Prise en charge médicale des enfants victimes de traumatismes par accident de la circulation

Prise en charge médicale des enfants victimes de traumatismes par accident de la circulation 

SAMU

La prise en charge des enfants victimes d’un accident de la circulation avec lésion grave débute en France sur les lieux mêmes de l’accident. En effet, contrairement à la plupart des pays anglo-saxons, la France a fait le choix d’une médicalisation précoce et d’un transport sous assistance et surveillance médicale. Les Services mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR) qui dépendent des Services d’aide médicale d’urgence sont alertés soit directement par des personnes témoins de l’accident soit par les autres services de secours ; pompiers ou forces de l’ordre (Adnet et al. 2004). Une fois sur place, l’équipe soignante (médecin, infirmier et brancardier) délivre les soins d’urgence vitale, évalue la gravité des lésions et organise le transport médicalisé du blessé vers la structure hospitalière la plus proche ou la plus apte à gérer les soins d’un blessé par accident de la route. Elle doit donc évaluer la gravité lésionnelle, les circonstances accidentelles, mesurer les différents paramètres physiologiques appréciant le retentissement des lésions traumatiques (GCS, pression artérielle, fréquence cardiaque, fréquence respiratoire, température corporelle) et prendre les décisions urgentes qui s’imposent. Par exemple, l’équipe médicale d’urgence doit être capable d’intuber et de ventiler le patient victime d’un traumatisme crânien grave ayant des troubles de conscience, d’exsuffler un pneumothorax suffocant, de restaurer l’hémodynamique d’un patient en défaillance cardio-vasculaire (remplissage, éventuelle transfusion d’urgence, arrêt des hémorragies extériorisées). Ensuite, elle conditionnera le blessé de manière à ce que le transport puisse se faire sous surveillance continue et en toute sécurité (matelas coquille, collier cervical, scope, surveillance de la pression artérielle et du CO2 expiré si le patient est intubé). Le monitorage des patients traumatisés dans un état grave a fait l’objet d’une conférence d’experts en Juin 2005 et sert de référence dans ce domaine en France (2006). La rapidité de la prise en charge immédiate est fondamentale et en aucun cas le transport vers le centre hospitalier ne doit être retardé. Le facteur temps est un facteur pronostique reconnu et primordial. Dans d’autres pays, ce sont des personnes non médecins formées aux gestes de réanimation de base (« paramedics ») qui effectuent cette première prise en charge et la transport des patients. Ainsi, dans ces pays l’enfant arrive à l’hôpital sans qu’aucune prise en charge ni évaluation médicale n’ait été effectuée auparavant.

Les scores de triage et de gravité

L’orientation du blessé vers la structure la mieux adaptée pour gérer un blessé grave par accident de la circulation est un point clé de cette prise en charge initiale. Cette phase est aussi appelée « triage ». Plusieurs scores de triage ou échelles de mesure de gravité ont été développés pour faciliter la décision d’orientation (Marcin et al. 2002; Carli et al. 2004). Les plus utilisés sont le Pediatric trauma score (PTS) et le Revised trauma score (RTS) (Tableau 2, Tableau 3)(Tepas et al. 1987; Champion et al. 1989). Si un enfant a un score PTS ≤ 8 ou RTS ≤ 11, il devrait préférentiellement être orienté vers un centre spécialisé dans la prise en charge des traumatismes accidentels. Ces scores sont en effet bien corrélés à la gravité lésionnelle et à la mortalité. Ils ne doivent pas être les seuls critères d’orientation et les circonstances accidentelles ainsi que le contexte géographique ou l’existence d’un centre de traumatologie à proximité sont également à prendre en compte. De plus, certains items des scores sont assez subjectifs et parfois difficiles à évaluer. Peu de travaux ont été réalisés chez les enfants permettant de comparer ces scores entre eux (Ott et al. 2000; Cantais et al. 2001).

En complément des scores de triage existent également des scores de gravité lésionnelle qui attribuent un score à chaque blessure décrite. Les plus utilisés sont l’Abbreviated Injury Scale et l’Injury Severitry Score (AIS 90, ISS)(Baker et al. 1974; AAAM 1990). La combinaison des données physiologiques du RTS et des données anatomiques de l’ISS constitue le « Trauma Score and ISS » ou TRISS. Il a été développé pour prédire la mortalité ou la survie (Champion et al. 1990).

