Prise en charge de l’addiction aux opioïdes en France

La prise en charge de l’addiction aux opioïdes peut prendre deux formes différentes, soit un sevrage complet sous surveillance médicale, soit la prise d’un médicament agoniste aux opioïdes qui va remplacer la drogue (MSO). Ces deux modalités de prise en charge s’associent toujours d’un accompagnement pluridisciplinaire, médical, psychologique et social.

Traitement de substitution aux opioïdes

Il est important de différencier les TSO et les MSO. En effet le traitement ne se résume pas uniquement aux MSO, mais constitue toute une prise en charge globale et pluridisciplinaire de l’addiction dont les MSO font partie. (29) Les TSO ont plusieurs objectifs à court, moyen ou long terme, qui sont propres à chaque patient et qui sont évolutifs au cours de la pathologie addictive du patient. Les principaux objectifs des TSO sont : aider le patient à contrôler sa consommation d’opioïdes, diminuer, voire arrêter la prise d’opioïdes illicites, empêcher la survenue d’un syndrome de manque, intégrer le patient dans un processus de soins et permettre une réinsertion sociale du patient. (29)(30) Au fur et à mesure de l’avancée du patient dans sa pathologie, il pourra, s’il le souhaite, envisager de diminuer sa consommation de MSO, pour arriver finalement à une abstinence de tout opioïde.

Bilan des traitements de substitution aux opioïdes en France 

L’Académie nationale de pharmacie a publié un rapport en janvier 2009 « Bilan des politiques publiques en matière de substitution aux opiacés », dans lequel elle fait le point sur les résultats de l’instauration de ces traitements depuis 1995. (31) Avec la mise en place des traitements de substitution en France, la mortalité par overdose d’héroïne est 10 fois moins importante. L’Académie estime que 3 500 vies ont été épargnées grâce à ces traitements. Il est à noter cependant que cette diminution de mortalité a ralenti depuis 1999 et qu’on observe même des décès par surdosage liés à la prise de médicaments de substitution. Par ailleurs, les patients en TSO ont une mortalité 4 à 8 fois plus faible que celles des patients opio-dépendants non traités. Ils observent également une réduction importante des cas d’infection au VIH chez les usagers de drogues, passant de 1079 nouveaux cas chez les usagers de drogues par voie injectable en 1990 à 98 en 2005. Pour le virus de l’hépatite C, le constant est moins important, il est quand même observé une réduction du nombre de séroconversions. L’académie constate également un impact positif des traitements de substitution sur le plan social et sur la qualité de vie des patients. En effet, cette prise en charge permet un retour à l’emploi et une reconstruction de la cellule familiale. La conférence de consensus « stratégies thérapeutiques pour les personnes dépendantes des opiacés : place des traitements de substitutions » de 2004 dresse également un bilan de la prise en charge de ces patients. Un calcul a posteriori indique que les TSO ont permis d’économiser 595 millions d’euros pour l’année 1997. Ce calcul a été réalisé en faisant l’hypothèse que 50% des usagers d’héroïne soient sous traitement de substitution.

Médicaments de substitution aux opioïdes

Le MSO doit avoir plusieurs caractéristiques importantes telles que, contrôler le «craving», avoir peu d’effets euphoriques, avoir une demi-vie longue et être sans danger pour le patient. (30) Actuellement en France, il existe quatre médicaments indiqués dans la prise en charge des dépendances aux opioïdes : buprénorphine haut dosage (Subutex® et génériques), buprénorphine et naloxone (Suboxone®), méthadone sirop et gélule.

Méthadone sirop et gélule

Ce médicament a d’abord été commercialisé sous la forme d’un sirop en 1995, puis en 2008 la forme gélule a été mise sur le marché. Les gélules ont une image moins stigmatisante que le sirop, et l’absence du sucre permet d’éviter certains effets indésirables de la forme sirop (prise de poids, problèmes pour les personnes diabétiques, problèmes dentaire…). Par ailleurs, la forme gélule est plus facile à stocker (grâce à un conditionnement moins volumineux), ce qui facilite la gestion et le rangement du médicament de la part des patients.

La méthadone fait partie des médicaments classés dans la catégorie des stupéfiants. Les conditions de prescription et de délivrance sont donc encadrées et très strictes. En effet, la prescription initiale de ce médicament ne peut être effectuée que par des médecins exerçant dans les centres de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) ou par des médecins hospitaliers à l’occasion d’une hospitalisation, d’une consultation ou en milieu pénitentiaire. La prescription doit se faire sur une ordonnance sécurisée et le nom de la pharmacie qui doit délivrer le médicament doit également être indiqué sur la prescription.

