) dans le sens de « considérer soigneusement les choses qui concernent le culte des dieux ». Il s’agit du « fait de s’occuper d’une nature supérieure que l’on appelle divine et de lui rendre un culte.»[14]
Donc la religion est considérée comme tout ce qui a trait avec la relation entre Dieu et l’humanité.

Nuances entre le spirituel et le religieux

Le terme « spirituel » est plus ample que le terme « religieux » qui dénote l’aspect institutionnel et communautaire, les contenus partagés avec une tradition auquel le sujet appartient (Breitbart, 2005).alors que la spiritualité n’est pas réductible à une catégorie du penser. Elle est l’expression même de la vie, de toute vie ; elle est consubstantielle à la nature humaine, introduite autour les questions existentielles de sens, d’espérance et de transcendance.
La religion fait référence au concept du « sacré », personnes ou événements considérés comme en dehors de l’ordinaire, et donc qui méritent de la vénération.
La religion a été définie classiquement, comme un système de croyances et de pratiques sociales telles que les rites [17], un système de symboles qui formule des conceptions d’ordre général. C’est-à-dire, elle comporte une dimension sociale et collective importante [17] et implique l’appartenance à une organisation, avec des dogmes et des symboles transmis et partagés avec une communauté. Alors que la spiritualité est considérée comme la partie personnelle et subjective de la vie religieuse [15], l’expérience individuelle de cette recherche du sacré.

spiritualité et psychisme

Spiritualité et neurosciences

La neurothéologie est une discipline qui a vu le jour dans les années 1990, et qui a pour intérêt de mettre en exergue les mécanismes mentaux qui poussent l’individu à croire en la présence de Dieu [19].
Dans les expériences en rapport avec la transcendance, les neurosciences visent à comprendre ce qui se passe dans le cerveau pendant l’expérience avec une réalité transcendante. Des écrits sur ce sujet existent. Parmi eux The « God » Part of the brain [20], The God Gene.
Andrew Newberg, dans son livre Pourquoi Dieu ne disparaîtra pas [22] a fait des observations sur des personnes en méditation transcendantale par le biais de l’imagerie cérébrale fonctionnelle. D’après ce travail, il a élucidé qu’un certain nombre d’expériences mystiques, comme le sentiment de fusion avec l’absolu, d’union avec Dieu, ou l’éveil, peuvent être expliquées par un état de disposition particulière du cerveau.
Il a utilisé également une technique d’imagerie cérébrale, le SPECT (Single Photon Emission Computed Tomography) pour mesurer l’activité cérébrale d’un certain nombre de méditants tibétains. Au terme de leur méditation ou de leur prière, lorsqu’ils ressentent une sorte de « fusion avec l’univers, de disparition des limites entre elles mêmes et le monde environnant », il a été observé une augmentation d’activité au niveau du lobe préfrontal (impliqué dans l’attention) , avec une baisse d’activité dans le lobe pariétal supérieur postérieur ( impliqué dans l’orientation du corps dans l’espace et la perception du « soi »).

Spiritualité et personnalité

Une étude [23] s’intéressant à la relation entre la religiosité et le modèle de 16 facteurs de personnalité de Cattell a conclut que l’attitude positive envers la religion est associée à des scores élevés sur cinq des facteurs de personnalité qui sont : le facteur G (conscience et respect des conventions), le facteur I (sensibilité) et facteur Q3 (perfectionnisme, autodiscipline). La religiosité est aussi associée aux scores bas en facteur E (soumission), facteur F (sérieux, retenue) [23]
Pour certains auteurs (Emmons, 2005) [24] et (Snyder, Sigmon, & Feldman, 2002) [25], la religion apporte un sens à la vie des individus en leur permettant d’avoir des objectifs et des systèmes de valeurs [24] ; (Roccas, 2005). [26] Une étude menée par Francis et Jackson (2003) [27] avait pour but d’objectiver les liens entre la religiosité et la dimension de névrotisme d’Eynseck. Dans cette étude, ils cherchaient les liens entre la religiosité et les sept composantes du névrotisme: basse estime de soi, mécontentement, anxiété, dépendance, hypocondrie, culpabilité et obsessionnalité. Ils ont conclu qu’il n’y a pas de corrélation significative entre la dimension globale de névrotisme et la religiosité. En outre, lors de l’étude des sept composants séparément, ils trouvent une corrélation positive entre religiosité et culpabilité, ainsi qu’une corrélation négative entre religiosité et mécontentement

Spiritualité et adaptation psychologique

Une étude réalisée à propos de 1607 personnes âgées de 60 ans et plus, montre que plus les difficultés de santé augmentent, la place de la religion dans la vie devient plus importante.
L’implication religieuse dans ce contexte est interprétée comme une stratégie d’adaptation pour faire face aux difficultés de santé.
Koening a conclu dans ses études que la pratique religieuse favorise la diminution du besoin d’alcool et de drogue, en rendant les personnes moins vulnérables au stress et en augmentant leurs capacités d’adaptation.

