Problématique de la résilience paysanne en relation avec les changements climatiques

Les savoirs locaux en matière de technologie

   L’un des constats essentiel qui ressort de l’analyse des politiques actuelles et des opérations de développement dans toute l’Afrique est le fait que les savoirs locaux constituent le facteur le plus important de développement de la production agricole et une amélioration de la gestion des ressources naturelles. Plusieurs études ont été meuées sur l’importance des savoirs locaux dans le développement de la production agricole notamment celle de l’agriculture. Cette importance dans le développement de l’agriculture concerne tout le processus de production, de transformation et même d’échange (Kéita et Samaké, 2007). A l’initiative du Centre d’analyse des politiques économiques et sociales (CAPES) du Burkina Faso un groupe de consultants a rédigé un état des lieux des savoirs locaux. Il s’est agi principalement d’établir un inventaire des savoirs locaux et de formuler des propositions pour qu’ils soient des « facteurs d’impulsion du développement» (CAPES 2006). En effet, selon Kéita et Samaké (2007), les savoirs locaux sont comme des corpus de connaissances localisées, contextualisées, hétérogènes qui concernent la gestion de l’écosystème, les divers systèmes de production, les rapports socio-politiques et économiques; qui se transmettent de bouche à oreille et par la pratique. Pour ces mêmes auteurs, ces connaissances ont un caractère évolutif favorisé par les changements endogènes et exogène de même, les paysans disposent et adoptent des techniques adaptées aux différents types de sol. Les paysans détiennent des connaissances ésotériques sur la production et à la conservation des semences, les types de sols, l’aménagement de ces sols, les techniques de production de la fumure organique, les techniques de lutte antiérosive et les races animales, leur capacité d’adaptation et de reproduction (Kéita et Samaké, 2007). Le rapport des contributions canadiennes au projet ACDI-CILSS (2007) parle de savoir traditionnel qui représente la somme de connaissances (savoir et manière), des pratiques puis des représentations maintenues et développées par des personnes détenant une histoire d’interaction vers l’environnement naturel. Selon ce rapport un savoir est dit traditionnel lorsqu’il est local, tacite, transmis oralement, basé sur l’expérience plutôt que sur la théorie, acquise grâce à la répétition et changeant constamment. Face aux impacts négatifs de la variabilité du climat, les nouvelles techniques d’aménagement agricoles sont les principales stratégies utilisées par les agriculteurs. A cela s’ajoute des techniques qui ne sont pas données à travers une formation de projet mais connues et pratiquées depuis longtemps chez les agriculteurs. Il s’agit du paillage, du parcage, de l’enherbement et de la jachère (Rapport des contributions canadiennes au projet ACDI-CILSS 2007). D’après Nacoulima (SD), les sociétés rurales disposaient d’une nomenclature détaillée des plantes, possédaient des moyens de diagnostiquer et traiter les maladies humaines et animales. Elles avaient adopté des techniques adaptées aux différents types de sols. Elles savaient récupérer, agencer, recycler, inventer du neuf avec l’ancien à partir des matériaux usagés. En faisant allusion aux connaissances accumulées par les savoirs paysans dans les différentes contrées du monde, on parle aujourd’hui de savoirs localisés, de savoirs indigènes ou encore de savoirs autochtones. Selon cet auteur, Olivier de Sardan usera du terme de savoir populaire technique afin de mettre en relief le fait qu’ils constituent des stocks de connaissances pragmatiques, opérationnelles pour les producteurs ruraux.

Rapport coût/avantage et innovations techniques

   Les technologies d’adaptation ont tous pour objectif d’améliorer la productivité animale et végétale et présente chacune des caractéristiques et des avantages spécifiques. Plusieurs auteurs ont mis l’accent sur ces impacts, les difficultés et les coûts relatifs de leur réalisation (Dakio (2000), Kinané (2002), INERA (2004), Perret et Jost (2008), Belemviré et al. (2008), GWP/AO (2010), mCN (2011), Savadogo et al. (2011), CILSS (2012), Winterbottom R., et al. (2013), Bilgo et al. (2014)). Mais, ces auteurs mettent uniquement l’accent sur les impacts et les difficultés biophysiques. Les impacts économiques quand ils sont traités, ils ne concernent que les coûts et avantages tangibles liés à ces technologies, avec une faible attention sur les aspects non tangibles des coûts et avantages qu’ils engendrent.

La théorie de la diffusion

   Selon la théorie de l’adoption, il existe plusieurs facteurs non tangibles qui influencent la décision des producteurs à adopter ou non une technologie d’amélioration de la productivité agropastorale.Il apparaît donc judicieux de prendre en compte ces facteurs pour assurer une meilleure efficacité de ces technologies. L’un des modèles dont l’utilisation est largement répandue dans le domaine de l’adoption des technologies est celui de la diffusion des innovations de Rogers (1983) qui est considéré comme étant un modèle descriptif D’après les théories relatives à l’innovation, une innovation se diffuse dans la société en suivant un processus qui touche différentes catégories de consommateurs, des plus enthousiastes jusqu’aux plus réticents face à la technologie. Rogers explique que l’individu qui est soumis à une innovation entre dans un processus comportant cinq étapes : la connaissance, la persuasion, la décision, l’utilisation et la confirmation. Conçu afin d’expliquer les phénomènes de l’adoption et de la diffusion d’innovations diverses, ce modèle suppose que des éléments reliés à la perception des attributs de l’innovation, au type de décision, au canal de communication, au système social et à l’agent de changement vont agir sur la rapidité avec laquelle une innovation est adoptée dans la population. La diffusion est définie selon Rogers comme étant: «le processus par lequel on propage un message qui renvoie à une innovation en ayant recours à certains canaux durant une certaine période de temps au sein d’un groupe social donné» (Rogers, 1983). Le processus de diffusion comprend quatre (04) éléments constitutifs:
L’innovation: toute idée, pratique ou objet perçus comme nouveau par un individu ou un groupe susceptible de les adopter. La rapidité avec laquelle une nouveauté est adoptée est très variable. Elle comprend cinq (05) caractéristiques qui sont: les avantages relatifs, la compatibilité, la complexité, la facilité de mise à l’essai et la perceptibilité;
Les canaux de communication: ce sont des moyens de communication utilisés et comprennent le choix du canal de communication (orale ou écrite) et le type de communication (communication interpersonnelle en face à face, communication à distance par l’intermédiaire de mass medias en général) ;
Le temps: la dimension temporelle est un élément crucial du processus diffusion implantation d’une innovation. Trois aspects de la dimension temporelle existent. Le premier c’est le temps nécessaire à l’individu pour passer de la première connaissance qu’il acquière au sujet d’une innovation à son adoption ou à son rejet; le second est lié à la capacité d’innover de l’individu et le troisième c’est le temps nécessaire au membre d’une communauté donnée compte tenu de leur nombre pour adopter l’innovation;
Le système social: c’est l’ensemble d’unités fonctionnelles différenciées. Il agit comme un ensemble de frontières à l’intérieure desquelles l’innovation doit être diffusée. Ce que André Leroi-Gourhan appelle le milieu intérieur. En effet pour cet auteur la diffusion d’une technologie est implicitement contenue dans le jeu de deux milieux (Leroi-Gourhan, 1973 :333 ): le milieu extérieur et le milieu intérieur du groupe humain. Pour lui, les valeurs du milieu extérieur et du milieu intérieur sont claires. Le milieu extérieur est ce qui matériellement entoure l’homme : milieu géologique, climatique, animal et végétal. Il faut, avec des modalités que nous dégagerons, étendre la définition aux témoins matériels et aux idées qui peuvent provenir d’autres groupes humains. Quant au milieu intérieur, il ne saisit non pas ce qui est propre à l’homme nu et naissant, mais à chaque moment du temps, dans une masse humaine circonscrite (le plus souvent incomplètement), ce qui constitue le capital intellectuel de cette masse, c’est-à-dire un bain extrêmement complexe de traditions mentales. Pour lui, il serait vain de chercher une mentalité primitive des techniques, un état de simplicité qui porterait automatiquement l’homme vers la solution simple. Le milieu intérieur apparait comme essentiellement vivant, instable comme celui d’une cellule animale dont le contenu est en perpétuel remaniement et dont l’analyse révèle en proportions indéfiniment variables des produits usés, des réserves, des secrétions internes, des hormones issues d’autres cellules du même organisme, des vitamines d’origine extrême (Leroi-Gourhan, 1973 :334).

Définitions conceptuelles

Perceptions: est la représentation consciente à partir des sensations. En d’autres termes, c’est le fait de percevoir par les sens, et par l’esprit (Rogers, 1995). La perception est l’activité par laquelle un sujet fait l’expérience d’objets ou de propriétés présents dans son environnement et qui est liée aux mécanismes de cognition (Mathelet, 2011).
Technologie: Nous défmissons les technologies dans le cadre de cette étude comme un ensemble de pratique, d’outil, de méthode ou technique utilisées pour faire face au changement climatique dans le but d’augmenter la productivité. Elles peuvent être exogènes ou endogènes. Elles permettent de satisfaire les besoins actuels et d’améliorer les moyens d’existence, tout en préservant l’environnement de façon durable.
Facteurs de coûts et avantages: Les facteurs coût peuvent être définis comme étant l’ensemble des éléments ou ingrédients intervenant dans le calcul du coût supporté par un producteur dans l’application d’une technologie.et les facteurs des avantages sont les différents éléments de bénéfice ou avantages tirés après réalisation d’une technologie. Notons que ces deux types de facteurs (coût, avantage) peuvent être tangibles ou intangibles.
Rationalité: La rationalité concerne la pensée lorsqu’elle prend une forme particulière. Elle a trait à la forme du raisonnement, aux concepts utilisés, à la communication et aux postulats qui guident le raisonnement.
Savoirs paysans: Ce sont des connaissances locales et culturelles propres à une société donnée. Pour Keita et Samaké (2007), les savoirs locaux sont comme des corpus de connaissances localisées, contextualisées, hétérogènes qui concernent la gestion de l’écosystème, les divers systèmes de production, les rapports socio politiques et économiques qui se transmettent de bouche à oreille et par la pratique.

Perception des technologies par les agropasteurs

   La perception des technologies d’amélioration de la productivité agropastorale par les producteurs a été ainsi analysée à travers cette étude. Ces perceptions sont très influencées par les caractéristiques socio- économiques des exploitants et a été jugé selon plusieurs critères dont les différents avis sur les objectifs et la pertinence des technologies à améliorer la productivité en se basant sur leur niveau de connaissance et de pratique. C’est ce qui explique la concordance entre connaissance et pratique des technologies agropastorales. Dans le cadre de ce travail les personnes enquêtées ont relativement une bonne connaissance et une bonne pratique des technologies de production animale par rapport aux technologies de production végétale. Cela pourrait s’expliquer par le fait que dans la région sahélienne, l’élevage est la principale activité économique et ils ont en moyenne 28 ans dans la production agropastorale. La perception des agropasteurs sur les technologies animales apparait donc plus claire et donne plus de précision car ils maîtrisent les moindres détails de leur activité et connaissent mieux les technologies qui font partie de leur quotidien. Par contre les technologies végétales sont des pratiques exogènes pour la plus part et l’expérience acquise dans leur pratique est relativement très faible. Aussi très peu de personnes ont reçu une formation en lien avec les activités agropastorales surtout sur les technologies végétales. Ces technologies sont introduites par le canal des services techniques déconcentrés (STD), les ONG et Projets de développement mais les informations sont le plus fourni aux producteurs par leurs proches de la communauté. Par conséquent ces technologies demeurent les moins pratiquées car les producteurs, par manque d’information sont un peu réticent pour les appliquer comme le montre le témoignage suivant concernant l’apport d’engrais minérale: «mise à part ceux qui sont dans les projets, ici les gens ont peur d’utiliser l’engrais minéral car s’il ne pleut pas, le champ se calcine» (B. B., 40 ans, Agropasteur, 15/02/2017, Seytenga). En gnise d’exemple, l’étude a révélé que les diguettes en terres bien qu’étant une technologie endogène sont très peu connues. Cette situation témoigne d’une part, du fait que leur vulgarisation ait été arrêtée étant donné les limites dans leur réalisation, dues sans doute à la nature des sols. Pour ceux qui ne disposent que de peu de moyens, parce que la construction de cordons pierreux serait trop couteuse (60 000 FCFA/ha, selon CILSS (2012», ils essayent donc d’adapter les diguette en terre soit en ajoutant des branches d’arbres pour ne pas que l’eau emporte la terre soit en mettant le sable dans des sacs. II s’agirait donc d’une forme d’adaptation. Aussi pour la zone d’étude, il se pourrait que cette technologie ne soit donc pas une technologie endogène.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
1. Contexte et problématique
2. Objectifs
3. Hypothèses
CHAPITRE 1 : SYNTHESE BIBLIOGRAPIDQUE
1.1 Problématique de la résilience paysanne en relation avec les changements climatiques
1.2. Les savoirs locaux en matière de technologie
1.3. Milieu et technique: la question de l’innovation technologique et de son adoption
1.4. Rapport coût/avantage et innovations techniques
1.5. Perceptions paysannes
1.6. La théorie de la diffusion
1.7. Définitions conceptuelles
CHAPITRE II: MATERIEL ET METHODES
2.1. Présentation de la zone d’étude et justification du choix des sites
2.2. Echantillonnage
2.3. Méthode de collecte de données
2.4 Analyse des données
CHAPITRE III: RESULTATS ET DISCUSSION
3.1. Résultats
3.1.1 Caractéristiques socio-demographiqnes des producteurs cnquêtés
3.1.2 Disponibilité en facteurs de production des producteurs enquêtés
3.1.3. Niveau de connaissance et de pratiques des technologies
3.1.4. Pertinence de la technologie agropastorate pour les objectifs visés
3.1.5. Influence des technologies agropastorales sur la productivité
3.1.6. Perception des facteurs de coftts des technologies agropastorales
3.1.7. Perception des facteurs « avantages»
3.2. Discussion
3.2.1. Perception des technologies par les agropasteurs
3.2.2. Perception des facteurs coûts et avantages des technologies
3.2.3. Technologies et savoirs paysans
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES BmLIOGRAPIDQUES
ANNEXES

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *