PHILOSOPHIE ET SYSTEME CHEZ HEGEL

La philosophie de Hegel : une démonstration du système

   Avant d’entrer dans le vif de notre sujet, nous jugeons nécessaire d’éclaircir un terme capital chez Hegel : « Idée », « Idée absolu ». Pour comprendre le sens et la portée spéculative de ce terme dans le jargon de la philosophie hégélienne, on peut en consultant l’histoire de la philosophie se référer au « Noûs » d’Anaxagore, à l’Idée platonicienne ou bien au « Logos » des stoïciens. Ce terme signifie chez Hegel l’intelligibilité de toute chose. Elle est la pensée qui met en mouvement tout et dont tout est le reflet. Ainsi, tout ce qui a la forme intelligible est une participation de cette pensée. Elle est l’œil à partir duquel Hegel va établir un rapport de dépendance entre ce qui voit et ce qui est vu. L’Idée, ainsi que Hegel nous le suggère c’est la « Noesis » d’Aristote, « la pensée qui se pense et par là pense tout ce qui est pensable, c’est-à-dire, toute chose. »C’est lui le créateur de toutes choses, car pour Hegel le fond des choses, c’est la pensée. Dès lors on peut dire que seule l’Idée absolue mérité l’appellation d’être. Elle est de ce fait un espace théorique dont on ne sort jamais. Cause pour laquelle la philosophie de Hegel en voulant être le reflet de cette Idée absolue ne pouvait faire l’économie d’être un système. Pour aborder la dimension systématique de la philosophie hégélienne il nous faut partir de l’Encyclopédie des sciences philosophiques. Ce primat que nous accordons à l’Encyclopédie n’implique pas le rejet des autres œuvres. Seulement nous jugeons que c’est dans cette œuvre que Hegel a voulu déposer la forme achevée de son entreprise philosophique. En outre, c’est à travers la dialectique instaurée entre les trois moments de l’Idée absolu (Science de la logique, Philosophie de la Nature et Philosophie de l’Esprit) et qui constituent cette Encyclopédie que nous voulons s’inspirer pour mettre en exergue la valeur systématique de la philosophie hégélienne. Mais avant cela, il sera intéressant de rappeler que le terme « système » n’apparait pas en philosophie pour la première fois avec Hegel. On le retrouve chez les stoïciens, Kant, Schelling. Mais le système de Hegel est plus proche du système mis en place par les stoïciens que celui élaboré par ses concitoyens allemand. En effet, le système des stoïciens se résume à trois tâches : Logique, Physique et Morale. La Logique chez les stoïciens sert à élucider les inférences qui s’établit entre les instances de la pensée d’une part et entre les événements d’autres part. La physique quant elle est une façon de montrer que le monde n’est pas livré au hasard. Il est gouverné par une harmonie préétablit. Enfin la Morale correspond au respect et à l’acceptation de toutes situations qui ne dépend pas de nous. Car, il existe dans le monde une divinité qui soit à l’origine de tout. Le monde est donc une révélation d’un système conçu avant. Ce triptyque a été repris indirectement par Hegel. En effet, dans le système de Hegel, Logique, Nature et Esprit ne sont rien d’autre que les trois moments partiels de l’Idée absolue. La Science de la logique telle que Hegel nous le présente est la science de l’Idée « en-etpour-soi », c’est-à-dire, la science de l’Idée dans son état de pureté. C’est la vie de l’Idée mise à équidistance entre son état de pur immédiateté et son développement. Ainsi, la Logique est la pensée se passant elle-même en dehors du temps et de l’espace. C’est la pensée avant toute chose. C’est ainsi que Hegel l’assimile dans la Science de la logique à la pensée avant même la création du monde. Le sommet de la Logique donc c’est l’Idée pure. C’est-à-dire, « …l’Idée pure pour laquelle est l’Idée ». Dès lors que La pensée se pense, elle est à la fois le sujet et l’objet de cette pensé. Compte tenu de ce mouvement, la Logique n’est rien d’autres que l’existence réelle, autonome de cette Idée absolue. Sous cette forme elle est la saisie immédiate de cette Idée absolue. C’est-à dire, lors que la pensée s’étudie, elle saisit cette Idée absolue dans sa pure abstraction, dans son ensoi et automatiquement elle s’obtient. Par conséquent, on peut dire qu’au terme de la Logique la pensée se possède elle-même par coïncidence avec soi. Or, comme le dit Léonard André, « Se posséder est la mort de la pensée, car la pensée est pure mobilité. »9Cette mort de la pensée coïncide chez Hegel avec le moment où l’Idée se fait Nature. C’est la Philosophie de la Nature. Ce passage de l’Idée en tant Logique à l’Idée en tant que Nature est illustré dans l’œuvre de Hegel à travers ce texte de La phénoménologie de l’esprit : « L’esprit qui se sait soi-même, justement parce qu’il saisit son concept, est l’égalité  immédiate avec soi-même et cette égalité est dans la différence la certitude de l’immédiat ou la conscience sensible, le commencement dont nous sommes partis. » Dans ce texte, Hegel expose le retour du concept à la conscience immédiate du début. Ce qui veut dire que la connaissance que l’esprit a de lui-même à partir de concept est porteuse d’une certitude de différence qui se trouve être à l’origine de cette connaissance de soi de l’esprit. La Nature sur ce point est la deuxième phase du système hégélien et correspond au moment où l’Idée absolue s’extériorise pour devenir autre. Il résulte de là qu’au terme de la Logique, la restauration de l’Idée absolue dans son état immédiat est celle de l’Idée elle-même s’extériorisant dans l’espace et le temps. Elle se laisse librement être hors de soi. Cependant cette extériorisation