Pourquoi partir de soi pour comprendre le lointain en petite section?

Pourquoi partir de soi pour comprendre le lointain en petite section?

Aborder l’entrée dans la littérature en petite section comprend des démarches incontournables que nous tenterons d’expliciter dans cette partie. Nous nous intéresserons à ce qu’implique la compréhension d’un récit chez des élèves de trois ans tout en définissant les différents types de récits préconisés à cet âge.

Que signifie comprendre un récit en petite section ?

Qu’entend-on par « comprendre un récit »?

Avant de nous intéresser plus spécifiquement à la compréhension des récits en petite section, il convient de définir ce qu’implique de manière plus générale la compréhension d’un récit chez l’élève à l’issue de la maternelle. Nous nous attacherons également à déterminer quels en sont les indicateurs. En maternelle, comprendre un récit suppose de s’intéresser aux mécanismes qui permettent aux élèves d’entrer dans la compréhension de l’écrit en s’appuyant sur le seul langage entendu. Le programme de maternelle explicite cet objectif à travers la compétence suivante : « comprendre des textes écrits, à sa portée, sans autre aide que le langage entendu ».

Patrick Joule et le groupe départemental « école maternelle » 95 ont établi six critères révélateurs de la compréhension du récit par l’élève à savoir : Identifier un ou plusieurs personnages Identifier et restituer des événements disjoints d’une histoire Produire un début d’organisation Structurer le récit dans le temps Identifier et restituer les relations causales  Produire une explication causale à plusieurs niveaux.

Comprendre un récit supposerait donc de nombreuses compétences qui renvoient à la capacité de verbaliser des élèves, de rétablir une chronologie de l’histoire ou d’appréhender la motivation des personnages. Cela dépasse la compréhension d’une simple histoire qui n’implique pas le repérage des relations de causalité entre les différents événements juxtaposés. Mireille Brigaudiot détaille quant à elle les étapes complexes de la compréhension du langage écrit chez le jeune élève. Lorsqu’il écoute une histoire, l’enfant développerait ces procédures mentales de manière aléatoire :
Plan 1 : L’enfant cherche des repères dans la situation
Plan 2 : L’enfant cherche des repères dans les caractéristiques du support
Plan 3 : L’enfant construit des hypothèses sur l’activité langagière du maître
Plan 4 : L’enfant segmente et traite la chaîne sonore entendue
Plan 5 : L’enfant travaille l’enchaînement du propos
Plan 6 : L’enfant construit un univers de référence
Plan 7 : L’enfant mobilise un espace de sa vie intérieure de sujet
Plan 8 : L’enfant construit des images mentales .

L’activité de compréhension de l’élève suppose donc une activité mentale dense qu’on ne peut entièrement solliciter chez des élèves de petite section. On peut cependant tendre vers une compréhension moins ambitieuse et proposer d’instaurer plus modestement des repères de compréhension atteignables en petite section.

Quels repères de compréhension en petite section?

Notre sujet nous amène à nous intéresser à la compréhension du récit et à ce que cela implique pour des élèves de petite section. En quoi peut-on considérer qu’un élève de 2 à 4 ans comprend un récit ? Peut-on convoquer tous les indicateurs détaillés dans la partie précédente ou doit-on se contenter d’en faire une sélection? A la lecture du livre de S. Terwagne  , il est possible de dégager des différentes séquences proposées les objectifs de lecture mis en évidence pour des élèves de 2 4 ans. On trouve notamment les critères suivants : l’identification des personnages, des objets sur les images, la description des relations entre les éléments, la description des actions, ou encore le fait de raconter le récit avec l’aide de peluches et d’images. Lorsque l’album vise un public d’élèves plus âgé, par exemple les 4-6 ans, S. Terwagne ajoute des objectifs à ses séquences de lecture ; on trouve par exemple la reconstitution d’histoires en remettant en ordre les images, la reconstitution par la narration de l’histoire, le fait de raconter les différents épisodes de l’historiette avec expression (dramatisation) ou encore la formulation d’interprétations narratives. En petite section où les élèves ont entre 2 et 4 ans, il semble donc, qu’on en soit aux prémisses de la compréhension du récit et qu’il convient d’instaurer les premiers éléments d’analyse à savoir l’identification des personnages, la description des différentes actions avec l’aide de peluches ou de marottes ; les éléments de causalité ou la chronologie de l’histoire ne sont pas des objectifs immédiatement atteignables mais nous essaierons de vérifier ce constat empiriquement. On comprend également à la lecture de ce livre que la compréhension n’est envisageable en petite section que si le texte est à la portée des élèves. On retrouve cette idée dans les programmes de maternelle où on parle de « texte écrits, à sa portée ». Comment considère-t-on qu’un récit est à la portée des élèves ? Quels albums doit-on choisir pour favoriser l’entrée des élèves de trois ans dans la compréhension de l’écrit?