Le relais vers un médecin de ville peut se faire, une fois le patient stabilisé avec une ordonnance de délégation du primo-prescripteur.

La méthadone gélule ne peut être prescrite qu’à des patients déjà sous méthadone sirop et stabilisés depuis un an. A la différence de la forme sirop, la prescription initiale de la méthadone gélule est réservée aux médecins travaillant en CSAPA et à ceux travaillant en service d’addictologie. La méthadone sirop peut être prescrite pour une durée maximale de 14 jours, la forme gélule quant à elle à une durée maximale de prescription de 28 jours. La délivrance se fait de manière fractionnée pour une période de 7 jours, sauf si le prescripteur indique sur l’ordonnance la mention « délivrance en une fois ». La prescription doit être présentée à la pharmacie dans un délai de trois jours. (30) Que ce soit la méthadone sirop ou gélule, ces médicaments nécessitent un suivi particulier tout au long du traitement. La méthadone est un agoniste entier, principalement des récepteurs opioïdes de type « mu ». Ce médicament présente donc toutes les propriétés des opiacés, avec notamment un risque de surdosage important pouvant conduire à des décès par dépression respiratoire. (30) La demi-vie de la méthadone étant en moyenne de 22 heures, une prise journalière suffit pour que le patient ne ressente pas les effets du syndrome de sevrage ou l’envie de consommer. (17)(33) Comme tout médicament, la méthadone peut engendrer des effets indésirables qui sont principalement : somnolence (signe d’un surdosage potentiel), prise de poids (parfois du au sucre du sirop), nausées, constipation, hypersudation, vomissements, troubles érectiles .  Ce médicament présente de nombreuses interactions avec d’autres médicaments .

L’association avec des morphiniques agonistes et/ou antagonistes est contre- indiquée en raison d’un risque d’apparition d’un syndrome de sevrage par compétition des récepteurs opioïdes. (34) La méthadone étant susceptible de donner des torsades de pointe, l’association avec d’autres médicaments torsadogènes est déconseillée. (29) L’association avec d’autres dépresseurs du système nerveux central est également déconseillée comme avec les barbituriques, les benzodiazépines, ou les autres analgésiques morphiniques, ces associations pouvant conduire à des dépressions respiratoires pouvant être fatales en cas de surdosage. (33)(34) La méthadone étant métabolisée par les cytochromes CYP450 (principalement par les cytochromes CYP3A4 et CYP2D6), l’association avec des inducteurs ou inhibiteurs de ces cytochromes est à réaliser avec précaution et contrôle de la concentration plasmatique de la méthadone.

Buprénorphine haut dosage (Subutex®)

Le médicament Subutex® (buprénorphine haut dosage) a été mis sur le marché en 1996 d’abord aux dosages 0,4 mg, 2 et 8 mg, puis en 2008 les dosages 1,4 et 6 mg ont été ajoutés. (16) A la différence de la méthadone, ce médicament peut être prescrit par tout médecin. Cette molécule fait partie de la liste 1 des médicaments, mais elle est dite « assimilée aux stupéfiants ». Elle suit donc les mêmes règles de prescription et de délivrance que les stupéfiants.

Elle peut donc être prescrite pour 28 jours maximum et doit être délivrée de manière fractionnée pour 7 jours, sauf mention « délivrance en une seule fois ». L’ordonnance doit être présentée dans un délai de 3 mois. La buprénorphine est un agoniste partiel des récepteurs opioïdes de type « mu » et « kappa ». Son effet agoniste permet, au bon dosage, d’empêcher le syndrome de sevrage de survenir et contrôle le craving du patient. Son action partielle permet d’avoir un effet plafond et limite le risque de surdosage, sauf en cas d’association avec d’autres substances dépresseurs du système nerveux central, notamment les benzodiazépines. La buprénorphine a une durée d’action de plus de 24 heures (demi-vie moyenne de 32 heures), ce qui permet une prise quotidienne par voie sublinguale uniquement. Si le médicament est pris par voir orale, la buprénorphine est détruite lors du premier passage hépatique et le médicament devient inefficace. (17)(35) Les principaux effets indésirables retrouvés, lors d’une utilisation respectant la prescription médicale de la buprénorphine, sont essentiellement : céphalées, hypersudation, nausées, constipation, insomnie, vomissements…(29)(35) La buprénorphine est contre  indiquée avec d’autres opioïdes tels que la méthadone et les analgésiques de palier III (déconseillée avec le palier II). Par compétition des récepteurs opioïdes, il peut survenir un syndrome de sevrage et, il y a un risque de diminution de l’effet de l’analgésique. Par ailleurs, l’utilisation concomitante d’antagonistes aux récepteurs opioïdes (naltrexone et nalméfène) est également contreindiquée en raison de la survenue possible d’un syndrome de sevrage. (36) L’association avec d’autres médicaments dépresseurs du système nerveux central (benzodiazépine en particulier) est déconseillée en raison du risque majoré de dépression respiratoire. Les concentrations plasmatiques de la buprénorphine peuvent être modifiées par les inducteurs et inhibiteurs enzymatiques du cytochrome CYP3A4.