ne signifie aucunement une séparation avec soi. Il s’agit plutôt d’un moment particulier d’elle-même. Autrement dit, dans cette négation qu’est la Nature, l’Idée absolue reste cependant elle-même. « Elle reste la saisie de l’unité absolue de son être et de son Soi,… »11 Dès lors, la Nature tout en étant une limite ou une négation de l’Idée est aussi l’élément par lequel cette Idée trouve son plein épanouissement, son étalement. Ainsi, la première ébauche de liberté pour l’Idée se trouve au cœur de la Nature. Cet épanouissement de l’Idée dans le cadre de Nature centré sur l’espace et le temps trouvera son sommet dans l’apparition de l’organisme animal dans la Nature objective. Donc l’organisme animal est le point d’achèvement de cette extériorisation de l’Idée, son épanouissement maximal. Mais chez Hegel, l’épanouissement maximal d’une forme déterminée de l’Idée entraine toujours la perte de cette dernière. Ce qui veut dire que le développement achevé de l’organisme animal dans le cadre de la Nature coïncide donc avec sa mort, son dépassement. S’il en est ainsi, c’est par ce que cette forme manifeste l’extériorité de la Nature par rapport à l’Idée absolu. En d’autres termes, en s’extériorisant, en s’incarnant dans la Nature, l’Idée absolue n’a pas encore fait le retour sur soi, elle dépend de l’extérieur. Ainsi, cette forme est incapable de porter l’universalité de l’Idée absolue. Elle sera donc dépassée dans la mesure où chez Hegel la forme adéquate à l’universalité de l’Idée est le retour en soi de l’Idée. Or, un tel fait marque l’avènement de l’Esprit dans la philosophie de Hegel. Ce qui veut dire que chez Hegel, l’Esprit apparait par ce que la forme immédiate, individuelle de l’Idée absolue que la Nature nous propose est incapable de porter l’universalité concrète de l’Idée. Et à ce propos Hegel écrit : « La mort de la vitalité singulière seulement immédiate est la venue au jour de l’Esprit ».Ce qui veut dire que, le moment de l’Esprit est un moment de pure négation de toute forme qui est incapable de porter ou de manifester l’universel dont on porteur cette Idée absolue. Signalons au passage que même si la mort au sens hégélien du terme de la Nature a favorisé le surgissement de l’Esprit, ce surgissement se fasse dans le domaine du concept et non selon la chair ou l’organisme animal qui est le sommet de cet être naturel. En effet, pour Hegel, l’Esprit ne sort pas de la Nature comme une réalité naturelle sort d’une autre. La Nature est impuissante à engendrer naturellement l’Esprit. « La mort est ainsi dans la Nature l’annonce de la parousie imminente de l’Esprit. »Autrement dit, le dépassement de l’Idée l’absolue telle qu’elle s’incarne dans la Nature occasionne le retour glorieux de l’Eprit à la fin des temps dans le but d’établir définitivement le savoir absolu. Après la Science de la logique, qui était l’Idée pure « en-et-pour-soi », après la Philosophie de la Nature qui était l’Idée dans son altérité et son dessaisissement de soi, on est arrivé donc à l’Esprit qui est l’Idée retournant en soi à partir de son être autre. Ainsi toute la Philosophie de l’Esprit consiste à montrer le mouvement par lequel l’Esprit fini, borné se libère de l’immédiateté et de l’unilatéralité pour devenir progressivement « en-et-pour-soi » rejoignant du coup la Science de la logique. Comment cela ? D’abord, chez Hegel, l’Esprit fait le retour sur soi qu’en prenant conscience de son concept, c’est-à-dire, en se considérant non pas comme un objet réel mais plutôt comme une idée pure sans objet, en entrant en possession de sa liberté. C’est ce qu’a voulu par exemple montrer Hegel à travers « l’Esprit subjectif » lorsqu’il le présente dans ses différentes facettes : âme, conscience, conscience de soi, raison, Esprit théorique, Esprit pratique et enfin Esprit libre. Ensuite l’Esprit doit concrétiser cette liberté abstraite dans le monde objectif en lui donnant la valeur d’un objet spirituel. C’est ainsi que dans l’œuvre de Hegel le développement de l’Esprit objectif est articulé par le droit, l’agir moral, la famille, la société civil et enfin l’Etat comme sommet de l’Esprit objectif. Cependant, pour Hegel, étant donné que les Etats particuliers sont l’incarnation d’un esprit populaire déterminé, ils sont appelés à disparaitre car leur réalisation parfaite dépend nécessairement d’une naturalité jugée imparfaite. Ainsi, ils ne sont pas épargnés du « …feu dévorant et purificateur de la négativité,… ». Ce qui laisse penser que l’histoire universelle est le jugement dernier au sens religieux du terme de ces Etats particulier. Ainsi, on peut dire avec Léonard André que : « L’histoire universelle, qui tour à tour suscite et délaisse les Esprits nationaux particulier, est le processus par lequel l’Esprit pensant s’affranchit de ses limites, brise les dernières attaches qui le lient à la Nature et repousse ce qu’il peut encore contenir de contingent et d’arbitraire, pour s’élever dans l’art, la religion et la philosophie, au savoir de son universalité concrète et absolu, à la jouissance de son de éternelle vérité. »  C’est pour dire que c’est l’ingratitude continue de l’histoire universelle à l’égard des peuples qui l’actualisent qui a favorisé la proclamation qu’en dehors des Esprits locaux particuliers, se déploie dans l’art, la religion et la philosophie le savoir de la vérité éternellement effective à l’aune de laquelle, comme dit Hegel « la Raison-qui-sait existe librement pour soi et où la nécessité, la Nature et l’Histoire ne sont que les instrument de sa révélation et les réceptacles