Les récits du quotidien et les récits d’imagination

S. Terwagne et M. Vanesse ont théorisé l’idée qu’il existait deux types de récits à utiliser en maternelle : « les récits du quotidien », basés sur des faits relevant de la vie quotidienne de l’enfant (ex : faire sa toilette, aller se coucher…) et « des récits d’imagination » qui ne s’appuient pas sur le vécu de l’enfant mais sur un schéma narratif plus complexe et fictionnel. Toujours selon ces mêmes auteurs, les récits du quotidien aideraient les enfants à alimenter leur compréhension du monde extérieur tandis que les récits d’imagination seraient propices à développer leur « vie intérieure». Paradoxalement, les récits du quotidien permettraient de sortir de soi tandis que les récits d’imagination conduiraient à un retour sur soi.

Les récits du quotidien s’appuient en effet sur des scripts du quotidien, de véritables situations de référence pour les élèves, théorisés ici par S. Terwagne : Nous stockons dans notre mémoire de nombreux scripts, car leur connaissance nous aide à répondre à des questions fondamentales comme « Que se passe-t-il autour de nous ? » et « Que va-t-il se passer ? ». Des scripts dépend notre capacité à anticiper les événements, à comprendre les intentions des gens qui nous entourent de manière à pouvoir négocier avec eux. Les scripts ont donc une fonction éminemment pratique et on comprend l’intérêt des jeunes enfants pour des « histoires » qui leur permettent de les retrouver, de les mémoriser avec diverses variantes. Les scripts ont également une autre fonction : ils constituent le socle des véritables récits ! Sans routine, pas de complication venant rompre la routine !

S’appuyer sur des situations quotidiennes relayées dans des récits du quotidien permettrait à l’enfant d’entrer plus facilement dans la compréhension de récits plus complexes. Les récits du quotidien permettraient en effet d’asseoir la compréhension de faits renvoyant au vécu de l’élève tout en lui donnant des armes (vocabulaire, motif…) pour entrer dans la compréhension de récits plus complexes.

Mireille Brigaudiot relaie également cette idée dans son plan schématique de la compréhension du récit ; il faut en effet que l’élève de petite section puisse construire un univers de référence ; elle ajoute : Ce n’est pas par hasard si les maîtres de Petite Section racontent et lisent beaucoup de petits albums qui offrent un univers et des personnages proches des enfants, des actions qui leur sont familières, ce que Mireille Brigaudiot et Ewald appellent des « fictions d’expériences personnelles ». L’entrée dans l’univers des « récits fictifs » proprement dits nécessite que l’enfant mobilise ses connaissances des univers de fiction et les fasse se rencontrer, avec ce qu’il entend de la bouche de l’adulte qui lit.

Entre théories et pratiques de classe, où en sont les recherches?

Qu’en pense l’Education Nationale?

La question de la compréhension du récit de fiction en maternelle a évolué de manière significative à travers les siècles en fonction de l’évolution des connaissances en psychologie et des différentes conceptions littéraires et didactiques. Marie-France Bishop synthétise ces recherches dans son étude . Selon elle, il semble que les programmes de maternelle se soient avant tout intéressés au récit de fiction de la fin du 19ème siècle au 20ème siècle plutôt qu’aux récits du quotidien. Cette préoccupation est survenue à la toute fin du 20ème siècle et nous synthétiserons ici les différentes étapes expliquant ce glissement didactique. Marie France Bishop explique que la lecture des récits de fictions en classe avait dès 1881, une visée moralisatrice et faisait partie intégrante de l’enseignement de l’éducation morale et physique ; la lecture de récits de fiction devait « inspirer aux enfants le sentiment de leur devoir envers la famille, envers la patrie, envers Dieu ». A partir de 1945, la scolarisation s’élargie avec l’arrivée de la guerre et l’intensification du travail des femmes. Le récit devient « un moteur d’activités » qui permet l’entrée dans des jeux éducatifs et des activités de langage. Une nouvelle ordonnance inscrit en effet le récit dans les activités de langage plutôt que dans le domaine « éducation morale»
comme auparavant. Les fonctions de la lecture de récit sont dès lors plus complexes. MarieFrance Bishop ajoute toutefois que cette activité de langage est peu définie et s’appuie sur une démarche approximative : « récits et lectures enfantines faits par la maîtresse et suivis de causerie avec les enfants » « la nature des causeries restant indéterminée ». Une enquête publiée à l’époque montre que les récits proposés sont souvent des contes de différents types : folkloriques, traditionnels… L’entrée dans le récit de fiction est donc immédiate et laisse la part belle au jeu. A partir de 1975, le rôle de l’école maternelle est redéfini en profondeur. La loi Haby voit le jour et lui donne trois nouvelles fonctions : « Il ne s’agit plus de moralisation, d’éducation et d’instruction, mais d’éveil de la personnalité, de compensation des inégalités et de dépistage des handicaps». Une circulaire adoptée en 1977 définit en effet de nouveaux objectifs qui sont : « l’affectivité, le corps, le mouvement, l’action, les représentations motrices, l’expression corporelle, l’expression vocale, la musique, l’image, les représentations iconiques, l’expression plastique, le langage oral et le langage écrit, de développement cognitif ». Marie-France Bishop ajoute « Dans ce nouveau cadre, les récits occupent une place secondaire, supplantés par les images qui sont considérées comme des éléments clés dans l’évolution enfantine ». La lecture est considérée avant tout comme un moyen de compenser les inégalités culturelles et il revient à l’école de compenser ce manque éventuel. Le principe didactique adopté durant cette période est le renforcement de l’imaginaire et le récit de fiction est un moyen de susciter l’expression des élèves. La part belle est une nouvelle fois faîte aux contes. En 1986, les objectifs de l’école maternelle changent une nouvelle fois et proposent de « scolariser, socialiser, faire apprendre et exercer». Les récits sont un support culturel comme  durant la période précédente mais ils élargissent leur portée vers la compréhension d’autres cultures : « Les enfants doivent très tôt prendre conscience de leur culture et percevoir l’existence d’autres cultures (…) Ils saisissent les identités et les différences, en particulier à travers les contes et les récits, les fêtes, les danses… ». En plus de cette ouverture à la diversité, les récits visent au développement du langage et à l’appropriation de la langue de l’écrit. Contrairement aux périodes précédentes, des albums de littérature de jeunesse sont lus au même titre que les contes. Les récits de fiction sont donc toujours plébiscités mais de nouveaux supports plus proches du quotidien apparaissent tels que les publicités ou encore les recettes.

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Table des matières

Introduction
1. Pourquoi partir de soi pour comprendre le lointain en petite section?
1.1. Que signifie comprendre un récit en petite section ?
1.1.1. Qu’entend-on par « comprendre un récit »?
1.1.2. Quels repères de compréhension en petite section?
1.1.3. Les récits du quotidien et les récits d’imagination
1.2. Entre théories et pratiques de classe, où en sont les recherches?
1.2.1. Qu’en pense l’Education Nationale?
1.2.2. Qu’en pensent les chercheurs?
1.2.2.1. Partir de soi
1.2.2.2. … pour entrer dans la fiction
2. Une problématique soulevée
3. Comment partir de soi pour comprendre l’imaginaire en petite section?
3.1. Quel album choisir?
3.2. Quel mode de lecture choisir?
3.3. Quel type d’évaluation choisir?
4. Analyse d’une séquence, entre attendus et réalité du terrain
4.1. Construction de la séquence
4.1.1. Le choix de la thématique
4.1.2. Le choix des albums de la séquence
4.1.3. Les difficultés éventuelles de compréhension
4.1.4. Le choix du mode de lecture
4.1.4.1. Le jeu d’imitation
4.1.4.2. Les scripts du quotidien
4.1.4.3. Les récits de fiction
4.1.5. Le choix de l’évaluation finale
4.2. Entre attendus et réalité du terrain
4.2.1. L’évaluation de la séquence
4.2.2. Les résultats de l’évaluation
4.2.3. Les bonnes pratiques de la séquence
4.2.4. Les points à repenser
Conclusion

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