psychiatrie et spiritualité

L’intégration d’une dimension spirituelle dans la psychiatrie prend en compte l’Homme dans sa totalité existentielle, c’est-à-dire physique, psychique et spirituelle.
Nous verrons que pour de nombreux scientifiques, mais également dans un raisonnement holistique, la spiritualité est une composante de la personne. Il devient donc de moins en moins cohérent, logique ou scientifique de ne pas inclure cette dimension quand on entre en interaction avec un patient dans une approche qui se voudrait humaine et globale, et notamment en psychiatrie. Comprendre le rôle de la religion et de la spiritualité est donc important pour la pratique psychiatrique. La mise en oeuvre de l’éducation formelle et la formation sur les questions spirituelles fait toutefois défaut.
Une étude pilote d’un cours sur l’interface entre la spiritualité, la religion et la psychiatrie [86] a été faite dans le but d’accroitre la compréhension des questions spirituelles et religieuses par les résidents de psychiatrie et de leur faciliter l’abord de ces questions dans leur travail clinique. Un cours de 6 heures, obligatoire, a été mis en place pour les résidents en psychiatrie de troisième et quatrième année à l’Université de la Colombie Britannique. Les séances d’enseignement se composaient de modules didactiques et de cas cliniques.
Le questionnaire d’impact du cours, une échelle de Likert en 20 points, a été utilisé pour évaluer les six domaines suivants : attitude spirituelle personnelle, attitude pratique professionnelle, psychiatrie transpersonnelle, compétences, changements d’attitude envers la religion et spiritualité, et changement dans les modes de pratique.
Le questionnaire a été administré à deux groupes de résidents et le feed-back qualitatif a été obtenu par commentaires écrits. De cette étude, il en est sorti que les résidents qui ont participé aux cours avaient une plus grande connaissance du domaine et avaient plus d’aptitude à parler de ce domaine avec leurs patients, et ainsi de répondre convenablement à une demande spirituelle de la part de leurs patients. Elle suggère alors l’amélioration dans les scores de compétences pour les résidents en psychiatrie.
Pour examiner la relation entre les caractéristiques religieuses des médecins et de leurs attitudes et comportements en matière de religion et spiritualité, une enquête transversale [87] conduite sur un échantillon aléatoire stratifié de 2000 médecins praticiens américains de toutes les spécialités a été menée e 2007 par Curlin et ses collaborateurs. Les variables prédictives ont été la religion personnelle, la spiritualité et l’appartenance religieuse. Les variables principales étaient la pratique du dialogue d’ordre spirituel et la prière avec les patients.
L’étude a montré que (91%) des médecins disent qu’il est approprié de discuter de religion et de spiritualité avec leurs patients si le patient soulève la question. Mais là où le doute réside, c’est dans le moment approprié pour s’informer sur la religion et la spiritualité des patients, car 45% pensent que c’est toujours inapproprié de soulever la question en tant que praticien.
Cette étude a aussi révélé que les médecins qui se considèrent comme plus spirituels ou religieux, en particulier ceux qui sont protestants, sont significativement plus susceptibles de soutenir les différentes façons d’aborder la religiosité dans la consultation. L’étude en a conclu alors que les différences d’abord de la religion / spiritualité sont profondément enracinées chez les médecins.
Une étude faite en 2000 par Curlin et ses collaborateurs, rapportée par Eichelman [88] sur les médecins américains et leurs croyances, ainsi que l’intégration de cela dans leur pratique clinique a fait usage d’un questionnaire d’auto-évaluation. L’étude a démontré un certain assouplissement de ce qui a été perçu comme une posture antireligieuse par la psychiatrie.
Ce changement d’attitude pourrait même indiquer une intégration progressive de la religion et de la spiritualité dans les soins psychiatriques.
Une étude menée au royaume uni [41] regroupant les membres de la Faculté de gérontopsychiatrie en 2002 avait pour objectif d’étudier les attitudes professionnelles et leurs relations avec les valeurs spirituelles dans la mise en route de soins par les gérontopsychiatres.
Les membres avaient été invités à remplir un questionnaire semi-structuré de 21 questions. Les analyses quantitatives et qualitatives ont été menées sur les réponses reçues. Avec un taux de réponses de 46%, l’étude a été significative. En effet, la majorité des répondants (92%) reconnaissaient l’importance de la dimension spirituelle dans les soins de la personne âgée, ayant des besoins spécifiques en santé mentale. Un quart des répondants semblaient considérer le fait d’orienter les patients vers un service d’aumônerie pour répondre à leurs besoins spirituels.
Cette étude a montré à quel point les opinions varient quant à savoir si l’abord de la spiritualité devrait être largement diffusé aux personnes âgées présentant des troubles psychiatriques ou non.
Dans un but de comparer les pratiques, attitudes et attentes des praticiens et des patients concernant la spiritualité et la religion, une étude menée sur des psychiatres a été menée par Baetz et ses collaborateurs au Canada [42]. Tous les médecins psychiatres canadiens inscrits à l’Ordre des Médecins et Chirurgiens du Canada ont reçu une fiche d’enquête. Ils étaient 2890, et le taux de réponse était de 42%. Les patients ont été recrutés en ligne et dans une clinique locale de santé mentale.

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Table des matières

INTRODUCTION 
PATIENTS ET MÉTHODES 
I. Participants de l’étude
1. Type de l’étude
2. L’échantillon
3. Le questionnaire
4. Le déroulement de l’enquête
5. Considérations éthiques
II. Méthode statistique
RÉSULTATS 
I. Analyse uni-variée
1. Résultats chez les patients
2. Résultats de l’étude sur les praticiens
II. Analyse bi-variée (corrélations)
1. Les patients
2. Les praticiens
DISCUSSION 
I. GÉNÉRALITÉS
1. contexte historique
2. Définitions
3. spiritualité et psychisme
4. psychiatrie et spiritualité
II. DISCUSSION DES RESULTATS
1. Discussions des résultats chez les patients
2. Discussions des résultats chez les praticiens
CONCLUSION 
ANNEXES 
RÉSUMÉS 
BIBLIOGRAPHIE

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