Prise en charge orthophonique de l’enfant d’âge préscolaire présentant un bégaiement associé à un retard de parole

Le bégaiement, un trouble de la parole

   La plupart des classifications des maladies, notamment le DSM-IV-R, s’accordent à le définir comme « un trouble de la fluence et du rythme de la parole, se manifestant par la survenue dans la parole du sujet de fréquentes répétitions et prolongations de sons ou de syllabes, d’interjections, d’interruptions de mots, de blocages audibles ou silencieux, de circonlocutions. » Ces manifestations, appelées dysfluences, sont des difficultés motrices qui empêchent l’écoulement de la parole, la rendant ainsi chaotique. La parole est une praxie, qui consiste en une coordination synchronisée de mouvements articulatoires organisés dans le but de produire un ensemble de sons, de syllabes, de mots et de phrases. L’acte de parler n’est pas automatique chez la personne qui bégaie. Celle-ci contrôle et anticipe les accidents de parole, ce qui entraîne des coupures inopinées du rythme. Elisabeth Vincent (2013) parle alors d’une parole « désorchestrée ». Enfin, il est important de rappeler que « le bégaiement est avant tout un trouble moteur de la production de la parole qui secondairement retentit sur la communication. » (M.C Monfrais-Pfauwadel, 2011)

Les comportements accompagnateurs

   Des comportements accompagnateurs non-verbaux s’ajoutent aux manifestations auditives et se caractérisent principalement par des excès de tension physique. S’observent alors (De Chassey & Brignone, 2003; Bloodstein & Bernstein-Ratner, 2008) :
– Au niveau du regard : une perte du contact visuel pendant l’échange verbal, des clignements de paupières intempestifs, un regard fixe.
– Au niveau du corps : des gestes conjuratoires qui aident à démarrer un énoncé, un mot : claquer des doigts ou des mains, taper du pied.
– Au niveau du corps et du tronc : une avancée de la tête et du cou, une élévation des épaules, une flexion de la colonne vertébrale, une gestuelle inadaptée.
– Des troubles du tonus sous forme de syncinésies : il s’agit d’une diffusion de la contraction musculaire des muscles articulateurs de la parole à d’autres muscles, notamment au niveau du visage, du cou, des épaules, rendant les mimiques inadaptées. Ces mouvements involontaires peuvent perturber l’interlocuteur.
– Des phénomènes physiologiques vasodilatateurs : des rougeurs, des pâleurs, une hypersudation, une hyper ou hyposialorrhée, une incoordination bucco-faciale.
– Des troubles respiratoires avec une coordination pneumo-phonique inadaptée.

Les symptômes secondaires et la notion d’Iceberg

   Des symptômes invisibles s’ajoutent à ceux que l’on voit et que l’on entend. Il s’agit de croyances, de souffrances, d’angoisses et de manifestations physiques liées à l’émotion engendrée par le bégaiement. En 1970, J.SHEEHAN propose la notion d’iceberg afin de décrire la double nature de ce trouble : « le bégaiement est comme un iceberg, avec seulement une petite partie au-dessus de la ligne de flottaison et une bien plus grande partie en dessous ». La partie immergée de l’iceberg illustre les sentiments négatifs que peut engendrer le bégaiement. Il peut s’agir de la honte, de la peur, de la culpabilité, du désespoir, de la mésestime de soi ou toute autre représentation psychiquement douloureuse vécue par la personne qui bégaie. Par ailleurs, ces manifestations peuvent entraîner des réactions d’évitement et développer un ensemble de croyances chez la personne qui bégaie. (De Chassey & Brignone, 2003). Cette partie représente l’ « Être bègue ». La partie émergée représente quant à elle les manifestations primaires que la personne bègue donne à voir et à entendre lorsqu’elle parle (les dysfluences et les mouvements accompagnateurs). Cette partie représente le « Paraître bègue ».

Les capacités linguistiques des enfants qui bégaient

   Quelles relations existe t-il entre le bégaiement et les compétences langagières ? Le bégaiement apparaît au moment de l’acquisition du langage, précisément lorsque l’enfant connaît une forte explosion langagière, que la complexité des structures syntaxiques s’intensifie et que les habiletés linguistiques sont en pleine expansion (Yairi & Ambrose,2005 ; Reilly et al., 2009). De plus, certains enfants qui bégaient suivent un développement langagier atypique. Des études portant sur l’analyse des compétences lexicales et syntaxiques d’enfants bègues, ont montré que ces derniers, bien qu’ils se situent dans la norme, présentent des scores en-dessous de leurs homologues fluents (NTOUROU et al. 2011). De plus, ces études montrent également que ces enfants possèdent des capacités très hétérogènes dans les différents domaines testés, et que ce déséquilibre même serait propice au développement des dysfluences (COULTER et al.2009). En ce qui concerne le développement phonologique, il s’agirait du domaine le plus sensible chez les enfants qui bégaient. Des études ont mis en évidence des différences concernant l’encodage phonologique chez une partie des enfants qui bégaient. Ainsi, YAIRI (2007), évoque l’existence d’un sous-groupe, constitué d’enfants présentant à la fois un bégaiement et un trouble phonologique. Plusieurs enquêtes ont déterminé la fréquence et la prévalence d’un retard phonologique parmi les enfants qui bégaient. Ainsi, suite à une enquête menée dans 10 Etats des Etats-Unis auprès d’orthophonistes exerçant en milieu libéral, nous constatons que la concomitance entre un trouble du langage et le bégaiement est de 44%, parmi lesquels 32% ont un trouble phonologique seul associé au bégaiement et 33% ont un trouble phonologique et un autre trouble associés au bégaiement (ARNDT & HEALEY, 2001). Ces chiffres sont également à mettre en relation avec les études de LOUKO et al. (1990) qui affirmaient déjà une fréquence de 40 à 60% de retards phonologiques chez les enfants qui bégaient. Enfin, NIPPOLD (2002) affirme que la prévalence d’un trouble phonologique chez les enfants fluents se situe entre 2 et 13%, alors qu’elle est de 30 à 40% chez les enfants qui bégaient.

