Propriétés spectroscopiques optiques et magnétiques de Yb3+ dans Y2SiO5

Les ions de terres rares paramagnétiques (appelés ions Kramers) donnent accès à un degré de liberté supplémentaire par rapport aux ions non-Kramers : les transitions de spin électronique. L’énergie correspondante à ces transitions se situe typiquement entre 0.1 et 20 GHz pour des champs magnétiques modérés (≋ 100 mT), contrairement aux transitions de spin nucléaire que peuvent avoir certains ions non-Kramers qui sont plutôt de l’ordre du MHz  . Leur structure électronique pourrait ainsi permettre la réalisation d’interfaces quantiques entre le domaine optique et micro-onde. Couplés avec des circuits supraconducteurs capables de générer des qubits et de réaliser des opérations avec [185, 186], les ions Kramers pourraient permettre la réalisation de systèmes quantiques hybrides et ainsi développer des réseaux de communication quantiques [187, 188]. De nombreux résultats publiés ces dernières années témoignent du récent engouement à l’étude des ions de terres rares paramagnétiques, tels que l’erbium ou bien le néodyme pour l’information quantique [44, 60]. Parmi eux, les espèces ayant un spin nucléaire non nul présentent l’intérêt supplémentaire de pouvoir stocker des états quantiques plus longtemps [30].

L’ion ytterbium est également une terre rare paramagnétique. Bien que très peu de travaux aient été réalisés sur cet ion en spectroscopie haute résolution et cohérente [148, 90], son étude présente un grand intérêt car il combine plusieurs critères favorables aux applications mentionnées ci-dessus. Tout d’abord, la longueur d’onde optique de sa transition d’intérêt se situe à 980 nm, une région dans laquelle il est facile de trouver des diodes laser convenables. De plus, Yb3+ possède les deux isotopes stables ayant des spins nucléaires non nuls : 171Yb3+ (I = 1/2) et 173Yb3+ (I = 5/2). Il est important de mentionner que 171Yb3+ est le seul ion de terre rare paramagnétique pourvu d’un spin I = 1/2, lui conférant une structure hyperfine d’une grande simplicité permettant de faciliter l’excitation sélective de certaines transitions entre niveaux hyperfins des multiplets fondamentaux et excités.

Conditions expérimentales

Échantillons utilisés

Les échantillons étudiés dans ce travail proviennent d’une boule de Y2SiO5 monocristallin dopé à 0.005% atomique par rapport aux ions Y3+, synthétisée au laboratoire par la méthode de Czochralski [170]. Les échantillons sont orientés selon (b, D1, D2). Ceux utilisés pour la spectroscopie optique mesurent (6.36, 4.77, 5.06) mm et sont polis (qualité optique) sur toutes les faces. Un autre échantillon de taille (7.14, 1.41, 5.97) mm a été utilisé pour mesurer l’absorption selon D1 sur le site 1, car le cristal absorbe beaucoup selon cette polarisation de la lumière. Les échantillons utilisés pour la résonance paramagnétique électronique mesurent (1.56, 2.23, 2.02) mm.

Spectroscopie optique

Les spectres d’absorption ont été obtenus en utilisant un spectromètre Varian Cary 6000i. La résolution des spectres est de 0.1 nm. Pour les mesures de fluorescence, un laser Titane-Saphire Coherent 829 pompé par un laser Coherent Verdi G10 a été utilisé pour exciter les ions Yb3+. Un monochromateur SpectraPro 750 de résolution 1 nm ainsi qu’une photodiode InGaAs ont été utilisés pour la détection. Les mesures des temps de vie radiatifs ont été faites en excitant les ions Yb3+ avec un oscillateur paramétrique optique (OPO Ekspla NT342B-SH) pulsé adaptable en longueur d’onde avec des durées de pulses de 6 ns. La détection se fait avec un monochromateur Jobin-Yvon HR250 ainsi qu’une photodiode InGaAs.

Pour la détermination optique du tenseur g dans l’état excité optique 2F5/2 (0), l’échantillon est placé dans un cryostat à hélium liquide dont la température est contrôlée par une vanne pointeau, agissant sur le flux d’hélium liquide vers la chambre d’échantillon. Le cristal est placé entre deux aimants permanents (NdFeB) générant un champ magnétique de 217 mT avec une inhomogénéité de 10% le long de l’échantillon dans la direction du faisceau laser, mesuré par un Gaussmètre à effet Hall (TM GN-206 ). L’échantillon est attaché à un piédestal solidaire d’un moteur Attocube rotatif ANRv51 contrôlé par ordinateur. L’angle de rotation est calibré en utilisant la réflexion d’un laser HeNe sur l’échantillon à travers une fenêtre transversale du cryostat. Les spectres de transmission sont mesurés de la même façon que précédemment.

Spectroscopie RPE

Les spectres de résonance paramagnétique électronique ont été réalisés à 9 K avec un appareil Bruker ELEXSYS E500 ainsi qu’une sonde haute sensibilité en cavité bande X.

Spectroscopie optique

Absorption, émission, temps de vie

Dans Y2SiO5, les multiplets 2F7/2 et 2F5/2 sont constitués en respectivement 4 et 3 niveaux de champs cristallins (ou niveaux Stark),  Afin d’étudier la structure de ces multiplets, des mesures d’absorption et d’émission à basse température ont été réalisées. Sur le spectre d’absorption pris à 10 K , nous pouvons voir que les transitions optiques 2F7/2 (0) → 2F7/2 (0,1,2) sont résolues.  L’attribution des raies d’absorption aux différents sites occupés par les ions Yb3+ a été possible grâce à des mesures d’émission de fluorescence (voir la suite). Sur le spectre d’absorption, seules les transitions de plus basses energies (2F7/2 (0) → 2F7/2 (0)) sont artificiellement élargies par la résolution de l’appareil (0.1 nm). D’après nos mesures ultérieures ainsi que d’autres résultats présents dans la littérature [90, 91], nous pouvons supposer que ces transitions sont élargies de manière inhomogène. Les autres transitions, en revanche, semblent être élargies de manière homogène. Ces transitions, à l’exception de 2F7/2 (0) → 2F5/2 (1) du site 2 à 10505 cm⁻¹ , ont des largeurs situées entre 15 et 30 cm⁻¹ . Dans d’autres échantillons plus concentrés en Yb3+ (5% et 0.5% [189]), certaines structures supplémentaires sont visibles notamment autour de 10550 cm⁻¹ . Ces structures ne sont pas visibles ici. On ne voit également pas de raies satellites autour des transitions 2F7/2 (0) → 2F5/2 (0) comme celles décrites dans [190].

La mesure des déclins de fluorescence nous permet de déterminer le temps de vie optique des niveaux 2F5/2 (0) dans les deux sites. Ces valeurs sont de 0.87 ms pour le site 1 et de 1.3 ms pour le site 2 quelque soit la raie d’absorption du site choisie pour exciter les ions Yb3+. Aux faibles concentrations utilisées ici, il est peu probable que des transferts d’énergie entre Yb3+ se fassent. De plus, l’écart d’énergie entre les deux multiplets 2F7/2 et 2F5/2 (≋ 10 000 cm⁻¹ ) est plus de 10 fois supérieur à l’énergie de coupure des phonons dans Y2SiO5 (≋ 960 cm⁻¹ [190]), rendant des processus de relaxation multi-phonons peu probables. On peut donc supposer qu’il n’y a pas, ou très peu de processus non radiatifs [171, 106].

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Table des matières

Introduction générale
I Les terres rares
I.1 Introduction
I.2 Chimie des terres rares
I.3 Niveaux d’énergies 4f, Hamiltoniens
I.4 Hamiltonien de spin
I.4.1 Interaction Zeeman, facteur g
I.4.2 Interaction hyperfine
I.4.3 Autres termes
I.5 Largeurs des raies
I.5.1 Largeur homogène et temps de cohérence
I.5.2 Élargissement homogène
I.5.3 Largeur inhomogène
I.6 Interactions spin-phonons
I.6.1 Absorption et émission d’un phonon : le processus direct
I.6.2 Processus à deux phonons résonants : le processus Orbach
I.6.3 Processus à deux phonons non-résonants : le processus Raman
I.6.4 Modélisation des processus spin-phonons pour les ions Kramers
I.7 Interactions spin-spin
I.8 Transitions d’horloges : ZEFOZ
II Dispositifs expérimentaux et matériaux
II.1 Spectroscopie optique haute résolution
II.1.1 Caractéristiques du laser
II.1.2 Cryogénie
II.1.3 Génération et contrôle des impulsions optiques
II.1.4 Contrôle de la fréquence et des scans du lasers
II.1.5 Détection
II.1.6 Creusement de trous spectraux
II.1.7 Echos de photons
II.2 Spectroscopie RPE
II.2.1 Introduction
II.2.2 RPE continue
II.2.3 RPE pulsée
II.3 Résonance magnétique détectée optiquement
II.4 Matériau
II.4.1 Y2SiO5
II.4.2 L’ion Yb3+
III Propriétés spectroscopiques optiques et magnétiques de Yb3+ dans Y2SiO5
III.1 Introduction
III.2 Conditions expérimentales
III.2.1 Échantillons utilisés
III.2.2 Spectroscopie optique
III.2.3 Spectroscopie RPE
III.3 Spectroscopie optique
III.3.1 Absorption, émission, temps de vie
III.3.2 Spectroscopie haute résolution
III.3.3 Comparaison aux autres terres rares
III.4 Spectroscopie magnétique
III.4.1 Spectre RPE
III.4.2 Détermination des tenseurs g
III.4.3 Isotopes à spin I>0
III.5 Détermination optique des tenseurs g de l’état excité optique 2F5/2
III.6 Raffinement des tenseurs hyperfins A de 171Yb3+
III.7 À la recherche de transitions d’horloges
III.7.1 Structure hyperfine de 171Yb3+ et 173Yb3+
III.7.2 Algorithme de recherche
III.7.3 Résultats pour 171Yb3+
III.8 Conclusions
III.9 Points-clefs
Conclusion générale

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