de sa gloire ». On voit donc que l’unité de l’Esprit subjectif et de l’Esprit dans le cadre de l’Esprit absolu ne s’effectue pas sur la base d’une addition, d’une conjonction ou d’une synthèse. Mais plutôt par la voie d’une négation commune. S’il en est ainsi, c’est par ce que chez Hegel, de même que le fruit où s’accomplit la fleur en est la réfutation, la vérité de toute chose éclate toujours par sa négation. C’est ainsi qu’il fera de la vérité de l’Esprit subjectif, la liberté humaine et la vérité de l’Histoire, l’Esprit absolu. Ce qui laisse voir que Liberté et Histoire se renient mutuellement dans l’Esprit absolu. L’Esprit absolu est plus original que la subjectivité et plus englobant que l’histoire universelle. Bref, c’est ce qui apparaît dans et à travers l’art, la religion et la philosophie après s’être passé dans ces sphères concrète de l’Idée que son : la Nature et l’Esprit fini. De ce fait, il se dégage dans sa pureté et parvient au savoir absolu qui est la saisie parfaite de soi-même dans son idéalité pure, dans sa pure intelligibilité. Par conséquent, par cette libération « en-et-pour-soi » l’Idée absolu revient à la transparence de son savoir logique de soi. C’est-à-dire, à la pensée dans son état pur : la Logique. Dès lors, le système se clôt par le retour à son point de départ, à la Science de la logique comme science de l’Idée en-et-pour-soi. Cependant nous notons une différence en ce sens que dans la Science de la logique l’Idée qui à son début n’était qu’une possibilité, s’est révélée à la fin du système, la réalité et la fin dernière de toute chose. Donc, le système dispose de trois coordonnés : Logique, Nature et Esprit. Mais ces trois coordonnés nous les avons dans l’œuvre de Hegel selon une ordonnance spéculative unique, celle qui va de la Logique à la Nature et de celle-ci à l’Esprit. La Science de la logique a été notre point de départ dans cadre de l’analyse du caractère systématique de la philosophie hégélienne, l’Esprit notre point d’arrivée et la Nature l’élément médiateur qui a assuré la connexion entre les deux. Ainsi, on voit que « Chaque œuvre de Hegel se situe elle-même à sa place dans le Tout de sa philosophie, en situant la détermination dont elle est le développement dans le Tout du savoir, c’est-à-dire, qu’elle exprime et sa propre nécessité et sa propre insuffisance,… » Cependant, cela est partiel dans la mesure où la Logique n’est seulement le point de départ, elle est ce qui partout pénètre le déploiement de l’Idée. De même l’Esprit n’est pas uniquement le point d’arrivée, il est l’opération qui préside toujours librement à ce déploiement. C’est ainsi qu’éclate le système dans la philosophie de Hegel et son immanence au jaillissement éternel dans l’activité philosophique.

La dialectique: l’épicentre du système

   La dialectique n’est pas un terme nouveau en philosophie. On le retrouve chez Platon. Cependant, chez Platon la dialectique c’est l’art du dialogue. C’est-à-dire, un dialogue au cours duquel on frotte les opinions contradictoires entre elles pour essayer de parvenir à l’identité de la vérité. On veut faire de telle sorte qu’on obtienne une opinion non contradictoire qui soit enfin vraie. Il est donc la vérité qui vise la non contradiction en frottant les opinons courantes entre elles. La dialectique hégélienne par contre, c’est l’idée qu’un terme produit son contraire, engendre de lui- même son contraire. C’est la dialectique du concept. Cette dernière est un procédé par lequel ce qui dialectise et ce qui est dialectisé sont issu d’un seul principe. Il n’y a pas un élément extérieur qui viendra booster le processus de développement du concept, le concept ne fait qu’extérioriser des virtualités latentes. Ainsi, on peut affirmer avec Claire Pagès que : « si la dialectique véritable ne se confond pas avec une méthodologie de l’argumentation, c’est d’abord parce qu’elle n’est pas extérieure à ce qu’il dialectise. Elle se distingue ainsi nettement de la dialectique extérieure de l’entendement, qui est souvent sophistique ». En effet, si on se réfère à la compréhension scolaire de la dialectique, cette dernière se résume aux trois moments de la dissertation à savoir : thèse, antithèse, synthèse. La thèse correspond l’élaboration d’un argumentaire permettant de défendre une position par rapport à un sujet donné. L’antithèse quand à elle montre relativise la thèse en montrant les limites de celle-ci. La synthèse essaie de concilier les deux positions mais d’une manière extrinsèque, c’est-à-dire, elle tire son contenu non pas de la dissertation elle-même, mais de choses avec lesquelles elle a un rapport plus ou moins direct. On peut comprendre à partir de là que, la thèse et l’anthèse sont deux positions valables et que chacune est autonome par rapport à l’autre. Par conséquent leur réconciliation dans la synthèse ne peut se faire qu’extérieurement, c’est-à-dire, c’est dans l’entendement que s’effectue cette réconciliation mais non dans la raison. Ainsi, ces trois moments de la méthodologie de l’argumentation se réfutent et ne se complètent pas dans l’argumentation. Chaque moment forme une entité qui cherche à fonder sa propre vérité. Elle est dans ce sens « cet esprit de contradiction bien formé et méthodique qui habite en tout homme, et qui excelle dans le meilleur des cas à distinguer le vrai d’avec le faux ».Cette distinction entre le vrai et le faux est un phénomène qui prend sa source dans l’entendement. En effet, l’entendement est cette faculté qui a tendance à diviser les éléments qui forment le processus logique de