Pratiques culturales et agricultures durables

Pratiques culturales et agricultures durables 

En agriculture, les itinéraires culturaux sont généralement assujettis à l’utilisation de pesticides et d’engrais dans le but d’avoir de meilleurs rendements, sans se soucier des conséquences de ces pratiques sur l’environnement et plus particulièrement sur la qualité des sols. En effet, la culture intensive par ses forts apports en amendements chimiques est responsable d’un ensemble de problèmes environnementaux tel que l’érosion, la pollution des sols ou encore la sélection de maladies et de ravageurs résistants aux traitements phytosanitaires (Cox et Atkins 1979; Jackson et Piper 1989; Vandermeer et al. 1998). Face à ce constat et en vue des nouvelles préoccupations liées à la protection de l’environnement, a vu le jour un débat passionné sur de nouvelles pratiques culturales qui pourraient maintenir une production optimale mais d’une manière durable (Tab. I.1). En effet, Agronomes et écologistes s’accordent aujourd’hui à dire que continuer à produire de manière intensive en ayant recours à la mécanisation et à l’utilisation massive d’intrants chimiques ne peut être envisagées d’une manière durable. Nous quittons une ère fondée sur « l’hygiène phytosanitaire », pour se tourner vers un avenir basée principalement sur « l’hygiène chimique ».

Plusieurs pratiques culturales permettent une gestion durable des systèmes agricoles, en réduisant le travail du sol par exemple, ce qui augmente l’activité biologique de ce dernier et améliore ainsi sa fertilité. Selon Wezel et al. (2013), il existerait 15 types de pratiques agricoles, dites durables, qui sont jusqu’ici mal intégrées dans les systèmes de cultures actuels. Parmi ces techniques, nous pouvons citer le semis direct sous couverture végétale, la diversification et l’allongement des rotations culturales, les méthodes de lutte biologique (choix de variétés résistantes, mise en place de zones « refuge » ou « trapps and killing zones») ou encore l’agroforesterie qui associe une production agricole annuelle avec une production forestière.

Il existe plusieurs exemples de pratiques agricoles écologiques ayant fait leur preuves et qui devraient être présentées dans un guide à l’usage des décideurs, qui sera publié en 2015 sous l’intitulé: Produire plus avec moins: maïs, riz et blé (FAO 2015). Ainsi, sur les terres cultivant le blé au Maroc central, l’élimination du labour a réduit de 30% le volume de l’eau de ruissellement et de 70% la perte de sédiments, optimisant ainsi la rétention d’eau pendant les saisons sèches. Aussi, la culture de différentes variétés de riz dans un même champ a réduit l’incidence de certaines maladies fongiques par rapport au riz en monoculture.

Certains agronomes ont récemment proposé que les systèmes de cultures traditionnelles multi espèces pourraient être utilisés en tant que modèles pour la conception durable d’itinéraires culturaux (Gliessman 2001; Altieri 2002). Ces associations, notamment le couple graminées légumineuses, sont largement répandues dans les systèmes naturels, tel que les prairies, mais ont quasiment disparu des systèmes de cultures intensifs plus favorable aux monocultures. (Anil et al. 1998 ; Malézieux et al. 2008). En effet, contrairement aux monocultures, les cultures multi espèces respectent un ensemble de principes écologiques basés sur la biodiversité, les interactions plantes-plantes ou plantes-sol et autres mécanismes naturels impliqués dans l’évolution spatio-temporelle des écosystèmes terrestres. Ils améliorent la productivité, la stabilité et la résilience de ces agro-écosystèmes (Vandermeer 1989). On observe donc un regain d’intérêt pour ces associations de la part du monde scientifique et plus particulièrement de la part des agro-écologistes.

Systèmes de cultures multi-espèces

Afin de répondre aux nouveaux enjeux de l’agriculture, plusieurs auteurs se sont accordées sur le bénéfice que peuvent avoir des systèmes de cultures avec une plus grande diversité d’espèces, cultivées en rotation ou en association (Vandermeer 1995; Vandermeer et al. 1998; Altieri 1999; Griffon 2006; Malézieux et al.2008). Il est en effet généralement admis que des altérations dans la diversité végétale peuvent influencer le fonctionnement de l’écosystème (Cardinale et al. 2007; Hector et Bagchi 2007). Tel que, la diversité du couvert végétal peut avoir un impact positif (Milcu et al. 2008) ou nul sur la composition de la microflore du sol (Habekost et al. 2008). Ainsi, les systèmes de culture multi-espèces peuvent être considérés comme une application des principes écologiques basés sur la biodiversité, les interactions entre plantes et d’autres mécanismes de régulation naturelle (processus de facilitation, feedback positif du sol). Selon Erskine et al. (2006) il existerait des interactions positives entre la composition du couvert végétale et différent processus écologiques comme la productivité primaire, la teneur en éléments nutritifs et la capacité de résilience du sol. Dans les agroécosystèmes, les systèmes de culture multi-espèces ont la capacité de réduire la prolifération des parasites et de minimiser ainsi leurs impacts sur les cultures. Il en résulte une amélioration de la lutte biologique ou du contrôle direct des ravageurs (Gurr et al. 2003). Par ailleurs, la diversité des espèces cultivées présenterait d’autres avantages, tel que la réduction de l’érosion des sols par une meilleure couverture et enracinement (Anil et al. 1998), une réduction de la lixiviation des nitrates (Corre-Hellou 2005) et une plus grande stabilité interannuelle des rendements (Lithourgidis et al. 2006).

D’autre part, différents itinéraires techniques peuvent être conçus en fonction de leur composition et de leur gestion (Tab. I.2). Dans les systèmes de culture multi espèces, l’utilisation de légumineuses est fondamentale pour maintenir la fertilité du sol. Résultat de la capacité des légumineuses à établir des symbioses avec les rhizobia et les champignons mycorhiziens. Ces plantes contribuent ainsi au maintien durable de la fertilité chimique et biologique des sols (Scheublin et al. 2007; Azcon Aguilar et al. 1986). Un itinéraire technique étant une combinaison de techniques mises en œuvre sur un périmètre agricole afin d’en améliorer la production (Sebillotte 1974). Le choix des techniques (espèces, variétés, fertilisation..) est très important, il se doit d’être cohérent et prend en compte un ensemble de paramètres économiques, pratiques ou environnementaux .

Processus écologiques au service des écosystèmes

L’avenir d’une agriculture durable, conforme aux nouvelles attentes mondiales, repose sur une gestion optimale de la fertilité des sols et de leurs propriétés physiques et biologiques. Il s’agit de favoriser des pratiques culturales qui mettent en jeu certains processus écologiques susceptibles de stimuler l’activité biologique tellurique et plus particulièrement les composantes microbiennes impliquées dans le fonctionnement des cycles biogéochimiques des sols. La diversité du couvert végétal favorise le maintien d’une activité microbienne élevée et diversifiée, permettant ainsi une optimisation de l’acquisition des ressources minérales et organiques des sols par les plantes. Cette microflore représente donc un acteur majeur dans le fonctionnement de l’agrosystème en étant impliquée dans certains processus biologiques tels que la différenciation de niche, la facilitation inter-plante ou encore l’effet rétroactif de la plante sur le sol (Plant Soil Feedback) (Fridley 2001; Van der Putten 2013; Callaway et Walker 1997).

Le processus de facilitation inter-plante

Le processus de facilitation a été récemment pris en compte en écologie, généralement négligé par rapport au concept de compétition, qui a longtemps été privilégié pour expliquer la dynamique des successions végétales au sein de l’écosystème. C’est un processus écologique largement représenté dans les communautés à travers le monde (Valiente-Banuet et al. 2006), tel que la présence d’une plante améliore la croissance, la survie et la reproduction d’une plante voisine (Callaway 2007). Le maintien de la facilitation dans le temps, montre que les avantages de cette association ne sont pas limités à la germination et l’établissement des semis, mais ils sont étendus à la croissance et la survie à long terme (Montesinos-Navarro et al. 2012). Selon Callaway (1995), cet impact positif sur la croissance et la survie des espèces peut s’effectuer de manière directe (en améliorant la disponibilité en éléments nutritifs, l’humidité du sol ou la luminosité) ou indirecte (en favorisant les polinisateurs, la protection contre les ravageurs ou en agissant sur les caractéristiques génétiques et fonctionnelles de la microflore du sol). Ces interactions induisent des effets importants sur la diversité, la structure, la productivité et la résilience de l’écosystème (Michalet et al. 2006; Callaway 2007; Brooker et al. 2008; Cavieres & Badano 2009 ; Bruno et al 2003). De plus, plusieurs auteurs ont montré que le processus de facilitation est exacerbé dans des situations de stress environnemental important. (Greenlee et Callaway 1996; Pugnaire et Luque 2001; Maestre et al 2003; Brooker et al 2006; Callaway 2007). Par ailleurs, la facilitation a été expérimentalement décrite comme présentant une spécificité d’hôte (Castillo et al. 2010). Par conséquent, les espèces végétales facilitatrices (plantes nurses) peuvent favoriser le développement de bénéficiaires spécifique plus fortement que d’autres (Valiente- Banuet et Verdu 2007, 2008; Castillo et al. 2010).

Plusieurs études ont rapportés l’impact positif qu’opère le processus de facilitation dans les écosystèmes naturels (Valiente-Banuet et al. 2006; Ouahmane et al. 2006). De façon similaire, les règles de fonctionnement de ce processus biologique peuvent être appliquées dans le cas plus spécifiques des agrosystèmes ; l’exemple le plus concret étant les cultures mixtes légumineuses/non légumineuses. La légumineuse étant considérée comme la plante facilitatrice (plante nurse) et la non légumineuse comme la plante bénéficiaire. Certains travaux ont en effet relaté le bénéfice pouvant être attendu des processus de facilitation dans les agrosystèmes multi-espèces. Zhang et Li (2003) concluent, suite à une étude portant sur les interactions de facilitation dans des systèmes de cultures mixtes en Chine, des effets positifs significatifs. Ils observent une amélioration de la nutrition en Fer chez l’arachide en co-culture avec le maïs et une augmentation de la nutrition phosphatée chez le mais en association avec la fèverole, de même pour le blé associé au pois chiche.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I
I.A. PRATIQUES CULTURALES ET AGRICULTURES DURABLES
I.A.1. Systèmes de cultures multi-espèces
I.A.2. Processus écologiques au service des écosystèmes
a. Le processus de facilitation inter-plante
b. L’effet rétroactif de la plante sur le sol (Plant soil feed back)
I.B. RELATIONS ENTRE LA MICROFLORE DU SOL ET LA DYNAMIQUE SPATIOTEMPORELLE DE L’AGRO-ECOSYSTEME
I.B.1. Champignons mycorhiziens à arbuscules
a. Généralités
b. La symbiose mycorhizienne : une composante clés dans le biofonctionnement du sol et la stabilité
durable des périmètres cultivés
I.B.2. Interaction complexe : plante-CMA-sol-microflore du sol
a. Effet des CMA sur les bactéries associées à la mycorhizosphère
b. Effet des CMA sur les endophytes et les pathogènes du sol
c. Effet des bactéries associées à la mycorhizosphère sur les CMA
I.B.3. Application des CMA pour augmenter le rendement global des plus importantes cultures
a. Gestion du potentiel mycorhizien du sol dans les systèmes de culture méditerranéen
b. Importance des cultures de fève et de blè au Maroc
I.C. OBJECTIFS ET HYPOTHESES DE TRAVAIL
I.C.1. Hypothèses de travail
I.C.2. Objectifs
CHAPITRE II
II.A. IMPROVEMENT OF MAJOR MICROBIAL TRAITS IS DIRECTLY LINKED TO FABA BEAN / WHEAT INTERCROPPING
II.A.1. Introduction
II.A.2. Material and Methods
a. Glasshouse experiment
b. Assessment of soil microbial community functions
c. Genetic structure of the soil bacterial and AM communities
d. Assessment of mycorrhizal soil infectivity
e. Statistical analysis
II.A.3. Results
a. Plant development and mycorrhizal soil infectivity
b. Soil microbial catabolic diversity
c. Bacterial and arbuscular mycorrhizal (AM) community structures
II.A.4. Discussion
II.B. YIELD PERFORMANCE AND LAND-USE EFFICIENCY OF WHEAT / FABA BEAN MIXED CROPPING SYSTEM AND ROTATION RELATIVE TO SOIL MICROBIAL FUNCTIONS AND MYCORRHIZAL SOIL INFECTIVITY
II.B.1. Introduction
II.B.2. Materials and methods
a. Field Conditions and Experimental Design
b. Plant analyses
c. Soil microbial analysis
d. Statistical analysis
II.B.3. Results
a. Grain yield and biomass production
b. Mycorrhizal soil infectivity and soil microbial functionalities
II.B.4. Discussion
CHAPITRE III
III.A. FIELD APPLICATION OF THE MYCORRHIZAL FUNGUS RHIZOPHAGUS
IRREGULARIS INCREASES THE YIELD OF WHEAT CROP AND AFFECTS SOIL
MICROBIAL FUNCTIONALITIES
III.A.1. Introduction
III.A.2. Materials and methods
a. Field Conditions and Experimental Design
b. Plant analysis
c. Soil microbial analysis
d. Assessment of the mycorrhizal soil infectivity
e. Statistical analysis
III.A.3. Results
a. Wheat nutrient uptake, growth and grain yield
b. Wheat mycorrhizal colonization and soil functionalities
III.A.4. Discussion
III.B. ENHANCED TRANSFER OF BIOLOGICALLY FIXED N FROM FABA BEAN TO INTERCROPPED WHEAT THROUGH MYCORRHIZAL SYMBIOSIS
III.B.1. Introduction
III.B.2. Materials and methods
a. Soil properties
b. Experimental design and plant labeling
c. Measurements and calculations
d. Statistical analyses
III.B.3. Results
a. Plant growth, total shoot N and mycorrhizal colonization
b. N2 fixation
c. Transfer of fixed N2
III.B.4. Discussion
a. Effect of AM inoculation and association on plant growth and total shoot N
b. Effect of AM inoculation and association on N2 fixation by faba bean
c. Effect of AM inoculation rate on the transfer of fixed N from faba bean to wheat
d. Reliability of the method used for N transfer estimation
e. Conclusion
CONCLUSION GENERALE

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