Physiopathologie des hépatites chroniques chez le chien

Physiopathologie des hépatites chroniques chez le chien

Classification des affections hépatiques et définition des hépatites chroniques

En 2001 le WSAVA Liver Disease and Pathology Standardisation Research Group, a été créé dans le but d’établir une standardisation mondiale de l’évaluation histologique du foie des carnivores domestiques. Ainsi, au sein des maladies hépatiques ont été distinguées 4 catégories d’affections : les affections vasculaires, les affections du système biliaire, les affections du parenchyme hépatique et les affections néoplasiques. Dans chaque catégorie, des sous-catégories ont été définies et concernant les affections du parenchyme hépatique 7 sous-catégories ont été distinguées. Parmi elles, les maladies inflammatoires associées à de la nécrose sont décrites et les hépatites chroniques du chien en font partie. En effet, la WSAVA a défini l’hépatite chronique chez le chien par l’association de lésions d’apoptose ou de nécrose hépatocellulaire, d’une infiltration de cellules inflammatoires mononuclées ou mixte et de lésions de régénération et/ou fibrose (Cullen, 2009).

Parmi les hépatites « primaires » (par opposition aux hépatites réactionnelles, voir encadré 1) recensées chez les chiens, 66% sont des hépatites chroniques et 21% des hépatites aiguës, le reste étant des hépatites lobulaires disséquantes, des hépatites granulomateuses et éosinophiliques (Favier, 2009). On note donc bien l’importance des hépatites chroniques dans la pathologie hépatique du chien. Certains auteurs suggèrent que la durée d’évolution de la maladie doit être de 4 mois minimum pour parler d’hépatite « chronique » (Fuentealba et al., 1997)(Sterczer et al., 2001). Les hépatites chroniques du chien sont donc caractérisées par une présentation histologique semblable due à des mécanismes physiopathologiques quasiment identiques mais dont les causes sont variées.

Le Bedlington Terrier Décrite pour la première fois en 1975, l’hépatite cuprique du Bedlington Terrier est présente partout dans le monde, mais aux Etats-Unis jusqu’à 2/3 des chiens de cette race sont atteints. Dans cette race l’accumulation de cuivre est due à une anomalie génétique transmise de manière autosomique récessive. Il s’agit d’une délétion de l’exon 2 dans l’allèle du gène COMMD1, cette délétion cause la perte de 94 acides aminés à l’origine de la perte de fonction de la métallothionéine, dont le rôle est de stocker le cuivre (Van De Sluis et al., 2002). Les zones de fixation du zinc sur cette protéine sont alors déficientes, le cuivre dispose donc de davantage de sites pour s’y fixer et se trouve séquestré dans les lysosomes hépatocellulaires au lieu d’être excrété dans la bile. Il s’accumule alors au niveau de la zone centro-lobulaire des lobules hépatiques (Hunt et al., 1986).

Cette accumulation de cuivre entraîne des lésions hépatiques en particulier lorsque les concentrations en Cu hépatique ([Cu]hep ) sont supérieures à 2000 μg/g de foie sec. Il a été mis en évidence que dans cette race les concentrations en cuivre hépatique augmentaient souvent jusqu’à l’âge de 6 ans pour diminuer ensuite. La cause de ces variations est encore incertaine, cependant des nodules de régénération exempts de cuivre ont été observés chez des animaux atteints présentant un foie cirrhotique, ce qui pourrait expliquer cette diminution. Par ailleurs, il est à noter que les animaux hétérozygotes peuvent présenter une augmentation des concentrations hépatiques en cuivre jusqu’à l’âge de 6 à 9 mois mais celles-ci diminuent par la suite pour atteindre des valeurs normales (Hoffmann, 2009).

Des campagnes d’élimination de la reproduction des animaux porteurs du gène sont en cours. Durant de nombreuses années la distinction des animaux sains et des animaux porteurs a reposé sur des dosages du cuivre hépatique sur la base de biopsies hépatiques avec une [Cu]hep limite de 400 μg/g ; Cependant, cette limite diffère selon les auteurs(De Novo, 2006b) (Thornburg, 2000) (Haywood, et al., 2001). Depuis que le gène en cause a été identifié, un test génétique est disponible pour identifier les chiens de race Bedlington Terrier porteurs du gène.