Ces scores sont utiles pour comparer les groupes d’enfants traumatisés entre eux et servent à apprécier la gravité lésionnelle globale. Ils sont surtout associés au risque de décès mais ils semblent de moins bons indicateurs du pronostic fonctionnel. La comparaison des performances des différents scores ou échelles de mesure de la gravité lésionnelle montre que les scores prenant en compte des données physiologiques semblent meilleurs que ceux basés uniquement sur des données anatomiques (Ott et al. 2000; Cantais et al. 2001). Les scores de gravité en réanimation qui intègrent certaines valeurs physiologiques, des valeurs biologiques et le score de Glasgow comme la Pediatric Risk of Mortality ou PRISM sont également performants en terme de prédiction de survie et seraient même meilleurs que les autres scores précédemment cités (Cantais et al. 2001). Plusieurs auteurs ont également montré que les scores développés spécifiquement pour les enfants ne sont pas plus performants que les scores adultes pour prédire le décès (Ott et al. 2000; Orliaguet et al. 2001).

La prédiction de décès pourrait être influencée par la qualité et la rapidité de la prise en charge initiale (au SAMU et en salle d’accueil des urgences vitales) ainsi que par la gestion du patient en salle d’opération d’urgence. Il est probable que la combinaison des scores de gravité traditionnels de réanimation avec les scores anatomiques pourrait améliorer les modèles de prédiction de décès. Par ailleurs, il serait intéressant d’évaluer ces différents scores comme facteurs prédictifs de séquelles à long terme. De plus, leur utilité dans la prédiction de décès ou de séquelles à l’échelon individuel ou dans l’élaboration de recommandations de pratiques cliniques doit être précisée (Marcin et al. 2002).

Prise en charge hospitalière initiale : la salle d’accueil des urgences vitales (SAUV ou « salles de déchoquage ») 

Une fois l’enfant pris en charge sur les lieux de l’accident, un choix doit être fait quant à son orientation vers le service le mieux adapté pour traiter au plus vite les défaillances d’organe mettant en jeu le pronostic vital immédiat. En ce qui concerne les enfants gravement blessés, il est clairement admis qu’une orientation vers une Salle d’accueil d’urgences vitales (SAUV ou déchoquage) est le choix le plus judicieux. En effet, ces structures d’accueil ont été développées justement pour prendre en charge les défaillances d’organe les plus graves en mettant à disposition des cliniciens tout le matériel de réanimation et tous les outils de surveillance nécessaires. L’équipement de ces SAUV a fait l’objet de recommandations de la part des sociétés savantes de réanimation et d’anesthésie (Chéron 2004). De plus, leur localisation à proximité d’un service de radiologie disposant d’un scanner, d’équipements radioscopiques et d’une échographie apporte un gain de temps précieux pour réaliser au plus vite le bilan lésionnel et permet des interventions thérapeutiques radiologiques d’urgence (embolisation d’une hémorragie interne, drainage écho-guidé…). La transmission des images par télémédecine ou via un réseau internet rend possible la communication avec les chirurgiens ou les neurochirurgiens localisés plus à distance.

L’autre fonction de ces SAUV est d’assurer la coordination des soins du patient traumatisé. Il est en effet largement reconnu que la prise en charge des patients traumatisés doit être multidisciplinaire en impliquant des médecins réanimateurs ou anesthésistes, des chirurgiens de différentes spécialités (neurochirurgiens, chirurgiens digestifs, orthopédiques, maxillo-faciaux, ORL…), des radiologues et des infirmiers (Driscoll et al. 1992). L’équipe médicale ainsi constituée est appelée dans les pays anglo-saxons la « trauma team »(Yurt 1992). Elle est coordonnée et dirigée par un médecin responsable appelé également « trauma team leader » (Sugrue et al. 1995). Le rôle de cette équipe et en particulier du responsable est de déterminer si le patient doit être admis d’urgence en salle d’opération ou si une stabilisation médicale préalable est nécessaire. La hiérarchisation des actes thérapeutiques et diagnostiques relève de leur décision. L’organisation, l’expérience clinique et le respect de procédures standardisées écrites (protocoles et algorithmes décisionnels) sont trois éléments clés de la qualité de cette prise en charge. Plusieurs études ont montré l’amélioration de la survie après mise en place de procédures standardisées de soins dans une population de traumatisés (Demetriades et al. 1995; Ruchholtz et al. 1998; Clayton et al. 2004). Vernon et al. ont montré que l’organisation formalisée des procédures d’appels et d’alerte de l’équipe trauma dans les situations d’extrême urgence diminue les délais d’obtention du bilan lésionnel, diminue le délai avant transfert au bloc opératoire en cas d’indication chirurgicale urgente et le temps de prise en charge en SAUV (Vernon et al. 1999). Ils montraient qu’en comparaison avec une population de référence (méthodologie TRISS), la survie étaient améliorée (Vernon et al. 1999).