la connaissance. Cette division installera par la suite une certaine distance infranchissable entre ces éléments de telle sorte que chaque élément reste fixe, sans mouvement, donc sans contact extérieur. C’est la dialectique des propositions de l’entendement. Car, c’est l’entendement qui produit la négation comme « une série de boites fermées avec leurs étiquettes dans une boutique d’épicier », c’est-à-dire, l’entendement opère une nette dissociation entre les éléments qui font l’objet de la dialectique. Chaque élément occupe une partie qui lui est propre et n’a aucune relation possible avec les autres. Il découle de là que, la dialectique qui provient de l’entendement est une dialectique non progressiste. En d’autres termes, elle est une dialectique qui reste sur place, incapable d’effectuer un mouvement, donc sans vie. C’est la raison pour laquelle, la différence notée entre la dialectique telle que conçue par le milieu scolaire et la dialectique hégélienne, c’est que, celle de Hegel reflète la vie de l’esprit. En effet, l’esprit dans son développement produit les pensées et leur négation. C’est ainsi que l’histoire de la pensée nous présente une succession d’idées qui se réfutent dans le temps. Cependant cette négation n’est pas synonyme de disparition totale. Les déterminations des premières pensées sont maintenues. Elle est un passage en un degré supérieur. En d’autres termes, la négation dans le domaine de la pensée n’est pas tout simplement une suppression. Elle est suppression et conservation à la fois pour reprendre Hegel. Par exemple si on consulte l’histoire de la philosophie on verra que la philosophie des présocratiques a été perfectionnée dans le platonisme, le platonisme dans l’aristotélisme, celui dans le cartésianisme… Ce qui veut dire que dans le développement de la pensée on ne crée pas, on perfectionne. Ce qui fait qu’il y a une perpétuelle interdépendance entre les moments de la pensée dans le processus de sa maturation. C’est ce que démontre cette métaphore hégélienne: « Le bouton disparaît dans l’éclatement de la floraison, et on pourrait dire que le bouton est réfuté par la fleur. A l’apparition du fruit, également, la fleur est dénoncée comme un faux-être là de la plante, et le fruit s’introduit à la place de la fleur comme sa vérité. Ces formes ne sont pas seulement distinctes, mais encore chacune refoule l’autre, par ce qu’elles sont mutuellement incompatible. Mais en même temps leur nature fluide en fait des moments de l’unité organique dans laquelle elles ne se repoussent pas seulement, mais dans laquelle l’une est aussi nécessaire que l’autre, et cette égale nécessité constitue seule la vie du tout. » Cette métaphore si on l’applique à l’histoire de la pensée, elle rappelle que le processus par lequel l’esprit accède à la connaissance de l’absolu n’est pas homogène, c’est-à-dire, il est fait d’idées qui s’opposent et se contredisent. Mais cela est une nécessité pour que l’esprit se réalise pleinement. Ainsi, la négation de certaines déterminations de la pensée ne veut pas dire qu’elles sont inutiles voire insignifiantes dans l’effectuation de l’esprit. Elle montre tout simplement la nécessité de passer en un degré supérieur plus proche de la vérité tant recherchée. Ainsi, dans la dialectique mise en place par Hegel, la pensée effectue un mouvement ascensionnel pour aller à la rencontre du savoir absolu. Cette rencontre n’est ni mystérieuse ni extérieure à la pensée. C’est la pensée qui se hausse petit à petit jusqu’au savoir absolu. Ce qui est déterminant dans ce processus c’est la puissance du négatif à transfigurer les oppositions en une connexion continue. S’il en ainsi, c’est par ce que l’effectivité de la pensée demande toute une série de savoir incertain, inadéquat voire même balbutiant mais nécessaire. C’est pourquoi, Hegel, dans son système de la connaissance de l’absolu ne pourra pas se départir des connaissances immédiates pour atteindre d’un coup l’absolu. Autrement dit, « …de savoir embryonnaire, se hausse peu à peu à l’absolu du savoir ». Ce qui montre que chez Hegel, la fusion immédiate avec le savoir absolu relève de l’impossible. Cette médiation qu’a opérée la pensée par le procédé de la dialectique est la subsistance par-soi immanente à la pensée. En effet, la contradiction qui sévit au sein de la conscience est son essence propre. C’està-dire, la contradiction forme l’arme avec laquelle la pensée va se servir pour filtrer les pseudoscience et les dépasser. Cette idée d’une contradiction interne à l’histoire de la pensée, a été bien illustrée dans la Phénoménologie de l’esprit. En effet, dans cet ouvrage, Hegel montre la nécessité de la conscience d’effectuer une ascension dialectique si elle veut atteindre l’absolu. C’est ainsi qu’elle va partir d’abord de ce qui est reconnu ou admis par tout le monde, pour passer ensuite à autres chose plus proche de la vérité, et finir avec la connaissance de l’absolu. Ce qui viendra confirmer l’idée selon laquelle la connaissance de l’absolu, l’étape ultime de la pensée n’est pas au début de la connaissance mais à la fin. Dès lors, on peut constater que sur le chemin qui mène à la vérité, chaque illusion trouvée en cours de route, est un pas décisif pour atteindre cette vérité. C’est ce qu’a compris par exemple Hegel en faisant des échecs répétitifs dans l’histoire de la pensée un moment important pour la connaissance de l’absolu. Pour lui, ces échecs montrent tout simplement l’insuffisance des déterminations particulières de la pensée à porter la vraie connaissance. De ce fait, elles sont appelées à devenir autres choses. Ce qui met la pensée dans un mouvement perpétuel. Donc, chaque pensée finie fait l’épreuve de sa propre insuffisance et tente de se rectifier en niant sa propre nature pour se trouver chez l’autre. Ce travail du négatif est donc consubstantiel à la nature de la pensée. Le mouvement dialectique dans cette logique ne modifie pas le contenu de la pensée philosophique par un élément extérieur. Car, chaque pensée contient au sein de lui-même les germes de sa propre négation. C’est dans ce sillage que Hegel disait que : « Le dialectique constitue par suite l’âme motrice de la progression… ».Ce qui veut dire que la dialectique est un noyau autour duquel le développement de la pensée va prendre son envol. Ainsi, l’effectivité de l’être de la science est une effectivité devenue. Dans ce sens la science ne s’est pas épargnée du principe de la contradiction interne qui secoue l’univers dans son entièreté. Signalons en passant que, si Hegel fait de la dialectique le moteur de l’histoire de la pensée, c’est pour faire comprendre qu’une loi unique gouverne le monde et c’est la loi de l’Idée. Elle est à l’origine de tout. C’est le dieu créateur des réalités. Or, ces réalités sont régies par des contradictions internes. Car, l’histoire a pu montrer que rien n’est éternel. Tout naît grandit et meurt. Ce cycle infernal ne laisse rien en rade. C’est ainsi qu’on a vu les plus grands régimes politiques s’écrouler, les grands hommes au sens hégélien du terme mourir, les grandes puissances économique et militaire tombaient devant leurs adversaires, les systèmes philosophique qui périssent dans le temps. Ce bouleversement incessant et soutenu est un résultat d’un esprit universel qui cherche à satisfaire ce que l’esprit des peuples réclame. On entend par là que, l’esprit universel n’est pas abstrait. Il est la vie concrète des individus et de leurs actions dans l’univers. Ainsi, il renferme des contradictions. Mais ces contradictions ne font pas l’objet d’une discorde dans le processus de maturation de la pensée philosophique. Elles sont les mobiles dont se sert l’Idée pour se réaliser dans le monde. Ainsi, l’histoire universelle cesse d’être une compilation d’événements produits par le hasard pour devenir un Tout rationnellement élaboré. C’est ce que veulent dire ces propos de Hegel : « L’histoire universelle n’est que la manifestation de cette Raison unique, une des formes dans lesquelles elle se révèle ; une copie du modèle originel qui s’exprime dans un élément particulier, les Peuples ».En d’autres termes, la Raison, en se réalisant, réalise l’histoire universelle. Or, la réalisation de cette raison universelle passe par des éléments particuliers tels que la philosophie. De ce fait, elle se retrouve dans la philosophie antique, dans la philosophie médiévale, dans la philosophie moderne, dans la philosophie contemporaine…. Chacune de ces philosophies représente un moment déterminant sur le chemin qui mène à la vérité. Autrement dit, chaque moment de la philosophie correspond à un mode de vie d’un peuple et reflète encore un processus logique dont la fin coïncide avec le retour de la philosophie elle-même. Donc la division de l’Idée dans l’histoire de la philosophie n’est pas une faiblesse mais une montée vers sa maturation. Car, c’est en extériorisant ces potentialités à travers la diversification des systèmes philosophiques que l’Idée atteint sa pleine figure. Cependant, ses potentialités ne s’extériorisent pas d’un seul coup. Elles suivent une logique nécessaire dans leur apparition. Ce qui veut dire que les philosophies qui apparaissent dans l’histoire de la pensée sont incompatibles dans leur apparition respective. Donc, ce que renferme cet esprit universel n’est rien d’autre que le besoin manifeste de la philosophie à se développer. Cela montre que la dialectique promue par Hegel n’est pas une dialectique qui reste dans l’entendement des individus. Elle est ce qui met en mouvement l’histoire du point de vue de la pensée. Car, dans la pensée philosophique « il s’agit de comprendre que la vie passe de sa propre finitude à sa propre infinité». Dès lors, la dialectique rentre dans la profondeur de la pensée philosophique, la transforme avant de proclamer son unité avec elle. Elle se présente dans toute l’histoire de la philosophie étant donné qu’elle est une façon de concilier la pensée et son devenir. Devant ce conservatisme, « le négative hégélienne est accusée de sacrifier le négatif et le néant ».En effet, la destination singulière du négatif hégélien c’est la positivité en ce sens qu’il se redouble à chaque fois pour donner quelque chose de positif. Elle est conditionnée par le positif. Ainsi, il perd son autonomie pour être au service du positif. Toutefois, ce conservatisme ne reconduit pas à l’identique vu que ce qui est nié dans le cadre de la pensée pour être conservé doit passer à son être autre et ceci jusqu’à la réalisation pleine du concept. Ainsi, cette répétition de la dialectique n’est pas comme le dit Nietzsche « l’expression d’une conservation du tout dans une gigantesque Mémoire ».Elle est la bonne marche de l’esprit subjectif vers son universalisation. C’est-à-dire, ce qui se contredit et ne se dissout pas en zéro comme parler Hegel dans La science de la logique. Ainsi, on peut dire que le négatif hégélien renait toujours de ses cendres comme le phœnix, cet oiseau légendaire. Si, la dialectique se présente ainsi, c’est parce qu’elle veut restituer les connexions, les interdépendances, les contradictions dans un système et subordonner ce système à la totalité universelle. Sans cette dialectique l’histoire de la pensée en générale et de la philosophie en particulier n’aurait pas de contenu. Elle serait un champ de bataille où il n’y aurait ni vainqueur ni vaincu, disait Kant, ou un cimetière où l’on enterre les combattants, dira Hegel. En effet, la totalité de la philosophie présente une contradiction sans cesse renaissante mais sans cesse résolue dans un système. Cette répétition des contradictions et leurs résolutions continuent, Hegel l’analyse sur la base de la loi de la diversification de l’apparaître et de sa disparition dans une unité devenue. Ainsi, si on considère la dialectique comme une méthode de penser, on constate qu’elle est différente du dogmatisme, de cette conception de l’absolu comme abstrait et du formalisme. Elle inscrit même ces derniers dans son mouvement. Ainsi, cette méthode dialectique n’accepte pas l’effectivité de la connaissance qui se réalise dans le déchirement. Car, le déchirement de la pensée ne supprime pas l’unité de celleci. Il faut juste montrer que toute pensée humaine s’accompagne d’une dialectique. Autrement dit, la dialectique est inhérente à toute activité de la pensée. Ainsi, elle n’est pas synonyme d’une séparation à l’intérieur de la pensée. Car, ce serait du coup donner la victoire à l’entendement sur la raison. Or, pour Hegel, la rationalité règne en maître dans le monde. Il faut donc considérer la dialectique comme une manière de montrer l’insuffisance du relatif, l’éphémère, par rapport au savoir promu par la raison. Partant cette idée, on peut dire que la dialectique hégélienne ne refuse pas l’identité. Mais cette identité s’inscrit dans un processus en devenir. Cependant, l’une des particularités de la dialectique hégélienne réside dans le fait qu’elle est une théorie qui explique l’importance de chaque moment. En d’autres termes, elle montre que la pensée est en concert avec l’actualité. De ce fait, elle est le miroir à partir duquel on contemple ce qui est déterminant dans une époque. Par conséquent, la pensée rentre dans cette vaste marée du devenir de l’histoire. Ce dynamisme de la pensée ouvre régulièrement dans la pensée une nouvelle perspective. Rupture et continuité habitent donc la pensée. Ce qui veut dire que : « Les formes particulières que l’esprit humain revêt successivement dans son développement se détruisent elles-mêmes et deviennent donc, par elles-mêmes et sur place, autres ». Pour comprendre ce phénomène de la dialectique qui caractérise l’esprit humain, l’individu ne doit pas isoler une partie de cette dialectique, l’étudier et faire une induction vers le général. Mais il faut saisir le processus tout entier de l’histoire, examiné les différents moments tout en y insérant le développement d’une Idée unique qui forme la totalité de l’histoire. Partant de là, la pensée est inscrite dans cette totalité en mouvement. De ce fait, si l’histoire est dialectique, la pensée ne pouvait faire l’économie de cette dialectique dans la mesure où elle est élément de l’histoire. La compréhension de processus dans sa totalité permettra au dialecticien, c’est-à-dire, l’individu qui en pensant, en parlant et en écrivant applique les procédés de la dialectique, de mieux se penser afin de réussir à vivre le conflit fréquent de la conscience avec elle-même. « Le dialecticien est donc celui qui, dans une péripétie historique, dans une évolution sociale, se comprend non seulement soi-même, comme force active unilatérale, voire comme force révolutionnaire, mais comprend aussi son adversaire conservateur ou réactionnaire. Il saisi le combat tout entier, dans lequel cependant il ne joue qu’un seul rôle. Il admet la nécessité de tous les moments du processus. Il y est englouti comme un point, mais il le comprend. Il aime son destin et en même temps le domine. » Suivre le processus de la dialectique de la pensée exige donc une compréhension des moments riches et les moments de crise qui caractérise l’histoire de la pensée comme une nécessité inhérente à la conscience, c’est-à-dire, il ne faut pas voir les défaites comme des obstacles qui refusent toute idée de progrès. Sans cet effort de substitution, la pensée n’aura pas la possibilité de saisir correctement les définitions, les contradictions et opposition. Ainsi, il n’y a pas d’opposition. Tout est identique. Or, l’identité comme disait Kostas Papaiannou « ne correspond à rien de vivant » La dialectique en ce sens est cette méthode qui donne vie à la pensée. Par elle la pensée produit son contraire et du coup elle devient autre. Ainsi, elle est un procédé efficace qu’utilise Hegel pour mettre en évidence le caractère mobile de la pensée philosophique. Dès lors, on peut dire que, l’effectivité du savoir dans le domaine de la conscience demande en contrepartie un dur labeur. Ce pénible travail qu’effectue la conscience est une preuve de la préciosité de l’objet de sa recherche. Elle doit donc l’atteindre, non sans peine. Jacques D’hondt confirme cela en disant : « On ne devient pas, sur simple demande, le secrétaire de l’Idée absolu. Il faut gagner durement ses grades ».On peut comprendre par là que pour atteindre le vrai savoir, le savoir absolu la pensée doit passer par des épreuves difficiles afin de se départir des connaissances illusoires. Cette introspection exigée montre également que, ce que cherche la pensée n’est pas extérieur à elle. Mais elle ne peut l’atteindre dans l’immédiat. Il faut le travail du négatif dira Hegel. C’est-à-dire, cette anéantissement à l’infini et qu’est à l’origine de toute activité, de toute vie, de toute subjectivité. Ceci montre que la pensée philosophique en mettant sur le chemin de la vérité a perdu son immobilité et son indépendance de départ pour entrer dans le bacchanal de la vérité. Si une pareille situation se présente dans la conscience humaine, c’est par ce que, le Tout de la conscience « est antérieur à ses concrétisations historiques et pousse l’esprit humain à transcender toute ses réalisations partielles jusqu’à en objectiver la totalité qu’il porte en lui. C’est l’immanence du Tout à la conscience qui l’oblige à trouver insuffisants, inadéquats, les objets bornés dans lesquels elle s’objective, les figures partielles dans lesquelles elle s’incarne. L’homme est cette contradiction perpétuellement renaissante qui consiste à représenter le Tout par son Concept et à être un aspect de ce Tout par son existence réelle. » Cette représentation du concept comme un Tout de la pensée et l’appartenance de l’homme à ce Tout, met en perpétuelle contradiction l’esprit qui veut se reposer sur des figures limitées. En d’autres termes, la totalité de la pensée philosophique prend sa conscience dans l’homme individuel et trouve celui-ci insuffisant pour exposer sa plénitude. Pour enlever l’équivoque, la pensée va entrer en conflit avec elle-même. Ce conflit lui permettra d’escalader une à une les connaissances limitées pour aller trouver refuge dans l’absolu. Ainsi, on peut dire que le monde et tout ce qui le compose sont régis par cette tension entre le fini de la pensée et l’infini de l’histoire universelle. Il y a donc une contradiction interne à l’âme du monde. Ainsi, l’essence de la dialectique hégélien c’est réconcilier l’histoire et la pensée dans un système en perpétuel mouvement. Ce passage des systèmes finis à un système infini ne s’effectue pas entre deux domaines séparés. En effet, le fini tel qu’il se présente dans la pensée n’est pas exempt de tout mouvement pour se cantonner sur les formes limitées de l’existence. Il se considère comme un moment de l’infini et du coup il est animé par ce désir à devenir autre chose. Ce désir est même l’essence de tout ce qui est. En d’autres termes, tout ce qui est, est mû par ce désir de devenir autre chose meilleure que ce qu’il est. C’est dans ce sillage que s’inscrivent ces propos de Kostas Papaiannou « Tout ce qui est n’est que dans la mesure où il aspire à ne pas être ce qu’il est ». D’où la différence de la pensée finie hégélienne et du fini des rationalistes. Ce dernier renonce à toute tentative de mouvement vers l’infini. Il est statique. Il a atteint ses limites en même temps que son existence. Ainsi, son caractère fini est dans sa nature. De même l’Infini hégélien est différent de la conception commune de ce terme. En effet, l’infini selon la signification courante du terme est ce qui n’a ni commencement ni fin, qui est sans bornes et sans limites. De ce fait, il ne résulte de rien et tout résulte de lui. Il est un mystère pour la conscience humaine. Par contre, la théorie hégélienne de la pensée qui atteint l’absolu inscrit celle-ci dans le devenir. En d’autres termes, la pensée qui atteint l’absolu n’est pas détachée de la réalité et de l’histoire des hommes. Elle est le produit de l’histoire. Ainsi, elle n’est ni mystérieux ni spontané. Elle n’est pas non plus « …le vide où viendraient s’engloutir les limitations terrestres, existe uniquement dans l’opposition entre le « simple et l’Infinité »- opposition qui n’existe que par l’union indissoluble de ses membres ». La pensée n’est donc pas une entité qui est sorti de soi-même, autonome dès son apparition et séparé de toute la réalité. Son caractère infini est un acquis et non un donné. Elle a une relation d’inclusion avec le fini. C’est-à-dire, le fini n’est pas exclut de l’infini. Cette inhérence de l’infini au fini est en même temps un rapprochement entre l’homme et Dieu. En effet, l’idée que la pensée finie contient toutes les potentialités de l’infini dans son organisme est une manière de mettre sur la même longueur d’onde l’omniscience de Dieu et la puissance de connaître de la conscience. « Mais cette identité de l’homme et de Dieu ne se limite pas à la seule connaissance. L’esprit divin se manifeste, se réalise et se connait dans toutes les créations humaines, dans toutes l’étendue du deuxième monde créé par l’homme, l’univers historique ».Ainsi, la transcendance de Dieu est supprimée au profit de son immanence. Autrement dit, la dialectique qu’opère la pensée philosophique de son état inculte jusqu’au savoir absolu remet en cause la théorie chrétienne selon laquelle Dieu serait un être séparé de l’homme et se trouverait en dehors de la conscience. Il est immanent à la conscience. Cette immanence de Dieu n’efface aucunement sa suprématie par rapport au tout. Elle est une façon de dire que la pensée humaine n’est pas limitée comme le pense les rationalistes. Elle est en mesure de connaître l’absolu. Mais cette connaissance de l’absolu s’effectue dans la durée. C’est-à-dire, connaître d’une manière absolue demande un long parcours tout autant dialectique que l’est la longueur du chemin de l’histoire. Ainsi, c’est par la dialectique que Hegel a résolu le problème qui empêchait la philosophie de devenir une science effectivement réelle. C’est-à-dire, un système de la connaissance où tout est à la fois produit et résultat dans la continuité. Ainsi, le système hégélien par le procédé de la dialectique est devenu le point de convergence de tous les autres systèmes. Il est donc effectif au sens hégélien du terme.

L’effectivité du système dans la philosophie

   En faisant du système l’unique moyen pour accéder à la vérité, Hegel a prouvé en même temps la nature systématique de la philosophie. En effet, la particularité de l’activité philosophique est cette recherche effrénée de la vérité. Or, la vérité telle qu’elle est conçu en philosophie n’est pas au début de la réflexion. Elle est au bout d’un long processus au cours de la duquel la pensée se redouble plusieurs fois avant de faire un retour en elle-même. C’est en quelque sorte un système de la pensée. Cette identification du système à la vérité remet donc en cause la vérité partielle ou relative. En d’autres termes, tout ce qui mériterait l’appellation ou nom de vérité en philosophie porte ou doit porter obligatoirement le manteau d’un savoir systématique. Ainsi, la vérité relative est un maillon de ce système de la connaissance qui seul peut mener au vrai. Ce qui est du coup une façon de dire que la vérité est indivisible et n’admet pas une valeur relative. Partant de cette idée, on voit qu’avec Hegel, toute vérité qui sortirait du cadre de ce système ne peut être qu’une vérité subjective et elle ne peut trouver sa justification et sa légitimité qu’en manifestant son appartenance au Tout, c’est-à-dire, au système. Car, admettre une vérité qui se trouve en dehors du système conduirait directement à la division du vrai. Or, la vérité comme le pense Claire Pagès« est pleine ou elle n’est pas ». Cela veut dire que la vérité n’a pas de pair, elle est unique malgré ses différentes appellations ou acceptions. Fort de ce constat, on voit que l’entreprise philosophique de Hegel a pour but de mettre en place une vérité qui sera le produit final de tout un arsenal de connaissances à acquérir, c’està-dire, un savoir systématique qui prendra en charge toutes les manifestations de l’esprit humain d’avant et d’après. C’est en quelque sorte un royaume de l’esprit. Ce royaume ni mystérieux ni extérieur au sujet mais émane de lui et tourne autour de lui. C’est pourquoi Hegel l’intériorise dans le système de la conscience et fait de cette dernière l’origine de la vérité. En d’autres termes, la vérité qui émane du système n’est pas une science toute faite planquée de l’extérieur. C’est le savoir qui effectue sa propre systématisation pour devenir un Tout manifestant une unité d’éléments en son sein. Ce devenir du savoir s’inscrit dans la durée. C’est pour dire que la connaissance philosophique pour devenir la demeure du savoir encyclopédique a dû prendre un long détour circulaire avant de se retrouver chez soi. C’est elle qui va vers l’autre qui constitue une limite, l’engloutit et fait de lui son appartenance. Car, la vérité philosophique se veut être totale et autonome. Le système hégélien est dans ce contexte un procédé par lequel le savoir supprime l’altérité pour se trouver chez soi. Ainsi, Elle ne dépend plus de l’extérieur. Elle renferme tout ce qui est autre. Dès lors, le détachement de la vérité philosophique est un détachement acquis qui signifie qu’il n’y a plus de rapport de dépendance, car elle intègre et inclut tout ce qui est autre. Cela veut dire que le savoir tel qu’il est présenté en philosophie n’est atteignable que suite à un laborieux travail de la raison. Car, la raison pour mettre en place une vérité qui répondrait à toute les questions que pensée la philosophique soulève, a dû systématisé toutes les autres formes de connaissance. De ce fait, le système permet au savoir philosophique de proclamer son indépendance. Ainsi, la vérité philosophique est essentiellement un résultat et non un donné immédiate qui émanerait de l’extérieur de la raison

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : LA PHILOSOPHIE HEGELIENNE COMME PROJET TYPIQUE D’UN SYSTEME
CHAPITRE PREMIER : L’IDEE DE SYSTEME EN PHILOSOPHIE
1-La philosophie de Hegel : une démonstration du système
2-Le système hégélien comme l’articulation des autres systèmes
CHAPITRE II : LES FONDEMENTS DU SYSTEME ET SON EFFECTIVITE DANS LA PHILOSOPHIE
1-La dialectique: l’épicentre du système
2-L’effectivité du système dans la philosophie
Conclusion partielle
DEUXIEME PARTIE : JUSTIFICATION DE LA NATURE SYSTEMATIQUE DE LA PHILOSOPHIE ET SES LIMITES
CHAPITRE PREMIER : INHERENCE DU SYSTEME A LA PHILOSOPHIE
1-L’histoire de la philosophie comme une appropriation du système
2-La rationalité comme un critère qui fonde le caractère systématique de la philosophie
CHAPITRE II : LIMITES ET PERSPECTIVES DU SYSTEME HEGELIEN
1-Les limites du système
2-L’avenir du système
CONCLUSION PARTIELLE
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE

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