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Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE 1 ADDICTION AUX OPIOÏDES 
1.1. Opiacés et opioïdes
1.2. L’addiction
1.2.1. Définition
1.2.2. Physiopathologie de l’addiction
1.2.3. Diagnostic de l’addiction
1.2.4. Conséquences de l’addiction à une substance psychoactive
1.3. Epidémiologie de l’usage des opioïdes en France
1.4. Prise en charge de l’addiction aux opioïdes en France
1.4.1. Traitement de substitution aux opioïdes
1.4.2. Bilan des traitements de substitution aux opioïdes en France
1.4.3. Médicaments de substitution aux opioïdes
1.4.3.1. Méthadone sirop et gélule
1.4.3.2. Buprénorphine haut dosage (Subutex®)
1.4.3.3. Buprénorphine haut dosage et naloxone (Suboxone®)
1.4.3.4. Autres médicaments
1.5. Prise en charge de l’addiction aux opioïdes à travers le monde
PARTIE 2 ENTRETIEN PHARMACEUTIQUE 
2.1. Nouvelles missions du pharmacien
2.2. Bilan des entretiens pharmaceutiques
2.3. Traitement de substitution aux opioïdes, nouvelle mission du pharmacien ?
PARTIE 3 ENQUETE AUPRES DE PROFESSIONNELS DE SANTE
3.1. Méthode du travail
3.2. Recrutement
3.3. Réalisation des entretiens
3.4. Résultats de l’enquête
3.4.1. Pharmaciens
3.4.2 Médecins
3.4.3. Autres professionnels rencontrés
3.4.4. Résultats des entretiens effectués auprès des professionnels
3.4.4.1. Recueil des besoins et difficultés des patients en traitement de substitution aux opioïdes
3.4.4.2. Objectifs et points importants à évoquer lors de l’entretien
pharmaceutique
3.4.4.3. Outils, référentiels et autres suggestions utiles pour améliorer la prise en
charge des patients en substitution à l’officine
3.4.4.4. Recueil des freins à la réalisation de l’entretien chez les pharmaciens
PARTIE 4 ENTRETIEN PHARMACEUTIQUE POUR LES PATIENTS SOUS
TRAITEMENT DE SUBSTITUTION AUX OPIOÏDES
4.1. Elaboration de la version n°1 du questionnaire
4.2 Validation du questionnaire par les professionnels rencontrés
4.2.1. Retour des professionnels
4.2.1.1. Partie 1 du questionnaire
4.2.1.2. Partie 2 du questionnaire
4.2.1.3. Partie 3 du questionnaire
4.2.1.4. Partie 4 du questionnaire
4.2.1.5. Partie 5 du questionnaire
4.2.1.6. Partie 6 du questionnaire
4.2.1.7. Autres remarques
4.2.2. Modifications apportées au questionnaire suite à l’évaluation des professionnels rencontrés
4.2.2.1. Modifications de la partie 1
4.2.2.2. Modifications de la partie 2
4.2.2.3. Modifications de la partie 3
4.2.2.4. Modifications de la partie 4
4.2.2.5. Modifications de la partie 5
4.2.2.6. Modifications de la partie 6
4.3. Modalité de l’entretien pharmaceutique pour les patients sous traitement de
substitution aux opioïdes
4.3.1. Patients ciblés
4.3.2. Présentation et planification de l’entretien
4.3.3. Espace de confidentialité
4.3.4. Traçabilité de l’entretien
PARTIE 5 DISCUSSION 
5.1. Points forts du travail
5.2. Méthodologie de l’enquête
5.3. Limites et freins de l’enquête
5.4. Limites et freins à l’entretien pharmaceutique
5.5. Autres axes d’amélioration de la prise en charge des patients sous TSO
5.6. Vers une évolution du métier du pharmacien d’officine ?
CONCLUSION

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