Risque de chronicisation

   Lorsque le bégaiement est associé à un retard de parole, il est légitime de s’interroger sur l’influence réciproque de ces troubles. Pour cela, des études ont été menées afin de déterminer la nature de la relation entre ces troubles. Trois études longitudinales (Paden & Yairi, 1996 ; Yairi et al., 1996 ; Paden et al., 1999) montrent que la présence d’un trouble phonologique associé au bégaiement pourrait être considérée comme un signe d’alerte de la chronicisation du bégaiement. Paden et al. (1999) étudient la parole lors de l’installation du bégaiement et comparent les capacités phonologiques d’enfants dont le bégaiement a persisté à celles d’enfants dont le bégaiement s’est arrêté tardivement. Sur un groupe de 84 enfants, les auteurs montrent que le groupe des enfants dont le bégaiement s’est chronicisé a des capacités phonologiques inférieures à celles des enfants qui se sont arrêtés de bégayer. Cependant, de nombreuses différences interindividuelles sont rapportées. Par ailleurs, d’autres études menées sur un plus long terme ne montrent pas d’influence du trouble phonologique sur l’installation du bégaiement. Finalement, il semblerait qu’une relation existe entre le bégaiement et la phonologie. Cependant, les auteurs des études restent prudents et expliquent que le trouble phonologique serait un signe d’alerte plutôt qu’un facteur prédictif de la chronicisation du bégaiement.

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Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE THEORIQUE
1. Les troubles en question
1.1 Le bégaiement
1.1.1 Le bégaiement, un trouble de la parole
1.1.2 Le bégaiement, un trouble de la communication
1.1.3 Symptomatologie du bégaiement
1.1.4 Hypothèses étiologiques du bégaiement
1.1.5 Installation du bégaiement chez l’enfant
1.2 Le retard de parole
1.2.1 Classification
1.2.2 Définitions
1.2.3 Manifestations du retard de parole
1.2.4 Etiologies et hypothèses explicatives
1.3 Le bégaiement associé au retard de parole
1.3.1 Les capacités linguistiques des enfants qui bégaient
1.3.2 Liens entre retard de parole et bégaiement
2. Prise en charge orthophonique du bégaiement et du retard de parole
2.1 Prise en charge du bégaiement de l’enfant d’âge préscolaire
2.1.1 L’accompagnement parental
2.1.2 Le programme Lidcombe
2.1.3 Les suites thérapeutiques : méthodes directes et indirectes
2.2 Prise en charge du retard de parole
2.3 Prise en charge des deux troubles associés
2.3.1 Problème du choix de prise en charge
2.3.2 Risque de chronicisation
3. Le rythme comme approche thérapeutique
3.1 Qu’est-ce que le rythme ?
3.1.1 Définitions
3.1.2 Le rythme, un élément prosodique de la parole
3.1.3 Paramètres du rythme
3.1.4 Développement du rythme chez l’enfant
3.2 Place du rythme dans les pathologies du langage oral
3.2.1 Rythme et retard de parole
3.2.2 Rythme et troubles de la fluence
3.3 Outils de médiation orthophonique utilisant le rythme
3.3.1 La Dynamique Naturelle de la Parole (DNP)
3.3.2 Les comptines et chansons enfantines
4. Hypothèses théoriques
PARTIE METHODOLOGIQUE
1. Population
1.1 Critères de recherche de la population
1.2 Présentation des enfants
1.2.1 Me
1.2.2 Pa
2. Outils méthodologiques
2.1 Les activités de stimulation du rythme
2.1.1 Education auditivo-perceptive
2.1.2 Travail de la mémoire auditive
2.1.3 Activités rythmiques non-verbales
2.1.4 Activités rythmiques verbales
3. Mode de traitement des données
3.1 Elaboration d’une grille d’observation
3.2 Analyse des compétences rythmiques
3.3 Analyse de la parole
3.4 Analyse des attitudes communicationnelles et de la motivation
4. Précautions méthodologiques
RESULTATS ET ANALYSES
1. Présentation et analyse des résultats
1.1 Etude de cas n°1 : Me
1.1.1 Les premières séances : travail des compétences rythmiques
1.1.2 Les dernières séances : progression vers les productions verbales
1.1.2 Analyse de la parole
1.1.3 Attitudes communicationnelles et motivation
1.1.4 Conclusions
1.2 Etude de cas n°2 : Pa
1.2.1 Analyse des compétences rythmiques
1.2.2 Progression vers les productions verbales
1.2.3 Analyse de la parole
1.2.4 Attitudes communicationnelles et motivation
1.2.5 Conclusions
2. Discussion
2.1 Traitement des hypothèses
2.1.1 Hypothèse 1
2.1.2 Hypothèse 2
2.1.3. Hypothèse 3
2.1.4 Hypothèse 4
2.2 Limites de l’étude
CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
Abstract

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