Le Retriever du Labrador

L’incidence des HC dans cette race est en augmentation ces dernières années. Les femelles d’âge moyen de 7 ans sembleraient plus affectées (De Novo, 2006b)(Andersson et Sevelius, 1991). Une étude réalisée par G.Hoffmann, TS. Van den Ingh, P. Bode et J. Rothuizen (Hoffmann et al., 2006) a porté sur 15 chiens de race Retriever du Labrador atteints d’HC avec accumulation pathologique de cuivre et a étudié les relations généalogiques entre les animaux. Les résultats de cette étude viennent étayer l’hypothèse que les chiens de cette race sont atteints par une forme héréditaire d’HC causée par un défaut primaire d’élimination du cuivre. Une étude rétrospective réalisée en 2007 (Shih et al., 2007) portant sur 24 chiens de race Labrador atteints d’HC confirmée histologiquement montre une moyenne d’âge des animaux atteint de 9.3 ans (de 3.9 à 14 ans), sans qu’aucune prédisposition sexuelle n’ait pu être mise en évidence.

Quinze des 17 biopsies hépatiques disponibles présentaient une accumulation multifocale du cuivre et 8/24 animaux avaient reçu un traitement aux AINS avant le diagnostic (l’intervalle de temps entre le traitement et le diagnostic n’est pas précisé). Dans une étude rétrospective menée en 2009 (Poldervaart et al., 2009) sur 101 chiens atteints d’hépatite primaire, dont 67 atteints d’HC, il a été mis en évidence que 16/67 chiens étaient de race Retriever du Labrador. Parmi ces animaux, 11 présentaient une HC liée à une accumulation de cuivre, les 5 autres présentant une HC idiopathique. Une étude menée par R.Smedley en 2009 (Smedley et al., 2009) et ayant pour objectif de vérifier si les chiens de race Retriever du Labrador étaient bien atteints par une forme d’HC avec accumulation de cuivre révèle les résultats suivants : parmi les 15 chiens de race Retriever du Labrador atteints d’HC présentés au Diagnostic

Center for Population and Animal Health de l’université du Michigan de 1985 à 2008, tous présentaient une accumulation pathologique du cuivre hépatique. Ces résultats viennent conforter l’idée d’une surcharge primaire en cuivre responsable d’HC chez les chiens de race Retrievers du Labrador. A la lecture de ces résultats, il semblerait que les chiens de race Retrievers du Labrador soient prédisposés à développer des HC et qu’une grande partie d’entre elles soient secondaires à une accumulation de cuivre. Pour certains auteurs, environ 75% des HC dans cette race seraient lié à une accumulation de cuivre (Hoffmann, 2009).

Surcharge en cuivre

Un peu plus d’un tiers des hépatites chroniques sont associées à une accumulation de cuivre quelle que soit la race (Favier, 2009). La pathogénie de l’accumulation de cuivre dans le foie est qualitative et quantitative, elle résulte soit d’un excès d’apport, soit d’un défaut d’élimination (voir Figure 2). C’est le défaut d’élimination qui est le plus fréquent ; il peut être dû soit à un déficit dans le métabolisme du cuivre, soit à une altération de l’excrétion biliaire. L’accumulation de cuivre hépatique entraîne des lésions oxydatives des membranes cellulaires, ce qui provoque une nécrose hépatocellulaire et une destruction de l’ADN cellulaire à l’origine du développement d’HC (Willard, 2010) (Center, 1996). La quantité normale de cuivre hépatique n’est pas définie et diffère selon les auteurs.

Cependant, tous sont d’accord sur le fait qu’une concentration en cuivre hépatique supérieure à 2000μg/g de matière sèche ([Cu]hep>2000μg/g ) a des effets délétères sur le foie (Thornburg, 2000). Comme vu précédemment, certaines races sont prédisposées à l’accumulation de cuivre dans les hépatocytes. Pour le Bedlington Terrier, une anomalie génétique du métabolisme du cuivre a été mise en évidence tandis que pour les autres races, la cause reste encore inconnue à ce jour. Il est à noter que tous les animaux appartenant à ces races et présentant une accumulation hépatique en cuivre ne développent pas tous des signes cliniques d’HC ou des anomalies histologiques. De plus, une accumulation de cuivre chez un animal souffrant d’HC n’est pas forcément la cause de l’HC. En effet, une choléstase chronique peut induire un défaut d’élimination du cuivre et une accumulation secondaire. Néanmoins, la répartition des dépôts en cuivre au sein du lobule hépatique, déterminée par l’analyse histologique, permet dans des stades précoces de différencier une accumulation primaire d’un dépôt secondaire (De Novo, 2006b)(Watson, 2004).

En effet, lorsque l’accumulation est primaire, elle commence par l’atteinte de la zone centro-lobulaire alors que lorsqu’elle est secondaire l’accumulation a lieu dans la zone péri-portale (Hoffmann, 2009). Des cas d’atteinte rénale avec syndrome de Fanconi ont été décrits chez des chiens atteints d’hépatite liée à une surcharge en cuivre, cela a également été décrit chez des patients humains atteints de maladie de Wilson (Aplleman et al., 2008). Un rapport de cas publié par T.L. Hill et son équipe (Hill et al., 2008) expose le cas d’un chien WHWT atteint d’une HC liée à une surcharge en cuivre avec des résultats d’analyses compatible avec un syndrome de Fanconi (protéinurie, glucosurie sans hyperglycémie et hyperchlorémie avec acidose métabolique). L’examen histologique des reins a révélé une tubulopathie avec accumulation anormale de cuivre au sein de vacuoles dans l’épithélium des tubes rénaux. Un autre rapport de cas réalisé par E.H. Appleman et son équipe (Aplleman et al., 2008) décrit les cas de 3 chiens (un épagneul Clumber, un Cardigan Welsh Corgi et un WHWT) atteints d’HC avec surcharge en cuivre primaire et présentant de manière concomitante un syndrome de Fanconi. Les 2 biopsies rénales disponibles ne présentaient pas d’accumulation de cuivre. Le mécanisme d’apparition du syndrome de Fanconi lors d’hépatite cuprique n’est pas élucidé et ne semble pas toujours lié à une accumulation rénale de cuivre, cependant il disparait lorsque l’hépatite cuprique est traitée.

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Table des matières

Liste des figures
Liste des tableaux
Liste des abréviations utilisées
INTRODUCTION
1.Rappels de physiologie hépatique et de physiopathologie des hépatites chroniques chez le chien
1.1. Rappels physiologiques
1.2. Classification des affections hépatiques et définition des hépatites chroniques
1.3. Physiopathologie des hépatites chroniques
2.Epidémiologie, étiologie et présentation clinique des hépatites chroniques canines
2.1. Epidémiologie des hépatites chroniques chez le chien
2.1.1. Races présentant une surcharge en cuivre
2.1.1.1. Le Bedlington Terrier
2.1.1.2. Le Doberman
2.1.1.3. Le West Highland White Terrier (WHWT)
2.1.1.4. Le Skye terrier
2.1.1.5. Le Dalmatien
2.1.1.6. Le Retriever du Labrador
2.1.1.6. Autres races
2.1.2. Races prédisposées à une hépatite chronique sans accumulation hépatique de cuivre
2.1.2.1. Les Cockers anglais et américains
2.1.2.2. Le Caniche Royal
2.1.2.3. Autres Races : Berger Allemand, Cairn Terrier, Springer Anglais, Dogue Allemand et Samoyède
2.2. L’étiologie des hépatites chroniques chez le chien et chez l’Homme
2.2.1. Etiologie des hépatites chroniques humaines
2.2.1.1. Hépatites virales
2.2.1.2. Hépatites dites « métaboliques »
2.2.1.3. Hépatite auto-immune
2.2.1.4. Hépatite alcoolique ou alcoolisme chronique
2.2.1.5. Hépatites médicamenteuses
2.2.2. Etiologie des hépatites chroniques du chien
2.2.2.1. Surcharge en cuivre
2.2.2.2. Causes infectieuses
2.2.2.2.1. Causes virales
2.2.2.2.2. Causes parasitaires
2.2.2.2.3. Causes bactériennes
2.2.2.2.3.1. Leptospira interrogans et grippotyphosa
2.2.2.2.3.2. Autres bactéries impliquées
2.2.2.2.4. Causes fongiques et algales
2.2.2.3. Causes médicamenteuses
2.2.2.3.1. Médicaments anticonvulsivants: primidone, phénobarbital et phénitoïne
2.2.2.3.2. Anti inflammatoires stéroïdiens : les glucocorticoïdes
2.2.2.3.3. Anti inflammatoires non stéroïdiens : le carprofène et le paracétamol
2.2.2.3.3.1. Le carprofène
2.2.2.3.3.2. Le paracétamol
2.2.2.3.4. Antibiotiques : l’association sulfamide-trimétoprime (TMPS) et les tétracyclines
2.2.2.3.4.1. L’association sulfamide-trimétoprime
2.2.2.3.4.2. Les tétracyclines
2.2.2.3.5. Anthelminthiques : l’association diéthylcarbamazine- oxybendazole
2.2.2.3.6. Fongicides : le kétoconazole et l’itraconazole
2.2.2.3.6.1. Le kétoconazole
2.2.2.3.6.2. L’itraconazole
2.2.2.3.7. Agents immunosuppresseurs
2.2.2.4. Causes toxiques
2.2.2.5. Hépatites chroniques idiopathiques
2.2.2.5.1. HC active
2.2.2.5.2. Hépatite lobulaire disséquante (HLD)
2.2.2.5.3. HC idiopathique « vraie »
2.3. Présentation clinique des hépatites chroniques chez le chien et chez l’Homme
2.3.1. Symptômes rencontrés lors d’hépatite chronique chez l’Homme
2.3.2. Symptômes rencontrés lors d’hépatite chronique chez le chien
2.3.2.1. Symptômes non spécifiques
2.3.2.1.1. Signes cliniques généraux
2.3.2.1.2. Signes cliniques gastro-intestinaux
2.3.2.1.3. Signes cliniques nerveux
2.3.2.1.4. Signes cliniques urinaires
2.3.2.1.5. Signes cliniques cutanés
2.3.2.2. Particularité de la présentation clinique chez le Bedlington Terrier
3.Diagnostic des hépatites chroniques chez le chien
3.1. Examen biochimique sanguin
3.1.1. Enzymologie clinique
3.1.1.1. Alanine amino-transférases (ALAT)
3.1.1.2. Aspartate aminotransférase (ASAT)
3.1.1.3. Phosphatases alcalines (PAL)
3.1.1.4. γ-glutamyl transpeptidase (GGT
3.1.2. Protéines plasmatiques
3.1.2.1. Protéines totales plasmatiques
3.1.2.2. Albumine
3.1.2.3. Globulines
3.1.2.4. Protéines de la coagulation
3.1.2.4.1. Temps de coagulation
3.1.2.4.2. Fibrinogène
3.1.2.4.3. Produits de dégradation de la fibrine (PDF)
3.1.3. Autres paramètres biochimiques sanguins
3.1.3.1. Le Cholestérol et les Acides biliaires
3.1.3.2. L’ammoniac et l’urée
3.1.3.3. La bilirubine
3.1.3.4. Le glucose
3.2. Examen hématologique
3.3. Analyse d’urine
3.4. Evaluation des complications
3.5. Imagerie médicale
3.5.2. Echographie abdominale
3.5.3. Radiographie abdominale
3.6. Examen cytologique
3.6.1. Examen cytologique du parenchyme hépatique
3.6.2. Examen cytologique du liquide d’épanchement
3.7. Biopsie et analyse histologique
3.7.1. Technique de prélèvement
3.7.2. Analyse histologique
3.7.2.1. Rappels sur l’examen histologique du foie sain
3.7.2.2. Examen histologique lors d’hépatite chronique
3.8. Diagnostic étiologique
3.9. Perspectives diagnostiques chez le chien : les méthodes adoptées en médecine humaine
4.Traitement et pronostic des hépatites chroniques du chien
4.1. Traitement des hépatites chroniques du chien
4.1.1. Traitements non spécifiques
4.1.1.1. Anti-inflammatoires
4.1.1.2. Immunomodulateurs
4.1.1.3. Anti –oxydants
4.1.1.3.1. Les anti-oxydants physiologiques hépatiques
4.1.1.3.2. Les anti-oxydants médicamenteux
4.1.1.4. Anti-fibrotiques
4.1.1.5. Vitaminothérapie
4.1.1.6. Mesures diététiques
4.1.2. Traitements spécifiques disponibles
4.1.2.1. Traitement des hépatites liées à l’accumulation de cuivre
4.1.2.1.1. Les mesures diététiques
4.1.2.1.2. La D-penicillamine
4.1.2.1.3. Le zinc
4.1.2.1.4. La 2,3,2-tétramine ou trientine
4.1. 2.2. Traitement des hépatites infectieuses
4.1.2.3. Traitement des hépatites toxiques
4.1.3. Traitements des complications
4.1.3.1. Traitements de l’ascite
4.1.3.2. Traitements de l’encéphalose hépatique
4.1.3.3. Traitements des ulcères gastro-intestinaux
4.1.3.4. Traitement du syndrome hépato-cutané
4.1.4. Traitements préventifs : la vaccination
4.2. Perspectives de traitement chez le chien : les traitements utilisés chez l’Homme
4.2.3. Traitements également utilisés chez le chien
4.2.4. Traitements spécifiques à la médecine humaine
4.3. Pronostic des hépatites chroniques du chien
4.3.3. Paramètres clinico-pathologiques
4.3.4. Caractéristiques histologiques
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE 1
ANNEXE 2

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