Cette organisation est celle utilisée dans la plupart des centres spécialisés américains et canadiens ou « trauma centers ». Or, il a été récemment montré que la survie était meilleure pour les patients adultes admis dans un centre spécialisé en traumatologie comparativement à ceux qui étaient admis dans des centres qui n’étaient pas organisés comme tels (MacKenzie et al. 2006). En ce qui concerne les enfants traumatisés, Potoka et al, ont montré que le pronostic des enfants avec traumatismes crânio-cérébraux était meilleur dans le centres spécialisés en traumatologie pédiatrique de niveau 1 ou dans les centres spécialisés en traumatologie adultes avec qualification en pédiatrie que dans les trauma centers adultes de niveau 1 ou 2 non qualifiés en pédiatrie (Hall et al. 1996; Potoka et al. 2001; Adelson et al. 2003b). La mise en place d’un système de prise en charge des enfants traumatisés diminue la mortalité (Hall et al. 1996) (Hulka 1999). En France, où l’organisation de la prise en charge préhospitalière est différente, celle-ci a montré son efficacité. Orliaguet et al. ont ainsi montré par une analyse TRISS sur une série rétrospective de 407 enfants traités à Paris dans un centre spécialisé en traumatologie pédiatrique, que la survie était équivalente à celle observée dans la Major Outcome Trauma Study (MTOS) aux USA, alors même que les enfants de leur échantillon était plus gravement blessés (Orliaguet et al. ICM 2001).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1 Introduction
2 État des connaissances
2.1 Définitions
2.2 Épidémiologie des traumatismes par accident de la route
2.3 Prévention des traumatismes par accident de la circulation
2.3.1 Aspects réglementaires
2.3.2 Efficacité des systèmes de protection
2.4 Particularités épidémiologiques pédiatriques
2.5 Spécificités lésionnelles pédiatriques
2.6 Prise en charge médicale des enfants victimes de traumatismes par accident de la circulation
2.6.1 SAMU
2.6.2 Les scores de triage et de gravité
2.6.3 Prise en charge hospitalière initiale : la salle d’accueil des urgences vitales (SAUV ou « salles de déchoquage »)
2.6.4 Prise en charge en réanimation et en chirurgie
2.6.5 Suivi après la phase aiguë : la rééducation
2.6.6 Filières de prise en charge
2.7 Séquelles à moyen et long terme
2.7.1 Des séquelles souvent invalidantes mais parfois invisibles
2.7.2 Séquelles motrices et fonctionnelles
2.7.3 Séquelles cognitivo-intellectuelles
2.7.4 Troubles du comportement et de la personnalité
2.7.5 Retentissement familial et scolaire
2.7.6 Qualité de vie et recours aux services de santé
3 Objectifs et résultats attendus
3.1 Améliorer les connaissances épidémiologiques des accidents de la circulation chez l’enfant : incidences, causes, nature des lésions
3.2 Mesurer l’impact des modalités de prise en charge médicale des traumatismes graves sur le devenir des enfants à la sortie de réanimation
3.3 Décrire les conséquences en terme de déficience, d’incapacité et de désavantage
3.4 Rechercher les facteurs prédictifs de mauvais devenir à long terme : les handicaps et conséquences socio-familiales
4 Méthodes
4.1 Le registre des victimes d’accident de la circulation routière du Rhône
4.1.1 Mode de fonctionnement
4.1.2 Données recueillies
4.1.3 Qualité du Registre
4.1.4 Analyses effectuées
4.2 Étude sur le suivi des enfants réanimés à la suite d’un accident de la circulation (étude SERAC)
4.2.1 Type et lieu d’étude
4.2.2 Population
4.2.3 Données recueillies
4.2.4 Critères de jugement
4.2.5 Bordereaux de recueil de données
4.2.6 Analyses statistiques
4.2.7 Organisation de la recherche
4.2.8 Contrôle de qualité et saisie des données
4.2.9 Aspects réglementaires et implications éthiques
4.2.10 Personnes impliquées dans la recherche
4.2.11 Financement de la recherche
5 Conclusion

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *