PROFIL PHARMACO-EPIDEMIOLOGIQUE DE L’AUTOMEDICATION

Le médicament et la médication

Définition officielle du médicament L’article 55, Livre III, du Code de la Santé Publique malgache définit le médicament comme étant « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines…ainsi que tout produit destiné à être administré à l’homme en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier des fonctions organiques » (22).
Catégories de médicaments Lors de leur mise sur le marché, la majorité des médicaments, en raison de leur toxicité potentielle, sont classés sur des listes (liste I, liste II ou liste des stupéfiants) qui réglementent leur prescription. Certains médicaments, considérés comme bien tolérés, peuvent ne pas être placés sur une liste, ils sont dits hors liste. La durée maximale de prescription des médicaments de la liste I ou II ne peut pas dépasser 12 mois. La première délivrance des médicaments doit intervenir dans les trois premiers mois qui suivent sa prescription. Le pharmacien ne peut délivrer qu’une quantité de médicaments correspondant à un mois de traitement, sauf pour les contraceptifs (3 mois). La différence entre les listes I et II concerne essentiellement les modalités de renouvellement de la prescription par le malade. Le renouvellement des médicaments de la liste I exige la mention expresse du médecin qui précise le nombre de renouvellement ou la durée du traitement. Sauf mention contraire du médecin, celui des médicaments de la liste II demeure possible durant les 12 mois. L’étiquetage des médicaments de la liste I se caractérise par la présence d’une lisière rouge et celui des médicaments de la liste II par une lisière verte. La durée de prescription des hypnotiques et des anxiolytiques a été modifiée : 2 semaines pour le triazolam, 4 semaines pour la plupart des hypnotiques et 12 semaines pour les anxiolytiques. La liste des substances stupéfiantes regroupe les substances toxicomanogènes. Leur étiquetage se caractérise par la présence d’une lisière rouge. Les médicaments classés stupéfiants sont désormais prescrits sur les mêmes ordonnances, dites sécurisées, que les autres médicaments, en précisant la posologie en toutes lettres, et en respectant la durée de prescription. La durée maximale de prescription ne peut pas dépasser 7 jours pour les formes parentérales, 14 jours pour les préparations orales (autres que le sulfate) et 28 jours pour les préparations orales de sulfate de morphine. Le pharmacien délivre les médicaments prescrits, garde un duplicata de l’ordonnance et inscrit sur un registre les médicaments dispensés. Une nouvelle prescription de stupéfiant, pendant la période couverte par une prescription antérieure, nécessite la mention du médecin s’il s’agit d’un complément au traitement précédent (23)(24)(25).
Définition de la médication La médication, empruntée du latin medicatio ou « emploi d’un remède », se définit comme étant le fait d’administrer des remèdes à quelqu’un, ou l’ensemble des remèdes qui constituent le traitement d’une maladie (26). En tenant compte de celle du médicament, le fait d’administrer un ou plusieurs médicament(s) à quelqu’un à des fins curatives, préventives ou en vue d’établir un diagnostic médical pourrait être proposé comme définition de la médication. Il s’agit à la fois d’un comportement et d’une catégorie de médicaments.

Avantages de l’automédication

     Selon l’OMS, l’automédication permet un accès direct et rapide de la population au traitement. Chaque individu peut avoir un rôle actif concernant leur propre santé ainsi qu’une auto-dépendance dans la prévention ou le soulagement des troubles mineurs ou des maladies. Au niveau communautaire, elle permet d’épargner les rares ressources médicales d’être gaspillées pour des troubles mineurs, de baisser les coûts des fonds communautaires dédiés aux programmes concernant les soins de santé, incluant le système de remboursement, et de réduire les absentéismes au travail causés par les symptômes mineurs (41). Baumelou et Coulomb considèrent l’automédication comme étant un des éléments importants, au même titre que l’apprentissage de la prévention primaire, de la responsabilisation du citoyen sur ses problèmes de santé. Elle participe à la maturation du patient, nécessaire à la qualité des soins. Dans les pays anglo-saxons, l’accent est mis sur la responsabilisation du patient, considéré comme apte à se traiter pour des pathologies mineures. L’automédication représente également un élément important d’une politique économique responsable du médicament (12). L’automédication présente un impact positif sur les dépenses publiques (53). Pouillard considère l’automédication comme étant un levier non négligeable dans le cadre d’une politique de maîtrise des coûts de la santé par détermination du choix des priorités : qualité des soins, possibilités financières, favorisées par ce seul motif de ne plus rembourser que sur des critères d’efficacité reconnus et non pour des motifs politiques (34). Selon l’Association Européenne des Spécialités pharmaceutiques Grand Public (AESGP), l’automédication responsable réduit considérablement les dépenses de l’économie nationale dédiées aux systèmes de la sécurité sociale et aux coûts des soins de santé. Elle apporte une contribution importante à la réduction des charges financières des systèmes de soins de santé (54). L’achat d’un médicament d’automédication n’est pas remboursé par l’assurance maladie, et il peut aussi éviter le remboursement d’une consultation médicale (37). Les gouvernements du monde entier y trouvent ainsi un moyen de transférer le coût des soins de santé aux consommateurs (55). Ils ne pèsent pas sur les dépenses de la sécurité sociale (11). Le fait d’être accessible directement sans ordonnance peut constituer en soi un élément du service médical. Il permet à un patient d’accéder sans délai à un traitement, pour une pathologie bénigne, ne nécessitant pas une expertise professionnelle. La reconnaissance de la responsabilité de chacun envers sa propre santé et la prise de conscience que les professionnels ne demeurent pas toujours nécessaires pour des maladies mineures ont contribué à cette opinion (41). Dans un contexte de panne de l’innovation pour les producteurs, l’automédication représente une opportunité de recycler des médicaments plus ou moins anciens, plus “à la mode”, et/ou déremboursés pour Service Médical Rendu insuffisant et, en conséquence, moins prescrits (56).

L’automédication en Afrique

     Sallam et al ont étudié la pratique de l’automédication chez les adultes s’approvisionnant dans les pharmacies d’Alexandrie (Egypte). Leur travail constate plusieurs aspects de l’usage irrationnel de médicaments, une prévalence élevée de l’automédication (81,1%) ainsi qu’une insuffisance de connaissance concernant les médicaments achetés (4). Une étude concernant le mésusage des médicaments sur prescription et les OTC a été réalisées à Cape Town (Afrique du Sud). Ce travail suggère de développer des protocoles au niveau des soins de santé primaires pour la détection et la gestion des mésusages de médicaments. Cette étude souligne l’intérêt d’un débat sur le changement de statut des substances contenant de la codéine (14). Arikpo a étudié la pratique de l’automédication dans les communautés rurales de Nigeria. Son étude constate une prévalence de 99,4% et suggère de rehausser les niveaux de soins de santé dans ces communautés (76). Konaté rapporte dans sa thèse que 63% des clients ont acheté des médicaments sans ordonnance dans les officines de la ville de Sikasso (Mali). Son étude soulève également l’absentéisme des pharmaciens, et que 81,66% des médicaments achetés en automédication ont été délivrés par les agents de comptoir (77). Une étude réalisée dans la Commune Urbaine de Lomé (Togo) rapporte que 93% des consommateurs interrogés ont reconnu avoir pratiqué l’automédication. Cette étude suggère de canaliser l’automédication afin de bénéficier de ses avantages (13). Suleman et al ont effectué une enquête auprès des ménages de la ville d’Assendabo (Ethiopie). Leur travail rapporte que la prévalence de l’usage de médicaments modernes et de remèdes traditionnels en automédication s’élève à 39%. Selon leur étude, le manque d’informations de la population concernant les médicaments ainsi que l’accessibilité aux médicaments OTC sans encadrement d’un professionnel de santé contribueraient au recours à l’automédication (78).

Les antipaludiques

     Un peu moins des deux-tiers des anti-protozoaires (64,7%), incluant les antipaludiques, a été délivré dans les pharmacies. Dès lors, ces médicaments ont été délivrés sans ordonnance malgré leur appartenance à la liste I. L’usage irrationnel des antipaludiques, incluant leur usage sans prescription qui manque de discernement, compte parmi les causes de la sélection de résistance (87). La chloroquine cp représente 1,6% des antipaludiques utilisés en automédication. La sulfadoxine – pyriméthamine cp demeure l’antipaludique le plus utilisé (69,2%). Cette dernière demeure facilement accessible pour les ménages car elle ne coûte en moyenne que 500Ar (≈0,26USD). Elle reste largement utilisée alors que la capitale ne compte pas parmi les zones d’endémie palustre (ZEP) de Madagascar. Konaté rapporte dans sa thèse que les antipaludiques représentent les médicaments les plus sollicités dans les officines de la ville de Sikasso (77). En 1994, l’usage de la chloroquine cp en automédication s’élève à 91% dans la région d’Antananarivo tandis que celui de la sulfadoxine – pyriméthamine cp ne représente que 3% (16). Cette comparaison montre que l’usage en automédication de la sulfadoxine – pyriméthamine cp a augmenté de 1994 à 2011, et réciproquement celui de la chloroquine cp a diminué. Cette constatation pourrait être liée à l’augmentation de la sélection de résistance vis-à-vis de la chloroquine cp et à la vulgarisation de l’usage de la sulfadoxine – pyriméthamine cp. La Politique Nationale de Lutte contre le Paludisme promeut actuellement l’usage de l’Artemisinin-Combined Therapy (ACT). Cette constatation démontre également l’insuffisance de l’information parvenue à la population en matière de lutte anti-palustre. Il faudrait également noter l’existence d’une forme d’automédication autorisée dans la lutte contre le paludisme, à savoir la prévention chez les enfants à bas âge habitant dans les endroits reculés. Les Chefs de ménage/Mères de famille déclarent que la céphalée ± fièvre ainsi que l’état grippal constituent les principaux symptômes prédominants ayant justifié l’utilisation de ces molécules. Ouédraogo et al rapportent également que les céphalées et la fièvre représentent les principaux signes ayant suscité l’automédication en antipaludiques (88). A Madagascar, il s’agirait davantage d’un problème de terminologie, source de confusion chez les patients. La malaria est rattachée au mot « tazomoka » tandis que les symptômes précédemment décrits se rapportent au mot « tazo » tout court, correspondant plutôt à une élévation de température ; ce dernier est par ailleurs mentionné sur le conditionnement de ces antipaludiques. Si l’existence d’un séjour antérieur dans une zone d’endémie palustre (ZEP) n’est pas tenue en compte, ce travail suppose que les antipaludiques sont utilisés de façon inappropriée dans la CUA. Même s’il agit d’une stratégie nationale afin de promouvoir l’accès aux médicaments, il serait recommandé de ne pas vulgariser l’utilisation de ces médicaments dans la capitale et de bien préciser le mot « tazomoka » sur leur conditionnement.

Une volonté politique des dirigeants

      L’adoption du nouveau Code de Santé reste primordiale car le Code, actuellement en vigueur, date des années 60, et n’est plus adapté à la situation actuelle en matière de santé publique (17). Les lois et règlements ainsi en vigueur devraient ensuite être appliqués rigoureusement par tous les acteurs concernés. Vu que le faible prix des médicaments constitue l’une des raisons encourageant leur achat dans le secteur informel, il serait préférable de trouver des solutions pour baisser le prix des médicaments mis sur le marché légal. L’Etat devrait encourager la production locale de médicaments génériques. Un appui aux industries locales et une baisse des taxes sur les matières premières s’avéreront ainsi nécessaires afin de produire des médicaments de qualité et pour pouvoir les vendre à un prix compétitif. Un meilleur suivi de la distribution de médicaments dans les formations sanitaires publiques serait également recommandé afin d’empêcher les détournements et les éventuelles pénuries de médicaments. Un centre d’information sur l’usage rationnel de médicaments devrait être mis en place. Ce centre travaillera en étroite collaboration avec l’Association des Pharmaciens. Son rôle principal consiste à informer et éduquer, non seulement la population, mais aussi les personnels de santé, sur un usage plus rationnel des médicaments.

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Table des matières

INTRODUCTION
Contexte et justification
Hypothèses de recherche
Objectifs spécifiques de la recherche
Limites de la recherche
Biais de sélection
Biais d’information
Première partie : GENERALITES 
I. Le médicament et la médication 
I.1. Définition officielle du médicament
I.2. Catégories de médicaments
I.3. Définition de la médication
II. Notions de pharmaco-épidémiologie 
III. Rationalité d’usage des médicaments 
IV. L’automédication 
IV.1. Définitions de l’automédication
IV.2. Types d’automédication
IV.3. Déterminants du recours à l’automédication
V. Le « switch » de médicaments 
V.1. Evaluation du changement de statut
V.2. Les médicaments « hors liste » et les OTC
VI. Avantages et risques liés à l’automédication 
VI.1. Avantages de l’automédication
VI.2. Risques liés à l’automédication
VII. Etudes réalisées sur le thème de l’automédication 
VII.1. L’automédication sur le plan international
VII.2. L’automédication en Afrique
VII.3. L’automédication à Madagascar
Deuxième partie : METHODOLOGIE DE RECHERCHE 
I. Cadre de l’étude 
II. Type d’étude 
III. Durée de l’étude 
IV. Période d’étude 
V. Population d’étude 
V.1. Critères d’inclusion
V.2. Critères d’exclusion
VI. Mode d’échantillonnage 
VII. Taille de l’échantillon 
VIII. Variables étudiées 
VIII.1. Variables dépendantes
VIII.2. Variables indépendantes
IX. Mode de collecte de données 
X. Modes de saisie et d’analyse de données 
XI. Calculs et tests statistiques utilisés
XII. Considérations éthiques 
Troisième partie : RESULTATS 
I. Description des participants à l’enquête 
II. Prévalence de l’automédication 
III. Profil socioéconomique des ménages ayant pratiqué l’automédication 
IV. Type de médicaments utilisés en automédication 
V. Modalités d’usage des médicaments 
Quatrième partie : DISCUSSIONS 
I. Prévalence de l’automédication 
II. Profil socioéconomique et fréquence de l’automédication 
II.1. Situation financière et fréquence de l’automédication
II.2. Niveau d’instruction et fréquence de l’automédication
II.3. Age et fréquence de l’automédication
II.4. Taille du ménage et fréquence de l’automédication
III. Les médicaments utilisés en automédication 
III.1. Nombre de médicaments utilisés en automédication
III.2. Catégorie de médicaments utilisés en automédication
III.3. Classe de médicaments utilisés en automédication
IV. Source d’approvisionnement en médicaments 
V. L’usage des anti-infectieux et leur source d’approvisionnement
V.1. Les antipaludiques
V.2. Les antibiotiques
Cinquième partie : RECOMMANDATIONS 
I. La promotion de l’automédication responsable et du conseil officinal 
I.1. Le contenu du message
I.2. Les types, canaux et supports de communication
I.3. La réalisation de pré-test et d’évaluation de la communication
II. Le maintien du statut actuel des médicaments 
III. La lutte contre le secteur informel 
IV. Une volonté politique des dirigeants 
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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